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Implantologie non conventionnelle dans le but d’éviter une chirurgie invasive

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Cet article a pour but d’illustrer le traitement d’un cas particulier à l’aide d’un concept nouveau qui semble prometteur en implantologie. Ce nouveau concept constitue une rupture dans la manière de penser et de traiter en implantologie. Ce n’est pas la première fois que l’implantologie est l’objet d’une rupture épistémologique, qui fait que l’on brûle aujourd’hui les idoles auxquelles on croyait hier encore. En fait, pour les citer nous n’avons que l’embarras du choix, entre la croyance totale en la mise en nourrice, celle non moins intégrale de la nature indispensable des micro-pores dans les membranes en Teflon expansé servant à la régénération tissulaire guidée, l’impossibilité absolue de faire de la mise en charge immédiate ou la nécessité tout aussi prétendument radicale d’un substitut osseux pour réaliser une augmentation verticale de tissu osseux aux dépens du sinus maxillaire, par voie crestale ou latérale. D’autres encore ont leur place dans cette litanie que seul le manque de place nous empêche ici de mentionner.

I l est actuellement accepté, de manière implicite tellement cela semble inutile de le préciser, que seul le tissu osseux est qualifié à venir au contact d’un implant dentaire. Cela exclut tout tissu fibreux, dentinaire ou cémentaire. Cela signifie donc, qu’avant de placer un implant dans un site post-extractionnel, il est indispensable d’enlever tout résidu radiculaire. Cela signifie aussi qu’une dent ankylosée doit être totalement retirée au risque d’une chirurgie particulièrement invasive pour la table vestibulaire, laquelle est capitale pour le maintien de l’esthétique. Cela signifie encore que si une dent incluse ou un bout de racine se trouve sur le trajet d’un implant, il est indispensable de l’extraire à moins de recourir à une stratégie d’évitement en inclinant l’axe de l’implant en ce site.

Deux articles (Davarpanah et Szmukler-Moncler 2009 a, b) et un abstract de congrès (Szmukler-Moncler et Davarpanah 2009) parus en 2009 dans la littérature internationale suggèrent que cette règle n’est pas aussi rigoureuse qu’on l’aurait cru. Au travers d’une série de cas, la possibilité d’un contact entre implant et résidus radiculaires a été documentée, pour autant que les sites étaient libres d’inflammation. Le premier article (Davarpanah et Szmukler-Moncler 2009 a) fait état de 5 dents ankylosées qui n’ont pas été extraites avant de poser un implant. Les dents ont été forées au travers de leur racine en suivant une séquence classique de forage jusqu’au diamètre souhaité, comme si la racine était absente. Avant de procéder à l’insertion de l’implant, l’immobilité des restes radiculaires persistants fut vérifiée.

Les implants vinrent donc au contact de tissus osseux et radiculaire sans mettre en péril ni l’ostéointégration, ni la stabilité de l’interface mixte. Dans cette indication, l’article fait état d’un suivi de 1 à 4 ans sans aucun échec, aujourd’hui, il est de 3 à 6 ans.

Le second article (Davarpanah et Szmukler-Moncler 2009 b) s’appuie sur le même concept pour poser des implants au travers de dents incluses alors qu’elles se trouvent sur le trajet d’un implant à poser. Là aussi, les nombres de patients et d’implants sont limités, 7 implants pour 3 patients. Chez le premier patient, un implant court de 8,5 mm fut perdu au cours des 3 premiers mois et les canines incluses laissées au contact des implants furent extraites au bout de 6 mois afin de se conformer au dogme prévalent. Chez les 2 autres patients, l’article fait état d’un suivi de 4 et 2 ans, sans échec, il est aujourd’hui de 6 et 4 ans. La troisième publication (Szmukler-Moncler et Davarpanah 2009) concerne une troisième indication, celle de racines résiduelles.

Lorsque des racines résiduelles, « oubliées » lors d’une extraction, sont recouvertes par du tissu osseux et sont asymptomatiques, il ne semble pas indispensable de détourner le trajet de l’implant pour éviter ces restes radiculaires. La casuistique concerne 7 cas dont le suivi s’étale entre 10 mois et 5 ans, aujourd’hui 2 à 6 ans.

Certes, le nombre total de cas est relativement restreint mais il est suffisant pour nous permettre de penser à remettre en question le dogme auquel nous nous soumettions.

Le cas suivant montre une application de cette nouvelle approche.

