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Echecs implantaires : recours aux implants courts et ultra-courts, une alternative stratégique, fiable et peu invasive

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Depuis les travaux du Professeur Branemark, l’implantologie moderne basée sur des données scientifiques offre une option thérapeutique fiable à long terme. Il est communément admis que plus un implant est long plus son taux de succès est élevé à long terme. Ce postulat de la longueur est basé sur l’ancrage bi-cortical censé diminuer les contraintes sur l’os entourant les implants et permettant aussi d’obtenir un rapport Couronne /Implant favorable. La difficulté réside dans des situations critiques où le volume osseux verticale est insuffisant particulièrement dans les régions postérieures ou la pose d’implants longs est souvent limitée par des obstacles anatomiques : au maxillaire, avec la pneumatisation du sinus et à la mandibule, avec la proximité du nerf alvéolaire inférieur associée à la résorption post extractionnelle. Pour répondre à ces problèmes, un grand nombre de techniques chirurgicales ont été élaborées pour augmenter verticalement le volume osseux.

Augmentation verticale du volume osseux

A l’heure actuelle, l’augmentation du volume osseux est obtenue par des :

  • techniques de greffes osseuses (autogène ou exogène)
  • techniques de distraction osseuse
  • techniques de régénération osseuse guidée.régions postérieures

Ces techniques indépendamment de la réticence des patients (techniques invasives) à les accepter ne sont pas toujours fiables.

Selon Esposito M., il n’existe pas de différences significatives en termes de gain osseux en fonction des différentes techniques proposées sauf pour la distraction osseuse et le comblement sinusien.

Il en est de même pour Aghalloo TL. Cet auteur décrit un taux de survie implantaire de 97 % après augmentation verticale du volume osseux avec la distraction osseuse et un taux de survie implantaire de 92 à 98 % après augmentation verticale du volume osseux avec le comblement sinusien.

Selon Chiapasco M., le taux d’échec des implants est de 9 % après augmentation verticale du volume osseux à la mandibule avec de l’os calvarial, de 17.5 % après augmentation verticale du volume osseux à la mandibule avec de l’os iliaque et le taux d’échec des implants avec les greffons intra-oraux est de 8.5 à 20 %.

L’étude de Dhalin en 2010, étude rétrospective à 5 ans, signale que le gain osseux le plus élevé est obtenu avec une membrane non résorbable et une xénogreffe avec un taux de survie des implants de 97.5 % mais que le taux d’exposition de la membrane est important ce qui n’est pas le cas avec des membranes non résorbables mais dans ce cas, le taux de survie des implants est beaucoup moins élevé. Dans la technique de la régénération osseuse guidée utilisant des membranes non résorbables dans le processus d’augmentation de la crête alvéolaire verticale, de nombreux auteurs comme Rocchietta en 2008, mettent en évidence des résultats inconstants et ces résultats sont d’autant plus aléatoires avec l’utilisation de membranes non résorbables.

Implants courts et ultra-courts

Le plus grand nombre de complications biologiques et de douleurs, l’augmentation des coûts financiers et de la durée opératoire qu’induisent les différentes techniques décrites précédemment sont des facteurs négatifs. Les implants courts voire ultra-courts pourraient représenter une alternative fiable et peu invasive des traitements de rehaussement par greffes osseuses des mandibules résorbées (consensus European Association Osseointegration EAO 2015)

Des méta analyses ont été réalisées à partir d’études rétrospectives et prospectives.

Etude de Kotsovilis S. 2009.

  • Pas de différence significative entre le taux de survie des implants supérieurs à 10 mm et inférieurs à 8 mm.
  • Un implant court sablé et mordancé constitue une solution de remplacement aux implants longs pour remplacer une ou plusieurs dents.
  • Un implant de longueur de 8, 5 mm peut être considéré comme un implant court.

Etude de Telleman G. 2011 sur les implants courts.

Il s’agit d’une méta-analyse sur le pronostic des implants inférieurs à 10 mm en édentation partiel qui montre :

  • pas de différence entre les implants de 9,5 et de 6 mm _ pour les 5 mm, le taux d’échec est plus important
  • les implants avec surface rugueuse sont préférables, avec un taux de survie supérieur par rapport aux implants dont la surface est usinée.
  • le taux de survie des implants courts est égal à ceux de 8 mm.
  • le taux de réussite est supérieur à la mandibule qu’au maxillaire.

Etude de Atieh MA. 2012 sur des implants courts destinés aux édentements partiels postérieurs a été réalisée entre 1992 et 2011. Elle porte sur 2573 implants inférieurs à 8 mm, 59 implants ont été perdus dont 71% avant la mise en charge ce qui équivaut à un taux de survie 97,7% à 1 an. Cette étude a démontré que les implants courts sont une option viable.

