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L’Hypnose médicale dans la gestion de la douleur

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Revues scientifiques, magazines, on retrouve l’hypnose médicale partout… en médecine et ailleurs… Peut-être vous demandez vous si cela marche vraiment ? Et surtout qu’est-ce qu’on peut faire avec de l’Hypnose ? Cet article a pour but de répondre à ces questions et d’autres que vous pourriez vous poser…

L’hypnose médicale est un outil au même titre que l’anesthésie locale ou générale, le méopa, la turbine ou la digue… avec ses indications, ses intérêts et parfois ses limites… Il n’est pas question d’en faire ici son apologie mais plutôt un tour d’horizon de cette technique utilisée dans notre pratique.

Nous définirons d’abord ce qu’est réellement l’hypnose médicale car, si chacun a son avis sur la question, peu de gens savent vraiment ce qui se cache derrière le mot « hypnose ». Ensuite à l’aide de cas cliniques concrets nous verrons les indications de l’hypnose dans la gestion de la douleur.

Un peu d’histoire…

4000 ans avant JC, les Egyptiens utilisaient déjà l’hypnose ! Au 19ème siècle, elle était un outil, fort utilisé par les dentistes jusqu’aux alentours de 1832. Lorsqu’elle fut remplacée par une technique qui semblait plus simple : un coton imbibé de chloroforme sur le nez des Patients et boum… les voilà dans les vapes le temps du soin. Revenue à la mode avec le courant des médecines douces et naturelles, elle retrouve sa place au sein de toutes les équipes médicales depuis quelques décennies.

Qu’est-ce que l’Hypnose Médicale ?

C’est un mode de fonctionnement naturel du cerveau dans lequel la personne est capable de faire des choses qu’elle ne peut pas faire dans le mode de fonctionnement « habituel » du cerveau que l’on appelle la conscience critique. Vous connaissez et utilisez toutes et tous ce mode de fonctionnement hypnotique mais sans le savoir…

Laissez-nous vous donner quelques exemples

  • Vous faites un trajet en voiture que vous connaissez bien et pendant ce temps-là vous faites la liste de toutes les choses à réaliser aujourd’hui… vous arrivez à votre destination et n’avez pas l’impression d’être passé par tel ou tel endroit ou encore que le trajet vous a semblé particulièrement rapide aujourd’hui…
  • Vous prenez votre douche tout en réfléchissant et vous vous lavez les cheveux une deuxième fois car vous êtes incapable de savoir si vous l’aviez déjà fait ou pas…

En classe, l’enfant rêveur, dans la lune, est lui aussi, dissocié de la réalité et incapable de répondre à la question du professeur qu’il n’a pas entendue et pourtant il n’avait pas bouché ses oreilles… Mais encore un bon mal de crâne vous emprisonne… vous vous posez devant la télé et, pendant le temps du film particulièrement captivant, vous « oubliez ce mal de crâne » qui revient de plus belle quand arrive le générique de fin.

Des situations anodines de la vie qui montrent combien l’hypnose fait partie de notre fonctionnement quotidien… C’est aussi ce qui explique que tout le monde peut utiliser l’hypnose médicale ! Il suffit de savoir comment faire pour mobiliser ses ressources internes et apprendre à les utiliser… C’est là tout le travail du Praticien ! Il ne fait pas l’hypnose ! Il aide ses Patients à trouver l’état hypnotique ! Tout comme l’entraîneur va préparer son joueur ou son équipe mais ne fait pas le match à sa place… Le Praticien n’a aucun « pouvoir » si ce n’est de mobiliser les ressources et les apprentissages de ses Patients… Il n’est donc pas question de prendre le contrôle de l’esprit de la personne en hypnose ni même de lui faire faire quelque chose qu’elle ne voudrait pas faire ! ( ce que l’hypnose de music-hall tente de faire croire… mais là, nous sommes dans le domaine du spectacle, de l’illusion…).

Dans le cadre de la gestion de la douleur, le soignant met toutes les conditions pour que la personne trouve cet état par ellemême et qu’elle ait un rôle d’acteur dans le processus de gestion de la douleur !

Que peut-on faire avec de l’Hypnose ?

