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Les Antibiotiques

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Le recours aux antibiotiques en parodontie est possible seulement s’il est justifié (1) (2). En aucun cas, sa prescription ne doit être systématique, à l’aveugle, pressée par l’urgence ou par la mode, mais au contraire basée sur des critères médicaux solides. La cible des antibiotiques en parodontie est la flore sous gingivale mais les bénéficiaires sont les tissus parodontaux qui peuvent représenter, dans les parodontites agressives, une surface importante de tissus infectés (Figure 1). Les microbiologistes indiquent que le biofilm bactérien est difficilement accessible aux molécules antibiotiques mais les recherches cliniques indiquent clairement que celui-ci est profondément modifié par les mêmes antibiotiques (3) (4).

cible-des-antibiotiques

Figure 1 La surface de tissus infectés dans les parodontites agressives peut atteindre plus de 50 cm2 soit la surface d’un ulcère de jambe.

La cible des antibiotiques

Prescription-par-voie-systémique

Figure 2 Du strict point de vue anatomique, on distingue une flore supragingivale (SUP) et une flore sousgingivale (SOUS) dont la frontière est le rebord de la gencive marginale. Figure 3 Du point de vue thérapeutique, les antiseptiques véhiculés par la brosse à dents et les brossettes interdentaires ont accès aux premiers millimètres de la flore sousgingivale (ATS : Antiseptiques – ATB : Antibiotiques).

Du point de vue anatomique, il existe deux localisations du biofilm bactérien (i.e. plaque dentaire) (Figure 2) :

  • L’une au-dessus de la gencive marginale (plaque supragingivale)
  • L’autre au-dessous de la gencive marginale (plaque sousgingivale)

Du point de vue thérapeutique, il existe (Figure 3) :

  • Une flore accessible aux soins locaux
  • Une flore inaccessible aux soins locaux

Du point de vue microbiologique, il existe deux flores :

Si les soins locaux améliorent rapidement l’aspect clinique de la muqueuse gingivale, cela ne veut pas obligatoirement dire que la flore sousgingivale soit contrôlée. En effet, seuls les premiers millimètres d’une lésion parodontale sont pris en charge par les soins locaux. Par conséquent, lorsque les lésions sont profondes et généralisées avec une flore sousgingivale incompatible avec la santé parodontale, la parodontite continuera à évoluer. On parle alors de « parodontites réfractaires », même si ce type de pathologie n’existe plus dans la classification des maladies parodontales.

Les antibiotiques (per os ou administrés localement) sont capables de faire « basculer » une flore sousgingivale incompatible vers une flore compatible avec la santé parodontale.

Prescription par voie systémique

Avant de prescrire un antibiotique, le clinicien se pose plusieurs questions :

Comment savoir si la flore est compatible avec la santé parodontale ?

  • L’examen direct en microscopie à contraste de phase suffit souvent pour répondre à cette question
  • Dans quelques cas, il faut recourir aux sondes nucléiques.

Si on doit prescrire un antibiotique, à quel moment le faire ?

  • Si le diagnostic étiologique est correctement posé, il est possible de savoir – dès la première consultation – si un antibiotique est nécessaire
  • Comme il a été dit plus haut, les antibiotiques ne sont utiles que lorsque les lésions sont profondes et infectées. Or, afin d’éviter un sondage douloureux et imprécis de lésions infectées, il est possible – grâce aux photos cliniques et au bilan radiologique long-cône – de déterminer (et non de « mesurer ») si les lésions sont profondes (Figure 4) (5). En effet, la profondeur des lésions est représentée par la différence entre la perte d’attache et la récession gingivale (Figure 5).
Application-locale

Figure 4 Lorsque les récessions gingivales ne sont pas importantes et que la crête interproximale radiologique indique des pertes d’attache sévères et généralisées, les poches sont donc profondes. Les soins locaux n’auront pas accès à la flore sousgingivale située au delà des premiers millimètres : un antibiotique sera donc nécessaire si la flore n’est pas compatible avec la santé parodontale. Figure 5 PA = RG + PP La profondeur de la lésion parodontale (PL) est représentée par la différence entre la perte d’attache (PA) et la récession gingivale (RG). Figure 6 Elyzol & Parocline Exemple de molécules antibiotiques contenues dans un polymère résorbable délivrées à l’aide d’une seringue. Elyzol® contient du métronidazole et Parocline® de la minocycline.

