L’art de ne pas se précipiter.
Il existe des gestes qu’on ne peut pas accélérer sans les dénaturer. Polir, sculpter, adapter, équilibrer — tout cela demande un tempo.
Le bon praticien le sait : il ne mesure pas son talent à la vitesse du soin, mais à la maîtrise du temps.
Dans un monde où tout s’accélère — empreintes instantanées, CFAO express, IA prédictive — la lenteur devient presque un acte de résistance.
Mais c’est une résistance féconde : celle qui permet la précision, la concentration, et parfois même la grâce.
Je me souviens d’une scène lors d’un congrès, sur un plateau de démonstration.
Autour, tout allait vite : le flux numérique, les explications projetées, le chrono en fond d’écran.
Et au milieu de cette agitation, un praticien invité — connu pour sa rigueur — a pris tout son temps pour ajuster une simple facette.
Il a déplacé la lampe, essuyé la surface, recommencé. Le public s’impatientait un peu. Lui, impassible, a simplement dit : “Je ne fais rien tant que je ne suis pas sûr.” Quand il a terminé, le résultat était parfait.
Pas spectaculaire — parfait.
Le silence qui a suivi en disait long : la lenteur venait d’imposer son évidence.
Un prothésiste m’a confié un jour : “Je reconnais un bon opérateur à la régularité de sa main. Ceux qui se précipitent font du bruit. Les bons travaillent en rythme.”
La lenteur n’est pas l’ennemie de l’efficacité : elle en est la condition. Parce qu’elle laisse au cerveau le temps de sentir, de corriger, d’intégrer. Parce qu’elle réduit le stress, diminue les erreurs, et protège la qualité du soin.
Dans la lenteur se loge la conscience du geste, et cette conscience, c’est ce qui différencie la répétition de la maîtrise.
DANS LA PRATIQUE…
La précision plus que la vitesse.
• Commencer chaque soin avec une respiration complète, avant tout contact instrument-bouche.
• Accorder 3 secondes de pause avant chaque décision irréversible (préparation, collage, taille).
• Former les jeunes à “voir le temps”, pas à le battre.
LES 5 GESTES OÙ LA LENTEUR AMÉLIORE LE RÉSULTAT
La lenteur n’est pas synonyme d’hésitation : elle signe la maîtrise. Cinq gestes gagnent toujours à être ralentis :
L’insertion d’un tenon ou d’un implant – pour sentir la résistance osseuse et corriger l’axe sans contrainte.
Le collage adhésif – pour laisser le temps à la photopolymérisation d’être homogène et stable.
Le polissage – parce qu’un mouvement plus lent évite la surchauffe et donne un éclat durable.
L’ajustage occlusal – pour lire la trace plutôt que de la deviner, et préserver la symétrie.
La suture – où chaque millimètre compte : la lenteur garantit la tension juste, donc la cicatrisation.
Dans tous les cas, la main lente n’est pas une perte de temps : c’est un gain de précision et de sérénité.
La main est
un outil de précision,
mais c’est la tête
qui décide et le coeur
qui corrige ”Jacques CHARON – Le Fil Dentaire 2014
La chirurgie implantaire ne consiste pas à forer,
mais à créer une harmonie entre l’os, les
tissus et la patience
“Implant surgery is not about drilling
holes, it’s about building harmony
between bone, tissue and patience ”Sasha JOVANOVIC – GIDE Institute, 2022



