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Développer son exercice de chirurgien-dentiste en zone rurale

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En 1997, l’organisation en exercice individuel demeure « classique » pour le Dr Véronique Strub exerçant à Langeac, en Haute-Loire : une assistante dentaire polyvalente, une salle d’attente, un secrétariat, une salle de soins, une salle de stérilisation. Résolument attachée à la formation continue et à l’omnipratique, le Docteur Strub a toujours privilégié la qualité de ses services cliniques, administratifs, logistiques et relationnels. « Chirurgien-dentiste Manageure » avisée, elle a su saisir toutes les opportunités de développement de son cabinet dentaire et n’a strictement rien à envier aux praticiens des villes …

Le souci de la formation, le secret de la réussite

Je suis diplômée de la Faculté de Clermont-Ferrand en 1983, date à laquelle je passe également un CES de Groupe A (Cytologie et Histologie générales). En 1984, je reprends un cabinet rural dans l’Allier et les formations restent une priorité, bien avant la formation continue obligatoire (1985 : CES de Parodontologie, 1988 : CES d’Odontologie chirurgicale). Lassée de l’exercice en solitaire, j’ai l’opportunité en 1989 d’intégrer une SCP de 4 praticiens à Clermont-Ferrand, carrément visionnaire à l’époque. J’adresse de vifs remerciements à mes confrères et à leurs correspondants qui m’ont appris mon métier ! Attachée dans le service d’Infectiologie de l’Hôtel-Dieu, je passe en 1993 un Diplôme Inter-Universitaire d’Infectiologie puis en 1994 un DU de Dermatologie Vénérologie de la muqueuse buccale. En 1997, je quitte la ville pour privilégier la vie de famille à la campagne. Langeac est une petite ville rurale de Haute-Loire nichée dans les gorges de l’Allier, entre Clermont-Ferrand et le Puy en Velay.

La démarche qualité…

Dès 1999, je réalise que la notion de qualité devient incontournable ; la Faculté avec sa formation initiale déficitaire ne prépare pas à ces nombreux challenges : concilier ma vie de femme, de mère, avec celle de chirurgien-dentiste ; faire une dentisterie de qualité malgré des tarifs de soins ridicules ; financer toutes ces formations continues et ces produits high-tech qui font rêver ; rémunérer mon assistante et lui offrir de quoi s’épanouir… je réorganise complètement le cabinet. La démarche qualité proprement dite, initiée en 2007, n’est que la continuité de ce que nous avons débuté en 1999 : qui contacter en cas de panne du compresseur ? Que fait l’assistante pendant l’acte « composite » ? Après la lourdeur de départ, le management du cabinet et du personnel devient plaisant car les patients et toute l’équipe y trouvent du bénéfice. Cela demande à la fois de l’énergie, de la souplesse, de la rigueur, de l’enthousiasme… et surtout la capacité de transmettre cela à nos assistantes.

La gestion des ressources humaines appliquée à l’odontologie

Le concept de l’assistante dentaire polyvalente, ou les erreurs de jeunesse

L’organisation de la SCP à Clermont-Ferrand, la confrontation avec les services hospitaliers, m’ont confortée dans l’idée que c’est grâce à nos assistantes dentaires que nous avons l’opportunité de développer notre exercice. Frédérique, deuxième assistante dentaire, plutôt attachée aux services administratifs et relationnels du cabinet, vient compléter l’équipe tandis qu’une seconde salle de soins est installée. En 2007, Delphine, ma première assistante dentaire quitte le cabinet pour des raisons familiales. Frédérique exploite alors pleinement son rôle d’assistante au fauteuil à temps complet et Mylène intègre l’équipe en tant que secrétaire administrative et assistante de communication, tout en passant son diplôme d’assistante dentaire. Son rôle est plus de gérer l’accueil des patients, l’administratif et la pré-comptabilité ainsi que de développer nos outils de communication interne et externe.

