M’entretenant récemment avec un « haut dignitaire » élu dans le sérail de nos éminentes fédérations dentaires, nous convînmes de l’incohérence des messages délivrés par nos instances dirigeantes :
- en regard de l’information et la formation continue auxquelles sont régulièrement invités les chirurgiens-dentistes d’une part,
- et des contraintes administratives et réglementaires que nous subissons d’autre part
D’un côté, l’on nous incite-oblige à investir (formation continue, mise aux normes de nos cabinets, acquisition de matériels et matériaux en rapport avec les multiples évolutions technologiques…) ; de l’autre on charge notre benne d’obligations administratives, dont la récente imposition conventionnelle de proposer diff érents devis à nos patients en y incluant le fameux « RAC 0 » Ce dernier fait par ailleurs, l’objet d’une publicité tapageuse sous couvert d’information politico-sociale qui enfonce le clou dans les esprits avertis du message déjà bien ancré: « les soins de santé gratuits sont un droit acquis inclus dans nos cotisations sociales »… Information qui reste vague sur les conséquences économiques de son application – évidemment – dans un contexte de croissance morose et de déficit annuel aggravé de la Sécurité Sociale (dans le rouge annoncé à plus de 5 milliards d’euros en 2019 et 2020) Dans le sillon de cette démagogie politique, on assiste à une flambée des publicités de la part des marchands de rêves à bon marché (prothèses fabriquées à l’étranger, centres dentaires non soumis aux contraintes ordinales…)
Selon le haut responsable de mon entretien, les données statistiques sont significatives en la matière: la grande majorité des praticiens (60 % !) choisit clairement de moins s’investir dans la formation et les acquisitions, préférant tenter de subvenir à ses besoins en suppléant le quantitatif-moins compliqué au qualitatif- plus exigeant… Ils suivent en cela la tendance de notre économie de marché qui veut que les consommateurs cherchent plus volontiers le moins coûtant plutôt que se donner les moyens d’accéder au meilleur Malheureusement, l’équation n’est pas si simple et les résultats se font ressentir quasi-systématiquement en termes de mécontentement quand on en vient (plus ou moins rapidement) à constater à quel point le moins coûtant est surtout peu fiable, voire délétère
Il serait temps que nos instances professionnelles (à commencer par le Conseil de l’Ordre et l’ensemble des 26 fédérations dentaires qui constituent l’ADF) s’accordent à délivrer un message de transparence qui soit le même envers les patients qu’envers les professionnels :
- OK, pour un minimum d’équité sociale imposant un eff ort collectif afin de permettre aux patients les moins aisés financièrement d’accéder à un plateau de soins avec RAC 0 s’il le faut… Mais ce n’est pas au praticien libéral (qui ne peut pas se permettre d’être en déficit comme la Sécurité Sociale) d’en assumer le coût ! Ce RAC 0 – promesse de campagne d’Emmanuel Macron – a été consenti par nos syndicats en échange de (trop) faibles revalorisations tarifaires… qui étaient pourtant dues et attendues depuis longtemps par les chirurgiens-dentistes conventionnés
- Les patients doivent également être mieux instruits (et pas seulement par les praticiens consultés) quant à l’existence de techniques, de technologies et de matériaux plus élaborés dont la mise en oeuvre est plus coûteuse… qui nécessitent donc des eff orts personnels tant du côté des prestataires (chirurgiensdentistes) que des consommateurs (patients) Ainsi, de même que la plupart de ces derniers investissent désormais dans des smartphones (très chers et non remboursés) qui rendent plus de services que les simples téléphones portables (moins chers), il faut que nos patients soient mieux informés et plus incités à consommer des soins de haute qualité. Arrêtons de leur « vendre du rêve pas-cher » et invitons-les plus franchement à mieux connaitre nos belles technologies ainsi que notre haute technicité au titre desquelles nos élites enseignantes brillent dans le monde entier Les praticiens seront alors peut-être plus tentés de s’investir dans leur métier avec d’autres perspectives que purement alimentaires !
Facile à dire, encore plus facile à écrire… J’en conviens Mais qui ne dit mot consent et qui ne tente rien n’a rien A bon entendeur, salut !