En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés à vos centres d'intérêts.

LEFILDENTAIRE est un site réservé aux professionnels de la santé dentaire.
Si vous n'êtes​ pas un professionnel de santé, vous pouvez obtenir des réponses à vos questions par des experts sur Dentagora.fr en activant le bouton Grand Public.

Je suis un professionnel Grand Public

Composite antérieur stratifié : à propos d’une nouvelle masse émail…

0

La résine composite est le seul matériau pouvant restituer la forme, la couleur et la fonction de l’organe dentaire, en technique directe avec préservation tissulaire. Les propriétés de la dentine et de l’émail étant différentes, les résultats esthétiques obtenus avec une masse mono teinte en composite sont souvent insuffisants. De ce fait, les fabricants proposent une large gamme de teintes, d’opacités et de translucidités variées permettant la mise en oeuvre des techniques de stratification ; largement décrites de nos jours, elles optimisent l’intégration esthétique en se rapprochant le plus possible de l’aspect naturelle de la dent.

Cependant, l’expérience montre que ces techniques sont longues à mettre en oeuvre et que l’effet esthétique obtenu n’est pas toujours reproductible car très « opérateur dépendant ». Lors des restaurations par la technique de stratification en composite, deux difficultés sont à prendre en compte :

La première, non encore résolue à ce jour, est l’instabilité de l’état de surface et les phénomènes de vieillissement inhérents au matériau. La seconde est l’effet grisâtre obtenu parfois avec les masses émail et, de ce fait, la visibilité du joint composite-dent. L’apparition sur le marché d’une nouvelle masse émail dont l’indice de réfraction se rapproche de celui de l’émail naturel permet de palier cet inconvénient et de simplifier la technique de stratification qui devient moins « opérateur dépendante » et dont les différentes étapes seront décrites.

Propriétés optiques de l’émail et de la dentine : quelques notions

La couleur d’une dent résulte d’une multitude d’interactions de l’émail et de la dentine sous-jacente avec la lumière.

L’émail est un tissu translucide. La translucidité se situe entre l’opacité complète et la transparence totale. 75 % de la lumière est transmise en profondeur lorsque l’épaisseur est de 1mm (1). Dans le choix de la couleur, l’émail est en grande partie responsable de la luminosité. Celle-ci est fonction de la quantité de lumière réfléchie qui se traduit concrètement par une sensation de plus ou moins blanc. La luminosité est indépendante de la teinte et peut s’évaluer sur une photographie en noir et blanc. Cet élément déterminant dans le choix de la couleur doit être sélectionné en premier (2). En général, le tiers moyen est le plus clair et le tiers incisif le moins lumineux (3). Au niveau du bord libre, des zones opalescentes bleutées ou ambrées peuvent être perçues lorsque la dentine est absente. Dans les techniques de stratification élaborées (4-5), cet effet opalescent est pris en compte en apposant un liseré de masse émail opalescent. Par ailleurs, avec l’âge, l’émail devient plus vitreux et son épaisseur diminue devenant plus translucide, moins lumineux et généralement plus lisse.

La dentine est plus opaque. Elle détermine la teinte et la saturation de la couleur de la dent. La dentine est fluorescente, c’est-à-dire qu’elle absorbe une partie de la lumière invisible à l’oeil pour la retransmettre dans un spectre visible.

La couleur de la dent dépend de trois facteurs : la luminosité qui est essentiellement déterminée par l’émail, la teinte et la saturation qui sont déterminées par la dentine. Toutefois, le choix de la couleur n’est pas le seul critère de réussite esthétique des restaurations ; la forme, l’état de surface et l’harmonie sont également des facteurs non négligeables.

Une nouvelle masse émail à indice de réfraction équivalente à l’émail naturel …

Dans la technique de stratification conventionnelle, l’épaisseur des masses émail et dentine est difficile à évaluer, et peut entraîner des résultats parfois décevants car un aspect grisâtre peut apparaître, mettant en relief le joint composite-dent. Ce phénomène peut s’expliquer par le fait que les composites de masse émail ont un indice de réfraction différent de celui de l’émail naturel.

