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Élévation du plancher sinusien par voie latérale

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La région postérieure du maxillaire présente un os de faible densité et subit une résorption osseuse post-extractionnelle parfois sévère. La maladie parodontale, les foyers infectieux péri-apicaux, combinés à la pneumatisation du sinus maxillaire laissent une crête osseuse alvéolaire qui interdit toute réhabilitation prothétique implanto-portée. L’os crestal sous-sinusien résiduel peut se résumer à une lamelle osseuse ultra-fine constituant la seule cloison entre le sinus et la cavité orale (Fig. 1, 2, 3).

schéma-du-maxillaire

Fig. 1 : schéma du maxillaire postérieur et de l’os résiduel sous le sinus après résorption Fig. 2 : radiographie d’une crête maxillaire résorbée Fig. 3 : os crestal réduit à une simple lamelle

D A Atwood, Carl Misch, puis Cawood et Howel ont proposé des classifications physiopathologiques des différents stades de résorption alvéolaire. Ils mettent en évidence des pertes osseuses horizontales et verticales [3].

Le rehaussement du plancher du sinus maxillaire, par un comblement osseux intra-sinusien est une technique chirurgicale, qui aujourd’hui est prédictible avec un protocole fiable et réalisable sous anesthésie locale.

Tatum et Boyne furent des précurseurs, ouvrant la voie d’une technique qui permet de poser des implants endo-osseux dans un volume osseux suffisant, recréé dans la cavité sinusienne en élevant son plancher [2].

Les techniques de Tatum et Summers augmentent la hauteur d’os sous la membrane sinusienne par compactage progressif d’un matériau de comblement avec des ostéotomes à partir de la crête alvéolaire.

Pour les comblements, différents matériaux sont utilisés, (os autogène, allogène, produits de synthèse, des verres et des sels…) avec des résultats variables.

Les autogreffes, (greffons osseux prélevés sur le patient au niveau d’un site donneur buccal ou extra-buccal) :

  • sites dans la cavité buccale : région du menton (symphysaire), région rétro molaires inférieures, ramique et autres, (de proximité)
  • sites en dehors de la cavité buccale : région pariétale, région iliaque et autres (tibiale, costale…).

Les allogreffes, (os humain de banque de donneurs vivants ou décédés) : DFDBA, FDBA, os lyophilisé, os iliaque congelé et irradié.

Les xénogreffes, (os d’origine animale : os de bovin, os porcin, corail) :

  • les matériaux allo-plastiques, d’origine non osseuse, la nacre, le plâtre de Paris, les céramiques de synthèse de phosphate de calcium : les hydroxyapatites, les phosphates tricalciques α et β, les céramiques semirésorbables
  • les matériaux dits composites (association d’un biomatériau avec un tissu naturel ou du collagène) : les copolymères de synthèse et les bio-verres.

Si la greffe autogène fait figure de référence par ses qualités, elle n’est pas sans danger et sans conséquence (morbidité liée au deuxième site opératoire donneur, limitation quantitative et quelquefois qualitative pour l’iliaque…). Pour le choix des greffons osseux autogènes de reconstruction, il est évident que la qualité d’intégration est influencée par leur origine topographique et donc par le mésenchyme embryonnaire et le mode d’ossification qui leur a donné naissance (B. Lengele, Bruxelles).

En ce qui concerne le comblement osseux intra-sinusien, il apparaît maintenant dans de très nombreuses études, que l’utilisation d’os d’origine animale, ou de biomatériaux, donne des résultats à long terme (en taux de survie des implants) aussi satisfaisants que l’os autogène (Valentini et Abensur, 2000) [10]. Et cela en association avec l’utilisation de membranes. (Wallace et Tarnow et al. en 2000 et 2005 ; Wallace et Froum en 2005 ; Del Fabbro et coll. en 2004 ; Wallace et coll. En 2009) [9, 12, 4].

Au préalable

Les contre-indications éliminées (médicales, celles des greffes en général et locales, ORL, CBS…), le diagnostic préalable qui a permis de poser l’indication d’élévation du plancher sinusien nécessite un bilan médical (général et ORL), radiologique (panoramique, scanner, RVG…), hématologique, clinique et prothétique (Fig. 4).

radiographies-panoramiques-et-scanner

Fig. 4 : radiographies panoramiques et scanner préopératoires

L’efficacité des biomatériaux dépend :

  • du volume à combler, (parois, alvéoles, sinus)
  • de l’âge du patient (potentiel de cicatrisation, qualité de l’os)
  • des contraintes mécaniques du site (secteur molaire, musculature…)
  • des conditions locales (vascularisation, asepsie…)
  • de la pathologie initiale (tissus sains, maladie parodontale, terrain médical…)
  • des exigences fonctionnelles et esthétiques.

