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Prédictibilités biologique et esthétique d’une réhabilitation implantaire globale : Apport du smile design et de la chirurgie guidée

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L’implantologie est une technique qui permet de réhabiliter la fonction et l’esthétique de nos patients et donc d’obtenir leur satisfaction. Néanmoins, pour atteindre ces objectifs de traitements, l’implantologie doit être en corrélation permanente avec la biologie (environnement osseux et muqueux) mais aussi avec la prothèse finale du patient.

De fait, il est nécessaire d’anticiper le traitement chirurgical implantaire en validant le projet prothétique initial (ensuite soutenu par des implants). Il est donc obligatoire de passer du temps sur ces étapes préalables afin d’éviter les mauvaises surprises qu’elles soient esthétiques ou fonctionnelles. L’objet de cet article est de décrire, au travers d’un cas clinique, dans un premier temps les étapes préalables au traitement chirurgical implantaire; étapes permettant de créer et de positionner les futures dents de notre patiente. Dans un deuxième temps, la chaine chirurgicale sera décrite afin de valider le processus global.

photo-de-portrait-initial

Figure 1 : photo de portrait initial

Etapes préparatoires de planification prothétique

La patiente se présente en consultation avec un souhait d’obtenir des dents fixes maxillaires tel que la réhabilitation mandibulaire (en place depuis 12 ans). En effet, elle se plaint du coté amovible de sa prothèse (inconfort principalement social) et souhaite par la même, obtenir une prothèse plus esthétique (fig. 1 à 4)

Réalisation du digital smile design(1)

Le Digital Smile Design (DSD) a été créé par Christian Coachman (Brésilien, qui est à la fois prothésiste et dentiste) (2). Il est certain que toutes les équipes, quel que soit le degré d’expérience, ont été confrontées à des problématiques de communication entre le laboratoire et la clinique en vue de l’établissement d’un plan de traitement. L’objectif du DSD est donc de fournir une aide en protocolisant la réflexion et la création d’un projet prothétique.

vue-du-sourire

Figure 2 : vue du sourire

protheses-intrabuccales

Figure 3 : vue des prothèses intrabuccales

L’analyse passe par une série prédéterminée de photographies numériques de qualité mais aussi de vidéos (permettant entre autre de capturer des images fixes plus naturelles). L’analyse de ces documents met en évidence les relations entre les dents, la gencive, les lèvres mais aussi dans le sourire (et le visage) qui est un élément dynamique permettant d’exprimer des émotions. En suivant le protocole et avec à l’aide d’objets de calibration, des mesures peuvent être réalisées. Ces mesures sont fonction de la prothèse complète existante dans le cadre présent. Celles-ci permettent une collaboration étroite avec le technicien de laboratoire pour une exécution raisonnée des améliorations de positions dentaires à apporter (fig. 5)

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Figure 4 : vue occlusale du maxillaire

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Figure 5 : synthèse du Digital Smile Design transmis au laboratoire.

Enregistrement des lignes esthétiques de référence : apport du ditramax

Les informations capitales et minimales à transmettre en terme de réalisations prothétiques sont la teinte des dents actuelles et à venir ainsi que les lignes de références définies par Chiche et Pinaut (3). Ces lignes de références respectées permettent de faire coïncider le plan sagittal médian et le milieu interinsicif ainsi que la ligne bi-pupillaire et le plan incisif. Ces 2 cohérences permettent de donner un coté harmonieux au visage et de créer donc un équilibre visuel non stressant.

positionnement-du-modele

Figure 6 : positionnement du modèle et de la base d’occlusion sur le Ditramax

A propos de la transmission des lignes de référence, une photo de portrait sera nécessaire. L’appareil photo (l’objectif) devra être perpendiculaire au visage du patient afin de pouvoir récupérer les bonnes informations de parallélisme et de perpendicularité. La transmission de ces deux lignes sera aussi favorisée par l’utilisation d’outils tels que le Ditramax® (4) (fig. 6) ou le one Bite® (Bisico®).

Choix de la morphologie des dents : apport du visagismile (5)

Dans les situations de patients édentés unitaires et partiels, les dents résiduelles permettent une première appréciation de la morphologie des dents manquantes (présence de la controlatérale ou de dents du même secteur). Cela permet donc au prothésiste de travailler, de créer des dents en s’inspirant des dents, des morphologies présentes.

Dans le cadre du traitement des édentés complets, il apparait difficile d’inventer des dents pour un patient avec un très faible nombre de données. Le visagisme peut être une aide au choix des dents : il aide les cliniciens à fournir des restaurations répondant aux critères esthétiques, mais aussi en fonction des caractéristiques psychosociales correspondant à l’image de chaque patient. Le visagisme implique la création d’une image personnelle et individuelle, qui exprime le sens d’une personne, son identité. La méthode est tirée de l’association des principes du langage visuel artistique et des disciplines comme la psychologie, la neurobiologie, l’anthropologie et la sociologie.

Un des défis majeurs va être, dès lors, de découvrir les traits de personnalité et les désirs du patient pour les traduire dans des formes de dent naturelles dans l’harmonie psycho-dentofaciale.

