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Intérêts et indications des lasers en odontologie pédiatrique

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Les lasers sont utilisés en odontologie depuis plus de vingt ans, avec un intérêt grandissant ces dernières années. Encore peu répandus en pédodontie, ils présentent pourtant de nombreux atouts. Cet article présente les principales indications du laser en odontologie pédiatrique et ses avantages.

Détection des lésions carieuses précoces

Il est parfois difficile de diagnostiquer une lésion carieuse précoce, occlusale ou proximale. Or, un diagnostic précoce est fondamental puisqu’il permet d’intercepter le développement carieux par l’instauration de mesures de reminéralisation. Il existe pour le moment un seul laser de diagnostic (DIAGNOdent®, DIAGNOpen® (version portable), KAVO). C’est un laser diode (λ=655nm) qui mesure la fluorescence émise par les tissus dentaires, dont l’intensité est liée à la concentration en matière organique dans les lésions carieuses, différente de celle des tissus sains. Des études cliniques récentes ont montré l’efficacité et la reproductibilité du DIAGNOdent ® dans la détection des caries occlusales des dents permanentes et temporaires, avec des résultats similaires à l’examen clinique et à l’examen radiologique (Olmez et al. 2006, Anttonen et al. 2004 ; Kavvadia et Lagouvardos 2004, Huth et al. 2008). L’utilisation du laser de diagnostic trouve donc un intérêt majeur comme outil complémentaire dans la détection des lésions carieuses précoces. Il s’inscrit parfaitement dans les concepts modernes de dentisterie préventive et micro-invasive.

Traitement des lésions carieuses

Les lasers de choix pour le traitement des lésions carieuses sont les lasers erbium (Er-YAG (λ = 2940 nm) et Er,Cr:YSGG (λ = 2780 nm)). Les lasers erbium ont une longueur d’onde qui est très absorbée par l’eau et l’hydroxyapatite.

Le mécanisme d’action des lasers de la famille de l’erbium dans l’ablation de l’émail est le suivant. L’eau contenue dans la matrice inter-cristalline est vaporisée sans fonte des composants organiques et inorganiques. On obtient une expansion volumétrique et une pression interne des tissus élevée ce qui produit une micro-explosion et l’élimination de la matière. Comme la durée du pulse est très courte, que la longueur d’onde est très absorbée et que l’on utilise un spray d’eau, la quantité de chaleur transférée dans les tissus adjacents est minimale. On a donc peu d’échauffement tissulaire et une pérennité du tissu pulpaire.

Des études sur les lasers erbium (Hibst et Keller 1989, Keller et al. 1991, Pelagilli et al. 1997, Ginbel 2000, Freiberg et al. 2002 ; Kornblit et al. 2008) ont démontré que :

  • la vitalité pulpaire n’est pas compromise avec un traitement par laser erbium.
  • la structure de la dent est équivalente après traitement conventionnel et au laser, seule la morphologie de surface est différente au niveau des sites traités.
  • le laser peut éliminer les caries complètement et efficacement.
  • le laser permet de réaliser des préparations convenables.
  • la qualité des préparations à l’aide du laser est équivalente à celles faites avec une turbine.
  • le laser a une action bactéricide
  • le laser permet une préparation des tissus en adéquation avec une bonne rétention des restaurations composites.
  • le laser permet une « sélection » des tissus, agissant préférentiellement sur les tissus cariés, riches en eau, conservant les tissus sains.

Les avantages en odontologie pédiatrique sont multiples. Tout d’abord, il n’y a pas de contact entre le laser et la dent. Aucune vibration, souvent désagréable et cause de stress, n’est ressentie par l’enfant. Un léger bruit est perceptible (onde de choc), sans commune mesure avec le bruit de la turbine. D’autre part, la plupart des actes d’odontologie conservatrice peuvent être réalisés sans anesthésie par infiltration (Kornblit et al. 2008 ; Genovese et Olivi 2008) avec un taux d’échec minimal. Cependant, les soins sur les molaires sont parfois difficiles (faible ouverture buccale). Il est possible d’utiliser des tips courts, voire des pièces à main par transmission. En outre, le traitement est souvent plus long.

Coiffage pulpaire

Les avantages d’un coiffage pulpaire à l’aide du laser (erbium ou CO2) comparé aux techniques conventionnelles sont nombreux. Tout d’abord, les lasers sont bactéricides. Par ailleurs, ils permettent un contrôle de l’échauffement tissulaire induisant seulement une nécrose superficielle (et hémostase) tout en conservant un tissu pulpaire sous-jacent vital. Olivi (2007, 2009) a montré un taux de succès thérapeutique meilleur pour des coiffages pulpaires réalisés à l’aide du laser erbium (+ hydroxyde de calcium) par rapport à une technique conventionnelle (instruments rotatifs + hydroxyde de calcium).

