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Matériaux actuels pour les restaurations partielles

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Les restaurations partielles collées (RPC) regroupent l’ensemble des restaurations adhésives n’impliquant pas de recouvrement corono-périphérique de la dent : “les facettes” ou RAC (Restaurations Adhésives en Céramique), les inlays (lorsqu’elles ne recouvrent aucune cuspide), les onlays (lorsqu’elles recouvrent au moins une cuspide) et les overlays (lorsqu’elles recouvrent toutes les cuspides). Dans le respect du gradient thérapeutique, elles préservent au maximum les tissus dentaires résiduels, ce qui facilite une ré-intervention ultérieure.

Elles peuvent être réalisées par technique directe (au fauteuil ou par Conception et Fabrication Assistée par Ordinateur (CFAO), semi-directe ou indirecte (au laboratoire de prothèse, par technique traditionnelle ou par CFAO).
A l’heure actuelle, trois grandes catégories de matériaux peuvent être utilisées pour réaliser ces restaurations partielles : les alliages (en particulier les alliages précieux), les composites et presque toutes les céramiques (vitrocéramiques en particulier, céramiques infiltrées voire poly-cristallines). Nous verrons d’abord quels matériaux peuvent être employés quand ni le praticien, ni le prothésiste n’est équipé d’un système de CFAO, c’est à dire les méthodes traditionnelles qui peuvent être employées. Puis nous verrons quels matériaux peuvent être usinés pour réaliser des RPC. Enfin, nous décrirons quels matériaux peuvent être utilisés pour l’assemblage des RPC et donnerons le temps par temps à suivre en fonction du système adhésif et de la colle choisis.

Les matériaux disponibles pour obtenir des RPC de façon traditionnelle, sans CFAO

Procédé artisanal de montage par couches

La céramique d’émaillage

Les céramiques d’émaillage constituent, avec les vitrocéramiques, la famille des céramiques feldspathiques : ce sont des céramiques vitreuses, constituées essentiellement d’une matrice de verre, au sein de laquelle se forment quelques cristaux (feldspaths, leucite, …) épars et colorée par des pigments minéraux.
Elles se présentent sous forme de poudre et de liquide. Elles sont appliquées directement au pinceau sur le “dye”, en couches successives. A chaque application d’une nouvelle couche, la pièce devra être frittée.
Elles permettent un très bon rendu optique du fait de la stratification et de la prédominance de la phase vitreuse. Ainsi, elles pourront être utilisées pour émailler l’infrastructure d’une RPC en céramique (par exemple en vitrocéramique ou en céramique infiltrée).
En revanche, leurs propriétés mécaniques sont trop faibles pour qu’elles puissent être utilisées pour réaliser des restaurations partielles [1], [2], notamment du fait de l’incorporation de bulles d’air et de porosités lors du montage. Autant de défauts qui constituent des points d’initiation de fissures.

Le composite

Les RPC en composite peuvent être réalisées de façon traditionnelle : le prothésiste procède alors par stratification progressive de plusieurs incréments. C’est actuellement la méthode la plus utilisée en France pour réaliser des inlays/onlays en composite [3].

Par rapport à la technique directe, la réalisation de RPC présente plusieurs avantages. D’une part, cela permet d’augmenter le taux de conversion final de la restauration, c’est-à-dire la proportion de monomères ayant réagi par rapport au nombre initial total de monomères – et par conséquent, d’améliorer les propriétés mécaniques et la biocompatibilité de la restauration. En effet, avant polymérisation, la matrice des composites est constituée de monomères. L’étape de polymérisation permet de lier ces monomères sous forme de chaînes polymères. Or, dans un composite direct, la polymérisation n’est jamais complète et environ 40 à 50 % des monomères restent libres ou partiellement liés. Pour majorer le taux de conversion, le prothésiste peut – après avoir monté ses couches et les avoir photo-polymérisées – avoir recours à différentes techniques, par exemple un traitement thermique (à 100-120°C environ), une polymérisation sous atmosphère d’azote ou une polymérisation sous pression modérée.

D’autre part, cette méthode limite les contraintes liées au retrait de polymérisation par rapport à une technique directe, puisque seule la colle se rétracte au moment de la polymérisation.

