En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés à vos centres d'intérêts.

LEFILDENTAIRE est un site réservé aux professionnels de la santé dentaire.
Si vous n'êtes​ pas un professionnel de santé, vous pouvez obtenir des réponses à vos questions par des experts sur Dentagora.fr en activant le bouton Grand Public.

Je suis un professionnel Grand Public

Évolution des guides chirurgicaux implantaires réalisés au cabinet dentaire

0

En implantologie, le placement idéal des implants ne dépend pas uniquement de la situation anatomique existante mais aussi et surtout du projet prothétique. La planification d’un traitement implantaire prend donc en compte l’ensemble des données osseuses, occlusales, parodontales, et esthétiques.

Une fois la position des implants déterminée, comment s’assurer que le geste chirurgical y soit parfaitement conforme ? La chirurgie guidée répond à cette problématique mais souffre aujourd’hui de son principal défaut, son coût (1). Nous présenterons ici un protocole simple, fiable et très peu couteux permettant de réaliser des guides chirurgicaux directement au cabinet par impression 3D.

La planification implantaire

La société américaine Blue Sky Bio propose un logiciel de planification en accès libre, BlueSky Plan, téléchargeable sur leur site internet. Il s’agit donc d’un outil gratuit et pourtant extrêmement complet.

LA-PLANIFICATION-IMPLANTAIRE

Fig 1 : « Matching » des données Dicom et STL

Comme tous les logiciels de ce type (Nobel Clinician, Simplant, CoDiagnostics…) il permet la superposition « Matching » des données DICOM radiologiques et STL cliniques du patient (2-3). Les données DICOM sont issues d’un cone beam ou d’un scanner, les données STL sont obtenues soit par une empreinte numérique avec caméra optique, soit par un scannage des modèles en plâtre provenant d’une empreinte physico-chimique. La superposition de l’ensemble de ces fichiers numériques peut se faire de différentes façons : automatique, dent par dent, point par point (Fig. 1).

Positionnement-implantaire-a-partir-d-un-wax-up-virtuel

Fig 2 : Positionnement implantaire à partir d’un wax up virtuel

Le projet prothétique peut être entièrement numérique en plaçant des dents virtuelles au niveau des édentements (Fig. 2), ou issu d’un scannage du wax-up réalisé au laboratoire (Fig. 3). Cela permet d’obtenir sur une même image la situation anatomique et le projet prothétique.

Positionnement-implantaire-issu-d-un-scannage-du-wax-up-de-laboratoire

Fig 3 : Positionnement implantaire issu d’un scannage du wax up de laboratoire.

On peut ainsi choisir la position, la longueur et l’axe des implants, anticiper le mode de liaison prothétique : transvisser si notre implant est dans l’axe prothétique idéal ou scellé avec un pilier angulé si l’émergence du puit de vis implantaire se trouve sur la face vestibulaire de notre future couronne, ou enfin poser l’indication d’une greffe osseuse si la situation anatomique est incompatible avec notre projet prothétique.

Plusieurs bibliothèques d’implants sont disponibles mais il est également possible de placer des implants « personnalisés » en connaissant la longueur, le diamètre au col et celui à l’apex de l’implant.

De nombreuses options sont disponibles telles que la mise en évidence du nerf alvéolaire inférieur, le contrôle du parallélisme des implants, la création de modèle STL inversés pour la réalisation de guide chirurgicaux à appuis muqueux, ou l’extrapolation des données DICOM vers un fichier STL des bases osseuses du patient pour la fabrication d’un guide à appuis osseux.

Tiges-modelises-au-niveau-de-l-axe-des-implants

Fig 4 : Tiges modélisés au niveau de l’axe des implants

La réalisation du guide

A l’origine, le logiciel permettait de figurer des tiges dans l’axe des implants au niveau de leur émergence (Fig. 4).

Generation-d-un-fichier

Fig 5 : Génération d’un fichier STL avec les tiges avant impression

Un fichier STL était donc créé que l’on envoyait à une société d’impression 3D sur internet (Fig. 5).

Application-de-l-isolant-et-positionnement-des-tubes-titane

Fig 6 (a, b, c) : Application de l’isolant, et positionnement des tubes titane.

On recevait alors au cabinet un modèle que l’on isolait et sur lequel on plaçait des tubes en titane au niveau des tiges (Fig. 6a, b, c).

Les-dents-sont-recouvertes-de-composite-en-englobant-les-tubes

Fig 7 (a, b) : Les dents sont recouvertes de composite en englobant les tubes.

