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Choix des blocs en CFAO directe en fonction de la situation esthétique dans le secteur antérieur

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En CFAO directe pendant très longtemps, lorsqu’il s’agissait de choisir un bloc pour une restauration antérieure, le choix se limitait essentiellement à la connue (et reconnue) céramique feldspathique Vita Mark 2. Depuis maintenant 10 ans, l’offre n’a cessé de croitre et d’enrichir des familles de matériaux existantes, voire d’en voir apparaître de nouvelles, avec des propriétés propres.

Dans le secteur antérieur, l’impact esthétique est prépondérant et le matériau universel n’existe pas. Ainsi, plus qu’ailleurs, le choix du matériau est devenu un facteur déterminant du succès thérapeutique. L’objectif de cet article est de livrer quelques éléments clés afin de vous aider à faire ce choix.

La CFAO (Conception et Fabrication Assistée par Ordinateur) connaît un essor considérable. Parmi ses différentes modalités, la CFAO directe est celle où toutes les étapes de la chaîne numérique jusqu’à la fabrication de la restauration sont réalisées au cabinet à l’issue d’une empreinte optique endobuccale. Les avantages de cette CFAO directe, dont le fer de lance est représenté depuis presque 30 ans par le système Sirona CEREC®, sont ceux de l’empreinte optique (précision, ergonomie, confort) et de la CFAO indirecte (précision, matériaux) auxquels s’ajoutent ceux de la séance unique (traitement en 1h/1h30) et de l’interactivité avec le patient qui est alors son propre modèle de travail. Le praticien maitrise toutes les étapes en étant architecte de la restauration, ainsi que son réalisateur.

Les matériaux accessibles par CFAO directe

Actuellement la quasi-totalité des matériaux usinables sont accessibles par CFAO directe et sont conditionnés sous forme de blocs. Cependant dans le concept d’une séance unique, seuls les matériaux ne devant pas être stratifiés seront privilégiés.

Les restaurations sont conçues « monoblocs » et sont polies et/ou maquillées et glacées.

Dans le secteur antérieur, le rendu esthétique est fondamental et juge souvent la qualité du travail. Face à des situations cliniques très variées (restaurations partielles, facettes, couronnes, dyschromie, vitalité, biomécanique, etc.) et compte tenu des possibilités forcément limitées du maquillage, le choix du bloc de matériau apparaît primordial mais souvent difficile2.

Les familles de matériaux esthétiques disponibles comprennent les céramiques, les composites et de nouveaux matériaux hybrides Tableau 1.

matériaux-CFAO-restaurations-antérieures
Tableau 1 : les différents matériaux disponibles en CFAO pour les restaurations antérieures

1. Les céramiques

En CFAO directe, seules les céramiques vitreuses seront employées (les céramiques cristallines, comme la zircone, doivent être stratifiées). Cette famille se compose de céramiques feldspathiques ou vitrocéramiques «conventionnelles» et de vitrocéramiques «renforcées».

Les céramiques feldspathiques ont été les premières céramiques mises en forme par CFAO (depuis 1991) (ex : Mark 2®, Vita, CEREC blocs®, Sirona).

Les vitrocéramiques dites « conventionnelles » (ex : Empress CAD®, Ivoclar Vivadent), plus récentes, sont assimilées aux céramiques feldspathiques car leurs propriétés sont très proches ; seul le procédé industriel de fabrication diffère.

Ce sont des céramiques cosmétiques très esthétiques car riches en phase vitreuse (55 à 70 %). De par leur faible phase cristalline (30 à 45%), elles restent fragiles et nécessitent d’être impérativement collées. Elles existent en différentes tailles de blocs avec différents degrés de translucidité. Des blocs avec dégradés de teintes (Trilux®, Vita, Empress® CAD Multi, Ivoclar Vivadent, CEREC® blocs PC, Sirona), permettent de faire varier la saturation de la teinte et la translucidité du collet au bord libre. Cependant ces céramiques demeurent particulièrement translucides et peineront à masquer un moignon dyschromié.

Les vitrocéramiques renforcées sont apparues en 2005 avec l’e.max CAD® (Ivoclar Vivadent), vitrocéramique renforcée au di silicate de lithium, et se sont étoffées plus récemment avec des vitrocéramiques renforcées au silicate de lithium et à la zircone (Suprinity®, Vita, Celtra Duo®, Dentsply). L’augmentation de leur phase cristalline (environ 70 %) a permis un bond des propriétés mécaniques autorisant des épaisseurs de restaurations plus réduites. Les blocs existent également en différents niveaux de translucidité, voire d’opalescence (e.max Impulse Opal®, Ivoclar Vivadent), ou encore de luminosité (e.max Impulse Value®, Ivoclar Vivadent). Par contre, tous ces blocs n’existent pas encore en dégradés de teintes.