Procédé de pressée (vitrocéramiques)

Ces céramiques ont une composition légèrement différente de celle des céramiques d’émaillage. En effet, elles subissent un traitement thermique particulier qui permet d’augmenter et d’optimiser leurs propriétés mécaniques. C’est pourquoi, ces vitrocéramiques sont régulièrement qualifiées de « renforcées ». En fonction du type de cristal qu’elles contiennent, on distinguera les vitrocéramiques enrichies à la leucite (PM9 (Vita), IPS Empress Esthetic (Ivoclar), Authentic (Jensen), OPC (Pentron), CZR (Noritake), Finesse All Ceramic (Dentsply)) et les vitrocéramiques enrichies en disilicate de lithium (e.max Press (Ivoclar)).

Elles sont obtenues par un procédé en deux temps. Tout d’abord, l’industriel fabrique un lingotin de céramique au sein duquel le nombre et la taille des cristaux sont parfaitement contrôlés grâce à un traitement thermique par paliers appelé “céramisation” : un premier palier à basse température pour favoriser la germination des cristaux puis un second palier à plus haute température pour favoriser leur croissance. Dans un second temps, ce lingotin est ramolli par le prothésiste par cuisson, « pressé » et injecté au sein d’un cylindre en matériau réfractaire contenant la forme de la pièce prothétique à réaliser.

Un lingotin n’est généralement constitué que d’une seule teinte – le prothésiste doit donc réaliser plusieurs pressées s’il veut obtenir une RPC de différentes teintes – mais il existe aujourd’hui des lingotins de teinte dégradée (par exemple e.max Press multi).

Procédé InCeram (céramiques infiltrées) : technique de la barbotine

Conçues par le Dr. Michael Sadoun dans les années 1980, ces céramiques contiennent une proportion plus importante de cristaux et moins de verre que les céramiques feldspathiques décrites précédemment. Ceci leur confère des propriétés mécaniques plus importantes, ainsi qu’un rendu optique plus opaque qui pourra être utile dans certaines situations cliniques. Toutefois, les céramiques infiltrées sont peu utilisées pour les RPC.
En fonction de la nature chimique des cristaux, on distinguera respectivement les céramiques infiltrées à base d’oxyde de magnésium et d’aluminium (In-Ceram Spinell), à base d’alumine (In-Ceram Alumina) et à base d’alumine et de zircone (In-Ceram Zirconia).

Elles peuvent être obtenues par la technique de la barbotine, qui n’est plus très utilisée en France même si certains praticiens d’excellence considèrent encore cette technique comme une référence du tout-céramique.
Le procédé In-Ceram classique consiste, dans un premier temps, à tremper le dye (réalisé en plâtre absorbant) dans une suspension de cristaux : la barbotine. Sous l’effet de l’absorption du solvant par le plâtre, les cristaux s’adsorbent sur le modèle. Par une cuisson de frittage partiel, on va favoriser l’agglutination des cristaux entre eux et donc leur densification. Dans un second temps, du verre est infiltré au sein des pores de ce réseau cristallin ce qui permet l’obtention de l’infrastructure de la restauration partielle. Une dernière étape d’émaillage permettra l’obtention de la restauration partielle finale.

Méthode de coulée à cire perdue (alliages précieux)

Les restaurations partielles en or sont souvent considérées comme un “gold standard” [4], [5], [6], [7]. L’or n’est pas retrouvé à l’état « pur » dans les restaurations prothétiques mais sous forme d’un alliage dit « précieux » : c’est-à-dire qu’il contient au minimum 75 % de son poids en or (Au) et/ou platine (Pt) ou palladium (Pd).
Les inlays/onlays/overlays précieux sont réalisés par le prothésiste, à partir d’un montage en cire préfigurant la future pièce prothétique. Puis, celui-ci est placé sur une tige de coulée et mis en revêtement dans un plâtre réfractaire. Le traitement thermique permettra d’abord de calciner la cire, puis de couler le métal précieux : c’est la fameuse technique de la cire perdue.

Outre sa durabilité, l’or présente l’avantage d’être hautement résistant à la corrosion, biocompatible et ductile (le brunissage des bords de la restauration permet d’obtenir une adaptation parfaite aux limites, en particulier pour les alliages à base d’or de type I). Avec un recul clinique de plus de 30 ans, il constitue un matériau de choix pour les RPC postérieures, en particulier en cas de bruxomanie. En revanche, son coût élevé, son côté inesthétique et les problématiques liées au poly-métallisme peuvent compromettre son indication.

