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DE LA CHIRURGIE GUIDÉE STATIQUE VERS LA CHIRURGIE NAVIGUÉE DYNAMIQUE

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De nos jours, l’implantologie est une discipline fiable si les étapes du plan de traitement sont bien respectées. L’ostéointégration n’est plus à démontrer et l’ensemble de la profession estime que c’est la prothèse qui doit guider le positionnement correct de l’implant, en tenant compte du volume osseux parfois réduit, des tissus mous et du respect de l’espace biologique. Ces critères sont essentiels pour maintenir le succès implantaire à long terme.

La mise en pratique de ces paradigmes est parfois bien plus compliquée. En effet, il est parfois difficile d’anticiper correctement tous ces paramètres pour réaliser une intervention totalement prédictible. Les sociétés implantaires ont alors développé des logiciels de planification nous permettant de définir à l’avance le positionnement de l’implant en intégrant l’objectif prothétique. Une fois cette planification réalisée, le logiciel permet la fabrication d’un guide chirurgical permettant un placement précis de l’implant. Depuis quelques années, une nouvelle révolution technologique permet à l’implantologue d’être guidé en temps réel. On parle dès lors de chirurgie dynamique naviguée.

Dans le cadre de cet article, nous décrirons d’abord le principe d’utilisation de l’un de ces systèmes, le X- Guide, développé par la société X-Nav Technologies. Ensuite, nous détaillerons les différentes étapes de la prise en charge d’un patient dans notre cabinet pour un cas simple. Enfin, nous discuterons des avantages, des inconvénients et de la précision de la chirurgie naviguée.

PRINCIPE DE FONCTIONNEMENT DE LA CHIRURGIE DYNAMIQUE NAVIGUÉE PAR X-GUIDE

A la différence de la chirurgie guidée statique dans laquelle un guide est fabriqué puis positionné en bouche pour guider les forets dans un axe fixe prédéfini, la chirurgie dynamique permet de naviguer en temps réel dans le volume osseux du patient tout en étant guidé par le projet implantaire. La comparaison la plus parlante est celle d’un GPS, permettant au conducteur d’atteindre sa destination tout en restant maître de son véhicule. Le GPS indique le chemin le plus court mais le conducteur peut à tout moment, décider de dévier de la trajectoire de départ suite à un imprévu par exemple. Le GPS va alors recalculer en temps réel un nouvel itinéraire pour nous permettre malgré tout d’arriver à la bonne destination. De la même manière, en chirurgie dynamique grâce à des capteurs appelés trackers, le système relie le patient et les outils chirurgicaux par triangulation (Fig. 1).

Figure 1 : triangulation entre les deux caméras du X-Guide et les trackers QR positionnés sur le patient et sur le contre-angle.

La visualisation d’une cible sur l’écran du X-guide permet au chirurgien d’évaluer avec précision le point d’impact, l’axe de forage, la profondeur et l’angulation par rapport à la planification. En temps réel, il visualise le foret qui progresse dans le volume osseux du patient (Fig. 2).

S’il le souhaite, il peut décider d’axer volontairement différemment son foret pour accrocher par exemple la corticale palatine et redresser ensuite son forage pour retrouver l’axe correct. Nous discuterons du niveau de précision plus loin dans l’article.

Figure 2 : triangulation entre les deux caméras du X-Guide et les trackers QR positionnés sur le patient et sur le contre-angle.

DESCRIPTION DU MATÉRIEL

Le X-Guide est constitué d’un ordinateur avec un logiciel dédié, d’un écran et d’un bras articulé positionné au-dessus de la tête du patient comprenant 2 caméras entourées de led violettes qui améliorent la précision (Fig. 3). Ce dispositif mobile s’adapte assez facilement dans l’environnement de la salle de chirurgie et est classiquement positionné aux pieds du patient. Pour le guidage, le système est constitué de différents trackers (capteurs) recouverts de code QR qui seront reconnus par les caméras et par le logiciel (Fig. 4).

Figure 3 : ordinateur et caméra X-Guide.