Ce fameux degré d’incompétence du dentiste-manager

Après la désorganisation due au départ de Delphine, le recrutement de Mylène redynamise l’équipe, mais l’établissement des protocoles est ressenti comme une contrainte. La motivation s’essouffle. Je réalise mon manque de formation face à ces problèmes de management que rencontrent également mes confrères : si jusqu’à présent mes différentes équipes ont apparemment bien fonctionné, je suis incapable de dire pourquoi cela ne fonctionne plus… Je fais donc appel à un spécialiste en management et communication appliqués à l’odontologie. Mes « compétences managériales » sont évaluées, révélant un défaut flagrant de contrôle interne (ambiance de travail, leadership) aussi bien qu’externe (motivation du patient), une réelle difficulté à pointer un dysfonctionnement, à définir précisément objectifs, priorités, échéances de réalisation… Qualités et insuffisances sont objectivement pointées, m’indiquant de nouvelles perspectives d’évolution.

La spécialisation des postes de travail, le sens de l’excellence

Je choisis de rationaliser les postes pour optimiser les atouts de chacun. Mylène quitte le cabinet. Frédérique se consacrera aux soins, ce qui correspond bien à sa propension médico-sociale naturelle et à ses indéniables aptitudes cliniques. Je recherche donc une véritable assistante de direction, ayant une certaine autonomie, un sens pointu de la gestion et de l’organisation globale du cabinet : un défi pour le praticien qui se doit d’être précis dans ses directives.

Responsabilisées face à des tâches bien distinctes, mon aide opératoire et ma secrétaire de direction devront améliorer conjointement la qualité de nos services cliniques, administratifs et relationnels. Je devrai aussi assumer de manière professionnelle mes responsabilités de « manageure »… Bref, tout un programme, là aussi inconnu à la Fac, ne serait-ce que sous la forme d’une initiation en management stratégique.

L’organisation clinique aujourd’hui

Frédérique m’assiste intégralement au fauteuil, est responsable de la stérilisation, du conditionnement et du déconditionnement des salles de soins, avec l’optimisation de notre système de « tubs » et cassettes. Elle montre les techniques d’hygiène bucco-dentaire aux patients, est responsable de la gestion des stocks ; elle supervise également les travaux de notre prothésiste de Chadrac, à côté du Puy en Velay, avec lequel nous travaillons depuis plus de 10 ans. La cerise sur le gâteau sera la mise en place d’un vrai travail à 4 mains, ainsi qu’une meilleure organisation de la maintenance et de la prophylaxie.

L’organisation administrative aujourd’hui

Nathalie, assistante de direction, gère de main de maître le pôle administratif et relationnel du cabinet : accueil, gestion du planning, coordination des pôles clinique et administratif, présentation et conclusions d’ententes financières, rédaction et mise en page des documents internes et externes, pré-comptabilité, règlement inté- rieur, préparation et arbitrage de nos réunions… tout ce qui n’est pas du ressort des compétences exclusives de soins que je partage avec mon assistante clinique. La secrétaire de direction complète l’assistante clinique en apportant une sécurité administrative indéniable à l’équipe soignante ; 2 assistantes spécialisées à temps plein pour un omnipraticien en exercice individuel, voilà ce qu’il faut, à mon sens, pour répondre le plus sereinement possible aux exigences et aux besoins de nos patients.

Mon infrastructure aujourd’hui

120 m² en rez-de-jardin, avec parking et accès handicapés ; salle d’attente ; secrétariat « fermé » pour privilégier la confidentialité lors de la présentation d’un devis ; 1 salle de radio panoramique faisant également office de salle de réunion avec coin repas et vestiaire ; 2 salles de soins avec RVG, postes informatiques en réseau avec le secrétariat et la salle pano ; 1 salle dévolue au stock et rangement ; un CEREC, un laser… Je pense que les moyens humains, les équipements techniques et l’éventail des soins proposés répondent enfin aux attentes de mes patients. Pour un cabinet ne comportant qu’un praticien « productif », une femme qui plus est, c’est beaucoup d’investissement de ma part, mais aussi beaucoup d’amour et de soutien de la part du cercle familial.

