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Les Conseils de Deborah : L’approche globale du patient, partage d’expérience avec Alain NEAU

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Soigner les patients avec une approche globale, comme on nous l’enseigne à la fac, a toujours été la pratique d’Alain NEAU, d’abord dans son cabinet d’omnipraticien, puis dans sa structure de soins plus récente orientée vers la réhabilitation globale et où il est associé à un endodontiste. Soigner de façon globale sous entend une autre organisation de travail : élaborer un plan de traitement global apportant une solution durable dans le temps nécessite en aval une investigation globale et diagnostique de toutes les pathologies buccales lors de la première consultation.

Soigner de façon globale requiert aussi l’acquisition d’outils de communication et de motivation afin de travailler avec des patients impliqués dans leur traitement, et plus tard, dans leur programme de maintenance. Alors pourquoi la majorité des patients est-elle toujours traitée au « coup par coup », en réponse à une demande ponctuelle, le plus souvent en urgence ?

Les raisons évoquées par les praticiens, et qui freinent régulièrement dans la mise en oeuvre d’une approche globale du patient, sont multiples.

Il y a la peur de perdre un patient et la crainte de ne pas être convaincant, conscient dans certaines situations de nos limites et de nos compétences en communication. Arrive également le stress généré par des enjeux thérapeutiques plus importants, voire le spectre de l’échec thérapeutique. Un agenda saturé ne permet pas la disponibilité nécessaire pour concevoir et exécuter des traitements plus complexes ; les traitements globaux nécessitent la mise en place de rendez-vous longs au risque de voir ces soins s’éterniser. Et puis, évidemment il y a le montant des honoraires afférent à une réhabilitation globale qui inhibe bon nombre d’entre nous.

« Le principal frein est le rapport difficile que nous pouvons avoir avec l’argent », me confie Alain NEAU. Nous ne pouvons ignorer que nous exerçons une profession où les techniques sont devenues sophistiquées, fiables mais aussi coûteuses. La qualité, le progrès scientifique, le bien-être ont un prix et engagent le praticien dans une relation thérapeutique où les décisions sont partagées.

La façon d’appréhender le patient la plus gratifiante à long terme pour le traitant et le traité est bien l’acquisition d’une vision globale de sa santé bucco-dentaire.

Pourquoi ?

  • parce que les pathologies buccales sont interdépendantes
  • parce que les pathologies non soignées continuent à évoluer
  • parce que la dentisterie au « coup par coup » embolise les agendas et crée des patients qui continuent à présenter en permanence des pathologies latentes ou avérées
  • parce que une vision globale du traitement est plus qualitative à long terme
  • parce que le patient après avoir été traité n’a plus de problème patent en bouche
  • parce que l’organisation en rendez-vous longs est plus satisfaisante et plus sereine pour le praticien et son équipe
  • parce que diminuer le nombre de rendez-vous par jour permet de diminuer le temps improductif d’installation, de désinstallation et le temps de stérilisation de chaque rendez-vous, et de ce fait réduire le nombre de rendez-vous imposé au patient pour finaliser son traitement.
  • Parce que travailler sur de longs rendez-vous génère rapidement une meilleure rentabilité horaire

La thérapeutique globale met en jeu un ensemble de techniques, une approche du patient différente sur le plan relationnel et une logistique organisationnelle adaptée du cabinet par rapport à cette thérapeutique. L’organisation est finalement un ensemble de structurations adaptables à n’importe quel cabinet et, sans doute, la partie la plus facile à mettre en place. Il y a en France des cabinets qui ont l’expérience de ce type de thérapeutique et il suffit de reproduire, pas à pas, des organisations qui ont fait leurs preuves. Si la thérapeutique globale dans l’absolu est, évidemment, la meilleure solution pour nos patients, elle n’est cependant pas réalisable dans tous les cas ; un nombre certain de facteurs peut venir s’interposer : la motivation du patient, des problèmes financiers, l’état de santé ou les facteurs de risque présentés par le patient etc. L’entretien médical formalisé par un questionnaire signé, consigné dans le dossier du patient, est une obligation légale ; il permet d’évaluer l’état pathologique actuel ou potentiel du patient, son mode de vie, et d’apprécier les facteurs de risque inhérents au plan de traitement envisagé.

