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Comment réagir face à l’échec ? Les 3 piliers de la compétence clinique

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A l’école, à l’Université, on enseigne la valeur du succès Il faut réussir ses examens, obtenir de bonne notes, décrocher un diplôme puis pour certains, acquérir des titres Le critère principal pour franchir ces étapes est principalement fondé sur la mesure et la validation des connaissances acquises.

Il en découle naturellement que le désir de réussite et la peur de l’échec occupent une place majeure dans l’esprit les étudiants. Cette peur se prolonge et se mute souvent dans la vie professionnelle en une peur de l’échec clinique Les échecs rencontrés étant inévitables pour une certaine proportion et imprévisibles par essence, sont alors à l’origine d’un sentiment de malaise, voire de culpabilité. Ce sentiment d’échec est renforcé par la nature de notre activité. Nous travaillons pour, ou plutôt sur, et même dans (!) des êtres humains qui attendent souvent de nous quelque chose d’infaillible, parce que nous sommes des Docteurs, c’est-à-dire étymologiquement des sachants Mais savoir n’est pas savoir-faire et encore moins synonyme de réussir à tous les coups.
Comment réagir face à l’échec ? 
Bien sûr et en premier lieu, il faut en assumer les conséquences vis à vis du patient. Il survient dans notre exercice de temps à autre, c’est inéluctable. Mais il a, du point de vue du patient concerné, une fréquence de 100 % des cas ! Avoir satisfait à l’obligation de moyens prévue par la loi ainsi qu’aux recommandations scientifiques, est un argument qui a peu de force du point de vue d’un patient concerné par un échec clinique. Pour lui, l’obligation de résultat est souvent implicite. Surtout quand il paye de ses deniers !
Ceci implique de reconnaître le problème plutôt que de le nier, en gardant à l’esprit que reconnaitre le problème n’est pas nécessairement reconnaitre sa faute. Ensuite, il est nécessaire de s’assurer de la prise en charge clinique voire financière dans certains cas, des conséquences pour le patient, que nous les assurions nous-mêmes ou en ayant recours à un tiers. Ces priorités réglées, cet intrus dans notre quotidien que constitue l’échec, devient un vecteur de progression. Il est même souvent le catalyseur le plus efficace de l’amélioration de nos compétences. A quelques conditions…
Quelles sont les attitudes courantes et possibles face à l’échec ?
1 : ne rien faire
« Je ne peux pas imaginer une situation susceptible de faire sombrer
un navire. Je ne peux concevoir qu’un malheur puisse frapper
ce vaisseau. La construction navale est au-delà de cela. » Edward
Smith, Capitaine du Titanic

Être confronté tôt ou tard à l’échec est inévitable pour tout un chacun (ceux qui prétendent réussir 100 % de leurs traitements sont probablement mal voyants… ou menteurs !). Mais la reproduction, dans des conditions similaires, de situations d’échecs peut être considérée comme le résultat d’une décision, si aucune démarche d’amélioration n’est mise en oeuvre. En d’autres termes, ne pas reconnaitre ses échecs permet à coup sûr de n’en tirer aucun bénéfice.
2 : La Stacose
« La faute des autres, c’est toujours réjouissant » André Gide
Connaissez-vous cette maladie ? Il s’agit d’un syndrome très répandu qui consiste à tenter de faire croire ou encore pire, croire nous-mêmes, que nous ne sommes pour rien dans cette affaire-là ! Qui est responsable ? Au choix ; « Stacose » de votre dent qui est mal fichue, votre canal trop tordu, ce matériel qui n’est pas fiable, la sécu, le gouvernement, les syndicats, le Conseil de l’Ordre, la Covid, votre précédent dentiste, le personnel, mon associé, les gens, le, la, le…

