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MISE EN CHARGE IMMÉDIATE ET NUMÉRIQUE : QUELS OUTILS POUR QUEL PROTOCOLE ?

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Le traitement de l’édenté complet avec mise en charge immédiate requiert une planification prothético-implantaire rigoureuse ainsi qu’une parfaite communication au sein de l’équipe thérapeutique. Aujourd’hui, il existe de nombreux outils numériques ayant pour objectif d’optimiser les protocoles : lors de l’étude pré-implantaire, pendant la phase chirurgicale et dans les techniques de réalisation du provisoire. Qu’est-ce qui fonctionne vraiment ? Vous n’avez jamais manipulé ces outils ? Qu’est ce qui est facilement intégrable dans votre pratique ?

Ça y est, le numérique est enfin rentré dans nos cabinets : avec l’apparition de cette révolution, notre exercice se retrouve en perpétuel remaniement. L’intégration du « Work Flow » dans notre pratique va se répercuter dans toutes les disciplines (prothétique, restauratrice, orthodontique, endodontique, occlusale, chirurgicale …) et représente aujourd’hui un outil puissant pour simplifier nos protocoles en implantologie.

Du cas simple au cas complexe, l’impact de cette technologie va inévitablement engendrer une modification de nos méthodes de travail et notamment dans la gestion de cas d’édentés complets ou en voie d’édentement avec mise en charge immédiate.

Ces outils digitaux vont largement influencer les différentes phases de notre traitement et particulièrement les 3 grandes étapes du traitement d’un édenté complet :

  • L’étude pré-implantaire,
  • La chirurgie implantaire en elle-même,
  • La réalisation de la prothèse provisoire.

 

L’ÉTUDE PRÉ-IMPLANTAIRE

Classiquement, les 2 étapes indispensables à toutes études pré-implantaires sont la réalisation d’une empreinte numérique (Fichiers STL) (Fig. 1) et l’acquisition d’un Cone Beam (fichiers DICOM) (Fig. 2). Ces 2 premiers paramètres sont nécessaires pour permettre de superposer les données cliniques et radiographiques du patient (Fig. 3).

 

Figure 1 : empreinte optique (Fichiers au format STL).

Figure 2 : Cone beam (Fichiers au format DICOM).

Figure 3 : matching des fichiers STL et DICOM à l’aide de l’outil PDIP (Carestream).

Afin de satisfaire nos exigences de précision, la collecte des données doit être rigoureusement exécutée afin de fournir un minimum de 3 points remarquables permettant les « matching » ou corrélation des fichiers.

Dans certaines situations cliniques (présence d’artéfacts métalliques ou absence de repères dentaires), des repères radio-opaques peuvent venir faciliter cette étape. 

A ces 2 premiers éléments essentiels, viennent s’ajouter des étapes complémentaires. Tout d’abord, les « Smile Design » (Fig. 4) qui proposent, à partir de photos en 2D, des morphologies dentaires idéales issues de logiciels d’analyse du sourire basés sur un système d’intelligence artificielle. Néanmoins, la superposition de données 2D avec des fichiers 3D va générer des déformations entrainant une fiabilité insuffisante pour établir un projet prothétique assez précis mais constitue un excellent outil de communication et de validation avec le patient.

Figure 4 : exemple de « Smile design » réalisé avec l’application Smile+.

En revanche, les « Scan faciaux » (Fig. 5) réalisent une véritable numérisation en 3D du visage permettant après superposition avec la situation clinique initiale de pouvoir définir les plans de référence et apportent ainsi une aide précieuse à la modélisation du projet prothétique.

Cependant, à l’heure actuelle, les méthodes d’acquisition de ces « Face-Scan » engendrent également des déformations pouvant entrainer une source d’erreur lors du repositionnement de l’empreinte optique, mais les répercussions cliniques restent minimes.

Figure 5 : intégration de l’empreinte optique et du projet prothétique dans le « Face-scan » (Bellus 3D).

Nous dressons ici volontairement une liste non exhaustive des protocoles et technologies numériques disponibles pour récolter les données cliniques initiales, certains outils permettent d’atteindre un niveau de précision bien supérieurs (photogrammétrie, logiciels d’analyse dynamique…) mais ils restent difficilement accessibles au cabinet et encore très onéreux, notre objectif étant d’établir des protocoles facilement intégrables dans notre pratique quotidienne.

Cette collecte de données va donc aboutir à la reconstitution d’un « patient virtuel » à partir duquel le laboratoire de prothèse va pouvoir élaborer un projet prothétique. C’est ce Wax up numérique devra être validé virtuellement car il nous est souvent impossible de l’essayer et donc de le valider cliniquement. Ce projet va pouvoir être matché avec les données initiales du patient et plus spécifiquement confronté aux volumes osseux sous-jacents dans le but de valider notre planification implantaire et de déterminer si des aménagements osseux sont nécessaires.