Certes, dans ces cas de contre-indications, une autre proposition de traitement devra être adaptée mais jusqu’où peut-on aller dans les compromis ? La question est légitime : quel compromis est acceptable, et quel compromis est inacceptable en fonction des perturbations que ces compromis peuvent engendrer, sur le plan occlusal notamment ?

Il est souhaitable que la thérapeutique globale soit présente à notre esprit en permanence, les compromis existent, il faut aussi savoir les gérer mais ne pas tomber dans des compromis permanents qui éloignent les cabinets de toute thérapeutique globale.

Certains patients sont prêts pour cette thérapeutique, il faut être prêt pour eux. Etre prêt c’est avoir intégré les freins des patients, mais surtout et avant tout, avoir réfléchi sur nos propres angoisses et nos propres freins. Nous informer sans cesse, adapter notre pratique à l’évolution des techniques et des nouvelles alternatives de traitement sont des conditions nécessaires pour maîtriser l’évolution irréversible que nous connaissons au sein de notre profession, et qui nous permettent de satisfaire les besoins, les demandes et les attentes de nos patients.

A l’heure de la formation continue obligatoire la formule des formations en petit nombre reste un élément éminemment appréciable. Réfléchir en groupe sur la manière d’aborder un traitement global donné, appréhender ensemble la complexité d’un cas exposé, confronter nos stratégies et solutions thérapeutiques sont des atouts inestimables.

Et puis aussi, au-delà de la clinique, pouvoir réfléchir sur nos comportements, conscients ou inconscients, qui peuvent freiner l’évolution de notre exercice et nous empêcher d’être serein et heureux !

La mise en oeuvre de l’approche globale au cabinet dentaire. Nos possibles, nos freins …et l’intérêt de nos patients !

Alors, bien sûr, il y a sans doute en fonction des facultés, quelques différences de formation des chirurgiens dentistes en France mais finalement elles ne peuvent pas tout expliquer. Expliquer les différences de comportement des praticiens dans leur futur exercice. Expliquer les différences des thérapeutiques proposées dans les cabinets. Expliquer que certains praticiens effectuent des traitements parodontaux et implantaires dans nos campagnes les plus reculées alors que d’autres soutiennent (et ils sont sincères) que ces traitements sont impossibles ou très limités à cause des contraintes socioculturelles ou économiques. Expliquer également que des praticiens soient constamment débordés, surchargés et en état de stress permanent alors que d’autres, plutôt détendus, arrivent à gérer leur patientèle dans des zones ou la démographie est pourtant identique.

Définir son choix professionnel est essentiel, mais a-t-on le choix de ces choix ? Sommes-nous capables de vraiment choisir ? La thérapeutique globale ne peut s’effectuer que sur des patients motivés…mais qu’est ce qu’un patient motivé ? Peut-on motiver un patient qui lui aussi a reçu une éducation dans un milieu socioculturel donné, proche de nous ou très éloigné ? Quel est notre rôle par rapport à la motivation du patient? Change-t-on le comportement des patients et pour combien de temps car la thérapeutique globale nécessite un patient motivé à long terme.

Comment gérer les cas complexes, multidisciplinaires, paro, implants, prothèses ? Quelle est le rôle du praticien dans le plan de traitement et dans la réalisation du cas clinique ? Lorsque les traitements deviennent complexes et coûteux, logiquement, le stress augmente. Comment peut-on gérer ce stress qui a peut être son incidence sur nos comportements professionnels ? Les traitements complexes sur les patients compliqués, difficiles aggravent encore notre stress et nos angoisses. Comment peut-on gérer ces cas difficiles sur ces patients difficiles ?

Finalement avant réflexion sur nos comportements en fonction de notre personnalité a-t-on vraiment le choix de notre exercice ? Quelle est la part du conscient dans nos choix , celle de notre éducation, notre milieu socioculturel et économique ? Quelle est l’influence de nos angoisses sur nos choix et sur notre exercice ?

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A propos de l'auteur

Dr. Deborah TIGRID

Présidente de Feed Back Medical

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