La technique chirurgicale

L’accès à la paroi latérale du sinus maxillaire se fait par le soulèvement d’un lambeau muco-périosté, avec une incision crestale et deux incisions de décharges vestibulaires à distance du site de comblement (Fig. 5). Une fenêtre osseuse d’accès à la cavité sinusienne est pratiquée, (après avoir pris des mesures précises), à la fraise boule en tungstène, puis diamantée (Fig. 6). La chirurgie piézo-électrique, légèrement plus longue, mais plus sécurisante (moins de risque de lésion de la membrane de Schneider) permet cet accès osseux et le décollement de la muqueuse (Fig. 7). Le succès de l’intervention dépend essentiellement du respect de l’intégrité de la muqueuse sinusienne.

Le volet osseux peut être conservé et repoussé avec la muqueuse ou enlevé. Il est alors nécessaire de ménager une cavité osseuse de comblement dans le plancher du sinus en décollant la muqueuse de la paroi osseuse.

Avec des curettes à sinus adaptées ou des inserts à ultrasons spécifiques, elle est délicatement repoussée, en gardant toujours un contact osseux intime. Ce décollement se poursuit sur la paroi interne médiane du sinus et en hauteur jusqu’au niveau souhaité pour un comblement permettant une implantation. En respectant l’anatomie du sinus, sa ventilation (méat), ses cloisons, murs et septa (Fig. 8). Avant le comblement osseux, l’intégrité de la membrane de Schneider est contrôlée, par sa mobilité lors des inspirations et expirations du patient. Une membrane de collagène peut protéger la muqueuse et former le plafond de la cavité à combler (Fig. 9). Le comblement est réalisé sans compression excessive, le matériau est bien plaqué contre les parois osseuses. Une membrane à résorption lente vient fermer la fenêtre, avant la suture du lambeau (Fig. 12). Un contrôle radiologique permet de vérifier la qualité du comblement et son innocuité (Fig. 14).

Quand le cas est favorable, avec une hauteur osseuse de quelques millimètres (au moins 3 mm) et un os suffisamment dense, permettant une bonne stabilité primaire de l’implant, nous pouvons poser les implants dans le même temps chirurgical que le comblement intra-sinusien. (Gain de temps sur le traitement d’au moins 6 mois) (Fig. 10, 11, 12, 13).

decollement-du-volet-osseux

Fig. 5 : tracé d’incision pour accès à la paroi latérale du sinus Fig. 6 : ouverture de la fenêtre osseuse, avec un instrument piézoélectrique Fig. 7 : décollement du volet osseux, sans léser la muqueuse du sinus Fig. 8 : la membrane de Schneider est refoulée délicatement Fig. 9 : une membrane de collagène est placée en protection avant le comblement Fig. 10 : des implants seront posés dans le même temps chirurgical Fig. 11 : les implants posés, Camlog Screw-line, le comblement osseux au Bio-Oss est terminé Fig. 12 : une membrane à résorption lente recouvre la fenêtre Fig. 13 : la suture étanche et sans tension termine l’intervention Fig. 14 : scanner de contrôle à 6 mois

Cas clinique

Édentement 2ème prémolaire et molaires supérieures gauches, après extraction de 27. Comblement endo-sinusien et pose d’implants simultanée en 25, 26, 27 (Fig. 4).

Traitement

Un traitement antibiotique de 10 jours a été instauré la veille de l’intervention, un traitement anti-inflammatoire et antalgique est mis en place le jour de l’intervention, avec les conseils postopératoires de rigueur. Les implants seront posés 6 à 8 mois plus tard, suivant la cicatrisation.

Dans notre cas clinique : 6 à 8 mois après, la cicatrisation osseuse est contrôlée radiologiquement, et la prothèse réalisée. (Fig. 15, 16, 17, 18).

Complications

Per-opératoires : la perforation et la déchirure de la muqueuse qui interdisent de poursuivre l’intervention.

Seules les petites brèches qui peuvent être obturées de façon étanche et sûre avec une membrane de collagène, autorisent la suite de l’intervention (Proussaefs et coll., 2004) [8]. Sinon une cicatrisation de la muqueuse de 4 mois permettra une nouvelle chirurgie, (Jabbour, 2007) [6]. Les cloisons et septa difficilement contournables peuvent représenter une contre-indication anatomique, de même que la présence d’une grosse artère alvéolo-antrale, (risque hémorragique).

Post-opératoires : la surinfection aiguë locale et du sinus qui impose l’élimination du comblement et le drainage, (faute technique, faute d’asepsie, fuite du matériau, mauvaise indication). La surinfection chronique sera traitée par un ORL et peut entraîner de même un échec avec perte du comblement et des implants.

Intérêt de la technique

La technique du comblement osseux intra-sinusien par voie latérale offre une vision directe de la muqueuse sinusienne par un accès vestibulaire. Elle autorise de grands comblements osseux.

