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L’aiguille fait sa révolution

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Les aiguilles à usage dentaire proprement dit n’existent que depuis 50 ans environ. Elles sont fabriquées industriellement, conditionnées individuellement dans des protections en plastique, stérilisées. Si les conditionnements ont bien évolués, qu’en est-il de l’extrémité « travaillante ou piquante » qui angoisse le patient … et le praticien ? Réponse : aucune évolution ! L’étude et l’analyse physique et mécanique rigoureuse de l’extrémité « piquante » nous permet de diminuer la douleur générée par cette extrémité et de l’adapter plus spécifiquement aux différentes techniques pratiquées dans notre profession.

L’aiguille, en anesthésie dentaire, pouvait sembler être un élément relativement secondaire jusqu’à il y a quelques années ; seuls la longueur et le diamètre variaient. Il ne semblait pas évident que l’aiguille puisse participer directement au succès de l’anesthésie. Aujourd’hui, il apparaît que si l’aiguille, en intraligamentaire, ne pénètre pas suffisamment le ligament, cet état engendrera une fuite qui générera un échec.

En anesthésie transcorticale, si l’aiguille n’a pas un pouvoir de coupe suffisant la perforation sera réalisée dans de mauvaises conditions, voire impossible. En intraseptale ou en intraligamentaire la torsion d’une aiguille signe par avance un échec. En anesthésie loco-régionale, la déflection de l’aiguille lors de sa pénétration est un des facteurs d’échec bien connu.

Nos aiguilles, à usage unique, présentent toutes une embase en plastique ou métal qui sertit l’aiguille (la canule) pour fixer celle-ci sur l’embout fileté d’une seringue. Nous utilisons dans notre profession trois diamètres différents :

  • 30 centièmes, 30G
  • 40 centièmes, 27G
  • 50 centièmes, 25G

Ces différents diamètres sont déclinés en longueur différentes pour répondre à la fonction souhaitée.

  • 8 et 12 mm pour les intraseptales intraligamentaires
  • 21 mm pour les para-apicales.
  • 32 mm pour les tronculaires.

Analyse de l’extrémité « piquante et travaillante » de l’aiguille

Toutes les aiguilles actuelles présentent une extrémité formée par trois biseaux, inspirée de la pointe d’un crayon. Deux configurations sont possibles :

Un biseau principal auquel sont opposés deux biseaux secondaires, c’est la configuration «back cut» (Fig. 1). Ce biseau n’avait, à notre connaissance, qu’une seule application pour des aiguilles 40 centièmes / 8 mm destinées à injecter dans la perforation faite après l’usage du Stabident®. C’est pourquoi nous n’en parlerons plus.

biseau-de-l-aiguille

Un biseau principal sur lequel sont placés deux biseaux secondaires. C’est la configuration « lancette » que l’on retrouve sur la grande majorité de nos aiguilles (Fig. 2).

Si l’on regarde de plus près l’extrémité de l’aiguille on peut observer que les angles que l’on retrouve sur les parois de cette extrémité sont formés par l’intersection d’un plan et d’un cylindre, qui forment un angle qui varie très rapidement de zéro à 180° sur la longueur du biseau (il est à 90° au milieu du biseau) selon la courbe illustrée par le diagramme (Diagramme n°1).

Cette extrémité, lorsqu’elle pénètre dans les tissus, les écarte et crée des tensions qui peuvent aller jusqu’au déchirement du tissu, générateur de douleurs.

Le fait d’augmenter la longueur des biseaux ne fait qu’allonger la pointe de l’aiguille mais ne diminue en rien les tensions générées. Une aiguille qui est coupante pénètre dans le tissu en l’incisant, donc en libérant les tensions internes et en diminuant par conséquent la douleur.

aiguille-incisantePour réaliser une aiguille « incisante », il faut créer une arrête « coupante », qui est le résultat de l’intersection de deux plans. Il faut donc tailler dans l’épaisseur de la paroi de l’aiguille un second biseau opposé au premier, qui formera une arrête tranchante comme un bistouri (Fig. 3).

Si cette arrête tranchante libère les tensions lors de la pénétration, la charge nécessaire à sa pénétration dans le tissu doit être inférieure à celle nécessitée par une aiguille à biseau classique. Cette hypothèse se trouve confirmée par les deux diagrammes suivants (Diagrammes n°2 et n°3).

diagramme-aiguilleDiagramme 1 : Angle ω1 créé par le plan 1 et le cylindre. Diagramme 2 : Section aiguille par rapport à l’extrémité. Ce diagramme montre que le volume de métal ayant pénétré le tissu pour une même longueur de pénétration est toujours plus faible pour l’aiguille à double biseau. Diagramme 3 : Pénétration force 30G needles. Le diagramme montre que la charge nécessaire à la pénétration de l’aiguille à double biseau est toujours inférieure (environ 10%) à celle ayant le biseau classique. Il est le résultat d’une étude faite sur une machine spéciale permettant de comparer les charges nécessaires à la pénétration des deux aiguilles à biseau différents, au diamètre identique, dans un même matériau, sous une même incidence.

