Le manque de volume osseux dans les régions sous-sinusiennes constitue souvent un obstacle à la pose d’implants dentaires. Malgré l’existence d’implants courts, certains cas ne pourront être résolus sans une augmentation osseuse. La littérature scientifique et professionnelle relate plusieurs techniques. Summers a publié ses premiers articles sur le sujet il y a 20 ans.
Cette fiche pratique se propose de vous donner, pas à pas, une technique d’élévation sous-sinusienne par voie crestale, ou technique de « Summers » modifiée. La difficulté réside dans le fait qu’elle est aveugle, et que le passage d’une corticale très solide à une membrane très fragile doit se faire avec beaucoup de tact. Elle requiert une courbe d’apprentissage lente pour arriver à d’excellents résultats.
Examen clinique et tomographie
Espace interarcades suffisant
Sur la tomographie : hauteur minimale d’os disponible 4 mm, jusqu’à 9 mm (ou moins si on pose un implant court) (fig. 1). Largeur d’os disponible : au moins 1 mm de chaque côté de l’implant.
Evaluation de l’épaisseur de la corticale occlusale, de la densité osseuse et de l’épaisseur de la corticale du plancher sinusien.
Présence ou non de septum osseux intrasinusien
Technique
L’élévation du lambeau pour accéder à la crête osseuse respecte les règles habituelles.
Accès à la membrane de Schneider
- Si la corticale sous-sinusienne est épaisse, utilisation du protocole de forage de son système implantaire à vitesse réduite jusqu’à toucher cette corticale. Dérouler alors toute la séquence instrumentale, jusqu’au foret terminal, en venant en butée sur la corticale. Si celle-ci est très épaisse, l’affiner délicatement avec le foret terminal afin que l’ostéotome (fig. 2) l’emporte facilement, avec des coups de maillet nets et maîtrisés. Attention à ne pas taper trop fort afin d’éviter des lésions des régions adjacentes (oreilles, yeux, …). Le franchissement du plancher sous-sinusien donne un bruit et une sensation caractéristiques : le son est d’abord très mat et clair, et l’on ressent une résistance. Au franchissement, le son devient creux et la vibration beaucoup moins forte.
- Si la corticale sous-sinusienne est fine, franchir la corticale occlusale avec le foret pilote puis continuer avec la séquence d’ostéotomes, jusqu’à la longueur mesurée sur la tomographie. Attention, le franchissement du plancher sous-sinusien se fait parfois de manière insensible dans ce cas.
Utiliser ensuite dans les deux cas toute la séquence d’ostéotomes pour arriver au diamètre de l’implant, préférablement celle du fabricant de l’implant qui l’aura correctement calibrée. A ce stade, les ostéotomes ne dépassent pas la hauteur osseuse de plus d’un millimètre. Le fait d’élargir jusqu’au dernier ostéotome permet de mettre ensuite en place le matériau plus rapidement et de manière plus homogène.
L’intégrité de la membrane de Schneider est vérifiée en réalisant la manoeuvre de Valsalva : on bouche une narine du patient puis les deux en lui demandant de souffler très doucement dans le nez. L’absence de bulle au niveau du puits de forage montre le succès de la procédure. Dans de très rares cas, la présence de bulle montre une perforation, qui induit un report de la procédure d’au moins 3 semaines.
Certains fabricants proposent des kits de forage spécifiques pour les élévation par voie crestale, rotatifs ou à ultrasons (Acteon, Mectron). Par exemple le système intralift (Satelec) va permettre de forer aux ultrasons puis d’élever la membrane avec du sérum physiologique activé par les ultrasons (fig. 3 – Cet insert terminal peut être utilisé seul en combinaison avec des ostéotomes), ce qui a pour objectif de réduire les risque de déchirure (voir leur protocole).
Elévation de la membrane
Elle se fait seulement avec les ostéotomes, sans ajout de biomatériaux, si la hauteur d’os à gagner est inférieure à 2 mm. Au-delà, elle se réalise en poussant progressivement le matériau de comblement à l’intérieur du puits de forage. Celui-ci est d’abord placé sur le site (soit à l’aide des seringues fournies avec celui-ci, soit à l’aide d’instruments spécifiques, type porte-amalgame redessiné pour la chirurgie – fig. 4), puis poussé délicatement sous la membrane avec l’avant-dernier ostéotome. L’utilisation délicate du maillet permet de sécuriser cette phase.
L’avant dernier ostéotome est progressivement amené à la longueur de l’implant, poussant ainsi le matériau dans sa position définitive.
La quantité de matériau est proportionnelle à l’élévation désirée. On compte 1 mm d’élévation par remplissage du puits de forage.
Préparation terminale et mise en place de l’implant
Passage du foret terminal à la longueur de l’implant moins 2 mm. On utilisera systématiquement un implant conique, le risque de voir celui-ci passer dans le sinus étant moindre qu’avec un implant cylindrique, surtout lorsque l’os est peu dense.
Le passage du foret terminal a deux objectifs :
- éliminer le matériau de comblement qui pourrait s’interposer entre os et implant ;
- calibrer la forme du forage au niveau de la corticale sous-sinusienne. En effet, en cas de sous-forage trop important, une compression de celle-ci par l’implant est extrêmement douloureuse.
L’implant est mis en place avec un couple maximum de 40 N.cm.
Une radio postopératoire permet de contrôler la bonne réalisation de la procédure.
En cas de doute, si par exemple le comblement est invisible sur la radio rétroalvéolaire à cause d’une densité osseuse trop importante, on peut procéder à une tomographie de contrôle (fig. 5).
Conseils postopératoires
On ajoute aux conseils postopératoires d’usage le fait que des saignements de nez et/ou une évacuation de granules de biomatériaux peuvent apparaître à distance de l’intervention. Ils ne doivent pas inquiéter le patient mais doivent être signalés.
Une nouvelle radio est prise 6 mois après l’intervention, avec la validation d’usage de l’ostéointégration.
Conclusion
La maîtrise de cette technique permet de repousser la limite des indications des implants «simples». Cette procédure permet des résultats reproductibles et fiables. Elle permet à nos patients de subir des interventions moins invasives et moins onéreuses.
Il faut cependant ne pas éviter à réaliser un volet latéral si le volume osseux est insuffisant.
Bibliographie
1. Summers R.B.:A new concept in maxillary implant surgery. The osteotome technique.Compend.Contin.Educ.Dent.1994a;15:152- 160
2. Summer R.B. :The oteotome technique: Part 3 .Less invasive methods of elevating the sinus floor.Compend.Contin.Educ.Dent.1994b;15:698-708
3. Wainwright M., Troedhan A., Kurrek A., The IntraLiftTM: A new minimal invasive ultrasonic technique for sinus grafting procedures, Implants magazine, Dental Tribune International, Vol.8, Issue 3/2007.