Lorsque la hauteur d’os sous-sinusien et sa qualité permettent une bonne stabilité primaire, les implants peuvent être posés immédiatement dans un axe favorable. Les matériaux utilisés aujourd’hui donnent des résultats très satisfaisants et le progrès des connaissances montre la bonne réactivité de la cicatrisation osseuse dans la technique d’élévation du plancher sinusien. Le matériau semble avoir moins d’importance ostéo-conductrice que de rôle de mainteneur d’espace sous la membrane de Schneider (Lambert, Lecloux, Rompen, 2008) [7]. La cicatrisation osseuse à partir des parois se comporte de façon similaire à celle d’une alvéole et l’ostéogenèse presque assurée quand la physiologie de ré-expansion du sinus est maintenue par la présence mécanique et physique du matériau.

(Empêchant la re-pneumatisation qui s’exercerait sur un caillot sanguin non soutenu). (Hass et coll., 1998 [1] ; Xu et coll., 2004) [13]).

vis-de-cicatrisation

Fig. 15 : vis de cicatrisation en place à 6 mois du comblement intra-sinusien Fig. 16 : RVG de contrôle Fig. 17 : cicatrisation gingivale Fig. 18 : les piliers d’empreintes Camlog avec leur capuchon de repositionnement Fig. 19 : pose de la prothèse définitive vue occlusale Fig. 20 : prothèse définitive et intégration parodontale

Conclusion

La technique de l’élévation du plancher sinusien afin d’augmenter ou de recréer le volume osseux implantable est aujourd’hui fiable, avec des taux de succès de survie des implants, élevés (Del Fabbro et coll., 2004 [4] ; Wallace et Froum, 2003 [11]). Le protocole est simple, réalisable en cabinet adapté et sous anesthésie locale. Grâce aux spécificités et qualités des implants aujourd’hui et aux biomatériaux, un second site chirurgical est évité et l’intervention plus rapide. Il n’y a pas de suite opératoire majeure, sauf de rares complications. Elle permet de répondre à toutes les situations cliniques, de l’édentement unitaire au remplacement d’un secteur latéral. Et enfin quand les conditions opératoires l’autorisent la pose des implants simultanément réduit considérablement le traitement.

Bibliographie

1. Haas R., Donath K., Fodinger M., Watzek G. Bovine hydroxyapatite for maxillary sinus grafting: comparative histomorphometric findings in sheep. Clin Oral Implants Res 1998;9(2):107-116

2. Boyne P.J., James R.A. Grafting of maxillary sinus floor autogenous marrow and bone. J Oral surg 1980;38(8):613-616

3. Cawood JL., Howell RA. A classification of the edentulous jaws. Int J Oral Maxillofac Surg 1988;17:232-236

4. Del Fabbro M., Testori T., Francetti L., Weinstein R. Systematic review of survival rates for implants placed in the grafted maxillary sinus. Int J Periodont Restor Dent 2004;24(6): 565-577

5. Fugazzotto PA, Vlassis J. Longterm success of sinus augmentation using various surgical approaches and grafting materials. Int J Oral Maxillofac Implants 1998;13:52-58

6. Jabbour M. Le rehaussement du plancher du sinus maxillaire. Le fil dentaire 2007 ;24 :30-33

7. Lambert F, Lecloux G, Rompen E. Augmentation osseuse sous sinusienne. Actualisation du Concept du Sinuslift. La Revue D’Odontostomatologie 2008 ;37 :3-17

8. Proussaefs P, Lozada J, Kim J, Rohrer MD. Repair of the Perforated Sinus Membrane with a Resorbable Collagen Membrane: A Human Study. Int J Oral Maxillofac Implants 2004;19:413-420

9. Tarnow D.P., Wallace S. S., Froum S.J., Rohrer M.D., Cho S.C. Histologic and clinical comparison of bilateral sinus floor elevations with and without barrier membrane placement in 12 patients: Part 3 of an ongoing prospective study. Int J Periodontics Restorat Dent 2000;20(2):117-125.

10. Valentini P., Abensur D., Wenz B., Peetz M., Schenk R. Sinus grafting with porous bone mineral (Bio-Oss) for implant placement: a 5-year study on 15 patients. Int J Periodontics Restorat Dent 2000;20(3):245-253

11. Wallace S. S., Froum S.J., Effect of maxillary sinus augmentation on the survival of endosseous dental implants. A systematic review. Ann Periodont 2003:8(1):328-343

12. Wallace S. S., Froum S.J., Cho S.C., Elian N., Monteiro D., Kim B.S. Sinus augmentation utilizing anorganic bovine bone (Bio-Oss) with absorbable and nonabsorbable membranes placed over the lateral window: histomorphometric and clinical analyses. Int J Peridontics restorat Dent 2005;25(6):551-559

13. Xu H., Shimizu Y., Asai S., Ooya K. Grafting of deproteinized bone particles inhibits bone resorption after maxillary sinus floor elevation. Clin Oral Implants Res 2004;15(1):126-133

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A propos de l'auteur

Dr. Jack NAHMIASH

Chirurgien Dentiste
DUI Bordeaux
DU Chirurgie pré-implantaire, Paris XI

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