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Les OSTEOTOMIES en secteur postérieur mandibulaire

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INTRODUCTION
Le manque d’os en secteur postérieur mandibulaire est une situation très courante en implantologie. Les secteurs édentés postérieurs libres entraînent des situations inconfortables lorsqu’un appareil mobile est porté. En effet, un phénomène de bascule de la prothèse adjointe est fréquent et les muqueuses étant fines, les douleurs ou des lésions sont par conséquent très fréquentes.

Le manque osseux peut être horizontal, vertical ou les deux.
Différentes techniques de reconstruction sont utilisées depuis plusieurs années, avec des reculs et des taux de réussite différents. Les reconstructions les plus reproductibles avec un taux de succès élevé restent les greffes en coffrage élaborées par Fouad Khoury (Khoury F. 2010), le « sausage technique » introduit par Istvan urban (urban 2017). Cependant, la réussite dépend également de la qualité de vascularisation et d’ostéogenèse du site ainsi que de la qualité de cicatrisation générale des patients. Les techniques utilisant les membranes non-résorbables représentent un taux d’échec important dû à l’exposition de ces dites membranes. Le principe de la distraction osseuse quant à elle, repose sur la séparation d’un bloc osseux de sa base et une réparation lente par cal osseux, millimètre après millimètre. Des plaques sont vissées sur les 2 parties osseuses et un vissage modéré et régulier les éloigne, ce qui déclenche une ostéogenèse de type réparation de fracture osseuse. L’axe de déplacement osseux peut être cependant difficile à contrôler.

Les ostéotomies utilisent le même principe mais le processus est accéléré car le segment séparé est
directement fixé à distance de la base osseuse dans sa situation finale (Khoury G. 2017) L’avantage est un gain de temps certain, moins de gêne par l’absence de la vis de serrage, et un contrôle de la forme
osseuse finale souhaitée.
L’activation des cellules osseuses de l’endoste, la vascularisation qui résulte du segment osseux déplacé car restant pédiculé, et l’absence d’un second site opératoire donneur, font de cette technique une reconstruction efficace et pratique. Cependant, le choix de l’ostéotomie appropriée et la maîtrise du geste demandent une courbe d’apprentissage importante.

La forme de l’os, la quantité d’os cortical ou spongieux impliquent des lignes de découpe osseuse différentes et des points de bascule particuliers. L’article de Zarrine en 2019 décrit précisément les étapes de chirurgie. (Zarrine 2019) Les découpes osseuses sont réalisées à l’aide d’un insert denté fin de piezochirurgie à forte puissance et sous irrigation abondante pour ne pas brûler l’os.
Nous avons classé ces ostéotomies en trois catégories. Cela permet d’avoir un arbre décisionnel pour le choix de la technique chirurgicale en fonction de l’anatomie osseuse. (fig 1)

Fig 1

– Ostéotomie horizontale pour une crête en forme de I
– Ostéotomie de rotation pour une crête en forme de V inversé
– Ostéotomie verticale pour une crête arrondie ou en 0

Lorsque la crête osseuse est fine, avec :
– une forme droite et verticale comme un I
– deux corticales osseuses séparées par de l’os spongieux
– une épaisseur totale > 3 mm
Une ostéotomie horizontale peut être réalisée. (fig 2).

Fig 2

Une incision gingivale est réalisée au niveau crestal. un lambeau de pleine épaisseur est soulevé en vestibulaire. L’échec important à éviter est la fracture du pan osseux lingual dont la cicatrisation osseuse est quasiment impossible à obtenir. Pour cette raison, le lambeau ne doit pas être décollé en lingual et la séparation des deux tables osseuse doit être effectuée en douceur par des ciseaux à os fins. toute résistance à la séparation doit être gérée en reprenant les lignes d’ostéotomie.
Le respect des traits d’ostéotomie est extrêmement important (fig 3)

– une ostéotomie de la corticale vestibulaire mésiale et distale,
– une ostéotomie crestale sur une profondeur correspondante à la hauteur d’os à augmenter en épaisseur
– une ostéotomie partielle apicale créant la ligne de bascule du volet osseux vestibulaire.

Fig 3

Idéalement, cette table vestibulaire doit rester attachée et pédiculée à la base osseuse apicale. La fracture du pan osseux vestibulaire est préjudiciable mais la stabilisation par une ou des vis d’ostéosynthèse diminuera le risque d’échec (fig 4).

Fig 4

Le lambeau de pleine épaisseur permet de réaliser cette ligne de fragilisation osseuse apicale qui sera l’axe de rotation de l’os vestibulaire (fig 5).