Figure 4 : tracker patient fixé avec le X-Clip et tracker chirurgien sur le contre- angle.

Ainsi, il y aura un tracker sur le manche du contre-angle, sur un disque permettant de déterminer avec précision l’axe de rotation du contre-angle, sur une sonde X-Mark permettant de définir des points de repère, sur une plaquette permettant de déterminer pour chaque foret sa longueur (Fig. 5). 

Enfin, un tracker sera positionné fermement dans la bouche du patient par l’intermédiaire d’un clip en matière thermoformable. 

CALIBRATION DU MATÉRIEL

Avant chaque intervention, il est nécessaire de calibrer le matériel en présentant les différents trackers aux caméras. Cela permet de garantir une précision sans faille. Le processus complet dure environ 2 minutes et peut être réalisé en amont de l’intervention, lors de la préparation de la salle d’opération (Fig. 5).

Figure 5 : quelques étapes de la calibration du matériel : contre-angle, disque, sonde X-Mark.

PREMIÈRE SÉANCE : ÉTUDE DU CAS – PLAN DE TRAITEMENT

Pour information, notre cabinet est dédié à la pratique exclusive de l’implantologie et de la parodontologie. Nous prenons en charge les patients pour la phase chirurgicale implantaire puis nous l’adressons à son dentiste correspondant pour la phase prothétique.

Lors de la première consultation, après avoir écouté attentivement la demande du patient, nous réalisons classiquement notre anamnèse. Ensuite, nous procédons à un examen clinique complet, en étant particulièrement attentif aux aspects parodontaux et occlusaux. Si l’indication de l’implant est validée cliniquement, nous détaillons alors les informations à savoir les avantages, inconvénients, risques principaux, alternatives et estimatif d’honoraire. Après validation par le patient, nous pouvons alors procéder aux examens complémentaires. Ceux-ci comprennent l’empreinte numérique des deux arcades, l’enregistrement de l’occlusion ainsi que le cone beam CT.

D’un point de vue pratique lié au temps de calcul du logiciel, nous procédons d’abord à l’empreinte des deux maxillaires ainsi qu’à l’occlusion en intercuspidie maximale. Au cabinet, nous sommes équipés du scanner Medit i500 et du logiciel Medit Scan. Le temps nécessaire est d’environ 5 minutes. Cela génère un fichier numérique au format .PLY sauvegardé sur le serveur du cabinet.

Nous passons ensuite à la réalisation du cone beam CT. Nous sommes équipés du Vatech Paxi 3D Smart. Pour notre examen, dans le cadre de notre flux de travail digital, nous optons pour un champ 12×9 permettant d’obtenir une arcade complète. L’examen se réalise de préférence en désocclusion afin de permettre par la suite une analyse plus simple des surfaces dentaires. Le fichier DICOM (.DCM) est également sauvegardé sur le serveur.

A ce stade, nous pouvons réaliser la planification à l’aide de notre logiciel DTX Studio Implant. Pour cela, nous importons les fichiers Dicom ce qui nous permet de visualiser le volume osseux en 3D. Ensuite, nous réalisons la smart fusion : nous superposons les empreintes numériques au volume osseux. Sur base de ces informations, le logiciel réalise un wax up  virtuel de la dent manquante. Nous pouvons alors naviguer dans le volume osseux du patient et la superposition de toutes ces informations nous permet d’avoir une vue précise du projet prothétique virtuel, de l’épaisseur de la gencive, du volume osseux et des éventuels obstacles anatomiques. A partir d’une bibliothèque reprenant l’ensemble du catalogue de la firme, nous pouvons alors choisir le modèle d’implant souhaité et planifier avec précision sa position idéale. Le choix du pilier prothétique est également anticipé en fonction de l’objectif prothétique (Fig. 6).

Figure 6: exemple de planification DTX avec wax-up virtuel (dent blanche) et positionnement idéal de l’implant.

Une fois finalisé, ce plan de traitement est alors détaillé au patient. L’estimation d’honoraires est validée et signée et nous donnons les conseils préopératoires.

