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Expansion osseuse horizontale associée à la pose d’implants au niveau des 2 secteurs postérieurs mandibulaires

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La résorption alvéolaire post-extractionnelle réduit le volume osseux restant rendant difficile dans certaines situations la mise en place d’implants pour des restaurations prothétiques fixes. Afin de recréer une architecture osseuse favorable, plusieurs techniques ont été envisagées. On y énumère les greffes d’apposition en onlay, la ROG, la distraction alvéolaire, et l’expansion alvéolaire transversale. Selon la littérature, le taux de succès de cette dernière est de 98 à 100 % et le taux de succès des implants posés dans l’os augmenté est de 91 à 97,3 %.

Cette technique par son aspect conservateur permet, selon la morphologie crestale résiduelle, de poser simultanément les implants diminuant ainsi le temps d’attente pour la pose de la prothèse finale.

Dans ce cas clinique la largeur des crêtes résiduelles étant de 3 mm, l’utilisation de cette technique semble indiquée. L’os spongieux restant va aider au clivage aisé des deux tables osseuses.

La patiente âgée de 68 ans ne tolère plus les prothèses amovibles et souhaite des restaurations fixes maxillaires et mandibulaires. Elle ne fume pas et ne présente aucune contre-indication d’ordre général pour ce type d’intervention.

Examen clinique et radiographique, décisions thérapeutiques (fig. 1 à 4)

L’observation clinique montre des arcades maxillaires et mandibulaires présentant des édentements multiples compensés par des prothèses amovibles instables. La présence des canines en classe I assure un guidage et un centrage mandibulaire. A l’instar de la forte inclinaison des 38 et 48 qui seront extraites, les espaces prothétiques sont convenables.

edentements-intercalaires-multiples

Fig 1a et b : édentements intercalaires multiples maxillaire et mandibulaire nécessitant des réhabilitations implanto-portées.

L’amplitude d’ouverture de la bouche est suffisante pour un accès chirurgical sans obstacles.

Sur le plan parodontal, on note une parodontite généralisée modérée, avec des lésions angulaires au niveau de la 17, 35, et 43. La 26 présente une furcation distale de classe 2.

L’abondance de la plaque et du tartre nécessite une prise en charge parodontale avant toute intervention implantaire.

preparation-parodontale

Fig 2a et b : Une préparation parodontale associée à des extractions de dents en phase terminale a permis de préparer le terrain avant la phase chirurgicale

Après l’avulsion des 38 et 48, un examen radiologique avec un guide opacifié issue d’un wax-up a permis d’évaluer le projet prothétique et d’étudier les conditions anatomiques locales.

Les volumes osseux maxillaires étant insuffisants aussi, la mise en place d’implants a nécessité aussi certains aménagements osseux ; à la mandibule, la résorption alvéolaire transversale nous oriente vers une technique d’expansion alvéolaire horizontale afin de placer les implants dans des couloirs prothétiques adéquats.

guide-radiologique

Fig 3 et 4 : Cone Beam des secteurs 3 et 4 réalisé à l’aide d’un guide radiologique permet de visualiser des crêtes osseuses atrophiées au niveau des édentements postérieurs mandibulaires. Noter la nette distinction entre les tables vestibulaires et linguales permettant de poser l’indication de l’expansion osseuse.

Etapes chirurgicales (fig. 5 à 11)

Le traitement chirurgical démarre par l’extraction de 38 et 48 qui, de par leur position fortement inclinée, réduisent l’espace prothétique disponible.

Huit semaines plus tard, les expansions osseuses des secteurs molaires 3 et 4 sont entreprises simultanément. Afin de mener correctement le déroulement des interventions 5 étapes successives sont nécessaires. Elles doivent être individualisées et contrôlées.

  • Un temps muqueux donnant un large accès à l’os sous-jacent,
  • Un temps osseux pour l’ostéotomie horizontale et le déplacement du volet vestibulaire,
  • La mise en place des implants et des vis de couverture dans une répartition et un positionnement compatible avec le projet prothétique,
  • La régénération osseuse guidée associée au comblement du vide osseux,
  • La fermeture étanche du site en contrôlant l’élasticité des lambeaux.

Après l’administration d’une anesthésie locale, une incision horizontale dans l’épaisseur de la gencive kératinisée résiduelle au sommet de la crête est faite. Elle est prolongée au niveau des sulcus des prémolaires. Une décharge mésio-vestibulaire prémolaire met en évidence le trou mentonnier, émergence du nerf alvéolaire inférieur. En distal, elle se prolonge par une décharge au niveau rétro-molaire. Ces incisions larges et étendues permettent de récliner délicatement un lambeau vestibulaire mucco-périosté de forme trapézoïdale donnant un accès visuel à la base de la corticotomie et créent d’emblée l’élasticité nécessaire au lambeau pour la fermeture du site en fin d’intervention. Elle est complétée par une petite décharge contrôlée mésio-linguale.