On venait ensuite recouvrir les dents de composite en englobant les tubes (Fig. 7a, b). Le guide obtenu était enfin poli et stérilisé à froid. (Fig. 8a, b)

Polissage-et-sterilisation-a-froid-du-guide

Fig 8 (a, b) : Polissage et stérilisation à froid du guide.

Aujourd’hui, il est possible de modéliser virtuellement le guide chirurgical dans Blue Sky Plan et d’en tirer un fichier STL, imprimable par la suite dans un logiciel tiers.

Modelisation-des-cylindres

Fig 9 : Modélisation des cylindres en regard des implants

Une fois que la position idéale des implants a été déterminée, des cylindres sont modélisés en regard des implants. Ils doivent être situés au-dessus de la crête gingivale sans quoi la bonne insertion du guide pourrait être compromise (Fig. 9).

Plusieurs types de guides chirurgicaux sont envisageables (4) : des guides de pointage avec passage du foret pilote uniquement, des guides de chirurgie complètement guidée, des guides à appuis dentaires, muqueux ou osseux. En fonction du type de guide désiré (de pointage ou complètement guidée), le diamètre de ces cylindres peut varier. Par la suite, des tubes en titane y seront insérés.

Modelisation-virtuel-du-guide-en-format-STL

Fig 10 : Modélisation virtuel du guide en format STL

Une fois l’ensemble des cylindres virtuels en place, le guide chirurgical peut être modélisé sur le fichier STL de l’arcade édentée, en choisissant précisément les surfaces d’appuis. Le guide est créé virtuellement et un fichier STL de celui-ci peut être exporté (Fig. 10).

L’impression 3D

L’impression 3D est un mode de fabrication présent depuis déjà de nombreuses années dans l’industrie. Elle va à l’encontre des techniques soustractives d’usinage mises en avant par les industriels dentaires (Sirona Cerec, Artica Kavo, Planmeca Mil40…). En effet, il s’agit ici d’une technologie additive qui évite toute perte de matériaux. De nombreux procédés existent tels que le FDM (Fuse Deposition Modeling, la SLA (stéréolithographie), le SLS (Selected laser Sintering ou frittage sélectif par laser).

La popularité de l’impression 3D a explosé ces dernières années en particulier grâce au FDM. Des machines de plus en plus petites, peu chère et facile d’utilisation ont été développées par les industriels créant un nouveau marché pour les familles, les écoles ou les entreprises. De plus, l’arrivée de petits scanner 3D et la présence de logiciels gratuit de modélisation 3D ont contribués à l’intérêt du public pour cette technologie et à la réalisation de petits objets directement à la maison. Ainsi, alors que l’impression 3D était réservée jusque-là aux centres de recherche et d’industrie, elle rentre aujourd’hui dans nos foyers et pour nous dentistes dans nos cabinets.

Le FDM correspond au dépôt d’une matière thermoplastique chauffée au travers d’une tête d’impression sur une plateforme. Couche par couche, la matière est déposée sous forme plastique puis elle se solidifie après refroidissement. On obtient alors un objet en 3 dimensions. Malgré un niveau de précision plus qu’acceptable (20 μm d’épaisseur de couche d’impression pour l’Ultimaker 2+), les pièces imprimées par FDM souffrent d’un état de surface parfois perfectible et donc d’un travail de finition conséquent (Fig. 11).

Etat-de-surface-perfectible

Fig 11 : Etat de surface perfectible et travail de finition conséquent des pièces imprimées par FDM

Le SLS consiste à une fusion laser couche par couche de poudre d’alliage métallique. Il trouve son application dans notre domaine d’activité dans la réalisation de couronnes ou d’armatures métalliques ou de châssis de prothèse amovible partielle.

Le SLA est la technologie dont nous allons parler dans cet article. Elle se définit comme la polymérisation couche par couche de résine liquide par laser. Son utilisation par les industriels dentaires se trouve dans la fabrication de modèle dentaire remplaçant nos antiques modèles en plâtre, et dans la réalisation de guide chirurgicaux implantaires. Plusieurs types de résine sont disponibles, de teintes et de propriétés physico-chimiques différentes. Cette technologie permet d’associer un niveau de précision élevé (jusqu’à 10 μm d’épaisseur de couche d’impression) et un état de surface parfaitement lisse (5). La gamme d’imprimante SLA s’étoffe de jours en jours avec par exemple la Form2 de Formlabs, l’Ember d’Autodesk.

Imprimante-Form-2

Fig 12 : Imprimante Form 2

Le DLP est un dérivé du SLA. Au lieu d’utiliser un laser pour polymériser la résine point par point, elle fonctionne avec un videoprojecteur envoyant une image et permettant de solidifier toute une surface de résine. Cela permet donc en théorie un gain de temps et une impression plus rapide.