Nous exportons la planification dans l’ordinateur du X- Guide pour qu’il soit disponible le jour de l’intervention.

DEUXIÈME SÉANCE : POSE DE L’IMPLANT

Après le rappel des explications données à la première séance, nous procédons à une anesthésie locale ainsi qu’à une désinfection de la bouche à la chlorhexidine.

La première étape du protocole X-guide consiste à préparer un X-Clip adapté à la bouche du patient. Il s’agit d’un clip en matière thermoformable, réchauffé dans une bouilloire à 75 degrés. Lorsqu’il est complètement ramolli, nous le positionnons sur l’arcade du patient, si possible du côté opposé au site à implanter. Une fois moulé, le clip est remis dans de l’eau froide pour durcir. Il est ensuite trempé dans du désinfectant.

Pendant ce temps, l’assistante prépare la salle d’intervention: mise en place des champs stériles et du matériel nécessaire à l’intervention. La préparation du X-guide peut alors commencer. Elle importe d’abord le fichier du patient généré par le DTX Studio Implant à la séance précédente. Ensuite, elle calibre le X-guide (Fig. 4).

Le patient est installé au fauteuil et on lui place des champs stériles ainsi qu’une paire de lunettes de soleil pour éviter l’éblouissement lié aux diodes. Le tracker patient est vissé sur le X-Clip et est placé fixement dans la bouche du patient. Nous pouvons alors déterminer dans le logiciel X-Guide des points de repère sur le volume 3 D que l’on va ensuite faire correspondre avec les mêmes points dans la bouche du patient à l’aide de la sonde X-Mark. L’intervention peut alors débuter. Chaque foret utilisé est d’abord identifié sur la plaquette tracker. Le chirurgien visualise à l’écran sa progression dans l’os en temps réel (Fig. 7 et 8). Dans la mesure du possible, l’implant est posé en un temps chirurgical. Une vis de cicatrisation large est positionnée pendant le temps d’ostéointégration. Nous utilisons des sutures résorbables.

Figure 7 : cible de guidage X-Guide et progression en temps réel du foret dans le volume osseux. La planification de l’implant est représentée en bleu.

Figure 8 : intervention chirurgicale guidée dynamique.

TROISIÈME SÉANCE : CONTRÔLE DE L’OSTÉOINTÉGRATION

Environ 3 mois après l’intervention, nous revoyons le patient pour contrôler la bonne cicatrisation. Nous lui remettons une boîte comprenant la traçabilité du matériel ainsi qu’une réplique d’implant et un transfert d’empreinte pour le dentiste correspondant (Fig. 9).

Figure 9 : planification dans DTX Studio Implant – Radiographie de contrôle à 3 mois – Boîte de traçabilité.

PRÉCISION

De nombreuses études dans la littérature évaluent la différence de précision entre la chirurgie à main levée, la chirurgie guidée statique et la chirurgie guidée naviguée. Pour ce faire, elles comparent généralement la planification sur le CBCT initial et un deuxième CBCT réalisé après l’intervention, implant placé, que ce soit sur un modèle d’étude ou sur un patient. Les paramètres généralement mesurés sont la déviation de profondeur, de point d’impact de l’implant, son apex et la différence d’angulation. Elles concluent toutes à un gain de précision plus élevé pour la chirurgie guidée, qu’elle soit statique ou dynamique. Par contre, la différence entre ces deux dernières n’est pas statistiquement prouvée. Elle se situe plutôt dans les nombreux avantages qu’offre la chirurgie naviguée que l’on détaillera dans le paragraphe suivant.

A titre d’exemple, citons l’étude de Michaël S. Block et de ses collaborateurs : « Implant Placement Is More Accurate Using Dynamic Navigation » (J Oral Maxillofac Surg. 2017) Quatre chirurgiens ont encodé leurs données sur patients en chirurgie guidée naviguée, partiellement guidée et à main levée. Leurs résultats en faveur de la chirurgie naviguée sont repris dans le tableau ci-dessous (Fig. 10).

AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS

Si chaque nouvelle évolution technologique procure de nombreux avantages par rapport à l’ancienne technique, elle apporte aussi son lot de nouvelles problématiques. Bien les comprendre permet de mieux les anticiper.

Le principal inconvénient du guide statique fixe positionné dans la bouche du patient est l’encombrement. Les forets qui doivent passer dans ce guide sont la plupart du temps rallongés de 10mm. Il en résulte une vraie difficulté d’accès pour les implants distaux avec parfois l’impossibilité de se servir du guide réalisé. Ce problème est totalement résolu avec le X-guide. L’accès aux implants distaux est libéré. De plus, on peut utiliser sa trousse de chirurgie classique sans devoir investir dans une trousse spécifique à la chirurgie guidée. Tous les systèmes implantaires peuvent être utilisés et l’on peut également utiliser toutes les fraises accessoires souhaitées ( ex : Sinusjet, Versah, …)

Un autre avantage majeur est le maintien de la sensation osseuse. Comme le foret ne doit pas passer à travers une gaine de guidage, le chirurgien ressent, comme dans la chirurgie à main levée, la densité osseuse traversée. De plus, nous l’avons vu plus haut, celui-ci peut varier l’axe en cours de forage et le redresser ensuite, tout en étant guidé. L’absence de guide permet également un parfait contrôle et gestion des tissus mous. Il n’y a pas non plus de limitation de l’irrigation durant le forage.

Les erreurs de positionnement du guide sont également supprimées. Elles étaient d’autant plus fréquentes lorsque le guide était en appui muqueux. On ne fait plus aveuglément confiance au guide puisque l’on peut vérifier pendant toute l’intervention la précision du système. On peut également beaucoup plus facilement réaliser des extractions/ implantations immédiates, avec des implants plus enfouis, nécessitant parfois de modifier la crête osseuse. D’un point de vue logistique c’est également nettement simplifié : pas de gestion de laboratoire, d’imprimante 3 D, de stockage des guides ou de délai de fabrication. Le protocole X-Guide permet d’ailleurs, si on le souhaite, de réaliser l’étude et l’intervention guidée à la même séance.

En cas d’imprévu chirurgical, le clinicien peut décider de modifier la position de son implant. Un guide classique serait alors inutilisable. Le logiciel de chirurgie naviguée permet à tout moment de modifier la planification et de définir une nouvelle position de l’implant pour continuer la chirurgie de manière ultra  d’investissement du matériel, il faudra rester attentif à la stabilité du X-Clip dans la bouche du patient. Si celui-ci bouge, ou si les dents qui le supportent sont mobiles, tout le guidage est faussé. Pour éviter cela, le chirurgien vérifiera pour chaque forêt la correspondance entre l’écran et la bouche du patient. L’autre inconvénient consiste dans l’encombrement relatif des trackers patients et contre-angle. Comme pour toute nouveauté, il y a une courbe d’apprentissage et un bon accompagnement de la firme lors des premières interventions est la clé du succès.

DISCUSSION

L’avènement de la chirurgie naviguée est une vraie révolution numérique. Elle s’inscrit parfaitement dans le workflow totalement digital du cabinet dentaire. Il y a une cohérence numérique dans toute la prise en charge du patient, depuis les empreintes optiques d’étude, le cone beam, la fusion des données puis la planification. Cela permet de passer à la chirurgie guidée dynamique sous contrôle informatique. Pour terminer la chaîne digitale, après ostéointégration, le praticien pourra bien sûr réaliser l’empreinte numérique pour la couronne d’usage avec un transfert d’empreinte numérique (scan body) ou en scannant directement le pilier de cicatrisation. La couronne sera façonnée également numériquement par le prothésiste avant d’être placée en bouche. Dans notre cabinet, l’intégration de cette technologie pour tous les implants posés nous a permis d’augmenter significativement le degré de précision de nos interventions tout en étant moins invasif. Les patients sont également particulièrement satisfaits et rassurés par cette prise en charge. Tout cela contribue à améliorer encore notre satisfaction de travail et notre professionnalisme.

 

 

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