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LA RÉVOLUTION DIGITALE EN ORTHODONTIE

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LES ENJEUX AUXQUELS SONT CONFRONTÉS LES ORTHODONTISTES

La révolution digitale en marche depuis quelques années dans notre spécialité s’est considérablement accélérée après la crise du Covid que nous venons de traverser. La pandémie a amplifié l’utilisation des outils digitaux avec des répercussions sur notre façon de vivre et de consommer (explosion des plateformes de streaming, de la vente en ligne …) ainsi que dans le monde du travail (télétravail, réunions à distances types Zoom ou Google Meet).
Ces changements ont également impacté les rapports entre les patients et les professionnels de santé. Le digital a permis aux patients d’être plus informés (mal parfois), d’échanger régulièrement sur les traitements (forums, réseaux sociaux). Nous pouvons en regretter certains aspects, notamment le niveau de qualité de l’information reçue en général sur le net, mais il évident que les professionnels de santé doivent s’adapter eux aussi à ces évolutions en utilisant à bon escient ces technologies digitales.
Les avancées digitales, notamment celles se basant sur l’intelligence artificielle, ont énormément fait progresser l’orthodontie, en commençant par l’essor des set up 3D dans la planification de nos traitements permettant ensuite la fabrication de dispositifs sur mesure (aligneurs, techniques de brackets en lingual ou en vestibulaire sur mesures).
Mais si les dispositifs ont gagné en précision, ils sont également devenus moins compliqués à utiliser et ont permis d’envisager que ces techniques ne soient plus réservées aux seuls orthodontistes. La crainte de voir notre profession disparaitre à cause du numérique est donc dans la tête de nombreux spécialistes.
L’orthodontiste, plus que jamais, est face à une remise en cause de sa spécialité. Il est donc primordial de réfléchir aux transformations que le digital induit sur notre profession, en même temps que sur la société dans son ensemble, et de comprendre comment les orthodontistes doivent évoluer au rythme de leurs patients et se servir de ces technologies pour améliorer la prise en charge à la fois en terme de traitements mais aussi en intégrant un meilleur suivi, une meilleure organisation de notre pratique et une communication plus adaptée à ces nouvelles générations qui passent la porte de nos cabinets.

UN DIAGNOSTIC PLUS COMPLET ET PRÉCIS
Le diagnostic est l’acte par lequel le professionnel de santé va identifier une pathologie par l’observation de ses symptômes. Il repose donc sur deux facteurs essentiels, le recueil de données observables et la mise en relation de ces données par le praticien.
Le recueil de données (data en langage digital) est donc essentiel dans notre profession et les technologies digitales ont considérablement augmenté la quantité de données disponibles en facilitant leur accessibilité, ainsi que la qualité, grâce à des outils de mesure très précis.

ANALYSES DES ARCADES DENTAIRES
L’arrivée des scanners intra-oraux et de la photographie dentaire 3D, ont permis l’acquisition de modèles 3D des arcades dentaires dans un temps aussi réduit qu’une empreinte à l’alginate. L’analyse de ses modèles 3D couplée à l’examen clinique et les observations faites sur les photos et les radiographies vont permettre d’établir le diagnostic.
Avant ces technologies, les moulages étaient en plâtre et les mesures étaient faites directement sur ces moulages avec des fils en laiton, des pieds à coulisses et nécessitaient la modification des modèles en plâtre.
Elles étaient donc compliquées et longues à réaliser, et les orthodontistes étaient souvent tentés d’évaluer ces mesures « à l’oeil » (ce qui était générateur de fortes imprécisions) ou de ne pas les incorporer dans leurs relevés de données pour l’analyse du cas. Aujourd’hui, les mesures telles que le diamètre mésiodistal des dents, l’encombrement, les largeurs d’arcades, le surplomb (Fig. 1 et vidéo 1), le recouvrement, l’indice de Bolton (Fig. 2), les points d’occlusion … sont disponibles en quelques clics grâce aux logiciels d’analyse des photographies dentaires 3D, avec une précision de l’ordre du centième de millimètre.

Fig 1 : calcul du surplomb avec le logiciel Ortho Analyzer

Vidéo 1 : utilité du calcul du surplomb dans la correction de la classe II.

Fig. 2 : calcul de l’indice de Bolton avec le logiciel Approver.

