Que ce soit dans la présentation de traitements concernant la prothèse traditionnelle ou dans celle des traitements implantaires, la réponse aux objections est à mes yeux, la phase la plus difficile à gérer pour les praticiens. En effet, bien que chaque phase de la présentation du plan de traitement, soit critique, la réponse aux objections constitue probablement l’étape la plus difficile et sans doute la moins comprise de la part des équipes dentaires. A compétences cliniques équivalentes, c’est bien là que la différence se fera d’un praticien à l’autre.
L’enjeu de la réponse aux objections est majeur. Il s’agit véritablement par une maîtrise de cette étape tout à la fois de rendre un service exceptionnel à votre patient et d’augmenter le taux d’acceptation de vos plans de traitement. Or, bien souvent les praticiens redoutent cette phase où après avoir exposé les tenants et aboutissants d’un plan de traitement, ils sont pressés de passer à la suite. J’ai ainsi constaté que rares sont les praticiens, y compris parmi les plus chevronnés, à réellement laisser la parole aux patients. En effet, même s’il s’agit d’un truisme dont je constate tous les jours la réalité dans les cabinets, la plupart des praticiens parlent encore trop. Ils empêchent ainsi le patient d’exprimer ses craintes, ses interrogations ou ses désirs. Il faut bien reconnaître que nous praticiens appréhendons le fameux « c’est cher, Docteur ! ». Aujourd’hui, je vous invite à considérer les objections de vos patients comme de réelles opportunités. En fait, il s’agit d’une véritable chance que le patient vous offre de répondre à ses freins profonds. Vous avez là, la clé de l’acceptation des plans de traitement. Je m’explique. Sortez du schéma où face à l’objection, chaque partie est sur la défensive et cherche à avoir le dernier mot. Les objections du patient sont des marques d’intérêt de sa part. Le pire serait encore un patient qui n’aurait aucune objection et qui refuse votre traitement sans raison apparente (ou avec une objection prétexte du style : « Je dois réfléchir »). Bien au contraire, suite à la proposition d’un traitement implantaire, il est légitime que le patient se pose un certain nombre de questions. Considérez-les comme des opportunités pour montrer votre professionnalisme et renforcer la confiance du patient envers votre équipe.
Exemples d’objections les plus courantes
Celles-ci sont données à titre d’exemples. Il existe de nombreuses autres possibilités d’objections. Notre objectif, ici n’est pas de donner de réponses toutes faites destinées à être réciter mécaniquement, mais bien plus au travers d’exemples de montrer l’état d’esprit général à adopter.
Peur des risques médicaux
Docteur, y-a-t-il des risques médicaux ?
« Les risques sont exactement les mêmes que pour la chirurgie dentaire en général. Il n’y a pas plus de risques que pour l’extraction d’une dent. »
Rassurez le patient en lui indiquant les véritables risques sans dramatiser ni embellir la situation.
Peur de la douleur
Docteur, il paraît que cela fait mal ?
« Comme pour toute intervention dans votre bouche, une certaine sensibilité est possible à l’issue de la séance ». Attention, à ce stade, il est important pour une information éclairée, d’informer objectivement le patient de l’existence de risques. C’est la différence entre informer et sur-promettre. Cependant, a contrario il ne s’agit pas non plus de dramatiser et dresser un tableau noir des risques qui ne relèverait pas, là non plus, d’une information objective.
« Pour éviter au maximum un inconfort, nous vous prescrirons un antalgique qui devrait vous permettre de mener une vie normale et confortable dans les quelques jours qui suivront. »
L’emploi du conditionnel vous permet d’indiquer l’absence de certitude.
« Ceci dit, de nombreux patients nous disent être surpris pendant et après l’intervention de l’absence totale de sensibilité. La plupart disent que c’est moins sensible qu’une simple extraction. »
Gestion de l’échec
Docteur, j’ai une amie à qui on a mis 5 implants… elle en a déjà perdu 4 !
Soyez déontologiques, demandez plus d’explications.
« Parlons-nous de la même chose ? Donnez-moi plus de détails. »
Dans ce cas, il est crucial d’explorer plus avant le cas décrit par le (ou la) patient(e).
Docteur, y-a-t-il des rejets ?
« Non, ce n’est pas une greffe. C’est un phénomène de cicatrisation osseuse. Il peut y avoir dans quelques rares cas, des rejets mais ils ne sont pas définitifs. Il existe la possibilité de replacer un autre implant. D’ailleurs, dans les cas très rares où cela arrive, il va de soi que le patient ne règle rien. »
Le patient exprime, ici, le besoin d’être rassuré. Il est important d’aller au-delà de la réponse simple et de le rassurer sur ce qui peut se passer dans l’éventualité exceptionnelle d’un problème.
Docteur, et si ça ne marche pas ?