Concevoir et anticiper le développement de son exercice en milieu rural

Langeac (petite ville de 4 000 habitants) est située à 45 mn de route du Puy en Velay, (magnifique ville d’art roman, étape sur le mythique Chemin de Saint-Jacques de Compostelle), à 1 heure de Clermont-Ferrand (ville universitaire et siège de Michelin), à 2 heures de Lyon. Peu d’industries sont présentes (Recticel – les matelas Bultex, entre autres – est le plus gros employeur de la région) mais elles résistent encore – pour combien de temps ? – à l’attrait des délocalisations; la région mérite d’être mieux connue, car la qualité de vie y est pré- servée au sein d’un environnement naturel somptueux. Nous avons la chance d’avoir des patients dotés d’un solide bon sens qui interdit l’esbroufe du « standing » : la déco de la salle d’attente peut être top, l’assistante attrayante, mais le reste doit suivre.

La démographie

Mon relevé SNIR 2010 est conforme à celui de la ré- gion Auvergne : 17 % de patients de moins de 16 ans (les caries diminuent chez les jeunes ?), 53 % d’adultes, 30 % de plus de 60 ans. Je soigne principalement des ruraux, mais apparaissent les jeunes retraités lassés de la ville et des tarifs immobiliers prohibitifs. « Ma » population CMU est de 6 % : les patients du Centre d’Aide aux Demandeurs d’Asile de Langeac sont parfois difficiles à gérer, mais nous avons aussi des patients fidèles qui sont devenus CMU par la force des choses… C’est là qu’interviennent la compétence et la fibre sociale éminemment appréciées de Nathalie, pour la gestion administrative de leur dossier.

Le cas de l’implantologie

Mon premier cas de prothèse sur implant date de 1994, je réalise mes propres cas chirurgicaux « simples » depuis 2007. Les besoins sont énormes, mais restent à lever les freins comme l’aspect financier, la peur de la chirurgie, la lourdeur du traitement… Malgré une politique de « fidélisation » inexistante, quelques correspondants (tiens, surtout des femmes, elles se reconnaîtront !) me font confiance pour les aider à gérer des problèmes parodontaux, occlusaux ou des cas implantaires, et j’en profite pour les en remercier encore aujourd’hui.

La dentisterie adhésive et esthétique, avec le CEREC entré au cabinet en 2009, connaît un beau succès, mais l’investissement est lourd et la courbe d’apprentissage fastidieuse. « Notre » laser vient juste d’arriver… Les projets pour le cabinet ne manquent pas, les évolutions sont bluffantes : quels rêves représentent la pano 3D ou le microscope !

Mon avenir professionnel

Le patient n’est, paraît-il, ni un client, ni un consommateur de soins… mais les évolutions sont si rapides que nous restons bien démunis pour l’aider à s’en rendre compte ! Au sein de la profession, les exercices sont disparates, l’individualisme est prépondérant, les voix manquent de puissance pour promouvoir l’exercice auquel nous sommes encore nombreux à croire. Optimisme et adaptation ont leurs limites : le moment est venu où, la mort dans l’âme, un certain nombre d’entre nous n’arrivent plus à concilier leur éthique personnelle avec les lois de notre pays ou celles de l’économie.

Bien sûr, je souhaite de tout mon cœur maintenir mon rôle de soignant la tête haute, rester actrice de l’économie de ma région ; pour moi cela passe inéluctablement par la qualité, l’organisation, la communication, la formation continue, quelle que soit la taille de nos structures. C’est aussi assumer mes fonctions de manager et anticiper. Que d’énergie pour tout cela ! Contrairement à l’air du temps, je n’attends pas la retraite avec impatience : j’entends vivre encore de belles heures avec mon équipe et mes patients. Notre exercice « libéral » est un leurre mais il nous reste une opportunité formidable : c’est d’abord dans notre tête – clin d’œil à mes amis ericksoniens ! – puis entre les murs de notre cabinet que ça se passe.

 

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A propos de l'auteur

Rodolphe COCHET

Fondateur de Dental RC : www.dental-rc.com (coaching managérial & accompagnement des équipes dentaires)
Chargé de cours* en organisation des cabinets dentaires à l'Université de Paris Odontologie (fusion Paris V & VII) et Évry

La philosophie de Dental RC : "Replacer l'humain au coeur de la gestion du cabinet dentaire et de l'environnement professionnel des chirurgiens-dentistes et orthodontistes"

Notre programme de coaching managérial

Fondateur des portails digitaux de la filière dentaire
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