Cette réaction survient souvent en premier lieu, telle un réflexe.
Elle est compréhensible, car enfin, nous ne l’avons pas voulu cet échec ! Elle est même naturelle, car échec et faute sont souvent culturellement mêlés. Rejeter notre échec permet de contourner le sentiment de culpabilité et au passage, il rassure notre ego. Mais s’accrocher à cette posture, l’ériger en moyen de défense, est plus gênant, car il est rare que ce ne soit QUE de « la faute des autres ».
De plus, c’est là aussi une garantie quasi-absolue de la reproduction des mêmes échecs cliniques et de leurs conséquences.
3 : Les stratégies d’évitement
« Qui a peur des étincelles ne devient pas forgeron » Proverbe allemand
L’évitement est une autre réaction possible ; je mets au placard ce matériel tout beau tout neuf et pourtant prometteur, que j’ai utilisé deux fois, j’évite de considérer telle ou telle pathologie, la paro ça ne marche pas, l’endo c’est trop compliqué, etc. Les restrictions peuvent finir par être nombreuses et je finis par m’en
accommoder.

4 : L’échec, vecteur de progrès de la connaissance
On ne peut évaluer ses compétences dans un domaine que l’on
ne connaît pas.” Jean-Louis Etienne
Si l’on accepte l’idée que l’échec représente potentiellement un – voire le plus – puissant vecteur de progrès, une autre échelle de valeur en découle. En analysant par nous-mêmes nos échecs, mais aussi en ayant recours à nos pairs, il devient possible de comprendre les circonstances qui les induisent et de corriger ce
qui doit l’être.
Nous pouvons décider d’élargir le domaine de nos connaissances.

Un corpus de connaissances est indispensable pour tout clinicien. Titres et diplômes peuvent les valider. Ceux-ci sont factuels, incontestables et sont valorisés aux yeux de tous de par la culture universitaire dont nous sommes issus. Les connaissances doivent être régulièrement actualisées et sont au service des compétences du clinicien. Mais savoir n’est pas synonyme de savoir-faire. Les diplômes et titres ne sont ni directement corrélés
à la performance clinique quotidienne, ni garants du succès de l’exercice clinique. La somme des savoirs nourrit seulement l’un des trois piliers de la compétence.
5 : L’échec, vecteur de progrès des compétences
« Quand vous jouez une seule note, seule la suivante permettra
de dire si elle était juste ou fausse » Miles Davis
La performance clinique repose sur trois piliers :
Savoir/ Savoir-faire/ Savoir quoi faire.
Même si les deuxième et troisième termes de cette triade sont beaucoup plus difficiles à mesurer que le premier, ils n’en sont pas moins essentiels. Face à l’échec, renforcer nos connaissances peut s’avérer insuffisant. Il nous faut aussi, parfois même prioritairement, acquérir ou perfectionner nos savoir-faire, grâce à différents outils de formation dédiés, qu’il convient de distinguer des outils de transmission des savoirs. Concernant les « savoir quoi faire », d’autres outils encore sont à notre disposition. Ce troisième volet est par ailleurs un des champs d’application des Recommandations cliniques des Sociétés savantes et Autorités de santé. Celles-ci font partie des connaissances indispensables, elles constituent des guides généraux, mais les respecter à la lettre ne garantit pas la compétence.
Les véritables compétences cliniques sont l’art de la combinaison des savoirs, savoir-faire et savoir quoi faire (et ne pas faire), face à chaque situation clinique particulière.


Mesurer objectivement la compétence est impossible. Nous devons en faire une autoévaluation permanente et honnête. Subjective, elle ne peut pas être affichée… ce qui en réalité n’est pas bien grave ! Quel est le plus important ? Une belle carte ou ce qu’il y a dans l’assiette ? Les diplômes encadrés en salle d’attente ou la satisfaction du patient, du praticien et de son équipe

CONCLUSION
Du point de vue scientifique, la richesse des connaissances fonde la valeur. Le clinicien, quant à lui, s’appuie sur les compétences dans son exercice. Les connaissances fondamentales sont au service de ses compétences, mais elles ne sont pas suffisantes à elles seules. Est-il possible d’exceller sur les deux tableaux ? Peut-être, mais reconnaissons que cela devient aujourd’hui presque mission impossible !
Prôner la suprématie de l’un ou de l’autre n’a pas beaucoup de sens. S’appuyer sur les complémentarités des scientifiques et des cliniciens est probablement beaucoup plus utile.

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A propos de l'auteur

Dr. Stéphane Diaz

Chirurgien-dentiste & Formateur
Fondateur de SD4DS
https://www.sd4ds.com/

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