Fig 5

Des implants peuvent être placés simultanément à l’ostéotomie horizontale (fig 6), si :

Fig 6

– la hauteur osseuse au dessus du pédicule mandibulaire permet la mise en place d’implants osseux
– l’ancrage des implants peut être obtenu dans les derniers millimètres apicaux de les implants
– si les plaques osseuses vestibulaire et linguale permettent d’avoir suffisamment d’épaisseur de part et d’autre des implants (minimum 1,5mm).

Il est important de souligner qu’une plaque osseuse vestibulaire qui exerce une pression sur un implant pourra se résorber. De ce fait, une épaisseur d’au moins 1,5mm est nécessaire ainsi qu’une maintien de l’épaisseur osseuse sans exercer de contrainte sur le col implantaire. Si la plaque osseuse vestibulaire est fracturée et détachée du reste de l’os, il est nécessaire de stabiliser ce rectangle osseux par des vis d’ostéosynthèse, de combler l’espace médullaire par un mélange d’os particulaire et de biomatériaux recouvert d’une membrane résorbable. Il sera contre indiqué dans ce cas de placer les implants simultanément.
Des implants BLX SLActives roxolid Straumann seront très efficaces pour obtenir une excellente stabilisation des implants simultanément à l’ostéotomie horizontale, grace au dernier 1/3 apical.
Un diamètre implantaire de 3,75mm en alliage roxolid permettra d’éviter une contrainte importante sur l’os tout en augmentant la résistance des implants à la fatigue.

2 – OSTÉOTOMIE DE ROTATION

Lorsque la crête osseuse est fine avec une forme osseuse vestibulaire qui est oblique et non verticale (fig 7) en forme de V inversé, alors une ostéotomie horizontale ne sera pas la bonne indication. En effet, le risque de fracture osseux est plus important car l’amplitude de la bascule est plus importante.

Fig 7

Dans ce cas, une ostéotomie de rotation est indiquée. une incision gingivale de pleine épaisseur est réalisée horizontalement et à distance du sommet de la crête. toute la gencive kératinisée et une grande partie de la gencive attachée restent adhérentes au segment osseux qui sera ensuite basculé.
Un décollement muqueux apical permet d’exposer la zone d’ostéotomie.
Le trait d’ostéotomie horizontal est légèrement incliné vers le haut, sectionnant entièrement la corticale vestibulaire et partiellement la corticale linguale (fig 8).

Fig 8

 

Sa position est déterminée par la forme de l’os et la largeur du futur os crestal que nous souhaitons obtenir. Les traits d’ostéotomie en mésial et en distal débutent à la ligne de découpe horizontale, passent sous la muqueuse crestale et pénètrent entièrement dans l’os spongieux jusqu’à la corticale linguale.
Par une fracture partielle de la table osseuse linguale, le bloc osseux est pivoté vers le haut tout en maintenant une attache périostée au niveau lingual (fig 9).

Fig 9

Le segment découpé est ainsi séparé de l’os basal par un mouvement de rotation grâce à un ciseau à os fin. Ce bloc est ensuite solidement fixé dans cette nouvelle position par 2 plaques d’ostéosynthèse en forme de I ou une plaque en forme de H, transfixées par des vis d’ostéosynthèse en prenant soin d’être à distance du pédicule mandibulaire (fig 10).

Fig 10

La gencive kératinisée a été déplacée lingualement lors de cette chirurgie.
Lors de la pose des implants à 4 mois dans le second et dernier temps chirurgical, l’incision devra être
obligatoirement au centre de la gencive kératinisée et non au milieu de la crête puisque la gencive a été déportée. Les plaques d’ostéosynthèse sont alors déposées et des implants tissu Level SLActive (Straumann) non enfouis sont mis en place, recouverts d’une vis de cicatrisation permettant de déplacer une partie du bandeau gingival kératinisé en vestibulaire des cols implantaires.

3 – OSTÉOTOMIE VERTICALE
Lorsque l’épaisseur osseuse est suffisante mais qu’il y a un manque de hauteur au dessus du nerf mandibulaire (fig 11),

Fig 11

Une ostéotomie verticale sera alors indiquée. Comme pour l’ostéotomie de rotation, une incision gingivale de pleine épaisseur est réalisée horizontalement et à distance du sommet de la crête laissant la gencive kératinisée et une partie de la gencive attachée adhérentes au segment osseux à soulever.
C’est à nouveau le décollement muqueux apical qui permet de réaliser les traits d’ostéotomie.

Le trait horizontal d’ostéotomie est parallèle à l’os crestal, sectionne entièrement la corticale vestibulaire et partiellement la corticale linguale. Sa position est déterminée par la hauteur du futur os crestal souhaité et sera obligatoirement à 2 mm de distance de sécurité du nerf mandibulaire. Il est important de souligner que les inserts de piézochirurgie ne sectionnent pas le nerf mais peuvent l’endommager par brûlure. une marge de sécurité est donc toujours nécessaire. Les traits d’ostéotomie en mésial et en distal débutent à la ligne de découpe horizontale, passent sous la muqueuse crestale et pénètrent entièrement dans l’os spongieux et découpe la corticale linguale sans couper la muqueuse linguale.
Le bloc osseux crestal est fracturé par un ciseau à os et déplacé verticalement (fig 12) tout en maintenant une attache périostée au niveau lingual.