Etude de Lai HC. 2013, rétrospective à 5-10 ans visant à évaluer à long terme les résultats cliniques et radiologiques d’implants unitaires dans les régions postérieures concluant qu’une couronne unitaire soutenue par un implant court est une modalité de traitement prévisible. Les sites d’os de type 4 doivent être traités avec prudence.

Etude de Bratu E. 2014 visant à évaluer l’association entre le diamètre et la perte de l’os marginal ainsi que le taux de survie pour des implants ultra-courts (étude clinique sur 2 ans). Cette étude de 2 ans a démontré que les implants ultra-courts sont une option viable pour certaines situations cliniques. Les implants ultra-courts avec des diamètres plus larges présentent moins de pertes osseuses marginales.

Etude de Hentschel A. 2016 est une étude de cohorte rétrospective avec 694 implants courts sur 416 patients visant à évaluer l’influence de la longueur sur la survie de ce dernier et la satisfaction des patients au cours de 24 premier mois de mise en charge. Les auteurs mettent en évidence que la longueur de l’implant n’a pas d’influence sur la survie de celui-ci.

Ces différentes études permettent de conclure :

  • l’implant court (longueur intra-osseuse égale à 8 mm) et ultra-court (longueur intra-osseuse égale ou inférieure à 6 mm) est une bonne solution de remplacement à l’implant long avec un taux de survie supérieur à la mandibule qu’au maxillaire;
  • l‘utilisation des implants courts et ultra-courts est une technique fiable pour des reconstructions prothétiques dans les zones postérieures mandibulaires ne faisant pas intervenir l’esthétique ;
  • le taux de survie des implants courts et ultra-courts au maxillaire est plus faible. Une grande prudence d’utilisation des implants courts et ultra-courts au niveau des zones postérieures maxillaires est indispensable ;
  • le rapport C/I ne semble pas représenter un facteur de risques biomécaniques. Le ratio racine-couronne ne s’applique pas sur les implants. La littérature montre qu’un rapport couronne/implant défavorable (supérieur à 1) n’a pas d’influence sur le taux de survie de l’implant et si le rapport est supérieur à 2, le taux de survie est de 94 % et la perte osseuse marginale n’est pas plus élevée ;
  • aucune relation n’est trouvée entre la largeur des tables occlusales et la résorption de l’os alvéolaire. La réduction de l’inclinaison de pentes cuspidiennes réduira le moment de flexion source de complications biomécaniques ;
  • le choix de solidariser ou non des implants est indépendant de la longueur des implants mais sous la dépendance du projet prothétique. L’utilisation de couronnes unitaires dans des situations d’édentement plural pose le problème de la gestion des points de contact entre les restaurations implanto-portées. Pour cette raison, il est préférable de relier une prothèse implantaire multiple sur implants courts ;
  • Les implants avec surface rugueuse sont préférables, avec un taux de survie supérieur par rapport aux implants dont la surface est usinée ;
  • Au maxillaire, une hauteur osseuse sous sinusienne de 6 mm permet d’envisager la mise en place d’un implant de 6 mm sans greffe osseuse. A la mandibule, il est nécessaire de respecter une marge de sécurité de 2 mm pour ne pas risquer de léser le nerf alvéolaire inférieur en conséquence une hauteur de 8 mm au-dessus du nerf alvéolaire inferieure est nécessaire et suffisante pour placer un implant ultra-court ;
  • Le positionnement de l’implant ultra-court de type cône morse se fera sous-crestal 0.5 à 1 mm ;
  • le diamètre des implants est important dès lors que la hauteur est réduite. Le diamètre doit être supérieur ou égal à 4,1 mm et pour certains auteurs supérieur ou égal à 4,5 mm. Toutefois, le choix du diamètre implantaire ne doit pas être corrélé à la longueur des implants mais au projet prothétique ;
  • l’utilisation d’implants courts ou ultra-courts nécessite une longue courbe d’apprentissage. Dans ce contexte, les implants courts voir ultra-courts seraient à l’heure actuelle une solution après un échec implantaire ayant entrainé une perte osseuse verticale et horizontale importante (péri-implantite) et ceci avant de perdre le capital osseux résiduel qui compromettrait un futur et nouveau traitement implantaire traditionnel.