En résumé, grâce à la CFAO, les possibilités d’études et de préparations pré-implantaires sont nombreuses, elles nous permettent de superposer la situation clinique de départ (Empreinte optique) avec les données radiographiques et donc osseuses sous-jacentes (CBCT) en intégrant les plans de référence du visage patient (Face-scan) dans le but d’élaborer et de matcher un projet prothétique qui guidera précisément notre planification implantaire.

LA CHIRURGIE IMPLANTAIRE

Mais cela ne s’arrête pas là, l’intérêt de toute cette démarche intellectuelle est de pouvoir transposer la position des futurs implants en bouche lors de l’intervention et ce au moyen d’un guide chirurgical.

Sans aucun doute, l’efficacité et les bénéfices de la chirurgie guidée ne sont plus à démontrer. Mais la « chirurgie guidée » est un vaste sujet sur lequel la littérature est plus qu’abondante, pouvant ainsi entrainer une source de confusion et de complexité dans le choix notre thérapeutique.

Pour simplifier notre approche nous retiendrons que : l

  • Le positionnement implantaire est plus précis en chirurgie « full guided », qu’en chirurgie « half guided » ou « pilote » qu’à main levée (TATTAN,méta-analyse de 2020) ;
  • L’appui dentaire est plus précis que l’appui osseux qui est également plus précis que l’appui muqueux (RAICO GALLARDO, méta-analyse de 2017), à condition que les appuis dentaires soient stables ;
  • La chirurgie guidée semblerait plus précise à la mandibule qu’au maxillaire car les corticales sont plus épaisses et offrent une meilleure résistance au couple de forage (MARLIÈRE, revue systématique de 2018) ;
  • L’utilisation de « vis de fixation » ou « clavettes » influence positivement la précision du positionnement implantaire (CASSETTA 2013(4) et TATTAN 2020).

 

A ces données scientifiquement avérées, il est nécessaire de confronter :

  • La situation clinique à traiter,
  • Les habitudes et l’expérience du praticien,
  • Les exigences et demandes du patient.

 

Pour toutes ces raisons, il n’existe pas de protocole de chirurgie guidée idéale dans le traitement de l’édenté complet mais différentes techniques opératoires qu’il faut savoir adapter en fonction des cas cliniques.

Afin d’organiser notre réflexion, nous pouvons tout de même distinguer 3 cas de figure en fonction de la complexité initiale du cas :

1. Les cas « simples » (Fig. 6) :

Lorsque les volumes osseux sont suffisants et qu’aucun aménagement n’est à prévoir typiquement les cas d’édentés complets porteurs de prothèse amovible. Nous pouvons alors avoir recours à des protocoles de chirurgie guidée simplifiés avec par exemple l’utilisation d’un guide pilote à appuis muqueux éventuellement stabilisé par des clavettes.

Figure 6 : implantation bi-maxillaire à l’aide de guides pilotes à appuis muqueux.

2. Les cas « intermédiaires »

Dans les cas plus spécifiques d’extraction implantation où suffisamment de dents fiables (non mobiles), n’interférant pas avec le positionnement des futurs implants, peuvent être conservées pour stabiliser le guide. La première étape du traitement consiste alors à extraire des dents stratégiques (validées en amont par l’étude pré-implantaire) pour pouvoir fixer sur les dents restantes un guide pilote ou full-guided éventuellement stabilisé par des clavettes. Parfois, ces dents sont maintenues en place jusqu’à la fin de l’intervention si elles constituent un repère dans le parcours d’acquisition de l’empreinte optique finale.

3. Les cas « complexes » (Fig. 7) :

Toute la complexité du traitement des patients en voie d’édentement complet réside dans la gestion des cas où aucune dent stratégique ne peut être conservée généralement pour cause de mobilité trop avancée ou d’interférence avec les implants (souvent rencontré dans les planifications d’implants angulés). La perte d’appuis dentaires stables rend le positionnement d’un guide conventionnel trop aléatoire, c’est pourquoi une nouvelle génération de « guides à étages » voit le jour depuis quelques années et permet de pallier ce risque.

Comme son nom le laisse entendre le « guide à étages » est constitué de plusieurs éléments :

  • Le guide « Base » à appuis muqueux ou osseux va être claveté en premier lieu puis laissé en place durant tout le déroulement de l’intervention. En effet, c’est sur cette base que les différents étages vont venir s’imbriquer grâce à des appuis vestibulaires et palatins. Ce guide sert donc de référence tout au long de la chirurgie, son bon positionnement est primordial et ne doit laisser aucune place à l’erreur sous peine de se répercuter sur toutes les étapes suivantes ;
  • Le guide « Gouttière » constitue uniquement une aide au positionnement du guide « Base » soit en créant une gouttière englobant les dents restantes, soit en préfigurant le futur projet prothétique pouvant alors être positionné en occlusion avec l’arcade antagoniste ;
  • Le guide de « Forage » vient également s’insérer sur la base pour guider le placement des implants souvent en technique full-guided ;
  • Enfin, le protocole de « guides à étages » offre la possibilité de réaliser un provisoire pré-chirurgical, c’est-à-dire un provisoire ajouré, imprimé en amont, voué à être assemblé en bouche sur le guide base pour être rebasé en technique directe.