L’hypnoanalgésie (anesthésie d’une partie du corps grâce à l’hypnose et sans chimie) permet de faire tous les soins classiques réalisés au cabinet dentaire : Soins, extractions, endos, pose d’implants et même sinus lift ! Ce qui est très intéressant pour les Patients allergiques aux anesthésiants qui sont rares mais qui trouvent là une solution à leurs problèmes (voir cas clinique n° 2).

La plupart du temps l’hypnose va être associée aux techniques d’anesthésies classiques et va décupler les effets d’une anesthésie chimique ou du gaz (méopa). Elle sera aussi utilisée pour réduire les effets et problèmes post-opératoires et améliorer la cicatrisation lors de chirurgies… Elle sera d’une efficacité redoutable également sur les douleurs chroniques !

Voyons tout cela à travers quelques cas cliniques. Nous ne détaillerons pas les techniques hypnotiques utilisées car ce n’est pas le propos de cet article.

techniques-d’anesthésies

Cas clinique n° 1 : anesthésie dentaire inefficace.

Véronique, 44 ans, référée par sa dentiste après trois tentatives de traitement endodontique de la 47 sans succès. Il y a toujours des douleurs malgré plusieurs injections ! En quelques minutes, nous emmenons Véronique dans un voyage qu’elle a réalisé l’été dernier. Pendant qu’elle revit ce moment particulier, nous réalisons l’anesthésie, retirons le pansement et finalement, constatons une fracture de la dent qui est donc extraite sans la moindre sensation douloureuse dans la séance. La patiente, un peu triste de la perte de sa dent est ravie du déroulement de cette intervention et a repris confiance pour la suite des soins qu’elle va réaliser chez sa dentiste. En bonus, à la fin de la séance quelques suggestions post-hypnotiques pour favoriser une excellente cicatrisation pour la pose d’un implant par la suite… Nous avons rappelé la Patiente quelques jours après l’intervention et la patiente nous a dit qu’elle n’avait même pas dû reprendre d’anti douleur (ce qui est souvent le cas grâce aux suggestions post-hypnotiques).

Cas clinique n° 2 : patiente allergique (vérifié !) aux anesthésiants locaux.

France, 28 ans, a un pansement sur la 16 depuis un an et demi. Son dentiste qui d’habitude faisait (avec beaucoup de stress pour lui) les soins sans anesthésie, voyant qu’il est dans la pulpe lui dit qu’il ne peut pas réaliser ce soin comme cela. Nous réalisons un traitement endodontique en analgésie hypnotique pure et lui apprenons l’autohypnose pour qu’à l’avenir, elle puisse l’utiliser à chaque fois qu’elle en aura besoin. À l’ouverture de la dent, nous avons constaté qu’un canal était nécrosé mais tous les autres étaient encore vivants. Nous avons pris 6 minutes pour obtenir une analgésie efficace et que le traitement commence… La patiente n’a ressenti aucune douleur ! Il lui restait quelques petits soins à faire et elle a pu expérimenter ces soins en auto hypnose chez son dentiste. Plus aucune sensation douloureuse.

Cas clinique n° 3 : patiente en douleur aiguë.

Mon associé le Dr Claude Parodi reçoit une patiente en urgence qui a une douleur aiguë très importante que les antalgiques n’arrivent pas à calmer : lésion péri-apicale sur dent dévitalisée, couronnée avec tenons radiculaires. Disposant de 10 minutes tout au plus, il ne peut évidemment pas envisager la reprise du traitement dans la séance. Il choisit donc de faire une séance d’hypnose pour gérer cette douleur. Au départ, la douleur est de 10 sur une échelle de 0 à 10. Après l’hypnose, la douleur passe à 2 en moins de 5 minutes. La patiente juge ce niveau de douleur confortable et a pu attendre le rendez-vous suivant sans que la douleur réapparaisse.

Cas clinique n° 4 : patient atteint de fibromyalgie et anesthésie inefficace.