Cas clinique 1

depose-de-la-prothese-d-usage

Fig. 1 : patiente âgée de 60 ans en bon état de santé général. Traitement d’une édentation unilatérale mandibulaire (remplacement 35-36) par deux implants Astra-Tech. Radiographie panoramique Novembre 2011 post prothétique Fig. 2 : radiographie de contrôle Juin 2015. A 4 ans, l’examen radiographique met en évidence une péri-implantite au niveau des 2 implants avec une perte de la moitié du support osseux. Fig. 3 : dépose de la prothèse d’usage et remise en place de piliers de cicatrisation sans aucun signe de mobilité des implants. Radiographiquement les défauts osseux ont une allure évasée en cuvette.

examen-Cone-Beam-revele-la-perte-osseuse

Fig. 4 & 5 : l’examen Cone Beam révèle la perte osseuse autour des implants et le capital osseux apical résiduel. Une dépose des implants dans de bonnes conditions nous permettrait après cicatrisation la mise en place d’implants ultra-courts en respectant une marge de sécurité de 2 mm pour ne pas risquer de léser le nerf alvéolaire inférieur. Le maintien des implants par un autre traitement pourrait entrainer une lyse osseuse apicale supplémentaire nous interdisant la mise en place d’implants selon un protocole classique simple et on devrait faire appel à des traitements de rehaussement par greffes osseuses. Fig. 6 & 7 : dépose des implants à l’aide d’un extracteur « tourne à gauche ». Une exérèse minutieuse du tissu de granulation doit être réalisée. Mise en place d’un matériau de comblement Bio-Oss dans les sites d’explantation. Fig. 8 & 9 : l’examen Cone Beam révèle à 3 mois une hauteur disponible de 8 mm autorisant la mise en place d’implants ultra-courts de 6 mm, marge de sécurité de 2 mm pour ne pas risquer de léser le nerf alvéolaire inférieur. Fig. 10 & 11 :mise en place de 3 implants Astra-Tech ultacourts en technique 1 temps. Contrôle radiographique mettant en évidence le respect des obstales anatomiques.

Controle-radiographique-post-prothetique

Fig. 12 & 13 :mise en place des piliers CFAO Atlantis et d’une prothèse provisoire à 3 mois de la chirurgie pendant un délai de 3 semaines. Fig. 14 & 15 :mise en place de la prohèse d’usage,la réduction des tables occlusales et des pentes cuspidiennes réduira le moment de flexion. Contrôle radiographique post prothétique Janvier 2017.

Cas clinique 2

Echecs-implantaires

Fig. 1 : patient âgé de 65 ans adressé en Janvier 2013 pour une mobilité d’une prothèse implantaire secteur mandibulaire droit avec comme signes cliniques des tissus parodontaux très inflammatoires. L’examen radiographique rétroalvéolaire décrit une situation particulière anarchique et chaotique. On constate de mésial à distal : 1. la fracture d’un taraud 2. un implant (implant 1) avec une perte osseuse marginale sur les premiers pas de spires. 3. un implant (implant 2) avec une perte osseuse en cuvette jusqu’à l’apex. 4. 2 implants distaux positionnés dans le même site en vestibulaire et en lingual.

examen-Cone-Beam-controle-radiographique-post-prothetique

Fig. 2 & 3 : examen Cone Beam : de gauche à droite, taraud fracturé, implant 1, implant 2, implants distaux. Fig. 4, 5 & 6 : dépose du taraud fracturé, de l’implant 1 et 2. On peut visualiser les implants distaux. Dépose de l’implant disto-vestibulaire, l’implant distolingual va être conservé et intégré dans notre future restauration prothétique. Nous verrons par la suite que la conservation de cet implant fut une erreur thérapeutique Fig. 7 & 8 :mise en place de 2 implants ultra-courts et d’un implant court en technique 1 temps ( implant Astra-Tech) Contrôle radiographique mettant en évidence le respect des obstales anatomiques Fig. 9 & 10 :mise en place de la prohèse d’usage scéllée sur piliers CFAO Atlantis. Contrôle radiographique post-prothétique Juin 2014. (prothèse réalisée par le Dr. MASSA Hala- Ollioules) Fig. 11 : contrôle radiographique post prothétique Décembre 2016. On peut constater l’abscence de perte osseuse au niveau des implants courts, l’implant distal présente un défaut osseux en cuvette, signe de péri-implantite, le maintien de cet implant a été un choix thérapeutique erroné qui nécessitera sa dépose, son remplacement n’étant pas indispensable.

Conclusion

L’implantologie est confrontée à des échecs implantaires biologiques entrainant une perte de tissu osseux, la gestion de ces échecs doit être réfléchie en prenant en considération la masse osseuse résiduelle. Le recours à des implants courts voire ultra- courts peut être une solution thérapeutique stratégique, fiable et peu invasive évitant ainsi de faire appel à des techniques d’augmentation osseuse verticale lourdes, douloureuses, onéreuses et difficiles à mettre en œuvre.

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A propos de l'auteur

Dr. Thierry BRINCAT

Chirurgie dentaire (Toulon)
Exercice exclusif en chirurgie et prothèse implantaires
Attestation d’études d’anatomie et techniques chirurgicales buccomaxillaires, Marseille
Diplôme de chirurgie et prothèse implantaires, Université Claude Bernard, Lyon
Trésorier du C.U.R.A.I.O

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