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TRAITEMENT DE PÉRI-IMPLANTITE SÉVÈRE : JUSQU’OÙ PEUT-ON TRAITER UNE PÉRI-IMPLANTITE ?

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Face à une péri-implantite avancée, la question du seuil de traitement se pose : faut-il tenter une approche conservatrice ou déposer l’implant ?
si la littérature indique un risque d’échec accru au-delà de 50 % de perte osseuse, certains cas offrent pourtant des perspectives de régénération encourageantes. À travers deux cas cliniques détaillés, cet article explore les stratégies thérapeutiques permettant de maîtriser l’infection et de restaurer la stabilité implantaire, en s’appuyant sur une approche combinant décontamination rigoureuse et techniques chirurgicales avancées.

INTRODUCTION
Jusqu’où peut-on traiter une périimplantite ? La question revient fréquemment en pratique clinique. Selon la littérature, au-delà de 50 % de perte osseuse, le taux d’échec des traitements conservateurs augmente significativement, atteignant un risque 18 fois plus élevé selon Ravidà et al. (1), rendant souvent la dépose de l’implant préférable (2). Toutefois, ce critère ne saurait être le seul déterminant thérapeutique. En présence d’une alvéolyse verticale de classe I (Monje) (3), une prise en charge adaptée, associant une décontamination efficace de la surface implantaire (4) et des biomatériaux, peut offrir des perspectives de régénération favorables.
Cet article explore les limites et les stratégies de préservation implantaire à travers deux cas cliniques détaillés.

CAS CLINIQUE 1
Une patiente de 47 ans nous consulte pour des douleurs secteur 4.
L’examen clinique montre un saignement et une suppuration sur les implants en 36 et 46.
L’examen radiologique rétro-alvéolaire montre une alvéolyse verticale de plus de 50 % de l’implant.
Nous posons le diagnostic de péri-implantite sur 36 et 46 (5) et une récidive de la parodontite (stade 3 grade B) (Fig. 1, Fig. 2).

Fig. 1 : situation initiale : inflammation péri-implantaire et perte osseuse > 50 %.

Fig. 2 : bilan de sondage initial.

Nous effectuons dans un premier temps un traitement non chirurgical sur les dents (thérapeutique initiale
parodontale) et sur les implants (débridement aux ultrasons titane) (6).
A la réévaluation à deux mois, on observe une diminution des poches parodontales sur les dents,
mais la situation n’est pas favorable sur les implants (poche >6mm avec saignement et perte osseuse
radiologique >3 mm).
Nous réalisons donc un traitement chirurgical (Fig. 3, Fig. 4) (7). Après dépose de la prothèse, on effectue
un lambeau de pleine épaisseur afin d’éliminer le tissu inflammatoire autour des implants à l’aide d’ultrasons et de curettes en titane. Débute alors la décontamination de la surface implantaire. Une implantoplastie (éliminer les spires et le revêtement de la surface implantaire) est réalisée avec des fraises en carbure de tungstène (Fraisier Komet®) sur contre angle rouge sur la partie accessible au « lissage » des implants (8). La partie non accessible à l’implantoplastie (difficulté d’accès, risque d’être iatrogène) sera traitée avec un brossage à l’aide de brosses en titane. De même, une décontamination chimique (chlorexidine, eau oxygénée, povidone iodée verte avec des rinçages abondants au sérum physiologique entre chaque antiseptique) est réalisée pour les parties de la surface implantaire difficile d’accès.

Fig. 3 : traitement chirurgical secteur 3 : dépose de la prothèse, exérèse du tissu inflammatoire, implantoplastie, brossage, décontamination chimique, comblement osseux.

Fig. 4 : traitement chirurgical secteur 4 : dépose de la prothèse, exérèse du tissu inflammatoire, implantoplastie, brossage, décontamination chimique, comblement osseux

Un comblement osseux (Bio-Oss, Geistlich) est placé dans les lésions verticales, sans membrane, les études n’ayant pas démontrées leur efficacité pour les défauts osseux « contenus » de péri-implantites (9) (10).
La prothèse est remise en place à la fin de l’intervention.
Les résultats à 6 ans post-opératoires sont présentés. On note une récession post-opératoire secteur 3, mais
la surface implantaire visible est lissée donc plus facilement nettoyable par la patiente et lors des séances de maintenance. Elle est également moins propice à l’accumulation bactérienne et au risque de récidive de mucosite ou de péri-implantite (11). Les poches sont inférieures à 4 mm, sans saignement.
Radiologiquement, on observe une diminution significative des lésions osseuses. Le diagnostic final est santé péri implantaire après régénération complète sur 46 et santé péri-implantaire sur support osseux réduit sur 36) (12) (Fig. 5).

Fig. 5 : situation clinique et radiologique à 6 ans post-opératoire

CAS CLINIQUE 2
Une patiente de 67 ans nous consulte pour des douleurs sur son implant en position 11. A l’examen clinique, on observe une suppuration au sondage associée à une profondeur de poche de 11 mm.
L’examen radiologique montre une perte osseuse avancée de plus de 80 % de l’implant (Fig. 6). Ici, la prothèse n’a pas pu être déposée (prothèse scellée unitaire non iatrogène).

Fig. 6 : situation clinique et radiologique initiale : profondeur de poche de 11 mm avec suppuration et perte osseuse verticale > 80 % de l’implant.

Dans un premier temps, une thérapeutique non chirurgicale est entreprise.
À la réévaluation, le traitement chirurgical de la périimplantite est effectué (Fig. 7).

Fig. 7 : après exérèse du tissu inflammatoire, visualisation du défaut osseux.