Fig 12

Le segment découpé est ainsi séparé de l’os basal puis fixé à distance solidement dans cette nouvelle position par 2 plaques d’ostéosynthèse en forme de I ou une plaque en forme de H, trans-fixées par des vis d’ostéosynthèse en prenant toujours soin d’être à distance du pédicule mandibulaire (fig 13 et 14).

Fig 13

 

Fig 14

 

A 4 mois, les plaques d’ostéosynthèse peuvent être déposées et des implants tissue Level Straumann SLActive sont placés et recouverts de leur vis de cicatrisation non enfouies.

SYNTHÈSE ET CLASSIFICATION

L’ostéotomie horizontale est une technique offrant des corrections d’épaisseur importantes tout en permettant une pose d’implant simultanée dans une majorité de cas. Elle est indiquée dès qu’une crête est verticale avec une épaisseur minimale de 3 mm et des parois osseuses non soudées bordant un os spongieux (fig 15).

Fig 15

Au contraire, l’ostéotomie de rotation nécessite un second temps implantaire mais répondra aux manques d’épaisseur à la mandibule postérieure sortant des critères de l’ostéotomie transversale avec un table osseuse vestibulaire oblique (fig 16).

Fig 16

De plus, elle a l’avantage d’un os cortical vestibulaire large et épais se retrouvant en situation crestale une fois basculé. Enfin, elle permet toujours l’adéquation entre l’axe osseux, implantaire et prothétique, pas toujours possible lors d’un clivage horizontal. L’ostéotomie verticale permet une augmentation de la hauteur osseuse au dessus du nerf mandibulaire (fig 17).

Fig 17

Une fois les ostéotomies réalisées, le périoste vestibulaire doit être libéré précautionneusement sans léser les branches nerveuses se distribuant en éventail à la sortie du foramen mentonnier. Le résultat sera une augmentation reproductible de l’épaisseur de la crête résiduelle tout en s’affranchissant d’un site de prélèvement ou de biomatériaux. La cicatrisation et le remodelage osseux sont optimisés par la vascularisation du bloc pédiculé et l’ouverture de l’espace médullaire peut être comblée ou pas. Si le comblement est réalisé par des biomatériaux ou un os composite (os d’articulaire et biomatériaux), l’utilisation d’une membrane résorbable sera indiquée. L’espace médullaire richement vascularisé est le siège de cellules sanguines libérant des cytokines et des facteurs de croissance. Il se forme alors un caillot riche en cellules souches permettant la cicatrisation puis le remaniement osseux. Pour les ostéotomies de rotation, les ostéotomies de déplacement vertical et les ostéotomies horizontales avec fracture du pan osseux vestibulaire, les implants pourront alors être placés et recouverts de vis de cicatrisation évitant un désenfouissement secondaire inutile.

CONCLUSION

L’absence des dents postérieures mandibulaires entraîne une résorption osseuse compromettant la restauration implantaire. La perte d’épaisseur compromet le bon positionnement tridimensionnel implantaire et provoque l’exposition des spires lors de la mise en place des implants ou par résorption osseuse après la mise en fonction. La fonte osseuse peut également entraîner un manque de hauteur qui empêche la pose des implants en respectant une marge de sécurité par rapport au pédicule mandibulaire. Les augmentations dans ce secteur sont particulièrement complexes des à un accès difficile, une gencive très fine, une vascularisation osseuse faible et un os cortical pratiquement dépourvu de vascularisation diminuant la capacité de cicatrisation. Les ostéotomies ont l’avantage de ne pas nécessiter un second site de prélèvement et utilisent les capacités de réparation osseuse consécutives à une fracture. trois techniques sont alors indiquées selon la forme initiale de l’os et l’objectif recherché : ostéotomie horizontale, ostéotomie verticale et ostéotomie de rotation. Ainsi, comme pour toute fracture, la cicatrisation débutera par une phase d’inflammation formant en quatre semaines un cal mou fibreux qui sera progressivement transformé en os mature en 3 à 4 mois redonnant de l’épaisseur et/ou de la hauteur à la crête alvéolaire.

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A propos de l'auteur

Dr. Sepehr ZARRINE

Exercice limité à l’implantologie, Saint Dié des Vosges
Speaker Fellow ITI
European Master in dental implantology (Frankfort, Allemagne) Diplôme Universitaire de réhabilitation chirurgicale maxillofaciale. (Médecine, Paris VII)

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