Les matériaux permettant d’obtenir des RPC par CFAO

inlay-systeme-adhesif-mr2Les composites usinables

Le Lava-Ultimate (3M ESPE)

Il s’agit d’un composite classique, avec d’un côté la matrice résineuse, à base de monomères et oligomères ester-diméthacryliques (phase organique) et de l’autre les charges, minérales et pré-polymérisées pour ce composite. Entre les deux phases, un silane sert d’agent de couplage. L’avantage des blocs de composite usinables par rapport aux composites traditionnels est la possibilité d’augmenter, d’une part, le taux de charges et, d’autre part, le taux de conversion, ce qui résulte dans un matériau et une RPC aux propriétés mécaniques et biologiques encore améliorées par rapport aux RPC en composite réalisées de façon traditionnelle (fig.1a et b). En effet, les blocs sont polymérisés industriellement, donc avec des technologies plus poussées que celles dont dispose le prothésiste. De plus, les composites traditionnels indirects doivent être suffisamment malléables pour pouvoir être modelés par le prothésiste et comportent donc plus de matrice résineuse et moins de charges. Dans le cas du Lava Ultimate, le taux de charges atteint 80 % en poids (contre une limitation à environ 70 % en poids pour les composites traditionnels).

L’Enamic (Vita)

Conçu par le Dr. Michael Sadoun et commercialisé récemment (mars 2013), il s’agit d’une nouvelle catégorie de composite avec une structure différente des « composites classiques ». Parfois nommé « céramique hybride », « composite poreux à squelette céramique » ou « composite infiltré », il s’agit du premier composite à structure inversée : d’un côté une matrice de céramique et de l’autre un renfort (ou liant) polymère (fig.2). Il présente ainsi des propriétés mécaniques intermédiaires entre émail et dentine et semble réaliser un bon compromis parmi les matériaux actuellement disponibles pour réaliser des RPC [8], [9]. Ne nécessitant pas de traitement thermique après usinage, il est particulièrement apprécié par les prothésistes et les praticiens souhaitant optimiser leur temps de travail ; plusieurs millions de blocs ont déjà été vendus.

Notons que ces deux matériaux sont plutôt réservés, pour le moment, aux RPC postérieures car il n’existe pas encore de bloc dégradé en teinte. Le résultat esthétique est donc obtenu par maquillage de la RPC monolithique à l’aide de composites fluides teintés, qui peuvent s’user assez rapidement. Notons aussi qu’un nouveau bloc en composite commercialisé par la firme GC vient de faire son apparition (CERASMART).

collage-photopolymerisation-sous-glycerine

Les céramiques usinables

Les vitrocéramiques

Constituées d’une matrice vitreuse à base d’oxydes ternaires alcalins (Na2O, K2O, Li2O, alumine Al2O3, silice SiO2) et d’au moins 30 % en volume de charges cristallines telles que la leucite (Empress CAD – Ivoclar)(fig.3a et b), les feldspaths (Mark II, TriLuxe, TriLuxe forte et RealLife – Vita, Cerec blocks Sirona), le disilicate de lithium (e.max CAD – Ivoclar) et, de manière plus récente, le monosilicate de lithium et la zircone (Suprinity – Vita et Celtra Duo Dentsply/Degudent) [10].

La cuisson dans un four à céramique est obligatoire pour l’e.max et le Suprinity car la couleur du bloc est différente de celle des tissus dentaires. Pour les autres blocs, la nécessité d’un traitement thermique dépendra de la situation clinique : il sera plutôt recommandé en cas de contraintes mécaniques importantes ou bien lorsqu’un maquillage est nécessaire pour améliorer l’intégration esthétique de la restauration.

Les céramiques infiltrées

Il s’agit des céramiques issues du procédé InCeram, disponibles cette fois sous forme de blocs à usiner par CFAO. Existant en trois déclinaisons : Spinelle (MgAl2O4 + verre), Alumina (Al2O3 + verre) et Zirconia (Al2O3 + ZrO2 + verre), ces blocs ont une structure cristalline préfrittée poreuse, qui est infiltrée par un verre et frittée après usinage. Ces blocs sont rarement utilisés pour des RPC.