Figure 7 : illustration d’un « guide à étages) comprenant un guide base, un guide gouttière, un guide de forage et un provisoire pré-chirurgical.

Par définition cette technique peut se montrer très attirante pour autant sa complexité n’en est pas moindre, elle requiert une maitrise parfaite du protocole chirurgical et implique une expérience capitale en chirurgie guidée.

En effet, il est important de rappeler qu’un manque de précision persiste dans tous nos protocoles de chirurgie guidée et plus particulièrement dans le traitement des édentés complets. Certains auteurs recommandent même de respecter une marge de sécurité d’au moins 2 mm dans tous les sens de l’espace pour pallier ce manque de précision (TAHMASEB, méta-analyse de 2020).

LA RÉALISATION DE LA PROTHÈSE PROVISOIRE

Le numérique apporte aussi un réel bénéfice dans la conception du bridge complet provisoire. Nous le savons, la mise en charge immédiate des implants va faciliter la réalisation des futures étapes prothétiques et permet de guider la cicatrisation gingivale.

A ce stade, deux grandes approches intégrant le numérique sont décrites :

  • Le rebasage en bouche d’un provisoire pré-chirurgicale imprimé en PMMA et évidé en regard des sorties de vis (Fig. 8). Cette technique nécessite de solidariser en fin d’intervention le bridge aux gaines provisoires vissées sur les piliers et demande un travail de finition minutieux pour obtenir un état de surface optimal. Grâce à la méthode des « guides à étages », ce temps opératoire est simplifié et notamment en facilitant le repositionnement du bridge grâce aux appuis présents sur le guide « Base ». Bien sûr, l’expérience et la satisfaction du patient sont toujours très élevées car ce dernier repart dès la fin de la chirurgie avec une restauration en place.

Figure 8 : illustration d’un provisoire pré-chirurgical : situation clinique initiale, rebasage en technique directe, situation finale (contrôle à 7 jours).

  • Différemment, une empreinte optique peut être prise en fin d’intervention à l’aide de scan body et transférer au prothésiste afin qu’il modélise et usine un provisoire fidèle au wax up numérique validé lors de l’étude pré-implantaire (Fig. 9). Cela implique de revoir le patient le soir-même pour procéder au vissage du bridge et peut nécessiter quelques retouches occlusales minimes. Cette approche comporte aussi de nombreux avantages en évitant l’injection de résine sur un site opératoire, elle supprime la phase d’ajustage et de polissage du provisoire et optimise l’état de surface final. Enfin, en cas de fracture de la restauration pendant la période d’ostéointégration un ré-usinage est alors rendu possible. La mise en œuvre et la réussite de ces deux différentes techniques sont opérateur-dépendantes si bien que la décision sera principalement orientée par les habitudes et les préférences du praticien.

Figure 9 : exemple d’empreinte optique réalisée en fin d’intervention, transférée au prothésiste (Design4me) pour modélisation d’un provisoire transvissé le soir-même.

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

1. TATTAN, Mustafa, CHAMBRONE, Leandro, GONZÁLEZ-MARTÍN, Oscar, et al. Static computer-aided, partially guided, and free-handed implant placement: A systematic review and meta-analysis of randomized controlled trials. Clinical Oral Implants Research, 2020, vol. 31, no 10, p. 889-916

2. RAICO GALLARDO, Yolanda Natali, DA SILVA-OLIVIO, Isabela Rodrigues Teixeira, MUKAI, Eduardo, et al. Accuracy comparison of guided surgery for dental implants according to the tissue of support: a systematic review and meta-analysis. Clinical Oral Implants Research, 2017, vol. 28, no 5, p. 602-612.

3. MARLIÈRE, Daniel Amaral Alves, DEMÉTRIO, Maurício Silva, PICININI, Leonardo Santos, et al. Accuracy of computer-guided surgery for dental implant placement in fully edentulous patients: A systematic review. European journal of dentistry, 2018, vol. 12, no 01, p. 153-160.

4. CASSETTA, M., DI MAMBRO, A., GIANSANTI, M., et al. The intrinsic error of a stereolithographic surgical template in implant guided surgery. International journal of oral and maxillofacial surgery, 2013, vol. 42, no 2, p. 264-275.

5. TAHMASEB, Ali, WU, Vivian, WISMEIJER, Daniel, et al. The accuracy of static computer-aided implant surgery: A systematic review and meta-analysis. Clinical Oral Implants Research, 2018, vol. 29, p. 416- 435.

 

 

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A propos de l'auteur

Dr. laurine birault

Praticien libéral, Nice
Exercice dédié à l’implantologie et la parodontologie
Formatrice « Génération Implant »


Adresse : 299 ch de la Calada

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