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Fig 5 et 6 : l’amplitude du clivage réalisé progressivement avec un jeu de ciseaux à os et un maillet est fonction du diamètre des implants à insérer. Des vis d’ostéosynthèse permettent de stabiliser le volet vestibulaire. Deux implants RP Branemark MK3 Nobel Biocare sont placés de chaque côté. Leur stabilité initiale est assurée par un sous forage apical.

Après ce premier temps muqueux, une corticotomie verticale profonde est entreprise afin de créer un volet osseux vestibulaire. L’utilisation d’un insert piézo-électrique fin de 0,3 mm d’épaisseur (Mectron) le long de la crête en direction de l’os spongieux se fait progressivement sous irrigation abondante. Pour compléter le trait vertical, deux autres ostéotomies osseuses de décharge sont réalisées toujours dans l’épaisseur de la spongieuse en évitant de perforer la corticale linguale. L’espacement de ces deux incisions de décharge est dicté par les diamètres des implants choisis auxquels on ajoute les espaces nécessaires pour leur répartition. Cette corticotomie vestibulaire est complétée par une quatrième au niveau apical sans atteindre la trame osseuse spongieuse, ainsi le volet osseux est maintenu pédiculé à sa base. L’utilisation du piézotome permet d’obtenir un plan de coupe net et précis en contrôlant l’échauffement, et en réduisant au mieux le traumatisme des tissus mous et nerveux.

substitution-osseuse

Fig 7, 8 et 9 : l’utilisation de particules de substitution osseuse d’origine bovine dans les espaces inter-implantaires et en vestibulaire des volets osseux associées à une membrane résorbable à double couche collagénique d’origine porcine protège ce volume augmenté.

A la suite du dessin du volet osseux, on prépare dans l’épaisseur de la corticale vestibulaire le premier forage large de la vis d’ostéosynthèse. Un jeu d’ostéotomes permet d’amorcer la désunion des corticales vestibulaires et linguales, ils sont complétés par l’utilisation de ciseaux à os et de maillet pour assurer un clivage graduel et délicat du volet pédiculé.

A ce stade, un deuxième sous forage au niveau de la table linguale est entrepris en passant par le premier forage vestibulaire, il permet de visser une vis d’ostéosynthèse qui va limiter l’expansion et contrôler le déplacement du volet vestibulaire. L’amplitude du clivage est fonction de l’espace recherché pour la mise en place des implants. Elle est généralement égale au diamètre de ces derniers.

Le clivage terminé, on procède à la mise en place des implants.

Un forage dans l’espace médullaire est nécessaire, idéalement il est étendu en sous forage de 3 mm au-delà de l’ostéotomie la plus apicale et selon la longueur des implants choisis afin d’obtenir une stabilité primaire nécessaire à tout processus d’ostéointégration. Les implants sont placés en commençant par celui qui a le diamètre le plus faible et la vis de couverture est mise en place. Avant de passer à l’étape suivante, on s’assure que l’architecture du complexe est stable.

ossification-importante-du-biomateriau

Fig 10 et 11 : l’ossification importante du biomatériau en vestibulaire est le signe d’une angiogenèse rapide générée par l’ouverture des espaces médullaires favorisant la précipitation des médiateurs chimiques.

Les vides péri-implantaires créés par cette intervention sont remplis exclusivement par un substitut osseux, une hydroxyapatite d’origine bovine Bio-Oss® (Geistlich) bien tassée et bénéficiant du pouvoir ostéogénique des cellules pluripotentes de l’os spongieux. Afin de préserver et d’épaissir la table vestibulaire le tout est couvert du même biomatériau et d’une membrane collagénique résorbable Bio-Gide® (Geistlich) assurant une régénération osseuse guidée. Elle est fixée à l’aide de mini clous en titane (Mondeal, IPP Pharma).

Sa fixation commence par le côté lingual puis se poursuit du côté vestibulaire en englobant le défaut et en assurant l’espace et l’herméticité nécessaire à la régénération osseuse.

Les temps osseux étant terminés, on procède à la fermeture du site. Des incisions périostées superficielles et uniques au niveau des deux lambeaux vestibulaire et lingual permettent de donner l’élasticité nécessaire pour un recouvrement sans tension. Les sutures se font en deux plans, le premier avec des points en U assurant une apposition conjonctif contre conjonctif, et le second avec des points en O rapprochant la partie superficielle des berges de la plaie.

