Que vous soyez un bon ou un piètre manager en dentisterie, vous serez toujours confronté à des coéquipiers qui tireront, volontairement ou non, votre cabinet vers le bas. Vous devez donc être constamment attentif au comportement de votre équipe (employés et/ou associés) et ne jamais négliger aucun signe précurseur d’un éventuel dérèglement de votre politique de management
Mieux vaut prévenir que guérir
Lorsque les problèmes d’organisation ou de communication sont mis à jour, il est parfois trop tard pour trouver une solution en toute autonomie au cœur de vos ressources humaines. Préoccupé par la qualité de vos soins, vous avez parfois tendance à considérer que les problèmes humains se régleront d’eux-mêmes avec le temps : si c’est le cas, vous faites fausse route. Des performances techniques ou relationnelles moyennes, un comportement erratique, des états d’âme, des habitudes de travail qui persistent malgré vos multiples recadrages, des objectifs de réalisation qui sont différés, voire complètement oubliés : ce sont tout autant de signes avant-coureurs d’un dysfonctionnement qu’il ne faut pas prendre à la légère.
Les indicateurs clés d’un cabinet dentaire “malade”
1. Baisse de la productivité
Que les problèmes soient humains, conjoncturels ou matériels, ils auront toujours un impact direct ou indirect sur la capacité de production et immanquablement sur le rendement ou la rentabilité de l’exercice professionnel du praticien. Tous les chirurgiens-dentistes, en exercice individuel ou en groupe, sont en moyenne, par palier de 3 à 5 ans, confrontés à des problèmes d’organisation ou de gestion RH qui les obligent souvent à recourir à des prestataires de services (conférences, séminaires, coaching).
Les évolutions techniques et scientifiques bien plus fulgurantes en dentisterie que dans la plupart des autres secteurs d’activités médicales, obligent en effet les praticiens à réviser parfois de manière drastique leur mode d’organisation selon ces échéances. Et si l’obstacle n’a pas été identifié et levé à temps, l’équipe, au pied du mur, jette parfois l’éponge et attend de manière passive que la situation soit débloquée par le praticien-gérant, tel un deus ex machina. C’est aussi dans ces moments difficiles que le praticien est évalué quant à son niveau de leadership : s’il ne tire pas d’affaire le cabinet, il perd de manière parfois irrémédiable toute crédibilité au regard de son personnel et de ses collaborateurs. La situation s’avère parfois tellement critique que des solutions radicales doivent être envisagées telle la reconstitution d’une nouvelle équipe, initiée dans certains cas par le départ volontaire ou forcé d’un premier démissionnaire.
En somme, au moindre ralentissement de l’activité du cabinet, il faut identifier la source de la baisse de régime et y remédier avant que la situation n’empire. Certains praticiens se retrouvant en difficulté décident parfois de suivre un parcours de formation, sous la forme de séminaires de “développement organisationnel” : or, on décide de suivre une formation théorique uniquement lorsque tout va bien et que l’on souhaite progresser, non pas lorsque les problèmes sont déjà survenus. La stratégie est alors toute autre : il faut recourir à des prestations de conseil et de coaching. D’un point de vue RH, la réflexion est profitable en termes de prévention, mais lorsque l’action est de mise, il faut alors et surtout savoir prendre des risques et assumer jusqu’au bout les décisions prises. Prendre des risques calculés et assumer ses décisions coûte que coûte sont les qualités essentielles d’un chirurgien-dentiste leader et manager.
2. Déclin de la qualité
Chaque manager en dentisterie doit accorder à la qualité du travail assurée par ses coéquipiers une attention régulière et sans faille, quitte à privilégier les personnes plutôt que les “statistiques” du cabinet.
Quelques signes précurseurs du déclin probable de la Qualité de vos services :
- un retard dans la réalisation d’une tâche
- une accumulation d’erreurs techniques (quel que soit leur degré de gravité : le plus important étant la récurrence de l’événement)
- des oublis répétés (problèmes d’attention et de concentration)
- l’absence ou l’inefficacité de vos réunions de développement
- l’absence d’un cahier de protocoles (cliniques, administratifs, logistiques)
- l’inexistence d’un règlement intérieur du cabinet dentaire
Ces indices sont autant de symptômes des insuffisances professionnelles des gérants du cabinet en management stratégique ou opérationnel.
3. La cohésion de l’équipe en question
Qu’il s’agisse d’un praticien en exercice individuel avec une seule assistante dentaire polyvalente ou bien d’un cabinet de groupe, l’esprit d’équipe et surtout les intérêts du cabinet et des patients doivent être placés au-dessus des intérêts personnels.
Voici quelques exemples de dysfonctionnements humains qui doivent être rapidement identifiés avant qu’ils ne finissent par porter préjudice à la qualité globale des services du cabinet :
- l’un des membres de votre équipe est plus axé sur la préservation de ses acquis sociaux et salariaux que sur la réalisation de vos objectifs.
- l’un des membres du personnel a un taux d’absentéisme plus élevé que celui de ses collègues
- lorsque vous prenez une décision (correction, changement, recadrage), celle-ci semble être reçue systématiquement de manière négative par votre équipe ou par vos collaborateurs/associés. Vous ressentez de la désapprobation et de la rancœur envers vous et l’émanation de votre leadership et vous savez au fond de vous que les tâches seront effectuées à contrecœur.
