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La greffe gingivale libre

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UN BON ALLIÉ EN IMPLANTOLOGIE ENCORE AUJOURD’HUI !

La greffe gingivale libre ou greffe épithélio conjonctive est souvent décriée pour son aspect inesthétique. Cependant, dans certaines situations elle reste la meilleure option thérapeutique pour garantir un apport de tissu kératinisé. au cours des 30 dernières années, de nombreux auteurs se sont attachés à déterminer si la présence de tissu kératinisé autour d’un implant était une condition nécessaire à la survie à long terme de nos réhabilitations implanto-portées. Nous ferons donc le point sur ces différentes études dans un premier temps, puis nous verrons dans quels cas nous avons recours à cette technique et comment nous la réalisons.

GENCIVE ET IMPLANTS
Depuis les études de Wenstrom sur les dents dans les années 80, qui ont montrées que la présence de tissu kératinisé autour d’une dent n’est pas nécessaire pour limiter les récessions gingivales avec un bon contrôle de plaque ; nombreux sont les auteurs qui ont voulu transposer ces concepts au domaine de l’implantologie. Souza et araujo en 2016 réalisent une étude sur 80 patients et 270 implants. Ils notent un inconfort au brossage augmenté autour des implants qui présentent une hauteur de moins de 2 mm de gencive kératinisée.
Zigdon en 2008 étudie les paramètres cliniques et immunologiques autour de 63 implants. Il conclut également que les implants avec une hauteur de tissu kératinisé supérieur à 1 mm ont moins de profondeur de poche et moins de récession de ceux qui en ont moins de 1mm. Cette étude a aussi étudié l’épaisseur de gencive.
Les implants avec plus de 1mm d’épaisseur de gencive présentait aussi moins de récession et moins de facteur inflammatoire au sein du fluide créviculaire.
Linkevicius s’est beaucoup intéressé à l’épaisseur des tissus mous péri-implantaires et à la relation entre la perte osseuse crestale et ce paramètre. dans une étude de 2015 sur 103 implants, il montre que le fait d’augmenter l’épaisseur des tissus mous autour des implants a tendance à limiter la résorption de l’os crestal.
Ladwein dans une analyse de 967 implants sur une durée de 15 ans confirme que la présence de tissu kératinisé autour des implants a une influence sur la santé gingivale peri-implantaire (présence de plaque et saignement), mais pas sur le niveau osseux. En d’autres termes, l’absence de tissu kératinisé favoriserait les mucosites sans pour autant favoriser les peri-implantites.
Roccuzo en 2016 dans une analyse rétrospective à 10 ans sur 98 patients montre que les patients édentés à la mandibule postérieure présentent beaucoup d’inconfort en l’absence de tissu kératinisé. La réalisation d’une greffe gingivale libre dans ces cas spécifiques permet au patient un meilleur accès au brossage.
dans notre pratique quotidienne, on préférera donc mettre en place des implants dans un environnement de tissu kératinisé. Pour garantir la présence de gencive, nous pouvons réaliser des aménagements avant, pendant ou après la mise en place des implants.
Comme nous l’avons vu avec les études de Linkevicius, l’épaisseur de gencive joue également un rôle important, c’est pourquoi les greffes de tissu conjonctifs sont désormais très fréquemment utilisées dans les réhabilitations antérieures.
Pour les secteurs postérieurs, la greffe gingivale libre semble être la solution qui apporte les meilleurs résultats en termes de gain de hauteur de tissu kératinisé et de maintien du niveau osseux marginal d’après la métaanalyse de Lin en 2013 lorsqu’elle est associée à un lambeau repositionné apicalement. Cette technique décrite depuis la fin des années 70 a l’avantage d’être très reproductible et relativement facile à réaliser. Souvent décriée pour son aspect inesthétique, elle trouve tout son intérêt dans les zones postérieures. avec le développement ces dernières années des guides chirurgicaux, la rapidité opératoire nous fait souvent oublier ce paramètre gingival.
On voit en effet trop souvent des réhabilitations implantoportées complètes avec une absence de vestibule qui empêche le patient d’avoir un bon accès à l’hygiène. De plus, la réalisation de techniques de régénérations osseuses guidées nous amène très souvent à tirer nos lambeaux fortement en coronaire pour fermer les sites opératoires.
La conséquence est là encore le déplacement de la ligne de jonction muco gingivale et la nécessité de réaliser un aménagement muco gingival pour avoir ces fameux 2 mm de tissu kératinisé autour de nos implants.
Nous allons donc voir trois cas cliniques différents : le premier où on a décidé de réaliser une greffe gingivale libre avant la mise en place des implants, le second où nous allons réaliser une greffe gingivale libre après la réalisation de la prothèse en raison d’une gêne constatée par le patient.
Enfin, dans un troisième cas, nous verrons qu’il peut être intéressant d’attendre entre l’extraction et la ROG pour éviter de déplacer la ligne de jonction muco gingivale.