Cette rapidité d’acquisition permet à l’orthodontiste d’accorder plus de temps à l’analyse de ces données plutôt qu’à leur collecte (tâche longue et fastidieuse) et a ainsi un impact positif sur le diagnostic initial.

LA RADIOGRAPHIE 3D
Le développement du cone beam en orthodontie a eu un impact majeur sur les stratégies de déplacement dentaire. En effet, lors de l’élaboration du plan de traitement, l’orthodontiste tient aujourd’hui, autant compte des couronnes cliniques, que des racines dentaires. Il prend en compte, les rapports des racines entre elles et mais aussi avec l’os environnant.
La possibilité d’importer les cone beam dans les set up 3D (Fig. 3) des logiciels de conception d’appareils (Clincheck, Approver …) offre une meilleure lecture des possibilités thérapeutiques et de leurs limites.

Fig.3 : intégration du cone beam dans le logiciel Approver (Spark).

Ainsi certains déplacements dentaires seront planifiés différemment grâce à l’analyse du cone beam avant traitement (Vidéo 2), car la seule observation de la couronne clinique ne nous donne pas toutes les informations quant aux racines et à la quantité d’os autour.

Vidéo 2 : exemple de modification de plan de traitement grâce au cone beam.

Si ces examens deviennent déterminants pour la conception du plan de traitement, ils sont tout aussi utiles dans l’analyse à la fin de nos traitements, en nous permettant d’évaluer les effets de nos thérapeutiques sur les racines et l’os alvéolaire. Ces feed-back permettent à l’orthodontiste un apprentissage constant sur sa pratique.
Toutefois, contrairement aux scanners intra-oraux qui permettent une multiplication des examens si besoin, l’utilisation du cone beam est aujourd’hui soumise à une réglementation de bonnes pratiques et à une limitation de son utilisation à des cas bien précis. Mais au vu de la quantité d’informations supplémentaires et de la constante diminution des doses utiles pour obtenir ces images, les recommandations vont certainement évoluer dans les années à venir.

LES LOGICIELS DE PLANIFICATIONS
Les logiciels de set up 3D sont une des grandes avancées en orthodontie ces dernières années.
L’orthodontiste va planifier son plan de traitement en intégrant les photographies 2D, 3D, les radiographies et éventuellement le cone beam afin de réaliser l’option thérapeutique qui lui semblera la meilleure pour son patient.
Ce temps digital est devenu une part importante du travail de l’orthodontiste aujourd’hui. Le set up 3D fait le lien entre le diagnostic initial, le plan de traitement et la thérapeutique. Toutes les informations recueillies préalablement lors du diagnostic vont être utilisées (Vidéo 3) pour décider du résultat final, mais plus important encore des étapes pour y parvenir (staging).

Vidéo 3 : le diagnostic initial et le set up 3D.

De la qualité de ce set up va dépendre l’efficacité du traitement. Il est donc impensable de le faire intégralement réaliser par un tiers (technicien) n’ayant ni examiné le patient, ni les compétences exigées pour la réalisation du traitement.
Les orthodontistes doivent acquérir les compétences nécessaires à la maîtrise de ces nouveaux outils, que ce soit en termes de biomécanique, différente avec les nouvelles technologies (aligneurs), l’utilisation des logiciels, la communication avec les nouveaux intermédiaires (techniciens réalisant ces set up 3D), afin d’en rester le prescripteur (qui prend d’ailleurs la responsabilité de cette prescription) et non pas seulement un « fournisseur » de ces traitements.

UN SUIVI (À DISTANCE) OPTIMISÉ
De nombreux cabinets d’orthodontie utilisent des solutions de monitoring à distance pour suivre leurs patients. La principale actuellement est Dental Monitoring, société française qui permet grâce à des « scans » (photographies) réalisés à l’aide d’un smartphone et d’une Scan Box (Fig. 4), de suivre les déplacements dentaires, l’adaptation des aligneurs, la présence des « taquets » (plots de composites nécessaires aux traitements par aligneurs), l’hygiène dentaire, l’apparition de récessions gingivales …

Fig.4 : le scan pour le monitoring à distance.