Le patient doit donc prendre part activement à ce choix-là : l’utilisation de quelques questions permet effectivement de dégager certains traits de personnalités qui devront être en harmonie avec la morphologie des dents (fig. 7).

resultat-du-visagismile

Figure 7 : résultat du Visagismile pour la patiente

Transmission de la teinte des dents : apport de la photographie (5)

La photographie en odontologie est un élément capital. En effet, les photographies ont à ce jour 3 rôles principaux :

  • posséder les données pour pouvoir réaliser un plan de traitement précis et étayé,
  • transmettre les données cliniques au prothésiste,
  • aspect comparatif du traitement (avant/après).

L’outil photographique permet donc une meilleure communication auprès du patient mais aussi et surtout auprès des techniciens de laboratoires. Dans le cas présent, l’utilisation de la photographie est nécessaire (hormis le cadre DSD) pour la transmission de la teinte des dents. En effet, il s’agit de quelque chose de délicat à transmettre, à décrire (fig. 8)

photographie-de-la-pige

Figure 8 : photographie de la pige de teinte correspondante à la patiente

Une fois l’ensemble de ces éléments transmis, le technicien de laboratoire peut alors travailler avec toutes les indications nécessaires. Il est intégralement guidé pour le montage de ces dents et réalise ce dernier de façon sereine au vu de l’ensemble des données cliniques transmises. Il est évident que le prothésiste pourra adapter ce projet transmis afin de s’adapter aux contraintes cliniques (occlusion, place disponible etc.) mais aussi pour donner une touche ‘personnelle’ à chaque sourire. Ce travail sera alors testé en bouche afin de valider la bonne position des dents au niveau intrabuccal, du sourire, des tissus de soutien mais aussi du visage. La particularité de ce type de projet est l’absence de rebord prothétique remontant dans le fond du vestibule : en effet, les prothèses implantaires provisoires et finales ne recouvriront pas la crête dans sa globalité. Il est donc inapproprié de faire monter la cire au fond du vestibule, elle devra s’arrêter sur le sommet de la crête (fig. 9 à 11)

essayage-des-six-dents

Figure 9 : essayage des six dents antérieures maxillaires, vue de face intrabuccale

dents-anterieures-maxillaires

Figure 10 : essayage des six dents antérieures maxillaires, vue du sourire de face. Figure 11 : essayage des six dents antérieures maxillaires, vue de profil afin de visualiser le soutien des tissus péri-buccaux.

Etapes chirurgicales : de la planification a la mise en charge immédiate

La réalisation d’un projet prothétique pour un traitement implantaire d’un édenté complet est finalement issu des mêmes étapes que celle de la réalisation d’une prothèse complète amovible (empreinte primaire, empreinte secondaire, base d’occlusion, essayage). Une fois ce projet prothétique réalisé et validé, la chaine de traitement implantaire pourra se mettre en place.

Guide radiologique chez l’édenté complet (6)

Dans le cas présent et de façon générale, la technique du double scanner semble préconisée chez l’édenté ancien. La technique a été initialement décrite par Verstreken (7). Elle consiste à réaliser deux scanners : un scanner du patient avec son projet prothétique (type appareil amovible, appelé donc guide radiologique) et un scanner du projet prothétique seul.

L’ensemble des données DICoM (Digital Imaging and Communications in Medecine) peut donc être intégré dans l’ordinateur et lu avec des logiciels adaptés (Nobelclinian®, Simplant®, …). Sur les logiciels tridimensionnels décrits, la prothèse pourra être apparente (plein ou transparence) ou non et ce facilement, permettant donc une planification implantaire en fonction de la biologie osseuse mais également de la future prothèse.

Dans la situation clinique présentée, les implants sont planifiés en fonction du projet prothétique (prothèse bleue sur la figure 12). Il s’avère que pour respecter les impératifs biologiques, les implants sont enfouis largement sous le niveau crestal initial osseux (cf os en forme de lame de couteau).

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Figure 12 : images du planning chirurgical : implants positionnés en fonction de la prothèse, guide stéréolithographique chirurgical statique et guide stéréolithographique de résection osseuse.

Ces impératifs biologiques osseux (espace biologique circonférentiel péri-implantaire de 7 millimètres minimum) sont indispensables tant pour la cicatrisation initiale que la pérennité de la reconstruction implanto-portée. Donc avant l’insertion des implants, il est nécessaire préalablement de réséquer la crête osseuse afin d’obtenir un volume osseux adéquat avec les impératifs biologiques d’un implant.

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Figure 13 : guide stéréolithographique de résection osseuse. Figure 14 : guide stéréolithographique de positionnement des implants

Pour réséquer de manière fiable ce volume osseux, un guide stéréolithographique de coupe osseuse est conçu (guide rouge sur la figure 12 et figure 13). Après cette résection osseuse virtuelle, un guide chirurgical de type chirurgie guidée statique est conçu (guide blanc sur la figure 12 et figure 14).

Dans le cas présent, et compte-tenu du volume osseux réduit, un guide de chirurgie guidée statique à appui osseux a été réalisé afin d’assurer le bon positionnement des implants (Simplant, Materialise).

