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Le droit, l’enfant et l’odontologie

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Dans le cadre de l’activité professionnelle, les praticiens sont régulièrement amenés à effectuer des traitements sur des mineurs, qu’il s’agisse d’enfants et/ ou d’adolescents. Ces soins sont d’ailleurs fortement incités en termes de santé publique, notamment lors des campagnes de l’assurance maladie. Toutefois, lors de tels soins, l’appréhension des mineurs peut amener à certaines difficultés.

Notion de capacité, de mineurs et d’autorité parentale.

Le mineur est juridiquement considéré comme un incapable, et ce depuis le droit romain. Il ne devient « capable » qu’une fois atteinte sa majorité légale, c’est-à-dire à l’âge de 18 ans. Jusqu’à cet âge, la gestion de ses droits et devoirs est dévolue aux titulaires de l’autorité parentale, éventuellement à un tuteur par décision de justice. Ces notions donnent toutefois lieu à des difficultés d’interprétation.

En premier lieu, il existe différentes majorités. Si la majorité légale est posée à 18 ans, âge auquel on est capable de tous les actes de la vie civile, il existe un certain nombre de spécificités. Selon les usages, si l’infans ne dispose pas de capacité juridique, il commence à l’obtenir à l’âge de 7 ans, considéré comme l’âge de raison. Il doit toutefois attendre ses 10 ans pour atteindre l’âge permettant de consentir à certains actes importants de sa vie. C’est souvent à partir de cet âge qu’il pourra notamment prendre position dans le cadre des mesures du divorce parental qui le concernent au premier chef, comme sa garde. Il n’atteint en revanche sa majorité pénale, et notamment sexuelle, qu’à l’âge de 15 ans, plancher marquant la fin de la protection pénale du mineur.

Il ne devient en revanche délinquant véritablement sanctionnable qu’à l’âge de 13 ans, et essentiellement à ses 16 ans, où le régime répressif se rapproche de celui des majeurs. C’est également l’âge où il peut ouvrir un compte bancaire. Ainsi, il apparaît qu’au sein de la catégorie des mineurs, il existe différents degrés de capacités dans un régime global d’incapacité. Le droit distingue donc l’enfant de l’adolescent, privilégiant à un régime fondé sur l’âge, un dispositif fondé sur le degré de maturité, la capacité juridique dépendant directement de sa capacité de discernement.

En second lieu, le Code civil, en son article 371-1, définit « L’autorité parentale » comme « un ensemble de droits et devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant. », et d’ajouter qu’ « Elle appartient aux père et mère jusqu’à la majorité de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité. ».

Toutefois, plus que du père et de la mère, le Code civil a vocation à régir l’autorité parentale, exercée par ses représentants légaux désignés comme les titulaires de cette autorité parentale. Cette précision est de taille dans une société contemporaine où, devant l’accroissement du nombre de divorces, de familles recomposées, de familles monoparentales, de concubinages, et face à la réduction du nombre de mariage et donc de familles légitimes, l’ancien régime napoléonien ne trouve plus à s’appliquer. L’une des problématiques essentielle du praticien sera donc de déterminer quels sont ces représentants légaux, ces titulaires de l’autorité parentale.

En cas de famille recomposée, le père légal n’a plus forcément la charge usuelle de l’enfant, qui sera dévolue juridiquement à sa mère, mais parfois exercée dans les faits par le nouveau compagnon de la mère, pourtant dépourvu de tout lien de parenté et parfois légal. Toutefois, l’autorité parentale n’étant dévolue à un tiers que par la loi ou décision de justice, si le représentant « en pratique » et représentant « légal ». Ce qui est malheureusement très rarement le cas, la simple notion de cohabitation restant insuffisante.

Mineur, information et consentement aux soins

 

Le droit français, fondé sur les deux lois du 4 mars 2002, la première sur l’autorité parentale, la seconde sur les droits des malades, accueille cette double obligation d’information et de consentement sous le regard d’une conciliation, d’une appréhension par le mineur des soins envisagés. Nous pouvons citer en ce sens les dispositions de l’article 371-1 in fine du Code civil : « Les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité ».

Notre droit national s’inscrit ainsi dans le prolongement des conventions internationales, notamment de la convention internationale des droits de l’enfant, qui met en exergue les droits de l’enfant à participer aux prises de décisions le concernant, l’établissant ainsi dans un statut d’un sujet de droit dont nos racines romano-germaniques l’avaient longtemps privé. La CIDE expose ainsi que l’enfant qui est capable de discernement dispose du droit d’exprimer librement son opinion sur toutes questions l’intéressant, « les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité ».

Plus spécifiquement en matière de soins, tout acte de soin sui generis répond d’une obligation de consentement, suite logique d’un droit à l’information.

Pour l’enfant, ces droits et devoirs sont forcément modulés. Ainsi, selon le droit français, les mineurs doivent selon les dispositions du Code de la santé publique « recevoir eux-mêmes une information et (…) participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée à leur degré de maturité. ».

Concernant leur consentement, celui-ci doit « être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision ».

Le praticien sera donc débiteur d’une double obligation d’information, non seulement vis-à-vis des titulaires de l’autorité parentale, mais également du mineur lui-même, cette dernière étant fonction de son degré de maturité, et adaptée.

En revanche, le consentement reste jusqu’à sa majorité une prérogative essentiellement parentale, reposant sur la distinction fondée sur la qualification de la nature des soins.

S’il s’agit d’actes usuels, c’est-à-dire un acte de soins courant (traitement de caries….), le consentement d’un seul des titulaires de l’autorité parentale sera suffisant, celui-ci étant présumé agir avec l’accord de l’autre. Il appartiendra donc à l’autre titulaire de l’autorité parentale de faire le cas échéant part de son objection. Tout litige devra être tranché devant le juge aux affaires familiales.

S’il s’agit d’un acte grave, en revanche, le consentement des deux titulaires de l’autorité parentale sera requis. Ainsi, si les parents sont séparés, celui qui a la garde de l’enfant pourra prendre seul la décision de traitement, sous réserve toutefois d’en informer l’autre parent, qui pourra faire valoir son opposition. En cas de désaccord persistant ou le cas échéant, notamment en cas d’urgence, les titulaires de l’autorité parentale devront s’en remettre au juge aux affaires familiales, voire au juge des enfants, si la gravité de l’acte et les risques qu’ils comportent peuvent s’avérer dangereux pour le mineur.

Conclusion,

Il convient de noter que les professionnels de l’enfance restent parfois septiques et préfèrent régulièrement s’en tenir à la lettre des textes, tant nationaux qu’internationaux, fondant l’adhésion de l’enfant en corrélation avec son degré de maturité et sa capacité de discernement. Cette double obligation d’information et de consentement ne saurait donc s’appliquer qu’institu personnae.

Par ailleurs, si le droit français permet désormais de faire participer l’enfant aux décisions le concernant, la décision finale n’en demeure pas moins un droit pour ne pas dire une prérogative exclusive des titulaires de l’autorité parentale.

En conclusion, plus que la recherche d’un consentement, il s’agit plutôt en pratique d’obtenir l’adhésion de l’enfant au plan de traitement, et de la recherche d’un consensus dans une relation tripartite parents – enfants – praticiens.

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A propos de l'auteur

Maître Laurent DELPRAT

Avocat à la Cour
Docteur en droit
Lauréat de l’académie nationale de chirurgie dentaire 2007

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