GREFFE GINGIVALE PRÉ IMPLANTAIRE
une patiente de 64 ans est adressée pour une réhabilitation implantaire du secteur 4. a la dépose du bridge provisoire, on note une absence de gencive avec une ligne de jonction muco gingivale au sommet de la crête osseuse. Le bilan radiologique montre également l’impossibilité de mettre en place un implant en 44.
Il est décidé de réaliser d’abord une greffe gingivale libre.
Cette greffe est réalisée en trois temps. La réalisation d’un lambeau déplacé apicalement : une incision est effectuée au niveau de la ligne de jonction muco gingivale. un décollement en épaisseur partielle est réalisé avec des ciseaux de Metzenbaum pour éviter toute lésion du pédicule mentonnier. des points de suture apicaux avec du fil résorbable de diamètre 5/0 pour fixer notre lambeau au périoste. dans un deuxième temps, un greffon epithélio conjonctif est prélevé au palais. une plaque de protection palatine est tout de suite mise en place pour passer directement à la troisième étape sans s’occuper du saignement palatin.
Le greffon est suturé sur le site receveur avec du fil monofilament de diamètre 6/0. après 6 semaines de
cicatrisation, les implants sont mis en place en un temps chirurgical afin de déplacer encore la nouvelle ligne de jonction muco gingivale en apical. Le contrôle à 6 semaines montre la présence d’un bandeau de gencive de 2.5 mm en vestibulaire.
Le contrôle à 7 ans montre un chipping de céramique mais aucune inflammation ni récession de la gencive autour des implants. Si nous comparons l’image pré opératoire et la réévaluation à 7 ans, nous avons l’impression qu’une greffe osseuse a été réalisée mais c’est uniquement l’apport de gencive qui a comblé la perte vestibulaire.

Vue initiale

 

Après la dépose du bridge.

 

Vue occlusale après la dépose du bridge.

Vue occlusale de la greffe.

Vue latérale de la greffe.

Contrôle de greffe à 6 semaines.

Contrôle des implants à 6 semaines.

 

Réévaluation à 7 ans

 

GREFFE GINGIVALE LIBRE APRÈS LA RÉALISATION PROTHÉTIQUE
Une patiente de 54 ans est adressée par son dentiste en consultation. Il a mis en place deux implants 2 ans
auparavant et a réalisé les couronnes. depuis, la patiente se plaint de douleurs au brossage et a présenté deux « gonflements de la gencive » au cours des deux derniers mois. L’examen clinique met en évidence une légère suppuration au sondage et une absence de gencive en regard des deux implants. L’examen radiologique montre un début de perte osseuse autour des deux implants. Nous prenons la décision de réaliser un nettoyage de la surface des implants associé à une greffe gingivale libre pour approfondir le vestibule et permettre à la patiente de brosser plus facilement cette zone sans douleur. Là encore,
la technique se déroule en trois temps qui sont exactement les mêmes que ceux décrits précédemment. Le nettoyage de la surface des implants est effectué avec un aéropolisseur et une poudre constituée de micro-billes de glycine. a la dépose des sutures à 8 jours, on remarque une bonne vascularisation du greffon. au contrôle à 6 mois, on note que le greffon s’est très bien intégré et protège les implants. La patiente ne présente plus de douleur au brossage et n’a pas eu d’épisode d’infectieux depuis l’intervention.

Vue pré opératoire

Radio pré opératoire.

Réalisation de la greffe gingivale libre.

Résultat à 6 mois.

RÉALISATION D’UNE RÉGÉNÉRATION OSSEUSE GUIDÉE À DISTANCE DE L’EXTRACTION
Une patiente de 26 ans est adressée au cabinet pour remplacer la 24 qui présente une résorption externe.
L’examen clinique montre une récession importante ainsi qu’une perte osseuse vestibulaire empêchant la mise en place d’un implant le jour de l’extraction. Si on réalise la ROG le jour de l’extraction, on va déplacer coronairement la ligne de jonction muco gingivale pour recouvrir la membrane et perdre ainsi une grande quantité de gencive kératinisée. Nous avons donc choisi de réaliser une extraction simple avec la mise en place de collagène. A 4 semaines, nous avons réalisé une ROG et à 5 mois l’implant a été mis en place. après réalisation de la partie prothétique par notre consoeur, on remarque que l’implant est serti par de la gencive kératinisée mais également que les collets sont alignés. Ce cas clinique ; qui peut paraître
hors sujet par rapport à la greffe gingivale libre ; est mis ici pour montrer que malgré la réalisation d’une
régénération osseuse conséquente, sans réalisation de technique d’aménagement gingival, nous nous retrouvons avec la même quantité de tissu kératinisé avant et après le traitement. Certes, cette technique demande un peu plus de temps à une époque où les patients veulent tout tout de suite mais le résultat doit primer sur le temps de traitement.

Situation initiale.

Extraction de la dent, collagène, suture.

 

ROG

 

Contrôle à 5 mois

Contrôle à 1 an.

BIBLIOGRAPHIE

-Tomas Linkevicius , algirdas Puisys , Laura Linkeviciene , Vytaute Peciuliene , Markus Schlee Crestal Bone Stability around Implants with Horizontally Matching Connection after Soft Tissue Thickening:
A Prospective Clinical Trial Clin Implant dent relat res 2015 Jun;17(3):497-508.
-André B Souza , Mariana tormena , Flávia Matarazzo , Maurício G araújo. The influence of peri-implant keratinized mucosa on brushing discomfort and peri-implant tissue health Clin Oral Implants res 2016
Jun;27(6):650-5.
-Hadar Zigdon , Eli E Machtei. The dimensions of keratinized mucosa around implants affect clinical and immunological parameters Clin Oral Implants res 2008 apr;19(4):387-92.
-Catharina Ladwein, rainer Schmelzeisen, Katja Nelson, tabea Viktoria Fluegge, and tobias Fretwurst. Is the presence of keratinized mucosa associated with periimplant tissue health? A clinical cross-sectional
analysis Int J Implant dent. 2015 dec; 1(1): 11
-Roccuzzo M, Grasso G, dalmasso P. Keratinized mucosa around implants in partially edentulous posterior mandible: 10-year results of a prospective comparative study. Clin Oral Implants res 2016;27: 491– 496.
-Lin GH, Chan HL, Wang HL. The significance of keratinizedmucosa on implant health: a systematic review. J Periodontol 2013;84: 1755–1767.

 

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A propos de l'auteur

Dr. Rémi COLOMB

Ancien Assistant hospitalo-universitaire chargé d'enseignement

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