La dentisterie actuelle fait face à de grands bouleversements dans l’abord des patients. De nouvelles pratiques se mettent en place, notamment en raison du développement des nouvelles technologies. L’éducation thérapeutique propose des pistes pour un accompagnement et une implication du patient. Une bonne communication de la part du praticien et de l’assistante au fauteuil permet d’établir des relations de confiance, de gagner du temps et de réaliser les meilleurs traitements possibles au patient. Cela demande toutefois de développer des compétences psychopédagogiques et un vrai partenariat avec le patient dans une relation respectueuse : une vraie dentisterie moderne et humaniste.
Alors que le miroir et les supports papiers restent, bien entendu, toujours d’actualité, ajouter les outils supplémentaires d’aujourd’hui va vous permettre d’augmenter l’attention du patient, d’accroître ses connaissances dentaires tout en lui permettant d’être plus décontracté. Le changement vers plus de communication digitale et visuelle commence par des écrans en salle d’attente qui diffusent en boucle des informations sur les procédures dentaires. Ils permettent également de promouvoir des instructions pour une approche préventive des problèmes dentaires. L’objectif de cette communication est de sensibiliser le patient aux nouvelles possibilités offertes par l’évolution de la chirurgie dentaire. Nous en recommandons un contenu personnalisé.
Ceci dit, l’impact le plus important sur le patient reste la relation thérapeutique de personne à personne, lors de l’entretien qui aura lieu soit au fauteuil, soit au bureau. Une méthodologie en 3 étapes est impérativement à respecter : Écouter, Rassurer, Informer. Dans le cadre de cet article, nous nous intéresserons uniquement à la 3e étape : informer.
À ce titre, une fois réalisée l’anamnèse, il est essentiel d’utiliser la phase de diagnostic pour commencer à éduquer le nouveau patient. Malheureusement, encore trop de praticiens ne prennent pas assez de temps pour la phase de diagnostic. Or celle-ci, loin d’être du temps perdu, est un véritable investissement dans la relation avec le patient.
Aujourd’hui, il est essentiel à mes yeux, de transformer la phase d’examen au fauteuil en processus d’éducation du patient. Cela lui permettra de mieux comprendre la nécessité de réaliser le traitement proposé. Ce même processus éducationnel met les patients plus à l’aise avec vous. Cela vous rend qualifié à leurs yeux pour déceler leurs problèmes. Inconsciemment, cela leur donne l’image d’un professionnel d’un haut niveau de compétence et donc apte à les soigner.
Quand vous examinez de nouveaux patients, chaque étape du diagnostic devrait être couplée à une explication. La première étape est d’abord d’expliquer ce que l’on fait. Si par exemple vous établissez un bilan radio complet, expliquez qu’il est important d’avoir une vue d’ensemble des dents, de l’os de la mâchoire, des traitements de racines, des infections sous-jacentes invisibles à l’œil nu, etc. Cela permet au patient de comprendre comment est posé un diagnostic. Poursuivez ainsi quand vous utilisez des modèles ou quand vous réalisez un sondage parodontal !
Voilà mes recommandations (hors cas d’urgence) pour mettre en place cette nouvelle approche :
- après avoir installé le patient, demandez à votre assistante (si vous en avez une) de venir auprès de vous pour lui dicter vos notes
- ne commencez jamais par les dents ! Vérifiez la tête et le cou en cas d’inconfort ou d’anomalies musculaires, vérifiez les ganglions, expliquez que vous vous souciez de sa santé générale et que cela fait partie de l’examen de routine ; cela permet une approche plus douce, moins agressive de la bouche qui est une zone à fort pouvoir symbolique ; le patient aura vraiment le sentiment que vous vous occupez de lui
- faites ouvrir la bouche au patient et poursuivez par l’examen de la langue ; expliquez-lui que ceci est capital pour un bon examen dentaire
- palpez ensuite l’intérieur des joues : un examen exhaustif peut révéler toute douleur musculaire ; vous devez aussi palper les gencives pour déceler toute inflammation ou saignement que le simple toucher peut parfois causer
- continuez à expliquer ce que vous faites et rassurez le patient en disant que tout semble aller bien
À ce stade, faites part de vos observations à votre assistante en respectant des étapes bien précises :
1ère étape : description
Il s’agit de faire des observations dans un langage compréhensible pour le patient. Exemples : « tous les muscles semblent normaux, l’examen des ganglions est négatif, présence de saignements au niveau des gencives en haut à droite, etc. ».