L’intervention étant achevée la patiente est invitée à contrôler ses mouvements d’ouverture et de fermeture buccale les premiers jours afin de ne pas compromettre les phases initiales de cicatrisation. Le port de toute prothèse générant des appuis sur le site est prohibé et l’alimentation doit rester de consistance molle.

Elle est revue pour déposer les sutures à 15 jours puis deux contrôles sont effectués à 3 mois et à 6 mois.

A 6 mois, lors de la mise en fonction, l’ouverture du site permet d’apprécier l’enveloppement et l’intégration osseuse des implants. Après cicatrisation gingivale, les étapes prothétiques sont entreprises.

Etapes prothétiques (fig. 12 à 14)

Une empreinte de positionnement à ciel ouvert est réalisée sur les implants. Après le contrôle avec des clés en plâtre, des couronnes solidarisées sont transvissées directement sur les implants. Elles sont installées en bouche après la validation de l’occlusion.

couronnes-ceramo-metalliques-transvissees-sur-implant

Fig 12 et 13 : les couronnes céramo-métalliques transvissées sur implants, de par leur morphologie, donnent un accès direct pour une hygiène rapide et efficace. (Prothèse : Docteur Pascal WALLET, Laboratoire : MASSODENT).

controle-radiographique

Fig 14 : le contrôle radiographique à 3 ans après la mise en charge de tous les implants montre une parfaite stabilité des niveaux osseux. L’ensemble des deux arcades sont réhabilitées et équilibrées. La patiente retrouve une fonction masticatrice efficace lui permettant une alimentation non restrictive.

Discussion

L’ostéotomie segmentaire horizontale est une technique d’expansion osseuse qui fait intervenir un mécanisme de cicatrisation de type fracture. Elle a pour intérêt de permettre une mise en place simultanée des implants et une exploitation rapide de ces derniers (4 mois dans certaines situations).

L’exploitation de l’élasticité osseuse permet des augmentations allant jusqu’à 7 mm d’épaisseur. Cette technique est basée sur le guidage de la fracture et le clivage du versant vestibulaire.

En effectuant un trait de corticotomie basale on facilite et on contrôle la mobilisation du volet vestibulaire tout en le maintenant pédiculé à sa base. Comme pour les fractures, la stabilisation de ce volet vestibulaire est primordiale pendant la phase de cicatrisation.

Bien qu’il existe relativement peu d’études dans la littérature et peu de recul concernant ces techniques de corticotomies, ces dernières restent toutefois considérées comme relativement peu invasives comparées aux greffes d’apposition. L’espace médullaire généré peut théoriquement ne pas être comblé mais la mise en place d’un biomatériau devrait éviter l’invagination des tissus mous et probablement amélioré la qualité de la densité osseuse. L’interposition d’un matériau peu résorbable tel l’hydroxyapatite d’origine bovine recouverte d’une membrane collagénique résorbable associée à l’absence de compression osseuse semblent cliniquement limiter la résorption lors de la phase de cicatrisation.

Les complications peropératoires de cette approche restent la fracture du volet vestibulaire et l’impossibilité de maintenir l’implant stable selon un axe idéal, auxquels cas la mise en place de l’implant sera différée dans le temps. Les limites de cette technique restent encore l’édentement unitaire encastré de petite étendue, l’absence de spongieuse entre les tables osseuses ainsi que les crêtes dont l’axe de clivage est incompatible avec le projet prothétique.

Consulter la fiche Step by Step – Expansion osseuse horizontale associée à la pose d’implants au niveau des 2 secteurs postérieurs mandibulaires

Bibliographie

1. Chiapasco M, Casentini P, Zaniboni M. Bone augmentation procedures in implant dentistry. Int J Oral Maxillofac Implants. 2009;24 Suppl:237-59.
2. Bravi F, Bruschi GB, Ferrini F. A 10-year multicenter retrospective clinical study of 1715 implants placed with the edentulous ridge expansion technique. Int J Periodontics Restorative Dent. 2007;27:557-65.
3. Scipioni A, Bruschi GB, Calesini G. The edentelous ridge expansion technique: a five-year study. Int J Periodontics Restorative Dent. 1994;14:451–459.
4. Simion M, Baldoni M, Zaffe D. Jaw bone enlargement using immediate implant placement associated with a split-crest technique and guided tissue regeneration. Int J Periodontics Restorative Dent 1992;12:462–73.

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A propos de l'auteur

Dr. Marwa FESSI

Docteur en chirurgie dentaire CES en parodontologie,

Dr. Théodore Majid ABILLAMA

DCD – DUP – DUICP
Exercice privé, Saint Germain en Laye

Dr. Hadi ANTOUN

Docteur en chirurgie-dentaire
exercice privé limité à la Parodontologie et à l’Implantologie, Paris
Fondateur de l’Institut de Formation en Chirurgie Implantaire Avancée (IFCIA)

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