2. Les composites

Les composites sont étrangement d’apparition très récente et leur gamme est encore limitée (ex : Lava™ Ultimate, 3M Espe, Cerasmart™, GC, Ambarino® High Class, Creamed). Ils présentent des propriétés mécaniques intéressantes mais surtout une excellente usinabilité permettant des restaurations très fines. Ils existent en 2 gammes de translucidité. Cependant leur maquillage reste délicat et plus limité que celui des céramiques ; quant à sa durée dans le temps elle est soumise à discussion.

3. Les hybrides

Les hybrides sont actuellement représentés par un seul matériau (Enamic®, Vita). Ce matériau est constitué d’une trame céramique (75 %) renforcée par injection et interpénétration de résine. Cette structure innovante permet, par rapport à la céramique, de réduire sa fragilité et d’améliorer son usinabilité et, par rapport au composite, d’améliorer sa résistance à l’usure3. Il existe en plusieurs teintes sur 2 niveaux de translucidité. Son maquillage est photo-polymérisable comme pour les composites.

Le choix du matériau

Si l’usinage de la pièce prothétique (et donc l’insertion du bloc dans la machine outil) intervient une fois la thérapeutique bien engagée, le choix du matériau doit être anticipé et réfléchi au démarrage du cas.

Parmi les facteurs clés à prendre en compte, nous avons retenu: la teinte, l’usinabilité, le collage, la résistance mécanique, et le maquillage.

1. La teinte

Si l’on parle communément de teinte ou de couleur, les caractéristiques chromatiques d’une dent sont plus complexes et intègrent la teinte, la saturation, la luminosité, la translucidité et l’opalescence4. Ces paramètres doivent être appréhendés avant les étapes de préparation, souvent à l’aide de photographies.

La teinte, la saturation et la luminosité relèvent de la dentine et de l’épaisseur d’émail. Plus l’émail sera fin, plus la dentine sera visible et la dent saturée. La luminosité dépend de la quantité de lumière réfléchie. Un émail très translucide donnera une dent peu lumineuse. Ainsi, cette translucidité sera parfois recherchée, parfois évitée.

D’une manière générale, les céramiques feldspathiques sont plus translucides que les vitrocéramiques renforcées.

Tous les familles de matériaux existent selon au moins 2 niveaux de translucidité.

Les blocs HT (high translucidity) ou T (translucidity), moins lumineux, sont conçus pour remplacer l’émail essentiellement. Leurs valeurs de teintes sont d’ailleurs données par les fabricants pour des épaisseurs de 0,8 à 1 mm Fig. 1.

Les blocs LT (low translucidity), plus lumineux, viseront à remplacer la dentine et l’émail. Leurs valeurs de teintes sont données pour des épaisseurs de 1,2 à 1,5mm Fig. 1.

Les blocs avec dégradés permettent de mieux concilier saturation et luminosité avec une transition douce de ces 2 paramètres du collet vers le bord libre.

Certains blocs se différencient par leurs particularités. Ainsi, les blocs RealLife® (Vita), sont des blocs de céramique feldspathique possédant une structure en 3D avec un noyau opaque et saturé dentinaire et une enveloppe translucide amélaire reproduisant le dégradé de couleur curviligne entre la dentine et l’émail naturels.

La gamme e.max® comprend par ailleurs des blocs adaptés aux restaurations par facettes pelliculaires et couronnes antérieures plutôt claires permettant de jouer sur le degré de luminosité (e.max® Impulse Value, Ivoclar Vivadent) ou encore sur le degré d’opalescence (e.max® Impulse Opal, Ivoclar Vivadent).

Afin de guider au mieux le praticien, l’utilisation de teintiers de « moignons » est recommandée (ex : Natural Die Material, Ivoclar) Fig. 2. Des tables de correspondance présentes dans les modes d’emploi des blocs permettent de confronter la teinte du substrat et la teinte désirée afin de déterminer le bloc (teinte/translucidité) le plus adapté à la situation clinique.

teintier-de-moignon

La société Ivoclar Vivadent a également développé une application web et iPad (IPS e.max shade selection wheel), qui intègre toutes les correspondances possibles, destinée à faciliter le choix des blocs e.max® CAD de cette manière.

Enfin, signalons que sur des supports très dyschromiés, un éclaircissement sera toujours un préalable indispensable : les blocs LT ne permettant pas de masquer les dyschromies trop importantes (ex : ND8, ND9 du teintier Natural Die d’Ivoclar Vivadent), il sera alors nécessaire de passer par des blocs MO ou HO (moyenne ou haute opacité) et une stratification en laboratoire.