Le débridement est réalisé à l’aide d’inserts ultrasonores en titane, puis l’implant est lissé (Fig. 8) et traité à l’aide de brosses en titane qui permettent également d’éliminer les particules de titane liées à l’iimplantoplastie du site opératoire.

Fig. 8 :implantoplastie.

La décontamination chimique est réalisée avec de la povidone iodée, de la chlorhexidine et de l’eau oxygénée ; des rinçages successifs au sérum physiologique sont effectués entre chaque étape.
L’anatomie du défaut, vertical à trois parois, permet une approche réparatrice par l’apport d’une xénogreffe d’origine bovine (Bio-Oss, Geistlich) (Fig. 9) avec une membrane résorbable (Bio-Gide, Geistlich) (Fig. 10) (perte importante de la corticale vestibulaire et comblement non « contenu »).

Fig. 10 : mise en place d’une membrane résorbable.

À 3 ans post-opératoire, on observe une absence d’inflammation péri-implantaire, une profondeur de sondage de 2 mm et, radiologiquement, un comblement presque complet du défaut osseux (santé péri-implantaire sur support osseux réduit). Un traitement d’orthodontie a également été effectué (Dr Nicolas, Toulon) (Fig. 11).

Fig. 11 : situation clinique et radiologique 3 ans post-opératoire.

CONCLUSION
Le traitement des péri-implantites avancées reste un défi clinique, mais il ne doit pas être systématiquement synonyme de dépose implantaire. Comme le montre ces cas cliniques, une approche rigoureuse combinant décontamination mécanique et chimique, implantoplastie et comblement osseux peut permettre de stabiliser la situation et d’obtenir une régénération partielle ou complète des lésions. Toutefois, le succès repose sur une sélection rigoureuse des cas, une exécution minutieuse des protocoles chirurgicaux et une maintenance rigoureuse à long terme. Ces résultats soulignent l’importance d’une prise en charge individualisée et d’un suivi régulier pour maximiser les chances de succès et limiter les récidives.

BIBLIOGRAPHIE

  1. Ravidà A, Siqueira R, Saleh I, Saleh MHA, Giannobile A, Wang HL. Lack of Clinical Benefit of Implantoplasty to Improve Implant Survival Rate. J Dent Res. 2020 Nov;99(12):1348-1355.
  2. Martin-Cabezas R, Giannopoulou C. Residual bone level as a prognostic factor in the surgical treatment of peri-implantitis. Front Dent Med. 2024 Dec 18;5:1532094.
  3. Monje A, Pons R, Insua A, Nart J, Wang HL, Schwarz F. Morphology and severity of peri-implantitis bone defects. Clin Implant Dent Relat Res. 2019 Aug;21(4):635-643.
  4. Brincat A, Ohanessian R, Monnet-Corti V. Arbre décisionnel relatif à la gestion des complications péri-implantaires. Parodontologie Implantologie Orale. VOL. 2 – N° 4 – OCT-NOV-DÉC 2022 : 48-57.
  5. Herrera D, Berglundh T, Schwarz F, Chapple I, Jepsen S, Sculean A, Kebschull M, Papapanou PN, Tonetti MS, Sanz M; EFP workshop participants and methodological consultant. Prevention and treatment of peri-implant diseases-The EFP S3 level clinical practice guideline. J Clin Periodontol. 2023 Jun;50 Suppl 26:4-76.
  6. Renvert S, Roos-Jansåker AM, Claffey N.Non-surgical treatment of peri-implant mucositis and peri-implantitis: a literature review.J Clin Periodontol. 2008 Sep;35:305-15.
  7. Brincat A, Dumas C, Melloul S, Monnet-Corti V. Péri-implantites : protocoles de traitements.Implant 2020;26:1-14.
  8. Brincat A, Ohanessian R, Toma S, Monnet-Corti V. L’implantoplastie pour le traitement des péri-implantites : revue systématique de la littérature. Partie 2 : Protocoles chirurgicaux associés, matériel et mise en œuvre. Parodontologie Implantologie Orale.

9 Monje A, Pons R, Vilarrasa J, Nart J, Wang HL. Significance of barrier membrane on the reconstructive therapy of peri-implantitis: A randomized controlled trial. J Periodontol. 2022 Nov 18.

  1. Regidor E, Ortiz-Vigón A, Romandini M, Dionigi C, Derks J, Sanz M. The adjunctive effect of a resorbable membrane to a xenogeneic bone replacement graft in the reconstructive surgical therapy of peri-implantitis: A randomized clinical trial [published online ahead of print, 2023 Feb 19]. J Clin Periodontol.
  2. Monje A, Amerio E, Cha JK, et al. Strategies for implant surface decontamination in peri-implantitis therapy. Int J Oral Implantol (Berl). 2022;15(3):213-248.
  3. Ravidà A, Galli M, Siqueira R, Saleh MHA, Galindo-Moreno P, Wang HL. Diagnosis of peri-implant status after peri-implantitis surgical treatment: Proposal of a new classification. J Periodontol. 2020 Dec;91(12):1553-1561.

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A propos de l'auteur

Arthur Brincat

Ancien chef de Clinique
des universités - Assistant
des hôpitaux
Exercice exclusif en
Parodontologie et en
Implantologie, Toulon

Dr. Thierry BRINCAT

Chirurgie dentaire (Toulon)
Exercice exclusif en chirurgie et prothèse implantaires
Attestation d’études d’anatomie et techniques chirurgicales buccomaxillaires, Marseille
Diplôme de chirurgie et prothèse implantaires, Université Claude Bernard, Lyon
Trésorier du C.U.R.A.I.O

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