Ce que vous faites là est simplement la construction d’un cas dans l’esprit du patient. Cependant, si elles sont exprimées seules, les affirmations précédentes peuvent entraîner la confusion. C’est pourquoi il faut compléter vos observations par une explication.
2e étape : explication
En effet, chacune de vos observations doit être suivie d’une courte explication. Ainsi : « Nous décelons quelques saignements au niveau des gencives. Ces saignements sont l’un des symptômes qui nous permettent d’analyser l’état de vos gencives et de l’os en dessous. Il se peut qu’il y ait des problèmes à ce niveau. C’est pourquoi nous devons effectuer un examen plus approfondi pour découvrir ce dont il s’agit. »
Ce faisant, vous avez capté l’attention du patient. Il est essentiel de parler comme eux et de faire de même lorsque vous dictez à votre assistante vos observations. Cela permet aux patients de saisir ce que vous dites. Il va de soi que lors de la transcription des informations sur le dossier, par l’assistante (ou vous-même) les codes dentaires ou les abréviations habituels sont utilisés !
À ce stade, assurez-vous de dire au patient qu’il s’agit de résultats préliminaires en attendant ceux des radios et des modèles d’étude. Si vous réalisez les modèles (comme nous le recommandons vivement), expliquez bien ce que vous faites. Vous donnez ainsi de la valeur à vos services. Vous lui montrez bien qu’il s’agit d’un examen complet. Plus tard, lors de la visite, quand vous ferez votre exposé sur le plan de traitement, votre autorité sera renforcée et vous serez véritablement perçu comme un expert. Je n’ai jamais vu un patient se plaindre d’un examen trop complet, ou que l’on s’occupe trop de lui.
3e étape : premier bilan rapide
L’étape suivante est de renseigner le patient sur l’état de sa bouche sans trop entrer dans les détails. Pensez que vous semez des graines. Vous ne cherchez pas encore à planifier le traitement à ce stade. De nombreux patients vous demanderont, dès cette première consultation, de leur donner le traitement complet ainsi que le montant que cela représentera. Soyez prudent. Ne vous engagez pas dans une conversation trop technique sur les traitements ou les tarifs. Il n’est jamais conseillé de présenter les tarifs au nouveau patient au premier rendez-vous.
Rôle de l’assistante
L’assistante joue un rôle, évidemment essentiel, dans ce processus. Ce rôle est double. Tout d’abord, renforcement positif de ce que dit le praticien. La plus grande proximité du patient avec l’assistante lui permet de jouer entièrement son rôle de confidente auprès de lui.
D’autre part, elle tient également une place cruciale lorsqu’une fois la consultation terminée avec le praticien, le patient lui pose toutes sortes de questions complémentaires sur le traitement. À nos yeux, l’assistante doit être à même de répondre à ces questions et de rassurer le patient. Enfin, elle pourra donner toutes les informations nécessaires sur le coût du traitement.
Utilisation des nouvelles technologies
Si vous possédez un équipement de haute technologie, prenez le temps d’expliquer de quoi il s’agit, pourquoi vous avez acquis cet équipement et quels bénéfices le patient pourra tirer de son utilisation. Ceci indique une grande qualité de soins alliée à des qualités humaines.
Ne pas donner d’explication sur le matériel hightech risque d’aboutir à l’effet inverse de celui souhaité ! N’oubliez pas que tout matériel médical, aux yeux du patient, est quelque chose de froid et souvent peu rassurant !
Internet
Aujourd’hui, l’utilisation d’Internet nous permet d’aller encore plus loin. Internet a connu une évolution notable avec la généralisation des forums et des réseaux sociaux. Depuis que les patients peuvent facilement échanger leurs impressions, les connaissances disponibles s’enrichissent de façon exponentielle. Dans le passé, les praticiens assuraient seuls la diffusion de cette information. Aujourd’hui, le rôle du praticien est plus de servir de filtre avec un savoir-faire professionnel et d’extraire parmi la masse d’information disponible celle qui lui paraît pertinente et utile au patient.
Aussi, n’hésitez pas au fauteuil même, à utiliser l’écran situé devant le patient ou au dessus de lui, pour les plafonniers (Luxima…), pour vous rendre sur des sites d’information sur les soins dentaires que vous aurez préalablement sélectionnés. L’usage d’Internet est automatiquement associé dans l’esprit des patients à un praticien à la pointe du progrès. Il va de soi, que si, comme nous le recommandons, vous possédez votre propre site, il est préconisé de le montrer au patient, où il peut y trouver les fiches d’information.
Caméra endobuccale et CD-Roms de communication
La caméra endobuccale est aujourd’hui un puissant outil de communication dans un cabinet dentaire. Elle offre une haute technologie pour une visualisation de la cavité buccale.
