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VOLET OSSEUX : l’astuce parfaite pour des économies tissulaires en chirurgie orale

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INTRODUCTION
De nombreuses procédures de chirurgies orales, comme les extractions complexes, l’exérèse d’éléments iatrogènes / pathologiques / suspects, les explorations sinusiennes, les explantations, les chirurgies
d’explorations osseuses, etc., nécessitent la préparation d’une cavité d’accès osseuse pour une meilleure visibilité et dégager la structure visée. Cette cavité d’accès est bien souvent préparée après élévation d’un lambeau en pleine épaisseur avec un fraise boule chirurgicale. L’ostéotomie doit être suffisante pour permettre une bonne visibilité de l’opérateur, le passage des instruments, et le retrait de l’élément cible. un dégât osseux
parfois conséquent peut en résulter.
L’astuce du volet osseux permet de réduire la morbidité de cette cavité d’accès. En effet, cette approche a pour but d’ouvrir la cavité d’accès avec un volet qui pourra être réimplanté en fin de chirurgie, plutôt que de
détruire l ‘os avec une fraise. Ce tour de main a été initialement décrit par F Khoury, dans le cadre de résections apicales molaires mandibulaires sans pertes tissulaires vestibulaires (1). Le développement d’instruments rotatifs à disque (MicroSaw® Dentsply Sirona) ou encore le développement d’instruments de chirurgie piézoélectrique très fins (Ot12, Mectron®) permettent des ostéotomies graciles et la réalisation de volet osseux destiné à être repositionné une fois la chirurgie terminée.

INDICATIONS
Les indications de volets osseux sont multiples :

  • resection apicale molaire mandibulaire,
  • extraction de canine incluse, d’apex dentaire fracturé,
  • cystectomie,
  • antrostomie vestibulaire en cas d’aspergillose ou de corps étranger dans le sinus
    maxillaire,
  • explantation,
  • etc…

En revanche, elle n’est pas indiquée si l’os en vestibulaire de l’élément à retirer est extrêmement fin (quelques dixièmes de millimètres) ou absent.
Grâce à cette astuce chirurgicale, le caillot sanguin est mieux stabilisé et le volet osseux rapidement revascularisé. La cicatrisation osseuse et le maintien du volume osseux sont optimisés, tout en évitant une invagination des tissus mous provoqué par la compétition cellulaire (3,4,5,6,7).

AU TRAVERS DE DEUX EXEMPLES CLINIQUES

– Au maxillaire (cas présenté dans la vidéo)
En dentisterie quotidienne, il est fréquent que des corps étrangers puissent effracter le sinus maxillaire. Il peut s’agir d’un apex radiculaire lors d’une extraction complexe, d’un implant dentaire peu stable lors de la
pose combinée à un Summers, ou encore d’un germe de dent de sagesse. Nous verrons au travers de la vidéo ci-jointe, comment une fraise dentaire perdue par un confrère lors d’une séparation de racine, a pu être retirée
du sinus maxillaire, sans recourir à une méatotomie sous anesthésie générale.
Ici, le sinus présente une infection et de nombreux polypes. une communication bucco-sinusienne avec écoulement purulent est présente depuis 8 semaines. Pour éviter de détruire tout le capital osseux chez ce
patient en essayant de récupérer la fraise à travers la communication buccosinusienne, un volet osseux
est découpé avec un insert. Il est luxé avec la membrane sinusienne attenante permettant un bon accès visuel au sinus maxillaire infecté. Les polypes intrasinusiens sont curetés minutieusement sans endommager la membrane sinusienne, puis le corps étranger est retiré.
Le volet est repositionné grâce à des sutures résorbables monofilament (Monofast 5.0, Neohm), et le lambeau suturé hermétiquement sans tension après une incision périostée.

Après trois mois de cicatrisation, un sinus lift conventionnel a été réalisé. Cette chirurgie nous a permis d’apprécier la qualité de régénération du volet osseux. Le patient a été réadressé chez le praticien traitant pour la pose des implants.
Ce tour de main chirurgical du volet osseux nous a permis ici d’éviter une méatotomie sous anesthésie générale à notre patient et d’optimiser les volumes osseux en prévision de la chirurgie de sinus lift à suivre. (Fig. 0).

