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DENTISTERIE 2.0 : LA SUPERPOSITION DES COUCHES

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Ces dernières années, nombreuses sont les communications (articles, conférences, webinar, etc.) portant sur un sujet de plus en plus présent dans les cabinets dentaires : le flux numérique. ce flux est cependant difficile à définir tant les applications sont nombreuses. Il est par exemple possible de parler de flux numérique en implantologie, lorsqu’une planification assistée par ordinateur est réalisée, débouchant ou non sur un guide chirurgical ; qui peut lui-même être un guide pilote simple ou un guide pour une chirurgie entièrement guidée (1).

De la même façon, lors de la réalisation de prothèses, le terme de flux numérique pourra être utilisé, allant de la simple réalisation d’une empreinte optique jusqu’à la réalisation d’un avatar virtuel complet incluant toutes les spécificités du patient à soigner(2).

Quel qu’en soit l’usage, ce flux tend a priori à se développer et trouver des applications de plus en plus étendues. Il est souvent comparé et opposé par ses utilisateurs au flux analogique/conventionnel qui semble devenir chaque jour plus désuet et présenter d’intérêt que l’apport des technologies rencontrées dans le flux numérique. Pourtant, ce flux analogique aujourd’hui en péril, repose sur des années de recul, d’expériences et de littératures scientifiques qui devraient fournir l’assurance d’un flux amené à persister dans le temps(3)(4)(5)(6) . Quelles sont alors les raisons de cette révolution à laquelle nous assistons actuellement en dentisterie ? Le flux analogique repose sur des techniques éprouvées, qui trouvent leurs applications dans de nombreuses indications lors de nos plans de traitement : différents types d’empreinte existent, chacune ayant leurs spécificités selon la restauration à réaliser(7)(8) (fig. 1).

Fig.1 : empreintes conventionnelles réalisées à l’aide de matériaux différents : polyéther, plâtre, silicone.

Il est également possible de capturer l’esthétique de différentes façons, de communiquer sur celle-ci avec différents outils que ce soit avec le patient ou le prothésiste (fig. 2) ; et la gestion de la fonction, qu’elle soit statique ou dynamique, se fait à travers des dispositifs dont le fonctionnement est connu et établi (9) , afin de garantir une bonne intégration dans la fonction des patients et des soins durables dans le temps (fig. 3).

Fig. 2 : gestion de l’esthétique en flux conventionnel : photographie, Smile Design,
Dithramax sont des exemples d’outils permettant de communiquer avec le patient et/ou transmettre les informations nécessaires au prothésiste.

Fig.3 : exemple d’outils utilisés dans la gestion de l’occlusion en flux conventionnel : l’arc facial et l’articulateur

 

 

 

 

 

 

 

Tous ces outils ont pour but de capturer les spécificités de nos patients et ont été développés pour palier à un élément crucial faisant défaut lors de l’élaboration de nos plans de traitements et la réalisation de restauration : il est tout simplement impossible dans une pratique conventionnelle d’avoir le patient assez longtemps à notre disposition, et en particulier à celle du prothésiste, pour réaliser directement en bouche des essayages afin de valider notre diagnostic et a fortiori de produire des restaurations prothétiques.

Si l’on considère en plus les conditions intrabuccales néfastes pour nos réalisations, on comprend alors pourquoi il est plus adapté d’effectuer tous ces enregistrements afin d’obtenir les données nécessaires et l’environnement adéquat pour nos diagnostics et réalisation prothétiques (fig. 4).

Fig. 4 : différence de substrat de travail entre Dentiste et Prothésiste : les outils utilisés pour la transmission des informations visent à retranscrire le plus fidèlement possible les informations du patient à réhabiliter

Le flux numérique est perçu comme attrayant par les technologies utilisées, souvent mise en avant par les commerciaux des différentes entreprises impliquées.

Il est admis que ces technologies sont effectivement impressionnantes lorsqu’on les compare au flux analogique : la possibilité de réaliser une empreinte en quelques minutes voire secondes, sans matériau désagréable pour le patient, sans déformation liée au matériau d’empreinte, au transport, à la coulée du plâtre (10) (fig. 5) ; la capture de l’esthétique par une visage en trois dimensions du patient (fig. 6), ou de la fonction par machines perfectionnées capturant directement les mouvements du patients, sans passer par un simulateur (fig. 7).

Fig. 5 : différence entre flux numérique et conventionnel en termes de prise d’empreinte et transmission au laboratoire.

Fig. 6 : gestion de l’esthétique en flux numérique : Scanner Facial 3D (Bellus3D).

 

 

 

 

 

Fig. 7 : gestion de l’occlusion en flux numérique : Capture de la cinématique
mandibulaire (Modjaw).