- vous réalisez que l’entraide est inexistante et que l’autonomie intellectuelle de vos employés est déficiente. À chaque fois que l’un des coéquipiers rencontre une difficulté, celui-ci vous fait remonter directement l’information plutôt que de tenter de trouver une solution par la collaboration ou par la réflexion.
- en cours de réunion, il y a toujours quelqu’un qui pointe les failles de toute suggestion de développement en mettant un point d’honneur à décourager toute initiative personnelle ou collective (il peut s’agir d’un employé subalterne en opposition, mais aussi d’un praticien collaborateur ou associé).
- un ou plusieurs membres de l’équipe se disputent parfois ou constamment, en présence des patients ou du moins durant les heures d’ouverture du cabinet. Dans tous les cas, votre position doit être ici radicale : soit chacun d’entre eux reçoit une lettre d’avertissement les obligeant à mettre un terme immédiat à toute éventuelle querelle, soit vous faites intervenir un médiateur. Derrière toute querelle au sein d’un cabinet dentaire se cache toujours un problème important de management et d’organisation du travail.
Le remède aux maux organisationnels du cabinet
Le problème est du ressort des compétences techniques
Posez-vous donc la question de savoir si votre coéquipier a non seulement les compétences nécessaires et suffisantes pour assumer pleinement et en toute autonomie les fonctions qui lui ont été attribuées et si surtout il a un potentiel de développement tel qu’il pourra accompagner la progression du cabinet.
Vous devez dès lors identifier les faiblesses de chacun de vos coéquipiers en deux temps :
- Établir une fiche de poste détaillée (cf. “le guide de la charte de poste au cabinet dentaire”, par Rodolphe Cochet. Vous pouvez demander ce guide directement par email à info@rh-dentaire.com).
- Convoquer l’employé dans le cadre d’un entretien individuel durant ses heures de travail (éviter les fins de journée et privilégier cette typologie d’entretien juste avant la pause de midi, par exemple). À partir de la fiche de poste que l’employé aura lui-même complétée au préalable, demandez-lui ouvertement s’il est capable d’assurer la mission qui lui a été confiée. Complétez ou annotez aussi vous-même la fiche de poste (niveau de compétences techniques) à la main et demandez-lui ensuite de la mettre à jour. Dans un second temps, demandez-lui quels sont les moyens qui lui font défaut : moyens pédagogiques (besoin de formation), moyens humains (besoin d’aide, recrutement, heures supplémentaires) ou moyens matériels ?
En tant que Dentiste-Manager, vous devez vous assurer de manière régulière que votre assistante ou vos collaborateurs ont bien les qualifications, les connaissances et la formation (continue) requises afin de gérer tout nouveau projet dans votre cabinet. Si ce n’est pas le cas, il faut identifier leurs faiblesses et insuffisances et prendre les mesures adaptées pour assurer le développement de leurs compétences.
Le problème est du ressort des compétences comportementales
Il faut effectivement distinguer clairement la performance individuelle des problèmes personnels. Lorsque la situation au cabinet n’a pas encore atteint un niveau critique qui justifie le recours à un médiateur ou un coach, vous pouvez améliorer nettement l’ambiance de travail en adoptant le comportement qui convient et en appliquant les mesures correctives suivantes :
- Encouragez la coopération et l’entraide au sein de votre cabinet, et bannissez absolument tout esprit de compétition. L’esprit de compétition participe de l’émulation collective au sein d’une entreprise commerciale dans laquelle on fixe des objectifs de chiffres aux employés : il en va tout autrement au sein d’un cabinet médico-dentaire. L’esprit de compétition parfois entretenu de manière perverse par des praticiens maladroits et des coaches incompétents a conduit à la déconstruction/ destruction d’interrelations professionnelles saines et profitables au sein de plusieurs cabinets dentaires.
- Impliquez l’équipe dans tous vos projets, de leur définition jusqu’à leur réalisation
- Évitez le surcontrôle des tâches de travail (le surcontrôle se manifeste par une tendance quasi névrotique, significative d’une insuffisance professionnelle critique du dentiste-manager, à vérifier que le travail sera bien fait, ce, avant même que l’employé n’ait commencé à entamer la réalisation de la tâche concernée. Ces situations sont interprétées par le coéquipier comme un manque de confiance flagrant et sont suivies en général d’un désinvestissement personnel complet assorti d’une déresponsabilisation entamant fortement les performances individuelles).
- Si vous n’êtes pas un Leader né, ne cherchez pas à dominer l’autre en masquant vos faiblesses de commandement. Non seulement, on ne vous prendra pas au sérieux, pire, vous risquez de vous attirer le mépris de la part de votre équipe. Plutôt que de commettre des maladresses, prenez des cours de leadership (séminaires ou ateliers pratiques).
- Mettez en place un système, non pas de contrôle, mais d’évaluation des performances individuelles
- Prenez soin de récompenser vos employés de manière individuelle, mais aussi collective. Vous pouvez par exemple organiser un repas d’équipe au sein d’un grand restaurant ou envisager une sortie (activités de loisir). Évitez de convier les conjoints (sauf si celui-ci/ celle-ci a un contrat de travail au sein du cabinet) et ne confondez pas l’esprit d’équipe avec l’esprit de famille.