« Nous pourrons toujours replacer un autre implant. Les rares fois où cela arrive, cela est dû à un manque de consolidation. En règle générale, une seconde intervention permet de régler le problème. Evidemment, aucun frais supplémentaire n’est réclamé dans ce cas. »
Là aussi, la clé est de rassurer le patient en lui montrant les différentes possibilités de voies de secours.
Longévité de l’implant
Docteur, quelle est la durée d’un implant ?
«Un implant peut durer plus de 20 ans et même rester à vie ! En revanche, comme sur une dent naturelle, la couronne fixée sur l’implant peut s’abîmer au fil du temps. Si cela arrive, il y aurait juste à refaire la couronne. »
Cette dernière phrase est très importante. Là aussi, elle est destinée à rassurer le patient sur ce qui peut se passer en cas de problème.
Prix et remboursements (Objections les plus classiques)
Docteur, c’est cher !
« C’est vrai, c’est un investissement. C’est toutefois le meilleur investissement que vous puissiez faire pour retrouver le plaisir de manger. » (Si par exemple le désir du patient était fonctionnel.)
Attention ! Le point clé est de reconnaître l’objection !!!! Ce faisant, vous n’êtes pas en train de dire que vos honoraires sont surévalués. Vous faites, simplement, preuve d’empathie en montrant que vous comprenez la réaction du patient.
Les implants sont-ils remboursés par la Sécurité Sociale ?
« Non. Les actes implantaires ne sont pas encore remboursés par la Sécurité Sociale car l’implantologie est une technique de pointe. Une prise en charge éventuelle existe par certaines rares mutuelles complémentaires. Pensez à consulter la vôtre.
A défaut de remboursement de sa part, je vous invite à vous rapprocher d’un organisme de crédit ou de votre banque. Souvenez-vous aussi, que notre cabinet vous offre la possibilité de régler nos honoraires de façon fractionnée. (Optionnel)
Je vous recommande de prendre votre décision en fonction de ce que vous pensez être le mieux pour votre santé dentaire. Il est préférable à mes yeux de différer les paiements plutôt que les traitements. »
Il s’agit ici d’être clair et tranché. Il serait dangereux d’éluder la question et de laisser entendre au patient qu’il existe un quelconque remboursement. D’autre part, il faut ouvrir le patient à d’autres possibilités de paiement.
Peur des contre-indications ou de la complexité de réalisation.
Docteur, il parait qu’il s’agit d’une intervention complexe ?
Attention ! La réponse à cette question est très délicate. Si vous minimisez l’importance de l’intervention, vos honoraires ne seraient plus justifiés. Mais, si vous insistez trop sur la complexité, vous risquez de faire peur au patient. La réponse suivante est destinée là aussi à rassurer le patient.
« Effectivement, il ne s’agit pas d’une intervention aussi simple que les traitements traditionnels. Cependant, je tiens à vous rassurer totalement. Mon équipe et moi-même, nous sommes formés de longue date à ces techniques. D’autre part, nous avons à ce jour, posé plus de X implants. Et nous avons une grande expérience de ce type de traitement. »
Vous avez, à la fois, donné l’information sur votre niveau de formation et sur l’expérience que vous avez de ces traitements. Le but de la question de la part du patient était de vous tester et de se rassurer quant à votre niveau de compétence.
Docteur, y a-t-il des contre-indications à la pose d’implant ?
« Oui, bien entendu mais ces cas sont de plus en plus rares avec l’évolution de la technique.
Il y a globalement 2 cas de figures :
Tout d’abord, un mauvais état de santé général. Des examens préalables sont systématiquement demandés pour évaluer ces risques et éventuellement interdire la pose d’implants.
Ensuite, l’état de votre bouche est capital : en plus d’un brossage soigneux des dents, les caries et autres problèmes de gencive doivent être impérativement traités avant.
De même, le tabac est une contre-indication importante. Ceci dit, de nombreux patients, saisissent cette opportunité pour arrêter de fumer.
Enfin, toute une série de paramètres anatomiques doivent être pris en compte. Ils seront évalués à l’aide d’examens radiologiques préalables. Ainsi, si toutes les précautions ci-dessus sont prises, la pose d’implant peut s’effectuer en toute sécurité. »
Au niveau des réponses que vous apporterez, mettez en avant les avantages des implants non seulement sur le plan technique (par exemple : remplacement des manquantes, stabilité de la prothèse, technique non-mutilante, longévité et évolutivité, meilleure hygiène, etc.) mais également les avantages que les implants leur apporteront dans leur vie quotidienne (par exemple : meilleur confort, amélioration du goût, longévité accrue des dents naturelles restantes, plus grande confiance en soi, etc.).
Conclusion
Certes les objections peuvent perturber votre élan lorsque vous présentez un plan de traitement, mais il faut apprendre à les surmonter afin de poursuivre votre démarche. Les praticiens expérimentés n’appréhendent pas les objections des patients, bien au contraire. Ils savent que s’ils peuvent répondre correctement aux objections, ils sont d’autant plus à même d’obtenir le consentement de leurs patients. A vous de jouer !
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