Pulpotomie

La pulpotomie des molaires temporaires consiste à éliminer la pulpe coronaire infectée et à préserver la pulpe radiculaire, jusqu’à l’exfoliation naturelle de la dent. Différents matériaux sont utilisés pour traiter le tiers coronaire de la pulpe radiculaire et l’isoler du reste de la dent : formocresol, hydroxyde de calcium, sulfate ferrique, MTA… Cependant, ces matériaux ne sont pas totalement biocompatibles et des études ont montré des effets cytotoxiques, notamment pour le formocresol. Le laser, de part ses propriétés (il est bactéricide, hémostatique, biocompatible et stimule la cicatrisation), apporte une alternative aux traitements classiques. Des études ont montré que le laser erbium (le plus adapté) peut être utilisé sur la pulpe (Matsumoto et al. 2000, Schoop et al. 2002, Kimura et al. 2003) ; d’autres présentent des résultats similaires aux traitements conventionnels (Kotlow 2004, Huth KC et al. 2005, Toomarian L et al. 2007). Les auteurs proposent d’utiliser le laser erbium pour traiter et isoler la pulpe à l’entrée des canaux, avant la mise en place des matériaux de reconstitution. Cependant, d’autres études sont nécessaires pour valider ces résultats.

Chirurgie des tissus mous

Les lasers en chirurgie des tissus mous présentent des avantages indéniables : Précision, rapidité (en fonction de la puissance choisie), stérilisation du site opératoire, bonne hémostase (CO2 en mode défocalisé, Nd/YAG, Diodes), contrôle de la douleur per-opératoire (intervention sans anesthésie possible) et post-opératoire (inflammation et douleurs sont minorées), cicatrisation orientée (peu ou pas de cicatrices) et accélérée (Er-YAG) … On comprend donc l’intérêt que peuvent avoir les lasers dans la chirurgie des tissus mous chez l’enfant et les avantages par rapport à une technique chirurgicale classique.

Le laser de choix est le laser CO2 (λ = 10600nm), qui est fortement absorbé dans l’eau avec une pénétration tissulaire de quelques microns. Son efficacité de coupe est excellente, on a en général peu ou pas de saignement. L’intervention peut-être réalisée avec peu d’anesthésie (voire sans) et les suites postopératoires sont quasi-nulles. Les sutures ne sont pas indispensables puisqu’on obtient une bonne hémostase. Grâce à sa capacité hémostatique, ce laser permet de supprimer les lésions intra-orales vasculaires comme les hémangiomes. Il permet également de réaliser des chirurgies dans de très bonnes conditions sur des patients ayant des troubles vasculaires tels que les hémophiles. Le laser erbium est également indiqué, mais son efficacité de coupe est légèrement moins bonne que celle du laser CO2, l’hémostase est difficile du fait du peu de chaleur dispensée (spray d’air et eau) et de sa faible absorption par l’hémoglobine. Cependant, les suites post-opératoires sont également excellentes.

Les lasers diodes (λ = 810nm et 980 nm) sont de plus en plus utilisés dans la chirurgie des tissus mous. Ils présentent une bonne efficacité de coupe (inférieure au CO2) et une bonne hémostase. Cependant, leur pouvoir d’absorption est moins élevé que ceux du laser CO2 et de l’erbium. Ils sont donc à manipuler avec la plus grande prudence pour éviter tout risque de nécrose sur les tissus adjacents (muqueux et osseux). Toutes les interventions des tissus mous sont réalisables à l’aide d’un laser chez l’enfant, avec les avantages cités précédemment : freinectomie, gingivoplastie, gingivectomie, désinclusions, suppression du capuchon muqueux lors des péri-coronarites congestives, kystes éruptifs, traitement des lésions muqueuses (herpes, aphtes, fibrome…). L’étude de Genovese et Olivi (2008) souligne la bonne acceptation des lasers pour la chirurgie des tissus mous chez l’enfant.

Biostimulation (LLLT) et utilisation des « soft lasers»

LLLT signifie « low level laser therapy ». La LLLT est une application médicale du laser utilisant des énergies plus faibles que celles utilisées dans les applications chirurgicales. On parle de « soft laser» (laser basse puissance, laser froid…). La LLLT est utilisée principalement pour la stimulation des processus de cicatrisation, pour l’analgésie et la gestion des douleurs post-opératoires.

Depuis plus de 30 ans, les effets de ces lasers sur la cellule et sur les tissus ont été étudiés. Il existe de nombreuses études scientifiques sur la thérapie par la lumière dont 90% démontreraient son efficacité. Les lasers à diode semi-conducteurs (λ =650-810 nm, 1 à 25mW) sont préférés pour la biostimulation.