Cette quantité importante d’informations régulières pour chaque patient est recueillie par une intelligence artificielle. Les cabinets reçoivent chaque semaine de nombreuses données qui sont ensuite analysées par l’équipe du cabinet Ces solutions permettent un suivi « en temps réel » et ainsi une réaction rapide afin de
prévenir et d’anticiper tout problème survenant pendant le traitement, mais également déceler toute baisse de motivation de la part du patient. La coopération de nos patients étant un élément essentiel de la réussite du traitement, il est très important de garder cette participation active et de pouvoir intervenir à tout moment en remotivant nos patients ou en leur rappelant que leur traitement dépend de leurs efforts.

UNE COMMUNICATION 2.0
En tant que professionnels de santé, l’information délivrée à nos patients fait partie de nos obligations.
Si cette information doit être la plus claire possible (voir recommandations de bonnes pratiques de la HAS), elle doit être également comprise par nos patients. Il est donc primordial d’utiliser les médias adaptés à chaque patient. En fonction des différentes générations, les habitudes ne sont pas les mêmes. Un baby boomer sera surement plus sensible à des explications verbales alors qu’un enfant de la génération Z sera captivé par des vidéos ou de la 3D sur tablette. S’adapter à chaque patient grâce au digital est donc très simple et permet à notre message d’être mieux reçu par le patient et ainsi mieux retenu et compris.
Les applications smartphones en lien avec nos logiciels sont aujourd’hui très utilisées (Fig 5). Toutes les informations dont a besoin le patient (prochains rdv, dossier médical, devis, factures, ordonnances…)
sont disponibles immédiatement. La plupart de ces applications permettent un chat direct avec le cabinet
afin de renforcer les moyens de communication et rendre les échanges plus fluides entre le patient et le
cabinet (dans le respect de la réglementation RGPD).
Il est également possible de prendre les rendez-vous directement depuis l’application. Cette prise de rendez-vous en ligne est une solution qui paraît souvent compliquée à mettre en place par les professionnels de santé (notamment les orthodontistes avec des rendez-vous très spécifiques), car elle peut désorganiser un planning minutieusement réfléchi. Il est donc intéressant de fonctionner avec des masques de rendez-vous afin de permettre cette facilité à nos patients, qui y sont majoritairement habitués aujourd’hui.

Fig.5 : l’application Dentapoche en lien avec le logiciel Orthalis.

 

 

 

 

 

 

 

 

La communication est également facilitée entre professionnels de santé, véritable enjeu dans les traitements pluridisciplinaires. Elle obéit aux mêmes règles de protection des données et l’utilisation de passerelles dédiées permet à chaque spécialiste de se connecter à son portail personnalisé afin de visualiser les documents correspondants à ses patients (photographies, radiographies, ordonnances …).

UNE MODERNISATION DES CABINETS
L’attente de nos patients a évolué concernant nos cabinets. Ils s’attendent à des locaux équipés des
dernières technologies reconnues, mais également à des cabinets organisés pour les recevoir dans
de bonnes conditions (accueil chaleureux, sans trop de retard…). Les orthodontistes, comme les autres
professionnels de santé, se doivent donc d’optimiser leur organisation afin de répondre à ces exigences
car l’accueil est une source régulière d’insatisfaction, sur laquelle nous sommes jugés tout autant que sur la
qualité de nos soins. Il est facile de s’en apercevoir en regardant les avis laissés par nos patients sur internet.
Les logiciels de gestion et de suivi à distance nous permettent une meilleure organisation dans la planification de nos soins. Mais ils offrent également la possibilité d’analyser beaucoup plus facilement notre fonctionnement grâce à l’édition de statistiques essentielles à la compréhension de notre activité.

POUR CONCLURE

Le digital a modifié en profondeur les attentes de nos patients quant au contrat de soin. Et si le soin reste l’enjeu majeur de notre prise en charge, il n’est plus le seul critère à prendre en compte pour continuer à exercer notre profession dans les meilleures conditions pour nos patients. Alors bien que le numérique continue de faire peur à certains, il apparait plutôt comme une solution évidente afin de remplir au mieux nos obligations de soins, de communication, et d’accueil, si nous l’utilisons tel qu’il a été conçu, c’est à dire un outil à notre service (et non l’inverse) avec toujours le même objectif : une meilleure prise en charge de nos patients.

 

 

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A propos de l'auteur

Dr. Nicolas BOISSI

Chirurgien-dentiste spécialiste qualifié en orthopédie dento-faciale
Ancien assistant hospitalo-universitaire
Pratique privée à La Ciotat

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