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Exclusion d’un associé d’une sel de chirurgiens-dentistes

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Etude des moyens juridiques permettant à un ou plusieurs associés d’une SEL de chirurgiens-dentistes d’exclure un de leur coassocié à l’aune d’une jurisprudence récente et inédite de la Cour de cassation.

Dans une société d’exercice libéral (SEL) de chirurgiens-dentistes, comme dans toute société, il est fréquent que la communauté des associés souhaite exclure l’un de ses associés qui se montrerait dissident.

Quels sont les moyens juridiques dont elle dispose à cette fin ?

En droit des sociétés, il existe un principe général selon lequel chaque associé bénéficie du droit fondamental de demeurer associé. En application de celui-ci, un associé ne saurait être exclu d’une société contre son gré ; ce qui rend généralement ces questions d’exclusion particulièrement complexes.

En ce qui concerne les SEL de chirurgiens-dentistes, il existe une exception à ce principe prévue à l’alinéa 1 de l’article R.4113-16 du Code de la santé publique aux termes duquel un associé peut être exclu d’une SEL :

  • soit lorsqu’il est frappé d’une mesure disciplinaire entraînant une interdiction d’exercice ou du droit de donner des soins aux assurés sociaux, égale ou supérieure à trois mois ;
  • soit lorsqu’il contrevient aux règles de fonctionnement de la société.

Si la première hypothèse, l’existence d’une mesure disciplinaire entrainant une interdiction d’exercice, ne pose pas de difficulté d’interprétation particulière, il en est autrement de la seconde concernant les cas où un associé contreviendrait aux règles de fonctionnement de la société.

Quels sont ces cas ?

Au regard de la jurisprudence, peu d’arrêts permettent d’identifier précisément les cas où un associé contreviendrait aux intérêts d’une SEL de chirurgiens-dentistes.

Néanmoins, le Code de la santé publique prévoit également cette hypothèse d’exclusion dans d’autres SEL médicales et plus particulièrement les SEL de biologie médicale (article R.6223-66 du CSP), les SEL de pharmaciens d’officine (article R.5125-21 du CSP) et enfin, les SEL d’auxiliaires médicaux (article R.4381-16 du CSP).

Avec prudence, l’on peut dès lors raisonner par analogie au regard des décisions de justice rendues à propos de ces sociétés.

Ainsi, la Cour de cassation a, pour la première fois, dans un arrêt du 20 janvier 2017, s’agissant d’une SEL de biologie médicale, précisé les comportements qui ne contrevenaient pas aux règles de fonctionnement de la société.

En l’espèce, les associés d’une SEL de biologie médicale ont exclu un de leur coassocié aux motifs qu’il refusait (i) d’assurer les fonctions de direction du laboratoire (ii) de se remettre en cause au regard de la baisse de son chiffre d’affaires et enfin (iii) de s’investir dans le développement de la société de manière générale.

Alors que la Cour d’appel a décidé que ces refus répétés contrevenaient aux règles de fonctionnement de la société, la Cour de cassation en a décidé autrement au motif que ces éléments ne suffisaient ni à constater ni à préciser à quelle règle de fonctionnement de la société l’intéressé avait contrevenue.

Cette décision est riche d’enseignement en ce qu’elle permet d’identifier les lignes directrices suivantes :

  • Les associés d’une SEL ont tout intérêt à précisément inscrire, soit dans les statuts, soit dans un règlement distinct, chacune des règles dont la violation par un associé est susceptible de contrevenir aux règles de fonctionnement de la société ;
  • L’exercice par un professionnel de sa seule spécialité au sein de la SEL, son refus d’assurer des fonctions de direction et son refus de se remettre en cause au regard de la baisse de son chiffre d’affaires ne sont pas des motifs de nature à justifier son exclusion.

Avec du recul, cette décision est compréhensible dans la mesure où, en l’espèce, la communauté des associés fonde l’exclusion de l’associé dissident sur des choix et une attitude de ce dernier qui, s’ils témoignent manifestement de son manque d’implication dans la société, ne sauraient pour autant contrevenir à ses intérêts.

En outre, ces choix et cette attitude de l’associé dissident ne présentent pas un caractère fautif. Or, les comportements ayant jusque-là été reconnus par la jurisprudence comme contrevenant à l’intérêt de la société présentent généralement un tel caractère.

A titre d’exemple, parmi ces comportements, l’on peut notamment citer le fait pour un associé d’avoir constamment un compte courant débiteur, le fait pour un associé de systématiquement encaisser les chèques de la société avec du retard ou encore le fait pour un associé de ne plus communiquer avec ses coassociés et d’avoir recours à des manœuvres de chantage.

Il conviendra d’attendre d’autres décisions afin de préciser les cas où un associé contreviendrait aux règles de fonctionnement d’une SEL.

En tout état de cause, l’on rappellera que dans les SEL de chirurgiens-dentistes, comme dans toute autre société, il est toujours possible pour les associés de déroger au droit fondamental de demeurer associé par la mise en place de clauses contractuelles (dans les statuts ou un pacte d’associés) permettant d’exclure un associé dans des cas précisément déterminés par les parties elles-mêmes.

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A propos de l'auteur

Jean RONDOT

Avocat au Barreau de Paris
LLM in international business law – LSE (London School of Economics and Political Sciences)
Master II de droit des affaires et fiscalité – Panthéon-Sorbonne / HEC

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