La caméra endobuccale et les CD-Roms de présentation au fauteuil peuvent tenir une grande part dans le travail de présentation du traitement au patient. La raison principale en est que l’impact visuel de la projection sur écran, fait de ces outils éducatifs, un moyen d’implication du patient dans le traitement. Les patients peuvent voir et comprendre pourquoi le praticien suggère son traitement. Le chirurgiendentiste peut facilement montrer où se situent les problèmes et expliquer, photos à l’appui, les bienfaits du traitement.
Dans pratiquement tous les cabinets qui possèdent ces 2 techniques, le taux d’acceptation des traitements a fortement augmenté. Pourquoi ? Parce que les patients sont devenus partie intégrante de la prise de décision du traitement. Ils ont l’opportunité de comprendre leurs problèmes, les bénéfices des solutions proposées. Ils peuvent même visualiser les résultats grâce à des clichés « avant/après » réalisés sur des cas similaires. Bien entendu, il faut impérativement s’assurer au préalable que les résultats présentés sont techniquement possibles.
Un autre avantage de ces 2 outils est qu’ils rendent la mise au point du traitement plus facile pour le praticien. Il n’a désormais plus besoin de faire de schémas expliquant aux patients leur état dentaire. La caméra et le CD-Rom agissent comme des outils éducatifs qui aident à surmonter les aspects négatifs. Dans ce registre, il existe également un outil discret alliant un scyalitique et une caméra haute définition disposée dans l’axe du faisceau et orientée vers la bouche du patient. Grâce à un système autofocus, elle est entièrement autonome quelle que soit la position de travail ce qui libère vos mains. Au delà de la communication avec votre patient, cet outil offre d’autres alternatives comme celle de filmer et enregistrer vos interventions pour vos communications scientifiques , vos échanges entre confrères ou avec votre prothésiste.
Une fois que les patients ont compris et pensent qu’un traitement est nécessaire, ils mettront celui-ci en balance avec l’argent, le temps et la gêne occasionnée. Quand, à leurs yeux, les aspects positifs surpassent ces aspects négatifs, les patients acceptent le traitement. C’est une excellente aide pour offrir une santé bucco-dentaire optimale.
D’autre part, n’oublions pas non plus que leur utilisation projette l’image d’un cabinet à la pointe du progrès. Ce qui n’est pas sans influence dans la décision du patient.
Pour chaque patient avec ses problèmes particuliers, il est utile d’employer la caméra intra-orale ainsi que le CD-Rom. Le chirurgien-dentiste peut désigner aux patients les parties concernées et cibler les problèmes. Alors qu’ils ne sont en aucune façon un élément de diagnostic ou de mise au point du traitement, ils jouent un rôle essentiel dans le processus d’éducation du patient sur sa santé bucco-dentaire.
Voir c’est croire
Les patients sont assis en salle de soins. Avant toute chose, le praticien (ou l’assistante) explique au patient ce que sont la caméra et le CD-Rom, pourquoi le cabinet les utilise et comment ils vont les aider à comprendre le traitement proposé. Enfin, il rassurera le patient en disant que son usage est parfaitement indolore.
Négliger cette information peut aboutir à une perception négative de cet outil !
Ensuite le chirurgien-dentiste effectuera un balayage de la bouche avec la caméra. Il expliquera alors tout ce qu’il y décèle. Il pourra montrer un agrandissement de la dent avec son problème. Une fois celle-ci sur le moniteur en couleur, le patient et vous-même pourrez discuter de l’amalgame existant, de sa taille, de ses infiltrations, de la fracture palatine, du rôle de la couronne et de ses bienfaits. Le patient aura alors toutes les cartes en main.
Ces 2 outils permettent ainsi l’application d’une notion majeure dans le domaine de la communication.
Conclusion
La technologie continuera à changer la manière dont nous pratiquons notre profession. La mise à jour facile d’accès, instantanée et l’information au patient dispensée de manière professionnelle amé- lioreront l’acceptation voire la planification du traitement. Cette éducation va des schémas explicatifs dans les magazines aux vidéos en salle d’attente en passant par l’usage d’Internet. Il est important de ne pas prendre de retard dans l’utilisation de ces outils. Ils nous permettent aujourd’hui, sans doute aucun, d’être plus performants dans les informations données à nos patients. Cependant aucun écran, aucun site web, aucun film, aucune photo ne remplacera jamais l’interaction personnelle avec eux.
C’est, en réalité, là, le vrai secret d’une communication réussie. Nous sommes encore indispensables.