Faire moins, mais mieux.
Il y a des dentistes qui impressionnent par leur virtuosité technique, et d’autres par leur clarté.
Ceux-là ne montrent pas leur savoir-faire, ils le distillent.
Ils savent que la maîtrise, c’est d’abord de la lucidité : reconnaître ce qui est essentiel, et éliminer le reste.
Je me souviens d’un praticien rencontré il y a quelques années, dans un cabinet sans ostentation.
Pas de gadgets dernier cri, pas de décor anxiolytique à grand renfort de lumière bleue.
Juste une organisation millimétrée, un calme contagieux, et une assistante qui devinait chacun de ses gestes.
Trois instruments posés dans un ordre toujours identique, une aspiration parfaitement synchronisée, un champ clair.
En vingt minutes, il avait réalisé une restauration impeccable.
Tout semblait d’une simplicité désarmante — jusqu’à ce qu’on réalise qu’il avait passé vingt ans à épurer son protocole, à retirer les gestes inutiles, à ajuster chaque détail pour que rien ne soit laissé au hasard.
“Quand c’est fluide, c’est que c’est réfléchi”, m’a-t-il dit ce jour-là.
Simplifier n’est pas renoncer à la précision.
C’est, au contraire, mettre l’intelligence au service de la justesse.
C’est refuser l’accumulation de produits, d’étapes, de promesses technologiques qui finissent par brouiller la pratique.
La vraie complexité du soin ne vient pas de la science, mais de la diversité des situations.
Simplifier, c’est donc construire des repères stables, des routines fiables, des séquences qui résistent à la fatigue et à l’imprévu.
Les jeunes praticiens cherchent souvent la sophistication, la “signature”.
Les plus expérimentés, eux, recherchent la cohérence.
Ils savent qu’un protocole clair rend l’équipe autonome, et que cette autonomie libère l’esprit du clinicien.
Ce n’est pas un hasard si les cabinets les plus apaisés sont aussi les plus méthodiques : la rigueur simplifie, la confusion épuise.
Un prothésiste me confiait récemment : “Les empreintes que je reçois des bons praticiens se reconnaissent à la première ouverture du fichier. C’est net, c’est complet, c’est propre. On sent que tout a été pensé pour que le labo ne devine rien.”
La simplification, au fond, est une forme de génie discret. Elle n’éblouit pas : elle rassure.
C’est une architecture invisible, une façon d’enlever le superflu jusqu’à ce que la technique redevienne lisible.
Elle demande du courage — car il faut accepter de remettre en cause ce qu’on croyait savoir, de changer
ses habitudes, de dire : “Et si je pouvais le faire plus simplement ?”
DANS LA PRATIQUE…
• Rédiger des protocoles écrits, courts, que toute l’équipe comprend.
• Remplacer les “checklists mentales” par des séquences partagées.
• Choisir les instruments et matériaux par fonction, pas par habitude.
• Garder l’oeil critique : tout ce qui ne sert pas la qualité du geste est un poids inutile.
FAIRE SIMPLE, C’EST FAIRE SÛR
• Derrière chaque protocole épuré, il y a des années d’ajustements.
• Simplifier, c’est réduire le nombre de décisions à prendre pendant le soin, pour libérer la concentration.
• Les cabinets qui réussissent ont un principe commun : un protocole clair, une trame stable, et un matériel choisi pour sa fiabilité, pas pour sa nouveauté.
• La simplicité n’est pas une réduction — c’est une maîtrise.
L’élégance d’un cas réside dans sa simplicité “
Thierry DEGORCE – Le Fil Dentaire 2019
La simplicité est la forme la plus aboutie de sophistication en dentisterie restauratrice”
“Simplicity is the ultimate sophistication in restorative dentistry”Pascal MAGNE – Interview, Style Italiano TV – 2020