Figure 0 : volet osseux sur le mur facial du sinus.

A la mandibule : extraction délicate à proximité de structure anatomique.

Le plan de traitement pour cette situation clinique (fig. 1) est d’extraire la racine incluse, ankylosée de la prémolaire secteur III afin de pouvoir poser 3 implants dentaires en 34 35 36 avec les aménagements tissulaires nécessaires.

Figure 1 : ConeBeam et reconstruction 3D pré-opératoire, 34 incluse et proximité anatomique du nerf alvéolaire inférieur.

Une cavité d’accès conventionnelle à l’aide d’une fraise chirurgicale pour cette extraction aurait deux impacts :
– une perte tissulaire importante qui alourdirait la chirurgie d’implantation/augmentation
– une mise en danger du V3 et de ses émergences mentonnières par la fraise boule chirurgicale.

L’astuce du volet osseux a donc été réalisée ici.
L’intervention est réalisable sous anesthésie locale. Ici, elle a été combinée avec une sédation intraveineuse au
Midazolam. une prescription d’antibiothérapie prophylactique (2 gr. d’amoxicilline per os 1 heure avant l’intervention) est réalisée ainsi qu’une cure de corticoïdes de 3 jours (prednisolone 1mg/kg/jour) et un antalgique de palier I (paracétamol 1gr.)
une anesthésie locale en infiltration vestibulaire et linguale (articaïne 4 % et épinéphrine 1 :100000) est réalisée.
un lambeau mucopériosté de pleine épaisseur est récliné.
Nous réalisons 3 ostéotomies corticales, encadrant la 34 incluse, via le disque diamanté de la MicroSaw. une
alternative de choix eut été ici un système de piezochirurgie (Ot12, Mectron®).
Les ostéotomies se surcroisent en superficie pour se connecter en profondeur. (Fig. 2)

Figure 2 : ostéotomie mésiale, distale et basale.

Elles sont réalisées de façon convergente afin de faciliter la luxation puis la stabilisation du volet lors de son
repositionnement.
Du fait de la zone anatomique opérée, nous prenons une marge de sécurité de 2mm par rapport à l’émergence du nerf alvéolaire inférieur et de son trajet intra-osseux. De même, une distance de sécurité est ménagée en distal de la racine de 33. un carter présent sur le diamètre du disque permet de garder l’intégrité des tissus mous et des structures nobles du lambeau (ramifications mentonnières intra muqueuses du V3).
Le volet osseux est luxé à l’aide d’un fin ciseau à os et d’un maillet afin de créer une fracture en bois vert (fig. 3).

Figure 3 : volet osseux luxé avec le ciseau à os et le maillet.

Durant cette opération, la mâchoire du patient est maintenue.
Ici, le volet osseux initial n’a pas permis un accès complet à la racine incluse et d’autres volets sont réalisés selon le même protocole en ménageant le foramen mentonnier (fig. 4).

Figure 4 : Réalisation de 3 volets supplémentaires pour contourner l’émergence mentonnière, séparation et avulsion de la dent 34 sans lésion du V3.

La totalité de la dent incluse est extraite, une matrice collagénique est placée dans la cavité afin de stabiliser
le caillot sanguin et de faciliter le replacement des volets (fig. 5).

Figure 5 : mise en place d’une éponge collagénique (Parasorb®) et replacement des volets soutenus par l’éponge en collagène

Les volets sont maintenus en place uniquement par friction, sans aucune fixation complémentaire. Le lambeau
muco-périosté est refermé hermétiquement au fil 5.0 résorbable. (2,3) Les consignes postopératoires sont données et elle recommandent une alimentation molle pendant 6 semaine afin d’éviter toute fracture mandibulaire.
Après 3 mois de cicatrisation , un CBCT est réalisé et le site est de nouveau exposé (figs. 6 et 7).

Figure 6 : CBCT à 3 mois post-opératoire.

