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L’expression de nos céramistes artistes : situations à forte demande esthétique (CFAO semi directe et indirecte)

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L’automatisation des techniques prothétiques apportée par les systèmes assistés par ordinateur a bouleversé l’activité de nos techniciens de laboratoire. Les étapes conventionnelles fastidieuses sont peu à peu remplacées par une systématisation des protocoles par informatisation des étapes1.

Le gain obtenu par ces techniques de Conception Fabrication Assistées par Ordinateur (CFAO) permet à nos laboratoires de libérer plus de temps pour des restaurations plus complexes qui ne peuvent se passer de l’intervention d’un céramiste « artiste ».

CFAO Directe et limites

En CFAO directe, toutes les étapes sont réalisées au cabinet dentaire. Après obtention de l’empreinte par scannage optique intra oral, un fichier informatique est obtenu2 – 4. Les étapes de modélisation sont réalisées informatiquement par le chirurgien-dentiste. Le détourage est défini par tracé des limites de préparation, celles-ci sont validées directement par le praticien. Les risques d’erreur sont ainsi réduits, les variations d’interprétation limitées. La conception et la modélisation prothétique sont ensuite réalisées à partir d’une base de données modifiable, qui permet au praticien de visualiser facilement la forme et les volumes de la restauration à intégrer. Cette technique est avantageuse sur de nombreux points, elle amène notamment le laboratoire de prothèse au cabinet en une séance unique. Dans les cas simples, la conception de la prothèse et la réalisation d’un maquillage de surface par le praticien peuvent s’avérer suffisantes pour obtenir une intégration esthétique acceptable. Mais dans les situations plus exigeantes, en particulier dans les secteurs antérieurs, il est difficile de s’affranchir d’une technique par stratification pour obtenir les effets désirés. Cette dernière est beaucoup plus complexe qu’une caractérisation en surface. En effet, la bonne manipulation des masses de poudre de céramique demande une courbe d’apprentissage conséquente et nécessite d’importantes compétences. Il est donc parfois indispensable de faire appel à l’habileté du technicien en permettant au céramiste d’exprimer tout son talent.

Dans ce but, une coopération s’est développé entre les laboratoires de prothèses et des centres d’usinages où la modélisation des armatures et leur fabrication est réalisée, avant d’être retourné au laboratoire de prothèse pour céramisation.

L’expression des céramistes artistes

Dans les cas où l’exigence esthétique est élevée, le céramiste artiste va faire appel à toute son habileté pour tendre vers un mimétisme le plus proche du naturel. Dès les premières étapes de conception, le prothésiste doit procéder à une analyse poussée pour que la réalisation de l’armature aille dans le sens du résultat final tant en forme qu’en couleur. Celle-ci obtenue, il va procéder à la mise en place d’une couche de base sur laquelle différentes masses seront ensuite positionnées. La quantité de chaque apport dépendra de l’effet voulu et du ratio email-dentine à obtenir. Plusieurs essais en bouche viennent ponctuer le travail de céramique afin de contrôler l’exactitude de la restauration. Luminosité, saturation et teinte doivent être agencées selon les mêmes niveaux que ceux des dents naturelles à reproduire. L’aspect de surface est également retranscrit pour pouvoir établir une micro et macro géographie de surface la plus similaire aux dents homo et controlatérales. Enfin, les effets de surface en superficie viennent parfaire l’intégration esthétique et reproduire avec le plus de précision possible l’aspect naturel de la dent. C’est au travers de plusieurs cas cliniques que nous présenterons deux modes de CFAO allant dans ce sens: la CFAO semi-directe et la CFAO indirecte5.

CFAO Semi-Directe

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La CFAO semi directe repose sur la réalisation d’une empreinte optique intra orale au sein du cabinet2 – 3 – 6. Cette empreinte est transférée sous forme de fichier informatique au laboratoire de prothèse qui va procéder à la Conception Assistée par Ordinateur (CAO) puis à la Fabrication Assistée par Ordinateur (FAO). Dans le cadre de la réalisation de restauration monolithique le prothésiste va pouvoir s’affranchir de concevoir un maître modèle et usiner directement la restauration7. Dans le cadre où la demande esthétique est supérieure une stratification est nécessaire et un modèle issu de l’empreinte optique est réalisé. Il permet au céramiste de réaliser les techniques de stratification artisanales, actuellement les seules qui puissent permettre d’obtenir le résultat voulu dans les cas à haute demande esthétique.