Les céramiques polycristallines

L’alumine et la zircone sont moins utilisées que les céramiques à matrice vitreuse pour les RPC car elles présentent une faible aptitude au collage et ne sont pas accessibles par des techniques traditionnelles. Cependant, la zircone peut être indiquée lorsque des propriétés mécaniques importantes sont nécessaires, comme c’est le cas pour des overlays volumineux en secteur postérieur. On parlera alors de restaurations partielles en “full zircone”. Actuellement, les nano-composites Ce-TZP-A (ceria-stabilized tetragonal zirconia polycristalline and alumina) sont les céramiques les plus performantes pour cette application (ténacité à la rupture : 19 MPa.m1/2 ; résistance en flexion : 1400MPa et résistance à la dégradation à basse-température) [11].

L’assemblage

Les RPC doivent être collées. Quand la rétention est importante, un scellement adhésif au ciment verre ionomère modifié par adjonction de résine (CVI-Mar) est envisageable, mais la littérature montre que le joint vieillit alors rapidement.

Les colles

La colle est un matériau inséré entre le substrat dentaire et l’intrados de la RPC qui, sous l’effet d’une réaction de polymérisation, va durcir et unir ces deux surfaces. En fonction de leur composition chimique, on distingue trois familles de colles : les colles sans et avec potentiel adhésif et les colles auto-adhésives. En fonction du mode de polymérisation, on distingue 3 familles de colle : chémo ou photo-polymérisable ou duale (la polymérisation est activée par la lumière bleue et chimiquement).

Sans potentiel adhésif

Les colles sans potentiel adhésif nécessitent l’application d’un système adhésif avant l’application de la colle composite. L’adhésif permet l’adhésion aux tissus dentaires et la colle composite permet de “remplir” l’espace entre la dent et l’intrados prothétique. Dans ce type de colle, le composite est « classique » car il n’a pas de groupements spécifiques pour adhérer à la dent ou à la prothèse. Ces colles peuvent être photopolymérisables (par exemple : Variolink Veneer – Ivoclar Vivadent ; RelyX Veneer – 3M Espe) ou à prise duale (par exemple : NX3 – Kerr ; Multilink Automix – Ivoclar Vivadent ; RelyX ARC – 3M Espe ; Calibra Esthetic – Denstply).

Avec potentiel adhésif

Les colles avec potentiel adhésif ont également une composition proche des composites fluides, à l’exception que la matrice résineuse porte des groupements chimiques particuliers capables d’adhérer respectivement à la dent et à la prothèse. On pourra citer par exemple le Panavia (Kuraray), à prise duale, qui contient des groupements MDP-10 (Méthacryloyloxydecyl Dihydrogen Phosphate) qui favorisent tout particulièrement l’adhésion aux céramiques, ou encore le Superbond, chémopolymérisable, qui contient des groupements 4-META (4-méthacryloyloxyéthyl trimellitate anhydre) qui favorisent l’adhésion à différents substrats (notons que le Superbond présente la particularité d’être essentiellement composé de chaines linéaires de polyméthylméthacrylate et qu’il est non chargé. Il conserve donc une certaine plasticité après polymérisation. Ceci explique son intérêt pour les intrados métalliques – il va pouvoir se déformer au gré du fluage de l’alliage, et son intérêt en prothèse plurale, il peut se déformer au gré des mouvements entre les différents piliers. Ce dernier intérêt ne concerne pas les RPC.) [12].

Malgré leur capacité d’adhésion aux tissus dentaires, ces colles avec potentiel adhésif nécessitent un mordançage voire l’application d’un primer.

Auto-adhésives

Il s’agit de la seule famille de colle qui ne nécessite pas de traitement préalable des tissus dentaires. Ce sont aussi des colles composites, mais elles possèdent des groupements réactifs à base de phosphates qui leur permettent de coller sur la dent et sur les matériaux prothétiques. Plusieurs colles sont commercialisées dans cette famille (Maxcem Elite – Kerr ; SpeedCem – Ivoclar Vivadent ; Bifix SE – Voco, G-Cem – GC…). La plus documentée est, à ce jour, le RelyXUnicem – 3M Espe.
Toutes les colles (sans/avec potentiel adhésif et auto-adhésives) nécessitent une étanchéité parfaite et une isolation préalable de la dent sous champ opératoire. Lorsque cela n’est vraiment pas possible, il est recommandé d’utiliser une colle auto-adhésive : rapide d’utilisation, elle permettra de limiter les contaminations en peropératoire.