Figure 7 : situation osseuse à 3 mois postopératoire. Une grande partie de l’os vestibulaire a été conservée grâce à la méthode du volet osseux. Pose de 3 implants BLT Straumann en 34, 35 et 36.

On note une très belle revascularisation de tous les volets osseux et un dégât osseux très modéré grâce à l’emploi de cette technique.
Les implants peuvent alors être insérés et une augmentation osseuse latérale est réalisée simultanément . a l’aide de trépans (trephine Eject, Meisinger®), des carottes osseuses sont prélevées sur les sites implantaires lors de la préparation des lits implantaires. Puis elles sont stabilisées en vestibulaire des implants (Bone Level tapered, Straumann®) à l’aide de vis d’ostéosynthèses (Microscrew, Meisinger®) (fig.8). (8)

Figure 8 : carottes osseuses collectées lors des préparations implantaires et stabilisées avec des vis d’ostéosynthèse pour renforcer l’os vestibulaire (Microscrew, Meisinger®).

Après un temps de cicatrisation de 3 mois, les 3 implants sont mis en condition et le patient est réadressé chez le
dentiste traitant (Figs. 9 & 10).

Figure 9 : orthopantomogramme après mise en condition des implants.

Figure 10 : radio de contrôle à 6 mois.

CONCLUSION

Quelle que soit la situation clinique, l’économie tissulaire est un impératif à prendre en compte dans un plan de traitement.
La conservation des volumes osseux et tout particulièrement la corticale vestibulaire permet de réduire les interventions et l’importance des augmentations osseux conséquentes.
L’astuce du volet osseux prend alors parfois tout son sens, en limitant la morbidité de la cavité
d’accès par le repositionnement du volet en fin de chirurgie.

BBLIOGRAPHIE

1. Khoury F, Hensher R. the bony lid approach for the apical root resection of lower molars.
International Journal of Oral and Maxillofacial Surgery. avr 1987;16(2):166‑70.
2. Aliyev, T.; Efeoglu, B.F.; Rizaj, X.; Sahin, O. Removal of the residual root and implant therapy
simultaneously via bone lid approach. Niger. J. Clin. Pract. 2019, 22, 739–741
3. Sivolella S, Brunello G, Panda S, Schiavon L, Khoury F, Del Fabbro M. the Bone Lid technique in
Oral and Maxillofacial Surgery: a Scoping Review. JCM. 24 juin 2022;11(13):3667.
4. Khoury, F. the bony lid approach in pre-implant and implant surgery: a prospective study. Eur.
J. Oral Implantol. 2013, 6, 375–384.
5. Biglioli, F.; Chiapasco, M. an easy access to retrieve dental implants displaced into the
maxillary sinus: the bony window technique. Clin. Oral Implants Res. 2014, 25, 1344–1351.
6. Göçmen, G.; Varol, A.; Selçuk, B.; Göker, K. Extraoral Extraction of an Impacted Molar using
Bone Lid technique. Marmara dent. J. 2013, 1, 42–43.
7. Chiapasco, M.; Flora, A.; Serioli, L.; Zaniboni,
M. the removal of a deeply impacted lower third molar by means of the bone lid technique with
piezoelectric instruments. Ital. J. dent. Med. 2017, 2, 13–17.
8. Khoury F, Doliveux R. the Bone Core technique for the augmentation of Limited Bony defects:
Five-Year Prospective Study with a New Minimally Invasive technique. Int J Periodontics Restorative
dent. 2018 Mar/apr;38(2):199-207.
9. Hanser T, Doliveux R. MicroSaw and Piezosurgery in Harvesting Mandibular Bone Blocks from the
Retromolar Region: a Randomized Split-Mouth Prospective Clinical
t J Oral Maxillofac Implants. mars
018;33(2):36572.

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A propos de l'auteur

Dr. Romain DOLIVEUX

Chirurgie exclusive, Mulhouse, France
Spécialiste en chirurgie orale, Université de Münster Allemagne
Master of science in Implantology and dental surgery, Université de Münster, Allemagne
CES Biomatériaux, Université de Marseille, France
Ancien chef de service de la clinique Schloss Schellenstein (Prof. F Khoury), Olsberg, Allemagne

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