Une fois l’ensemble de ces préparatifs réalisé (projet prothétique et planification implantaire digitale), la chirurgie peut prendre place.

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Figure 15 : lambeau réalisé et exposition de la crête osseuse en lame de couteau. Figure 16 : guide stéréolithographique de résection osseuse.

Etapes chirurgicales

La chirurgie prend place de manière sécurisée dans le contexte prothétique réfléchi et mis en place précédemment.

Il ne s’agit que de suivre précisément toute la chaine préconçue afin d’assurer la bonne position implantaire et la bonne position prothétique.

Dans un premier temps, l’anesthésie locale est effectuée puis un lambeau large est décollé après incision (fig. 15). Ce lambeau permet la mise en place aisée du guide de résection osseuse (fig. 16).

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Figure 17 : résection osseuse effectuée. Figure 18 : guide stéréolithographique de positionnement des implants mis en place et maintenu par vis d’ancrage. Figure 19 : guide stéréolithographique et implants en place.

Cette dernière sera réalisée à l’aide d’une fraisez zekrya chirurgicale. Une fois, la résection faite (fig. 17), le guide implantaire à appui osseux sera mis en place (fig. 18).

Ce type de chirurgie guidée avec un appui osseux permet une conservation intégrale des tissus mous indispensables pour la pérennité implantaire.

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Figure 20 : implants dans le volume osseux. Figure 21 : empreinte au plâtre des piliers mis en place.

Les forages progressifs seront réalisés par un système de cuillères (trousse de chirurgie Nobel Guide, Nobel Biocare) puis les implants (Branemark Mk4, Nobel Biocare et Nobel Active, Nobel Biocare) seront insérés au travers du guide (fig. 19).

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Figure 22 : enregistrement de la relation intermaxillaire sur les piliers prothétiques.

Une fois, les implants en place (fig. 20), une empreinte au plâtre sera réalisée afin de transmettre la position implantaire dans le maxillaire au laboratoire de prothèse (fig. 21).

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Figure 23 : prothèse provisoire sur modèle

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Figure 24 : prothèse provisoire en bouche.

orthopantomogramme-de-controle

Figure 25 : orthopantomogramme de contrôle.

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Figure 26 : portrait 15 jours après la chirurgie.

L’enregistrement de la relation intermaxillaire sera également réalisé afin que le prothésiste puisse réaliser une prothèse provisoire en occlusion. Cet enregistrement est réalisé par l’intermédiaire d’un duplicata de la prothèse complète de la patiente : ce duplicata est ensuite rebasé en bouche par un matériau de type polyvinylsiloxane sur les capuchons des piliers prothétiques. (fig. 22). La prothèse provisoire est réalisée avec des cylindres temporaires en titane échancrés afin que l’insertion de la prothèse soit facile (fig. 23 et 24) : l’occlusion est vérifiée afin de s’assurer une répartition homogène des contraintes. L’adaptation est-elle vérifiée par un orthopantomogramme (fig. 25). Le résultat esthétique prothétique peut être pleinement vérifié par une photographie de portrait (15 jours post-opératoires, fig. 26).

Conclusion

Le projet prothétique implantaire est capital dans la réussite implanto-prothétique. Des outils tels que les photographies, le Digital Smile Design, le Ditramax doivent nous aider à planifier correctement la position dentaire dans un cadre global qu’est le visage. La chirurgie finalement ne doit être qu’une simple exécution du plan conçu avec les outils précédemment : elle est rendue moins aléatoire par les techniques de chirurgie guidée issues du projet prothétique.

Bibliographie

1. Noharet R, Clément M, Gaillard C, Coachman C. Analyse diagnostique d’un traitement esthétique : Digital Smile Design®. Information Dentaire n° 22 – 3 juin 2015
2. Coachman C, Calamita M.Digital Smile Design : A Tool for Treatment Planning and Communication in Esthetic Dentistry. Quintessence of Dental Technology 2012: Vol 35 ; 103-111.
3. Chiche G, Pinault A. Esthetics of Anterior Fixed Prosthodontics. Quintessence Books. 1994.
4. Margossian P et coll. Communication des données esthétiques faciales au laboratoire : le système Ditramax®. Réalités Cliniques 2010; 21(3) : 149-155.
5. Noharet R. Le projet prothétique en implantologie orale. Cah Prothèse 2016;173:47-57.
6. Noharet R. Contribution à l’assurance qualité des dispositifs médicaux en implantologie orale : a` propos de la précision du placement implantaire. Human health and pathology. Université Claude Bernard – Lyon I, 2014. French. <NNT : 2014LYO10109>. <tel-01148642>
7. Verstreken K, Van Cleynenbreugel J, Martens K, Marchal G, Van Steenberghe D, Suetens P. An image guided planning system for endosseous oral implants. IEEE Trans Med Imaging. 1998;17:842-852.

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A propos de l'auteur

Dr. Renaud NOHARET

Ancien Interne en Odontologie
Maître de Conférence des Universités
Praticien Hospitalier
Docteur de l'Université de Lyon
Exercice Libéral (Lyon)

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