Actuellement, les fabricants s’orientent vers l’introduction de nanoparticules minérales permettant de se rapprocher de l’effet naturel de l’émail.

Lorenzo VANINI et Thomas NIEM ont mis au point un nouveau composite de masse émail « Enamel plus HRi » commercialisé par le groupe Micerium® et dont l’indice de réfraction serait le même que celui de l’émail. Trois luminosités sont proposées : haute luminosité UE3 pour les dents des sujets jeunes ou ayant subies un éclaircissement, moyenne luminosité UE2 pour la majorité des dents des sujets adultes et luminosité basse UE1 pour les dents des sujets âgées. De plus, il n’est plus nécessaire de reproduire l’opalescence du bord incisal en utilisant des masses spécifiques « opalescentes » bleues ou ambres. Ainsi, cette nouvelle masse émail permet de simplifier la technique de stratification tout en obtenant un résultat esthétique satisfaisant et reproductible. Nous avons testé cette nouvelle masse émail dans 3 situations cliniques différentes.

Simplification de la technique de stratification : méthodologie à l’aide de 3 situations cliniques différentes

Cas clinique n°1 : fractures d’angles sur 21 et 22 (Fig.1)

fractures-d’angles

Fig. 5 : Fracture d’angle de 21 et 22. Fig. 2 : Clef en silicone réalisée à partir d’un wax-up. Fig. 3 : Mise en place de la masse émail UE2 (Enamel plus HRi) à l’aide du guide en silicone. Fig. 4 : Application d’une seule masse dentine sur 21. Notez la forme des mamelons dentinaires. Fig. 5 : Mise en place de la masse émail côté vestibulaire. Fig. 6 et 7 : Résultat 24h après dépose de la digue.

Lorsque le délabrement est étendu, la réalisation d’une clef en silicone à partir d’un wax-up (Fig. 2) facilite la reproduction de la morphologie des dents fracturées.

Après avoir réalisé un biseau long et peu profond au niveau du trait de fracture, un mordançange adéquat de l’émail et de la dentine est réalisé avec mise en place d’un système adhésif à 2 ou 3 étapes. Notons que l’utilisation des systèmes automordançants (SAM) ne présente aucun intérêt dans les secteurs antérieurs (6).

Une épaisseur de masse émail UE2 (Enamel plus HRi), équivalente à l’épaisseur d’émail naturel est mise en place sur le guide en silicone puis appliquée fermement sur les dents (Fig. 3). Nous obtenons un mur palatin dont la morphologie est quasiment définitive et une occlusion nécessitant peu de corrections.

Après avoir réalisé la face proximale avec cette même masse émail à l’aide d’un strip transparent, une masse dentine est appliquée sur le mur palatin (Fig. 4).

Enfin, une masse émail de même luminosité que celle utilisée en palatin est placée du côté vestibulaire (Fig. 5). Puis, l’ensemble est poli à l’aide de disques si la surface est lisse ou à l’aide de pâtes diamantées après avoir réalisé une micro et macro géographie de surface (Fig. 6 et 7).

Cas clinique n°2 : fluorose (Fig. 8 et 9)

réussite-esthétique-d’un-sourire

Fig. 8 et 9 : Fracture d’angle de 11 et 21. Notez la présence de fluorose au niveau du bord libre et des faces proximales Fig. 10 : Montage du mur palatin avec la masse émail de luminosité moyenne UE2 (Enamel plus HRi). Fig. 11 : Mise en place d’une masse dentine et d’un liseré de masse très opaque blanchâtre (Intensive Milky, IM, Enamel HFO). Fig. 12 : Mise en place en vestibulaire de la même masse émail utilisée côté palatin. Fig. 13 et 14 : Résultat immédiat après dépose de la digue.

L’harmonie est un des éléments essentiels de la réussite esthétique d’un sourire. Dans le cas d’une fluorose légère :

  • soit des tentatives d’éclaircissements ou/et de micro abrasions sont réalisées afin que les taches blanchâtres de fluorose disparaissent,
  • soit le liseré de fluorose au niveau du bord libre est reproduit afin de ne pas rompre l’harmonie du sourire.