Différentes fonctions des aiguilles dentaires

On peut classer les aiguilles dentaires en plusieurs familles :

  • les aiguilles pour anesthésie para-apicale (infiltration)
  • les aiguilles pour anesthésie intraseptale ou intraligamentaire
  • les aiguilles pour anesthésie transcorticale
  • les aiguilles pour anesthésie ostéocentrale
  • les aiguilles pour anesthésies tronculaires

Caractéristiques nécessaires

caracteristique-de-l-aiguilleL’aiguille pour anesthésie para-apicale (Fig. 4) doit être la moins douloureuse possible et adaptée aux patients (enfant ou adulte). Elle aura donc pour caractéristique d’être réalisée dans un diamètre de 30 centièmes, 30G, avec le biseau le plus performant et le moins douloureux : le double-biseau. Elle sera déclinée en deux longueurs : 15 mm pour l’enfant et 21 mm pour l’adulte. L’embase de l’aiguille est marquée par un repère qui permet de positionner l’aiguille correctement sur la muqueuse1.

L’aiguille pour anesthésie intraligamentaire et intraseptale (Fig. 5) doit être rigide pour ne pas se tordre, et du plus faible diamètre possible pour pouvoir pénétrer dans le ligament. De plus, son extrémité « travaillante » doit être la plus fine possible pour pouvoir pénétrer le plus loin possible dans le ligament afin d’éviter les fuites, premier souci en anesthésie intraligamentaire.

Cette aiguille sera donc d’un diamètre de 30 centièmes, 30 G, avec le double biseau le plus aigu possible qui donne à son extrémité une forme de lame coupante. Sa longueur sera de 9 mm, pour la rendre plus rigide. L’embase de l’aiguille est marquée d’un repère qui permet de positionner correctement l’aiguille pour sa pénétration optimale dans le ligament. De même, ce repère permet de positionner l’aiguille correctement lors de la réalisation de l’anesthésie en muqueuse attachée.

L’aiguille pour anesthésie transcorticale (Fig. 6) doit être capable de forer une corticale sans se fracturer. Elle doit donc être suffisamment solide avec un minimum de souplesse. Son extrémité doit se déformer le moins possible lorsqu’elle travaille.

Au double-biseau initial, le moins traumatisant pour les tissus, est ajouté un troisième biseau qui donne à l’extrémité de l’aiguille une forme de lame à deux arêtes qui taille l’os lors de la mise en rotation de l’aiguille. Cette aiguille, réalisée dans un diamètre de 40 centièmes, 27 G, a une longueur de 13 mm. L’embase de l’aiguille possède un repère qui permet de positionner l’aiguille correctement lors de la réalisation de l’anesthésie en muqueuse attachée.

L’aiguille pour l’anesthésie ostéocentrale (Fig. 7) doit être fine et longue pour pénétrer facilement dans les espaces interdentaires et avoir une capacité pour tailler l’os lors de sa mise en rotation. Elle a donc un diamètre de 30 centièmes, 30 G, et une longueur de 16 mm. Son double-biseau lui permet de perforer facilement les trabéculations qu’elle traverse lors de sa pénétration. Un repère de biseau sur l’embase permet de positionner correctement l’aiguille lors de la réalisation de l’anesthésie de la papille.

L’aiguille pour l’anesthésie tronculaire (Fig. 8) doit avoir pour caractéristique principale de ne pas se courber lors de la traversée des tissus jusqu’à l’épine de Spix. Elle est donc réalisée dans un diamètre de 50 centièmes, 25G, à paroi épaisse pour la rendre plus rigide. De plus, le double biseau sera réalisé de façon plus équilibrée, pour que les forces agissant sur ses deux faces soient presque égales pour éviter la déflection. Elle est réalisée dans la longueur classique de 32 mm, avec sur l’embase un repère de biseau permettant de positionner correctement l’aiguille lors de sa pénétration dans les tissus.

Conclusion

Il apparaît clairement qu’une aiguille n’est pas un instrument quelconque que l’on utilise pour transporter un anesthésique. Sa pointe, qui est l’objet de toutes les craintes pour nos patients et d’angoisse pour les praticiens, est devenue « constitutionnellement » moins douloureuse. D’autre part, son extrémité « travaillante » est adaptée à chacune de ses différentes applications. L’aiguille est donc maintenant un outil spécifique, que l’on choisit, en fonction de la technique envisagée, ce qui lui permet de participer directement au succès de l’anesthésie.

Bibliographie

1. Sixou J.-L., Du bon usage du biseau de l’aiguille lors de l’anesthésie chez l’enfant (et l’adulte), ID n° 37, 1/11/2006

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A propos de l'auteur

Dr. Alain VILLETTE

Docteur en Sciences Odontologiques

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