Nous utilisons la Form2 (Fig. 12) associée à son logiciel d’impression Preform en raison de sa précision d’impression (25 μm d’épaisseur de couche), de son remplissage automatique du bac de résine, et de la mise à disposition d’une résine autoclavable développée spécialement pour les dentistes pour la réalisation de guides chirurgicaux.

Après impression du guide, celui-ci doit être dégraissé en le plongeant dans un bain d’alcool isopropylique pendant 20 minutes puis rincé et séché (Fig. 13a, b).

bain-d-alcool-isopropylique

etapes-post-cure-traditionnel

Fig 13 a,b, c : Etapes post cure traditionnel, à l’aide d’un bac US et passage en chambre UV

Les tubes en titane sont mis en place sans aucun agent de liaison, par simple friction (Fig. 14). Le guide est alors mis sous poche et stérilisé.

Guide-fini-en-resine-Dental-SG

Fig 14 : Guide fini en résine Dental SG

Le coût

Malgré les avantages qu’elle offre, la chirurgie guidée peine à s’installer dans notre pratique quotidienne. C’est le coût qui freine les praticiens à recourir aux guides chirurgicaux. Les sociétés comme Simplant ou CoDiagnostics proposent depuis de nombreuses années des guides chirurgicaux dont le prix influe nettement sur le prix du traitement implantaire.

L’impression 3D directement au cabinet dentaire réduit très fortement cet inconvénient. L’imprimante Form2 coute entre 3 500 et 4 000 euros, un litre de résine Dental SG stérilisable coute 450 euros et il faut entre 10 et 15 ml de résine par guide en fonction de son étendu sur l’arcade, soit environ 5 euros par guide.

BlueSky Bio n’est pas une entreprise philanthropique, elle se rémunère sur l’exportation du fichier STL du guide. En fonction du pack commandé, l’export du fichier STL revient entre 11 et 20 euros. Elle commercialise également toute une gamme de tubes en titane de longueurs et de diamètres différents afin de s’adapter à tous les systèmes implantaires.

Ainsi les guides les plus simples se retrouvent à environ une quarantaine d’euros. Nous avons donc aujourd’hui un protocole simple, rapide, entièrement réalisé au cabinet dentaire et sans réel impact sur le coût du traitement implantaire.

Conclusion

La chirurgie implantaire guidée permet d’avoir des résultats prédictibles et conformes à la planification initiale. Longtemps cantonnée aux cas complexes en raison de son coût, elle est aujourd’hui abordable et complètement intégré au sein de notre pratique quotidienne au point de pouvoir systématiser ce protocole à toute chirurgie implantaire. L’impression 3D va très certainement dans un avenir proche venir compléter l’arsenal technologique dont nous disposons et étendre encore les possibilités du numérique en dentisterie.

Bibliographie

1. martelli N, serrano C, van den Brink H, Pineau J, Prognon P, Borget i, et al. Advantages and disadvantages of 3-dimensional printing in surgery: A systematic review. Surgery. 2016 Jan 30.
2. Pascual D, Vaysse J. [Guided and computer-assisted implant surgery and prosthetic: The continuous digital workflow]. Rev Stomatol Chir Maxillofac Chir Orale. 2016 Feb;117(1):28-35.
3. Vercruyssen m, Laleman i, Jacobs r, Quirynen m. Computersupported implant planning and guided surgery: a narrative review. Clin Oral Implants Res. 2015 Sep;26 Suppl 11:69-76.
4. Geng W, Liu C, su Y, Li J, Zhou Y. Accuracy of different types of computer-aided design/computer-aided manufacturing surgical guides for dental implant placement. Int J Clin Exp Med. 2015;8(6):8442-9.
5. ibrahim D, Broilo TL, Heitz C, de oliveira mG, de oliveira HW, Nobre sm, et al. Dimensional error of selective laser sintering, three-dimensional printing and PolyJet models in the reproduction of mandibular anatomy. J Craniomaxillofac Surg. 2009 Apr;37(3):167-73.

En complément : BroTHier J, Pia J-P, soeNeN a. Réalisation d’un guide chirurgical implantaire au cabinet,par impression 3D , Biomatériaux Cliniques, Vol 2,N°1, mars 2017.

Partager

A propos de l'auteur

Dr. Julien BROTHIER

Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire CES de Prothèses (Fixée, Amovible)
DU d’Implantologie Orale
Praticien Libéral

Dr. Arnaud SOENEN

Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire sous-section 58-02 : Prothèse(s), Université de BORDEAUX

Laisser une réponse