Nous n’entrerons pas ici dans l’explication des mécanismes d’action. Quelques exemples d’applications cliniques en pédodontie ont été décrits par Kotlow (2004):

  • Analgésie : L’auteur préconise d’utiliser le soft laser pour obtenir une analgésie de la dent temporaire (sur la surface occlusale de la dent temporaire pendant une à deux minutes) et de la dent permanente (près des tissus gingivaux qui recouvrent la racine, pendant une minute). De plus, l’utilisation du soft laser sur la muqueuse provoque une anesthésie temporaire qui permet une infiltration d’anesthésique sans douleur.
  • Douleur : On peut, après un traumatisme, utiliser un soft laser pour diminuer l’inflammation et la douleur tout en essayant de conserver la vitalité pulpaire et accélérer le processus de guérison. Lorsque la pulpe d’une dent temporaire est exposée, une dose plus importante permet de réduire la douleur. Enfin, le soft laser peut être utilisé en pré et post-opératoire afin de diminuer la douleur. En ce sens, une méta-analyse a été réalisée par Enwemeka et al. (2004) qui montre que la LLLT est très efficace pour la réparation tissulaire et le soulagement de la douleur.

La LLLT est également utilisée en milieu hospitalier pour le traitement des mucites. Les mucites sont des lésions de la muqueuse oropharyngée consécutives à des chimiothérapies et/ou radiothérapies. Ces lésions sont douloureuses, entrainant parfois des difficultés à s’alimenter et à parler et peuvent conduire à une septicémie sévère. Leur fréquence (2/3 des patients) et l’absence de traitement efficace (il n’existe actuellement que des traitements symptomatiques) compliquent la prise en charge du patient. De nombreuses études (Kuhn A et Al. 2009 ; Abramoff MM et Al. 2009 ; Bensadoun RJ et Al. 2002, 2006) ont démontré l’efficacité de la LLLT dans la prévention et le traitement des mucites. Le traitement consiste à illuminer la lésion à l’aide d’un soft laser (plusieurs séances de biostimulation). Cela permet de diminuer les douleurs et d’accélérer la guérison.

Conclusion

L’intérêt des lasers en odontologie pédiatrique est indéniable et confirmé par de nombreuses études scientifiques et cliniques. Cette technologie permet une approche plus sereine chez l’enfant en réduisant, voire en éliminant, les principaux facteurs de stress (anesthésie, vibrations, bruit, douleur…) et avec des suites post-opératoires meilleures (absence de douleur, cicatrisation accélérée…). En outre, elle apporte au praticien un réel confort de travail. C’est pourquoi, le LASER doit devenir aujourd’hui un outil de 1er choix en odontologie pédiatrique, tant les avantages, pour le patient et le praticien, sont nombreux.

Bibliographie sélective

1. Abramoff MM, Lopes NN, Lopes LA, Dib LL, Guilherme A, Caran EM, Barreto AD, Lee ML, Petrilli AS. Low-level laser therapy in the prevention and treatment of chemotherapy-induced oral mucositis in young patients. Photomed Laser Surg. 2008 Aug;26(4):393-400.
2. Genovese M.D., Olivi G. Laser in paediatric dentistry: patient acceptance of hard and soft tissue therapy. Eur J Paediatric Dent. 2008 Mar;9(1):13-7.
3. Kavvadia K, Lagouvardos P. Clinical performance of a diode laser fluorescence device for the detection of occlusal caries in primary teeth. Int J Paediatr Dent. 2008 May;18(3):197-204.
4. Kornblit R, Trapani D, Bossù M, Muller-Bolla M, Rocca JP, Polimeni A. The use of Erbium: YAG laser for caries removal in paediatric patients following Minimally Invasive Dentistry concepts. Eur J Paediatr Dent 2008 June;9(2):81-7.
5. Kotlow LA. Lasers in pediatric dentistry. Dent Clin North Am. 2004 Oct;48(4):889-922
6. Kuhn A, Porto FA, Miraglia P, Brunetto AL. Low-level infrared laser therapy in chemotherapy-induced oral mucositis: a randomized placebo-controlled trial in children. J Pediatr Hematol Oncol. 2009 Jan;31(1):33-7
7. Olivi G, Genovese M.D., Maturo P., Docimo R. Pulp capping: advantage of using laser technology. Eur J Paediatr Dent 2007 June;8(2):89-95
8. Olivi G, Genovese MD, Caprioglio C. Evidence-based dentistry on laser paediatric dentistry: review and outlook. Eur J Paediatr Dent. 2009 Mar;10(1):29-40
9. Toomarian L, Fekrazad R, Sharifi D, Baghaei M, Rahimi H, Eslami B. Histopathological evaluation of pulpotomy with Er,Cr:YSGG laser vs formocresol. Lasers Med Sci. 2008 Oct;23(4):443-50.

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A propos de l'auteur

Dr. Brice SAVARD

Docteur en Chirurgie dentaire, Université Paris V
Membre de la Dental Laser Academy
DU d’esthétique du sourire, Université Strasbourg

Ana-Sofia CABECADAS COELHO DE SOUSA

Chirurgien-dentiste, Paris 5

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