Quel mode de polymérisation choisir ?

Les colles photopolymérisables sont recommandées lorsque l’épaisseur de la RPC est fine (< 2 mm), comme c’est généralement le cas pour les facettes, et si sa teinte est assez translucide. Les avantages de ce mode de polymérisation sont un temps de travail illimité et une prise rapide. En revanche, le risque est la persistance de monomères non polymérisés en profondeur, ce qui pose des problèmes de biocompatibilité, de moindre résistance mécanique et de vieillissement.
Les colles chémo-polymérisables ont peu d’intérêt pour les RPC.
Les colles à prise duale sont les plus polyvalentes pour les RPC. Elles ont de nombreux avantages : elles limitent le risque de polymérisation incomplète quand la RPC est épaisse par endroits ou que la teinte est relativement opaque ; leur temps de travail est correct et leur prise peut être rapide, au moins au niveau des limites (accessibles à la photo-polymérisation), ce qui facilite le retrait des excès.
Attention toutefois aux incompatibilités possibles entre les SAM et les colles chémo-polymérisables ou duales (à vérifier auprès des fabricants).

Le tableau 1 résume quels sont les différents types de colles et quelles sont leurs indications en ce qui concerne les RPC.

differentes-colles-pour-assembler-rpc

Le temps par temps de l’assemblage

Traitement de l’intrados prothétique

Pour les composites

Après l’essai clinique, l’intrados de la restauration sera nettoyé à l’aide d’alcool ou d’acide phosphorique.Le traitement de surface de l’intrados des inlays/onlays/overlays en composite débute par une étape de sablage par projection de particules d’alumine de 50 microns, sous pression.Une fois la surface de l’intrados rincée et séchée (jusqu’à obtenir un aspect mat), on procédera à l’application d’un silanol (souvent appelé silane, mais ce dernier est en général pré-hydrolysé en silanol pour être prêt à l’emploi) [14]. Il faudra soit attendre au moins 3 minutes si on laisse la RPC composite à l’air libre, soit chauffer la RPC pendant environ 1 minute (par exemple à l’aide d’une lampe à photopolymériser utilisée à proximité de la restauration, ou à l’aide d’un petit “sèche-cheveux” ou de tout autre dispositif dégageant de la chaleur). Ceci permet d’optimiser la polycondensation du silanol et donc de le rendre plus efficace pour la suite du collage. En ce qui concerne l’Enamic, le traitement de surface est légèrement différent. Il débute par une étape de mordançage de l’intrados à l’aide d’acide fluorhydrique à 5 % durant 60 secondes, rinçage et séchage jusqu’à obtenir un aspect mat de l’intrados. Puis, il passe par l’application d’un silanol, selon le même protocole que précédemment.

ips-empress-apres-traitementPour les céramiques

Le traitement de surface de l’intrados prothétique dépendra de la nature de la céramique.

Pour les vitrocéramiques, le traitement de référence débute par un mordançage à l’acide fluorhydrique à 5-10 % durant 20 secondes pour le Suprinity et l’e.max (fig. 4), durant 30 secondes pour le Celtra Duo et durant 60 secondes pour toutes les autres céramiques vitreuses (fig. 5). Placer ensuite la restauration dans un bac à ultrasons durant 3 minutes. Après rinçage et séchage (jusqu’à l’obtention d’un aspect blanc crayeux), il est recommandé d’éliminer les éventuels petits dépôts blanchâtres avec une microbrosse (éventuellement imbibée d’alcool) puis d’appliquer un silane sur la surface selon le même procédé que précédemment.

Concernant les céramiques infiltrées, le traitement débute par un sablage de l’intrados à l’aide de particules d’oxydes d’alumine de 50 µm, suivi d’un dépôt de silice (Cojet – 3M-ESPE au cabinet ou Rocatec – 3M-ESPE au laboratoire de prothèse), d’un rinçage et séchage. Terminer par l’application classique d’un silanol.

Pour le collage des céramiques polycristallines, en particulier des nano-composites Ce-TZP-A, les données de la littérature recommandent, pour débuter, un sablage doux avec des particules d’alumine (50 µm) sous pression réduite (0,05 MPa ou 0,5 bar) [13]. Puis, d’utiliser une colle avec potentiel adhésif à groupements phosphates (Panavia – Kuraray).