Cas Clinique 1

Une patiente âgée de 33 ans nous consulte pour réfection de sa 21 : incisive centrale maxillaire gauche réalisée 4 ans auparavant. 21 et 22 ont été traitées endodontiquement suite à un traumatisme pendant l’enfance, une résection apicale sur 22 a été effectuée en 2011. La patiente présente un sourire gingival avec de fortes attentes esthétique. Le défi est ici de réaliser une restauration esthétique ponctuelle dans un cadre global. Dans un premier temps, un éclaircissement par voie interne au perborate de sodium est effectué au niveau de 22. Fig. 1 cfao-semi-directe-cas-2

Une égression orthodontique a été proposée à la patiente afin de restaurer l’harmonie dento-gingivo-labiale, cette solution thérapeutique a été écartée par la patiente. L’ancienne restauration sur 21 est déposée, une transitoire confectionnée. Fig. 2

Une empreinte optique intra orale est réalisée à l’aide de la caméra 3M™True Definition Scanner. Fig. 3 Le fichier STL issu de cette empreinte est adressé au laboratoire. Un modèle physique réalisé par impression 3D est confectionnée, en parallèle une chape en Emax® Cad (Ivoclar- Vivadent™) usinée. La stratification s’effectue par montage des différentes masses de céramique (cf remerciements) Fig. 4. Après les essayages habituels à l’état de de biscuit, des contrôles d’intégration occlusale et esthétique, la restauration prothétique d’usage est mise en bouche. La patiente est revue à 1 an en visite de contrôle Fig. 5.

Cas Clinique 2

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Bien souvent nos patients présentent au niveau des secteurs antérieurs des incisives avec de multiples restaurations composites réalisées au fil des années. Lors de nos ré-interventions : réfection de ces restaurations, remarginages, nous sommes parfois amenés à nous poser la question de procéder à une réhabilitation esthétique globale. Illustrons notre propos au travers de ce patient venant nous consulter pour réfection de ces incisives maxillaires. Fig. 6 Après dépose des restaurations composites antérieures, nous réalisons une empreinte optique intra orale, arcade entière, à l’aide de la caméra 3M™True Definition Scanner Fig. 7 L’interprétation des limites et leurs lectures est immédiate au fauteuil. Fig. 8 L’empreinte est adressée au laboratoire. Nous ordonnons la fabrication d’un modèle physique stéréolithographique de type In Tech, pour permettre la stratification des masses de céramiques sur nos chapes en Emax® Cad (Ivoclar-Vivadent™). Fig. 9 L’ensemble est mis en bouche, après les essayages et les validations d’usage. Fig. 10

CFAO Indirecte

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Après traitement d’une empreinte physico- chimique selon les techniques de coulées et de préparation conventionnelles, un modèle physique est obtenu. Ce modèle est scanné afin d’obtenir un fichier numérique, réplique virtuelle du modèle artisanal. L’élaboration prothétique a ensuite lieu de manière monolithique ou stratifiée à l’aide d’un maître modèle. Toutes les étapes sont ensuite réalisées de manière conventionnelle par un céramiste jusqu’à l’obtention du résultat esthétique souhaité.

Cas Clinique 3

Suite à un choc un patient vient consulter pour la réfection de 21, déjà porteuse de nombreuses restaurations directes de type composite Fig. 11. Après reprise du traitement endodontique, le moignon moyennement dyschromié a posé l’indication d’une armature zircone teintée (Procera®, Nobel Biocare™). Une empreinte conventionnelle est réalisée et une numérisation du modèle obtenu est effectuée. Les limites périphériques, la morphologie et l’homothétie de l’armature sont définies à l’aide du logiciel 3Shape™ avant envoi à un centre d’usinage délocalisé pour réalisation de l’armature Fig. 12. La pièce usinée est retournée vers le céramiste qui après contrôle de son adaptation sur le modèle en plâtre nous l’adresse pour une validation in situ Fig. 13. Le montage des poudres céramiques, les caractérisations et l’aspect de surface sont travaillés jusqu’à obtenir un parfait mimétisme avec 11 Fig. 14. Plusieurs essayages ponctués par des clichés photographiques permettent au prothésiste de définir la cartographie exacte de la dent à reproduire et obtenir une similarité exacte entre 11 et 21 Fig. 15. Les qualités biologiques de la céramique associées à la précision de l’usinage informatisé ont permis une intégration biologique optimale. Fig. 16