Prises individuellement, ces capacités nouvelles semblent déjà supérieures à celles obtenables en flux analogique. Elles présentent pourtant un manque de recul clinique et de protocoles établis par l’expérience des années éprouvées avec l’utilisation du flux analogique. Le flux numérique est donc prometteur mais nécessitera au praticien et au prothésiste de faire l’effort d’acquérir de nouvelles connaissances et compétences, adopter de nouveaux protocoles et adapter l’organisation du cabinet dentaire tel que nous le connaissons. cependant, le réel intérêt amené par le flux numérique, et la raison pour laquelle son adoption et application évoluent si rapidement ne réside pas uniquement dans les possibilités des outils le constituant, mais bien dans la capacité de superposer toutes les données de nos patients en un seul et même lieu : l’avatar virtuel (11) (fig. 8).

Fig. 8 : création d’un avatar virtuel, réunissant toutes les informations du patient à réhabiliter, permise par la superposition des couches.

C’est cette superposition des couches qui a par exemple aujourd’hui complètement changé la façon de planifier le positionnement des implants en implantologie. Là où les implants étaient planifiés sur des coupes radiologiques en deux dimensions, faisant figurer ou non, un projet prothétique (fig. 9), on planifie aujourd’hui ces positionnements implantaires en trois dimensions, en superposant les données osseuses, les données intra-buccales et le projet prothétique (12) (fig. 10).

Fig. 9 : planification implantaire en flux analogique : superposition de calque sur des
coupes issus d’une capture par CBCT

Fig. 10 : planification implantaire en flux numérique : superposition des couches entre situation intrabuccale actuelle, projet prothétique à réaliser et fichier DICOM
contenant les données radiologiques du patient.

 

 

 

 

 

 

Une fois ces positions déterminées, il sera ensuite possible de réaliser des guides chirurgicaux pour amener à la réalité cette planification. De façon assez similaire, nous sommes aujourd’hui capables superposer une situation donnée à un projet prothétique futur, permettant de visualiser la quantité de gingivectomie/ostéotomie nécessaire pour sa bonne réalisation, et concevoir des outils guidant le praticien lors de son geste (13) (fig. 11).

Fig. 11 : réalisation d’un guide de gingivectomie obéissant au projet prothétique final,
permise par la superposition des couches.

Plus simplement, cette superposition de couche va permettre d’établir des diagnostics et plan de traitement précis, d’envisager les possibilités thérapeutiques selon le résultat final visé : il est possible de prévisualiser si la proposition de wax up du prothésiste est réalisable lorsque superposée au reste des données du patient (fig. 12).

Fig. 12 : évaluation de la faisabilité thérapeutique d’un plan de traitement en superposant le projet prothétique à la situation actuelle

Cette capacité à superposer la proposition finale aux données initiales sera donc un atout majeur en termes de planification. mais elle trouve également son utilité dans nos réalisations prothétiques, elle permettra de guider précisément l’épaisseur de préparation nécessaire pour satisfaire au matériau de restauration (fig. 13), ou bien d’évaluer le maintien des tissus mous d’une prothèse complète à réaliser (fig. 14). Il sera possible de visualiser précisément l’impact de la fonction du patient sur nos réalisations prothétique, ou bien l’intégration dans l’esthétique du sourire en trois dimensions dans le but de garantir un résultat toujours plus prédictible.

Fig. 13 : création d’un guide de préparation à l’aide de la superposition des couches, guidant la réduction minimale nécessaire à la réalisation thérapeutique.

Fig. 14 : évaluation du maintien des tissus mous d’un futur projet prothétique, en
rapport avec le volume prothétique actuel.

 

 

 

 

 

 

 

Cette nouvelle ère annoncée par le flux numérique repose donc en effet sur des outils dont les applications et possibilités semblent repousser les capacités établies du flux analogique. ces nouveaux outils sont cependant amenés à évoluer et à se voir remplacer par des outils encore plus performants, au fur et à mesure des évolutions technologiques. mais la véritable révolution qu’amène ce nouveau flux réside dans cette capacité à superposer toutes les informations, dont nous avons l’habitude de capturer les détails, dans un même lieu et d’être à disposition du praticien et du prothésiste en corrélation avec le reste des données : on ne conçoit plus un projet prothétique esthétique qu’on fonctionnalisera dans l’articulateur, mais un plan de traitement prenant en compte l’esthétique, la biologie et la fonction simultanément. superposer toutes ces informations revient également à produire un véritable avatar virtuel de nos patients, s’approchant au maximum de l’idylle qu’est de travailler directement sur le patient : il est possible de réaliser des essayages, d’évaluer leur faisabilité biologique, et de visualiser les conséquences de celles-ci sur l’ensemble des constituants du sourire de notre patient. Enfin, cet ensemble de données, consultables au même endroit et de la même façon tant par le praticien que par le prothésiste, sera un atout majeur dans la communication.