Pour les alliages précieux

A l’inverse des composites et des céramiques, qui contiennent de la silice, le métal n’en contient pas. Or, celle-ci est nécessaire pour le collage car elle permet la liaison entre l’intrados prothétique et la colle via le silane. Il faut donc en déposer sur l’intrados métallique pour pouvoir le coller. Pour cela, on utilise un système en trois temps : soit directement au cabinet dentaire si vous possédez une sableuse (Cojet – 3M-ESPE), soit au laboratoire de prothèse (Rocatec – 3M-ESPE).
Dans un premier temps, un sablage classique à l’alumine (Al2O3) de diamètre 50 µm est réalisé : ceci permet de créer des microrugosités sur la surface. Dans un second temps, on dépose de la silice sur l’intrados ; au cabinet, ceci est obtenu par sablage réactif en projetant des particules d’alumine enrobées de silice (Cojet) sur la surface. Enfin, le dernier temps consiste en un dépôt de silanol en surface, selon le même temps par temps que précédemment (notons juste que les silanes qui fonctionnent le mieux sur les alliages sont légèrement différents de ceux qui fonctionnent le mieux sur les céramiques et composites. En général les premiers sont appelés “metal primer” tandis que les seconds sont appelés “ceramic primer”.) [14].

Notons que les colles auto-adhésives sont censées adhérer à l’intrados de façon intrinsèque. Toutefois, il est généralement recommandé de réaliser un traitement de surface de l’intrados, en particulier pour majorer la rugosité et donc la surface développée pour le collage.

Traitement du substrat dentaire

Isolation de la dent
La dent préparée est isolée à l’aide d’un champ opératoire (digue impérative)

Nettoyage/décontamination de la surface dentaire

  • Si vous avez réalisé une provisoire ou poudré la surface dentaire pour réaliser l’empreinte optique : le ciment de scellement ou la poudre a pollué la surface ; il est donc nécessaire de l’éliminer avant d’appliquer le système adhésif. Ceci peut se faire par air-abrasion à l’oxyde d’aluminium (27 ou 50µm) ou éventuellement en appliquant de la ponce (sans fluorures) à l’aide d’une brossette.
  • Notons qu’il est préférable de sceller la dentine au plus vite après la fin du fraisage et avant l’empreinte ; c’est ce qu’on appelle l’IDS (Immediate Dentin Sealing) [15]. Telle qu’elle a été décrite, l’IDS consiste à appliquer un système adhésif de type mordançage-rinçage (MR) en 3 temps, en le polymérisant complètement, au travers d’une couche de glycérine. L’application d’une base intermédiaire de composite fluide est une variante de l’IDS adaptée aux préparations comprenant des contre-dépouilles (préparations pour RPC postérieures en particulier), qui permet d’allier scellement dentinaire immédiat et préservation tissulaire.
  • Si vous avez réalisé une IDS, il suffira de sabler légèrement la préparation (légèrement pour ne pas éliminer toute l’épaisseur d’adhésif déposée lors de l’IDS).

Mordançage et application du système adhésif

Pour une colle sans potentiel adhésif

  • Si vous avez réalisé une IDS, il suffit de mordancer uniquement l’émail 30 à 45 secondes, rincer, sécher et appliquer la résine adhésive (“bonding”) avant collage. Pour limiter le risque d’insertion incomplète de la RPC du fait d’une surépaisseur d’adhésif, certains praticiens ne photopolymérisent pas cette couche de résine adhésive ; cette technique entraine toutefois un risque de polymérisation incomplète des monomères.
  • Si vous n’avez pas réalisé d’IDS, l’hybridation dentinaire se fait de la façon suivante :
  • Si vous utilisez un système auto-mordançant (SAM), mordancer l’émail si possible (15 secondes environ) puis appliquer le SAM selon les recommandations du fabricant et le photopolymériser. En cas de risque d’incompatibilité entre le SAM et une colle duale ou photopolymérisable, appliquer une couche de résine non chargée qui servira “d’isolant”, et la polymériser.
  • Si vous utilisez un système MR, l’appliquer selon les recommandations du fabricant (et inhiber les métalloprotéinases matricielles si possible, par exemple en choisissant un gel de mordançage contenant du chlorure de benzalkonium ou en appliquant de la chlorhexidine après mordançage).