Une jeune femme de 24 ans vient pour réhabiliter un site canin droit édenté (Fig. 1). L’examen clinique montre un effondrement de la paroi vestibulaire en regard de 13. L’anamnèse reconstitue l’historique du site édenté.

Au cours de son adolescence, une canine incluse fut diagnostiquée et extraite dans le but de poser un implant.

Malheureusement, la paroi vestibulaire s’effondra et une augmentation osseuse pré-implantaire se révéla indispensable (Fig. 2). L’examen scanner demandé révéla a posteriori la cause réelle de l’inclusion de la canine. En fait, la canine dans sa migration en direction de l’arcade avait rencontré la racine palatine de la 14 et cette interaction durant sa formation est probablement à l’origine de la déformation en direction mésiale (Fig. 1).

Avec le logiciel SIMPLANT, une simulation de pose d’un implant au niveau de la 13 est effectuée (Fig. 3).

Il s’avère que la racine palatine de la prémolaire adjacente se trouve sur le trajet de l’implant et qu’il n’y a pas moyen de l’éviter (Fig. 3c). Que proposer alors à la patiente ? Munis de notre expérience, une solution implantaire est alors proposée en 2 temps :

  1. recréer un volume osseux apte à recevoir un implant à l’aide d’une greffe ramique,
  2. poser l’implant au contact de la racine palatine.

La greffe ramique est effectuée en avril 2009.

Après 5 mois de cicatrisation, un implant Osseotite Ø 4 x 11,5 mm est posé au contact de la racine palatine courbée en direction mésiale (Fig. 4). Aucune douleur post-opératoire n’est à déplorer, à 4 mois l’implant asymptomatique est ostéointégré et la prothèse est en cours de réalisation. La patiente est bien entendu au courant du caractère exceptionnel de cette intervention car elle a signé un consentement éclairé, c’est la raison pour laquelle elle est sous contrôle tous les 3 mois durant la première année puis sous contrôle annuel. À un an, l’implant est asymptomatique, en fonction.

Sans cette expérience préalable du placement trans-radiculaire des implants, la voie implantaire chez cette jeune femme aurait été exclue. Quel traitement aurait pu être proposé à cette patiente dont les dents adjacentes à l’édentement de la 13 sont saines ? Un bridge réalisé aux dépens de 2 dents saines, une extraction invasive de la 14 pour poser 2 implants ?

Nous aurions pu demander la dévitalisation de la 14 mais là encore, notre expérience nous a montré que cela n’était pas absolument nécessaire. Cette alternative avait été gardée en réserve et en cas d’ultime nécessité.

Aujourd’hui, avec le recul de notre expérience actuelle, cette patiente aurait été traitée de manière différente.

Dés la fin de la croissance de la jeune fille, un implant aurait été posé, sans recourir à l’extraction invasive de la 13, ni à une greffe ramique. Une seule intervention au lieu de 3.

Bien entendu, ce cas est rare et extrême, mais il montre comment l’intégration d’un nouveau concept peut permettre de complètement changer notre stratégie de traitement.

Nous renvoyons les lecteurs aux cas plus classiques traités dans les articles publiés en 2009, comme celui de la figure 5.

situation-pré-opératoire

Fig. 1 : radiographie panoramique après extraction de la canine incluse. Sur la radiographie, il est difficile a priori de suspecter la présence d’une racine palatine courbée. L’agrandissement en médaillon montre une radiographie rétro-alvéolaire ultérieure où la racine palatine courbée est clairement identifiée Fig. 2 : vue occlusale du site lors de la greffe ramique ; la largeur de crête est insuffisante pour recevoir un implant Fig. 3 : simulation de pose d’un implant dans l’espace édenté a. mise en évidence de la nécessité d’une augmentation latérale ; l’implant simulé sort de l’enveloppe osseuse b. segmentation des dents et simulation de l’implant en 13 c. soustraction du tissu osseux autour des dents avec simulation de l’implant ; noter que la racine palatine courbée de la 14 se trouve sur le trajet de l’implant

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A propos de l'auteur

Dr. Serge SZMUKLER-MONCLER

Groupe de recherche de l’EID
Prof. ac. Université de Cagliari, Consultant Ettingen-Basel (CH)

Dr. Mithridade DAVARPANAH

Groupe de recherche de l’EID
Chef de Service de l’ORC (Oral Rehabilitation Center) de l’Hôpital Américain de Paris

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