Cas Clinique 4

Un patient adressé se présente en consultation pour demande esthétique : 22 trop lumineuse et 21 qui présente un éclat de céramique associé à un ajustage perfectible nous amène à poser l’indication de la réfection de ces 2 coiffes réalisées 10 ans auparavant Fig. 17. Après dépose des restaurations et analyse radiographique de 21 le choix est fait de ne pas déposer l’ancrage corono-radiculaire. Un système céramo-céramique est choisi pour ses qualités biologique et esthétique. Afin de masquer la dyschromie de l’inlay-core sous-jacent le choix s’est porté vers une armature zircone (Lava®, 3M ESPE™). Le modèle issu de l’empreinte physicochimique est réalisée et numérisée à l’aide du scanner 3Shape™. La conception est effectuée directement au laboratoire pour contrôler la morphologie de l’infrastructure céramique afin qu’elle assure le soutien correct de la céramique cosmétique de stratification.cfao-indirecte-cas-clinique-4

Pour ce faire il a été choisi dans le cas présent de réaliser une armature en cire comme dans la technique conventionnelle mais une fois réalisée, celle-ci a été scannée afin de transmettre le plus d’information possible au centre d’usinage Fig. 18. Les fichiers obtenus sont ensuite envoyés par le laboratoire vers ce centre. L’armature réalisée sera la reproduction exacte du design réalisé en cire au laboratoire. Une fois usinée celle-ci est retournée vers le céramiste qui, après vérification de l’ajustage prothétique par le praticien va pouvoir incrémenter les masses céramiques et effectuer les retouches nécessaires jusqu’à obtention du résultat esthétique souhaité Fig. 19.

Conclusion

Peu à peu l’informatisation gagne nos laboratoires de prothèse, le recours à ces systèmes est devenu inévitable, comme le dit F. Duret « l’ordinateur se fait prothésiste »8. Les indications de ces nouvelles technologies s’étalent sur des domaines de plus en plus importants et constituent une véritable révolution dans l’exercice de nos techniciens de laboratoire. Malgré cette évolution en perpétuel développement, la systématisation apportée ne trouve pas encore son application dans le domaine de l’esthétique. La complexité du tissu dentaire est telle qu’il n’existe pas encore de machine suffisamment performante pour pouvoir reproduire de manière systématisée toutes les composantes d’une dent. Mais pour combien de temps encore… ?

Une partie de ces cas cliniques a été présenté lors du congrès Mimesis 2014, par le Groupe Symbiose (PIA Jean Philippe, SOENEN Arnaud, DOS SANTOS Antonio, LASSERRE Jean-François) en communication orale.

Remerciements à :
Christophe SIREIX (Centre d’usinage Siriscan, Agen)
Jean Marc CHEVALLIER céramiste (Laboratoire Bertin, Bordeaux)
Hélène et Didier CRESCENZO (Laboratoire Esthetic Oral Care, St Tropez) pour le maquillage des poudres à l’aide de crayons fluorescents.

A lire

1. Beuer F., J. Schweiger, D. Edelhoff Digital dentistry: an overview of recent developments for CAD/CAM generated restorations. Br Dent J, 2008. 204(9): p. 505-11.
2. Pfeiffer J. Dental CAD/CAM technologies: the optical impression (I). Int J Comput Dent, 1998. 1(1): p. 29-33.
3. Pfeiffer J. Dental CAD/CAM technologies: the optical impression (II). Int J Comput Dent, 1999. 2(1): p. 65-72.
4. Ender A., A. Mehl Full arch scans: conventional versus digital impressions–an invitro study. Int J Comput Dent, 2011. 14(1): p. 11-21.
5. Miyazaki T.,Y. Hotta CAD/CAM systems available for the fabrication of crown and bridge restorations. Aust Dent J, 2011. 56 Suppl 1: p. 97-106.
6. Brawek P.K. et al. The clinical accuracy of single crowns exclusively fabricated by digital workflow – the comparison of two systems. Clin Oral Investig, 2013. 17(9): p. 2119-25.
7. Freedman M., F. Quinn, M. O’Sullivan Single unit CAD/CAM restorations: a literature review. J Ir Dent Assoc, 2007. 53(1): p. 38-45.
8. Duret F. Quand l’ordinateur se fait prothésiste. Tonus, 1982. 16: p. 13-15.

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A propos de l'auteur

Jean-Philippe PIA

Assistant Hospitalo-Universitaire sous-section 58-02 : Prothèse(s), Université de BORDEAUX

Mathieu CONTREPOIS

Ancien AHU Université de Bordeaux
Exercice Privé à Bordeaux
Membre du groupe Symbiose

Dr. Julien BROTHIER

Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire CES de Prothèses (Fixée, Amovible)
DU d’Implantologie Orale
Praticien Libéral

Dr. Arnaud SOENEN

Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire sous-section 58-02 : Prothèse(s), Université de BORDEAUX

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