Pierre, 64 ans, adressé par un confrère car celui-ci n’arrive pas à endormir la 46 qui est à soigner. A l’anamnèse, le patient explique qu’il souffre de fibromyalgie depuis plus de 20 ans, que tout a été testé pour lui et que seuls les deux patchs de morphine qu’il porte le soulagent un peu. Il pense qu’il n’est plus « réceptif » aux anesthésiants suite à sa grande prise d’antalgique. En accord avec l’équipe qui l’encadre, nous décidons de faire de l’hypnose afin de voir si l’on peut également améliorer son quotidien en lui apprenant l’auto hypnose pour gérer ses douleurs chroniques. En 3 séances, nous avons fait le soin dentaire et amélioré son confort de vie au quotidien par une diminution des douleurs chroniques d’environ 80 %. En dentisterie, nous ne serons pas amené à traiter des douleurs chroniques cependant dans ce cas particulier, tout avait été tenté et il n’y avait pas de prise en charge par hypnose dans sa région c’est pourquoi nous avons décidé d’y travailler ensemble.

Cas clinique n° 5 : enfant qui tombe et action sur la douleur et l’hémorragie !

Lors d’un goûter d’anniversaire, ma fille Armelle, 10 ans arrive avec le mollet en sang : une plaie d’une dizaine de centimètres de long de profondeur moyenne. En quelques secondes, je ratifie la douleur puis détourne son attention en lui demandant de mettre une couleur à sa douleur. Elle me dit rouge. Ensuite, je lui demande de quelle couleur devrait être la jambe pour que cela soit confortable. Elle me répond rose ! Nous avons fait passer sa jambe du rouge au rose et la douleur avait disparu. Aux urgences, Armelle a demandé au médecin de serrer davantage les points de suture car elle trouvait qu’il n’en mettait pas assez ! Durant le trajet, j’avais focalisé Armelle sur le fait qu’elle pouvait gagner le concours familial de celui qui a le plus de points de suture avec une belle grande blessure comme celle-là ! Une fois de plus j’avais détourné son attention du négatif en le retournant en positif ! Pour terminer, une douleur souvent insoupçonnée est celle des Soignants de plus en plus victimes du Burn Out. Les techniques de communications Hypnotiques permettent d’apprendre aux Patients à gérer eux-mêmes leur sac à dos. Ce qui réduit fortement le risque de Burn Out des Praticiens qui, trop souvent, se laissent piéger à porter le sac à dos de leurs patients…

Conclusion

L’hypnose médicale n’est pas de la magie mais les résultats que nous obtenons avec cet outil sont réellement magiques ! Comment cela fonctionne ? La question trouvera sans doute des réponses dans les années à venir car, si on a déjà pu cartographier le fonctionnement du cerveau en hypnose et déterminer des zones cérébrales spécifiques à cet état de conscience, les plus grands chercheurs mondiaux en neurosciences se penchent maintenant sur l’étude des processus hypnotiques…

Mais tout de même, comment peut-on expliquer ces phénomènes irréalisables consciemment ?

Le cerveau autonome gère à chaque instant des milliards de régulations pour que nous puissions juste être en vie. S’il est capable d’interpréter une sensation douloureuse et nous la signaler, il sait aussi l’atténuer ou ne pas en tenir compte… Tout comme nous ne prenons pas conscience de tout ce que nous voyons dans notre champ de vision, notre cerveau trie les infos et les utilise comme il estime que cela est nécessaire.

La communication hypnotique est en fait une communication entre notre cerveau « conscient » et notre cerveau « inconscient » ou autonome dans laquelle nous pouvons demander à ce cerveau autonome de réaliser certaines tâches qui sont du domaine de l’inconscient… Ainsi, stopper une hémorragie revient simplement à réaliser une vasoconstriction dans la zone nécessaire… Ce que notre corps fait déjà à chaque instant dans la régulation de la pression artérielle. Dans l’analgésie, les études montrent que l’information nociceptive est relayée au cerveau autonome mais il choisit de ne pas la transmettre à un niveau conscient… Voilà qui promet encore de belles découvertes et ouvre la voie à de passionnantes recherches…

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A propos de l'auteur

Dr. Claude PARODI

Chirurgien-dentiste
Conférencier international

Dr. Kenton KAISER

Chirurgien-dentiste
Conférencier international

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