Pour une colle avec potentiel adhésif

Suivre les recommandations du fabricant. Le traitement de la surface dentaire nécessite :

  • dans le cas du Panavia : l’application de primer A+B
  • dans le cas du Superbond : un mordançage de l’émail à l’acide phosphorique (activateur rouge) et de la dentine à l’acide citrique et au sulfate ferrique (activateur vert)

Pour une colle auto-adhésive
Vous pouvez éventuellement mordancer l’émail avant collage de la pièce prothétique.

Temps par temps du collage

  • utiliser un stick de préhension pour maintenir la pièce
  • bien repérer l’axe d’insertion
  • mettre la colle en excès sur l’intrados (attention au risque d’échec en cas de manque : sensibilités post-opératoires, mauvaise étanchéité…)
  • bien insérer la pièce à fond, vérifier l’adaptation et maintenir une pression constante (pendant tout le temps de la gélification s’il s’agit d’une colle duale ou jusqu’à la fin de la polymérisation s’il s’agit d’une colle photopolymérisable)
  • prendre le temps d’éliminer les excès : fil dentaire, mini CK6, bistouri…
  • appliquer un gel de glycérine (par exemple du gel d’échographie) sur les limites
  • photopolymériser (toujours au moins deux fois la durée indiquée par le fabricant)
  • déposer la digue
  • régler l’occlusion si nécessaire (diduction en particulier) : attention à bien dire au patient de ne pas serrer trop fort tant que les réglages n’ont pas commencé (sinon il y a un risque d’éclat, en particulier au niveau des crêtes marginales en postérieur ou du bord libre en antérieur). Au fil des réglages, le patient peut serrer de plus en plus fort.
  • polir les limites et les zones où l’occlusion a été ajustée.
  • un suivi dans le temps est très important pour assurer la pérennité de la RPC

Conclusion

Nous avons évoqué les différents matériaux qui permettent la réalisation et l’assemblage des RPC. Nous avons donné des éléments concernant le choix de la colle la plus adaptée en fonction de la situation clinique. Pour ce qui est du choix du matériau le plus adapté pour la RPC, il dépendra de paramètres liés au patient d’ordre esthétique, mécanique ou biologique, ainsi que de paramètres liés au praticien et de facteurs techniques, que nous avons déjà évoqué dans d’autres articles [16], [17].

Enfin, les matériaux permettant la réalisation et l’assemblage des RPC sont en plein essor, comme le montre le développement des hybrides, des vitrocéramiques et des colles auto-adhésives, ce qui nous offre, en tant que praticiens, de nouvelles possibilités, mais qui nécessite une mise à jour fréquente de nos connaissances.

Bibliographie

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13. Kern M, Swift EJ. Bonding to zirconia. J Esthet Restor Dent. 2011 Apr; 23 (2) : 71-2.
14. Fron H, Tirlet G, Attal JP. Les silanes : mieux les connaître pour mieux les utiliser. Info Dent 2009 ; 91 (20) : 2-7.
15. Magne P. Immediate dentin sealing : a fundamental procedure for indirect bonded restorations. J Esthet Restor Dent. 2005; 17 (3) : 144-54.
16. Fron Chabouis H, Attal JP. Les restaurations partielles postérieures esthétiques en 2014 : choix du matériau en méthode indirecte. Les entretiens de Bichat 2014 : 1-6.
17. Fron Chabouis H, Prot C, Attal JP. Restauration partielle indirecte : composite ou céramique ? Real Clin 2014; 25 (4).

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A propos de l'auteur

Solène MARNIQUET

Consultation Biomimétique du Dr. Gil Tirlet, Hôpital Charles-Foix, Ivry-sur-Seine
Master 2 au sein de l'Unité de Recherche Biomatériaux Innovations et Interfaces (URB2i, EA4462, Université Paris Descartes, Montrouge)

Dr. Hélène FRON CHABOUIS

MCU-PH en Biomatériaux
Responsable du pôle CFAO à l'hôpital charles-Foix, Ivry-sur-Seine.
Unité de Recherche Biomatériaux Innovations et Interfaces (URB2i, EA4462, Université Paris Descartes, Montrouge)

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