2. L’usinabilité

Il s’agit pour un matériau de son aptitude à être facilement usiné, sur de faibles épaisseurs, sans se fracturer, en respectant la forme géométrique modélisée au départ, tout en conservant un état de surface satisfaisant.

Sur ce point les composites et les hybrides présentent un avantage notable vis à vis des céramiques. Si nous devions hiérarchiser les matériaux en fonction de leur usinabilité nous aurions : composites > hybrides > vitrocéramiques renforcées > céramiques conventionnelles.

Ainsi dans les cas de zones de grandes finesses (cas des facettes sans préparation, bords fins) les matériaux composites ou hybrides permettront de reproduire plus fidèlement les détails Fig. 3.

comparaison-materiau-hybride-et-ceramique

3. Collage ou scellement ?

Les matériaux céramiques ou composites restent des matériaux fragiles et doivent être collés au substrat dentaire.

La microstructure des vitrocéramiques renforcées a permis d’accroitre leurs propriétés mécaniques : la résistance à la flexion est ainsi passée de 60 MPa avec les feldspathiques à 360-420 MPa, se rapprochant des valeurs des céramiques alumineuses.

Ainsi, à condition d’augmenter les épaisseurs des préparations (0,2 à 0,5 mm), les restaurations (couronnes) peuvent, dans ces conditions et avec ce type de céramique, être assemblées par scellement adhésif (CVI MAR, ex : Fuji plus, GC).

Cela peut être un élément déterminant dans les cas de moignons dyschromiés et avec des limites intrasulculaires.

Pour les céramiques collées, le rendu final sera toujours évalué avant collage à l’aide de pâtes d’essai. Il reste ainsi possible de jouer sur 1 à 2 nuances de teintes, bien que l’influence de la teinte de la colle ou du composite de collage ait tendance à diminuer inversement à l’épaisseur de la restauration5.

4. Résistance mécanique

Bien que les épaisseurs de matière nécessaires dans les restaurations antérieures soient proches, selon les matériaux elles peuvent varier sensiblement, d’autant plus que la situation clinique sera proche des valeurs minimales requises.

Dans ces cas et dans ceux où les contraintes occlusales pourraient être majorées, il sera préféré l’emploi des matériaux les plus résistants en vitrocéramique renforcée.

5. Le maquillage

Contrairement au maquillage des céramiques qui subit un traitement thermique et permet, par le jeu des très nombreux maquillants (shades et stains), un travail poussé sur le jeu des couleurs (voire simuler une transparence), le maquillage des composites et des matériaux hybrides, photo polymérisable, sera plus sommaire. Ces derniers seront ainsi plutôt réservés à des indications cliniques où la caractérisation ne sera pas trop poussée.

Conclusion

Dans les cas de restaurations antérieures en CFAO directe, le choix du matériau est un élément déterminant du résultat final que ne peuvent pas rattraper en cas d’erreur le maquillage et le collage. Parmi les nombreux facteurs à prendre en compte nous retiendrons : la teinte finale, la teinte du substrat, l’usinabilité, les épaisseurs de matière, le travail de maquillage et la nécessité du collage.

À lire

1. Zimmer S1, Göhlich O, Rüttermann S, Lang H, Raab WH, Barthel CR. Long-term survival of Cerec restorations: a 10-year study. Oper Dent. 2008 Sep- Oct;33(5):484-7.
2. Reich S, Fiedlar K. Cerec anterior crowns: restorative options with monolithic ceramic materials. Int J Comput Dent. 2013;16(4):295-315.
3. Dirxen C, Blunck U, Preissner S. Clinical performance of a new biomimetic double network material. Oper Dent J 2013, Sept6; 7:118- 222.
4. Della Bona A, Nogueira AD, Pecho OE. Optical properties of CAD-CAM ceramic systems. J Dent. 2014 Sep;42(9):1202-9.
5. Calgaro PA, Furuse AY, Correr GM, Ornaghi BP, Gonzaga CC. Post-cementation colorimetric evaluation of the interaction between the thickness of ceramic veneers and the shade of resin cement. Am J Dent. 2014 Aug;27(4):191-4.

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A propos de l'auteur

Dr. Karim NASR

Docteur en Chirurgie Dentaire
Maître de Conférences des Universités - Praticien hospitalier
Faculté de Chirurgie Dentaire de Toulouse - CHU de Toulouse
Praticien libéral

Dr. Olivier CHABRERON

Docteur en Chirurgie Dentaire
Assistant Hospitalo-Universitaire
Faculté de Chirurgie Dentaire de Toulouse - CHU de Toulouse
Praticien libéral

Dr. Bertrand ARCAUTE

Docteur en Chirurgie Dentaire
Assistant Hospitalo-Universitaire
Faculté de Chirurgie Dentaire de Toulouse - CHU de Toulouse
Praticien libéral

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