BIBLIOGRAPHIE

1. Tahmaseb A, Wu V, Wismeijer D, Coucke W, Evans C. The accuracy of static computer-aided implant surgery: A systematic review and meta-analysis. Clin Oral Implants Res. 2018 Oct;29 Suppl 16:416-435. doi: 10.1111/clr.13346. PMID: 30328191.
2. Joda T, Zarone F, Ferrari M. The complete digital workflow in fixed prosthodontics: a systematic review. BMC Oral Health. 2017 Sep 19;17(1):124. doi: 10.1186/s12903-017-0415-0. PMID: 28927393; PMCID: PMC5606018.
3. Lo Russo L, Caradonna G, Biancardino M, De Lillo A, Troiano G, Guida L. Digital versus conventional workflow for the fabrication of multiunit fixed prostheses: A systematic review and meta-analysis of vertical marginal fit in controlled in vitro studies. J Prosthet Dent. 2019 Nov;122(5):435-440. doi: 10.1016/j.prosdent.2018.12.001. Epub 2019 Apr 23. PMID: 31027957.
4. Hasanzade M, Aminikhah M, Afrashtehfar KI, Alikhasi M. Marginal and internal adaptation of single crowns and fixed dental prostheses by using digital and conventional workflows: A systematic review and meta-analysis. J Prosthet Dent.
2021 Sep;126(3):360-368. doi: 10.1016/j.prosdent.2020.07.007. Epub 2020 Sep 12. PMID: 32928518.
5. Parize H, Dias Corpa Tardelli J, Bohner L, Sesma N, Muglia VA, Cândido Dos Reis A. Digital versus conventional workflow for the fabrication of physical casts for fixed prosthodontics: A systematic review of accuracy. J Prosthet Dent. 2021 Feb 4:S0022- 3913(20)30798-8. doi: 10.1016/j.prosdent.2020.12.008. Epub ahead of print. PMID: 33551140.
6. Gallardo YR, Bohner L, Tortamano P, Pigozzo MN, Laganá DC, Sesma N. Patient outcomes and procedure working time for digital versus conventional impressions: A systematic review. J Prosthet Dent. 2018 Feb;119(2):214-219. doi: 10.1016/j.prosdent.2017.07.007. Epub 2017 Sep 28. PMID: 28967407.
7. Jayaraman S, Singh BP, Ramanathan B, Pazhaniappan Pillai M, MacDonald L, Kirubakaran R. Final-impression techniques and materials for making complete and removable partial dentures. Cochrane Database Syst Rev. 2018 Apr 4;4(4):CD012256. doi: 10.1002/14651858.CD012256.pub2. PMID: 29617037; PMCID: PMC6494560.
8. Flügge T, van der Meer WJ, Gonzalez BG, Vach K, Wismeijer D, Wang P. The accuracy of different dental impression techniques for implant-supported dental prostheses: A systematic review and meta-analysis. Clin Oral Implants Res. 2018 Oct;29 Suppl 16:374-392. doi: 10.1111/clr.13273. PMID: 30328182.
9. Farias-Neto A, Dias AH, de Miranda BF, de Oliveira AR. Face-bow transfer in prosthodontics: a systematic review of the literature. J Oral Rehabil. 2013 Sep;40(9):686-92. doi: 10.1111/joor.12081. Epub 2013 Jul 8. PMID: 23829310.
10. Ahlholm P, Sipilä K, Vallittu P, Jakonen M, Kotiranta U. Digital Versus Conventional Impressions in Fixed Prosthodontics: A Review. J Prosthodont. 2018 Jan;27(1):35-41. doi: 10.1111/jopr.12527. Epub 2016 Aug 2. PMID: 27483210.
11. Joda T, Brägger U, Gallucci G. Systematic literature review of digital three- dimensional superimposition techniques to create virtual dental patients. Int J Oral Maxillofac Implants. 2015 Mar-Apr;30(2):330-7. doi: 10.11607/jomi.3852. PMID: 25830393.
12. Greenberg AM. Digital technologies for dental implant treatment planning and guided surgery. Oral Maxillofac Surg Clin North Am. 2015 May;27(2):319-40. doi: 10.1016/j.coms.2015.01.010. PMID: 25951962.
13. Liu X, Yu J, Zhou J, Tan J. A digitally guided dual technique for both gingival and bone resection during crown lengthening surgery. J Prosthet Dent. 2018 Mar;119(3):345-349. doi: 10.1016/j.prosdent.2017.04.018. Epub 2017 Jul 8. PMID: 28689907.

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A propos de l'auteur

Dr. Ahmed Rabiey

Exercice privé libéral
Diplôme Universitaire Clinique d'Implantologie Chirurgicale et Prothétique
Diplôme Universitaire d'Occlusodontie
Fonctionnelle

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Chirurgicale
et Prothétique
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