Quelle molécule peut-on prescrire ?

  • La très grande majorité des bactéries associées aux lésions parodontales actives sont sensibles au métronidazole (Flagyl®) (6). Cette molécule est incluse dans le Bi Rodogyl®. La posologie moyenne se situe entre 750 mg et 1 gramme par jour pendant cinq jours. Il existe peu de résistance à cette molécule. La prise doit se faire au milieu des repas avec abstinence de boissons alcoolisées.
  • Si le contrôle de plaque supragingivale est correctement assuré, il n’est pas nécessaire d’associer une amoxicilline au métronidazole.

Il semble donc que la condition nécessaire, mais non suffisante, pour prescrire un antibiotique soit l’existence d’une flore sous gingivale incompatible avec la santé parodontale.

Une fois cette condition observée, la prescription d’un antibiotique par voie systémique est justifiée dans les trois situations suivantes :

  • Lésions profondes et généralisées
  • Lésions peu profondes mais avec un obstacle à l’entrée des lésions (du tartre par exemple) interdisant aux soins locaux d’avoir accès à la flore sous gingivale
  • Lésions peu profondes, sans obstacle, mais avec le statut médical indiquant une immunodépression (chimiothérapie anticancéreuse, glycémie non contrôlée, prise de médicaments immunodépresseurs, risque cardiovasculaire, paramètres plasmatiques modifiés, épisodes fébriles signant des décharges septiques, etc.)

Application locale d’un antibiotique

Bien entendu, si les lésions sont actives mais localisées, la prescription d’un antibiotique per os n’est pas nécessaire. Cependant, les critères de délivrance locale d’un antibiotique sont les mêmes que ceux qui régissent la prescription d’un antibiotique per os.

Il existe aujourd’hui deux molécules disponibles pour une application locale : le métronidazole (Elyzol®) et la minocycline (Parocline®) (Figures 6).

Un certain nombre d’études suggèrent que la prescription de tétracyclines à doses non bactéricides ou bactériostatiques (20mg/jour) peut entraîner l’inhibition des métalloprotéases (collagénases) par chélation des ions nécessaires à leur activation (6).

Il ne semble pas que cette attitude soit possible en pratique courante car on peut imaginer que cette prescription à long terme ne sera pas toujours suivie par le patient

Références bibliographiques

1. Slots J. et Rams T.E. – Systemic and Topical Antimicrobial Therapy in Periodontics. Periodontol 2000 10 : 5 – 159, 1996.
2. Sixou M. – Prescrire en odontologie. Ed. CdP. Collection JPIO. 2005.
3. Gilbert P. et Allison D.G. – Biofilm and their Resistance towards Antimicrobial Agents in Dental Plaque Revisited. Oral Biofilm in Health and Disease, Bioline, Cardiff, 1999.
4. Van Winkeloff A.J., Rams T.E. et Slots J. – Systemic Antibiotic Therapy in Periodontics. Periodontol 2000 10 : 45 – 78, 1996.
5. Charon J. et Mouton C. – Parodontie Médicale. Éditons CDP, Paris, 2003.
6. Loesche W.J., Giordano J.R., Soehren S. et Kaciroti N. – The Nonsurgical Treatment of Patients with Periodontal Disease : Results after 6.4 years. Gen Dent. 53 : 298 – 306, 2005.
7. Preshaw P.M., Hefti A.F. et Bradshaw M.H. – Adjunctive Subantimicrobial Dose Doxycycline in Smokers and Non-smokers with Chronic Periodontitis. J Clin Periodontol. 32 : 610 – 6, 2005.

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A propos de l'auteur

Dr Jacques Charon

Parodontiste exclusif, Lille

Dr. Frédéric JOACHIM

Parodontiste/Implantologiste, Lille

Dr. Sébastien DUJARDIN

Parodontiste/Implantologiste, Lille
Post Graduate in Periodontics, Temple University, Philadelphia, USA

Dr. Joël BEAULIEU

Dr en Médecine dentaire, Laval, QUEBEC
Formateur à l’Académie de Paro (Aix en Provence)

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