Dans ce cas clinique, le choix s’est porté sur la reproduction de ce liseré blanchâtre de fluorose (Fig. 8 et 9). Pour ce faire, les étapes décrites dans le cas clinique précédent sont identiques (Fig. 10), mise à part le fait qu’après la mise en place de la masse dentine, il faut rajouter un composite blanc opaque au niveau du bord libre (Intensive Milky, IM, Enamel HFO, Micerium®) (Fig. 11), puis l’ensemble est recouvert de masse émail (Fig. 12) et poli (Fig. 13 et 14).

Cas clinique n°3 : morphologie atypique des incisives centrales et agénésie des latérales (Fig. 15)

agénésies-des-incisives

Fig. 15 : Agénésie des incisives latérales et morphologie atypique des incisives centrales. Fig. 16 : Au niveau des canines, mise en place d’une masse dentine, côté palatin, recouverte d’une masse émail. Fig. 17 : Au niveau des incisives centrales, seule une masse émail monocouche de luminosité moyenne UE2 (Enamel plus HRi) est appliquée sur les faces proximales.

Dans ce cas clinique post-orthodontique, les agénésies des incisives latérales ont été compensées par la mésialisation des dents maxillaires. De plus, les incisives centrales de formes atypiques présentent des pertes de substance amélaires au niveau du 1/3 gingival (Fig. 15).

Le traitement a consisté :

  • au niveau des incisives centrales : à coller une seule masse émail UE2 (Enamel plus HRi) au niveau des bords proximaux afin de réduire le diastème et de redonner une forme plus conventionnelle à ces incisives (Fig. 17). En effet, la simplification extrême de la stratification par une mono couche de masse émail, au niveau proximal et au niveau du bord libre, est acceptable à la condition que la largeur de composite dans le sens mésio-distal ne dépasse pas 1mm. A ce niveau, la dentine est absente induisant un effet plus ou moins opalescent à cette masse émail. Si cette distance est supérieure à 1mm, il est souhaitable de placer une sous couche de masse dentine du côté palatin.
  • au niveau des canines : en fonction de ce qui a été détaillé ci-dessus, une sous couche de masse dentine a été placée sur le versant palatin (Fig. 16), puis recouverte de masse émail de luminosité moyenne (Fig. 17).

Conclusions

L’apparition sur le marché d’un composite de masse émail présentant un indice de réfraction similaire à celui de l’émail naturel (Enamel plus HRi, Micerium®) permet de simplifier la technique de stratification. Dans la majorité des situations cliniques, une technique bi masse en trois étapes est préconisée. Une masse émail du côté palatin puis une masse dentine qui sera recouverte d’une masse émail du côté vestibulaire. La maîtrise des épaisseurs d’une seule masse dentine et d’une seule masse émail, ainsi que la non apposition d’émail opalescent au niveau du bord libre, permettent de simplifier la technique de stratification. Enfin, nous avons constaté cliniquement qu’en utilisant une seule masse émail de luminosité moyenne, la luminosité augmente avec l’épaisseur du composite et inversement. Ce comportement, similaire à celui de l’émail naturel, contribue à l’obtention de restaurations hautement esthétiques et d’aspect naturel.

Bibliographie

1. Rouas P., Delbos Y. Etat de surface dentaire et intégration esthétique. Clinic 2006; 27:35-41
2. Silness J. Fixed prosthodontics and periodontal health. Dent Clin North Am 1980; 24:317-330
3. Magne P., Belser U. Restaurations adhesives en céramique sur dents antérieures. Quintessence int 2003
4. Vanini L. Light and color in anterior composite restorations. Pract Periodont Aesthetic Dent 1996; 8:673-682
5. Dietschi D; Free-hand composite resins restorations: a key of anterior esthetics. Pract Periodont Aesthetic Dent 1995; 7:15-25
6. Degrange M. Les systèmes adhésifs amélo-dentinaires. Réal Clin 2005; 16 :351-364

Partager

A propos de l'auteur

Dr. René SERFATY

Maître de conférences des universités
Faculté de chirurgie dentaire de Strasbourg
Responsable du DU d'esthétique du sourire
Pratique privée

Laisser une réponse