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La sédation consciente par inhalation d’un mélange équimolaire oxygène-protoxyde d’azote chez l’enfant

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Malgré les progrès réalisés, tant dans le domaine de l’anesthésie que de la dentisterie, la prévalence de l’anxiété dentaire se situe entre 4 et 20 %, indépendamment de la population, de la culture ou du pays1. La sédation consciente par inhalation ou analgésie relative, grâce à son effet relaxant, est une alternative à la prémédication neuro-sédative (efficacité limitée, effets secondaires) et à l’anesthésie générale qui ne saurait être pratiquée de façon systématique.

Depuis 2001, grâce à l’autorisation de mise sur le marché du MEOPA (Mélange Equimolaire Oxygène-Protoxyde d’Azote) pour l’Odontologie en milieu hospitalier, des soins dentaires sous sédation consciente peuvent enfin être réalisés. Des formations diplômantes ont été développées avec l’aide de médecins anesthésistes et de médecins spécialistes de la douleur et des études cliniques ont été menées afin d’évaluer la qualité de la formation proposée, les avantages, les indications et les effets indésirables liés à cette technique1.

Quels sont les objectifs des soins dentaires sous sédation consciente par inhalation de Meopa ?

  • promouvoir le bien-être du patient en diminuant l’anxiété, l’inconfort et/ou la douleur dans des conditions de sécurité optimale,
  • prévenir le développement de l’anxiété et la peur des soins dentaires,
  • faciliter la réalisation de soins de qualité chez des patients présentant des troubles du comportement2.

Quels sont les avantages du protoxyde d’azote ?2

  • rapidité d’induction et rapidité d’élimination : actif en 3 à 5 minutes, il est éliminé par voie pulmonaire, de manière rapide également et ne présente pas d’effet retard ;
  • la vigilance est maintenue, il y a une diminution légère du niveau de conscience, mais sans abolition du jugement ;
  • grande sécurité : il ne s’accumule pas dans l’organisme et il n’y a pas de risque de relargage différé ; il n’y a pas de perturbation des réflexes laryngés donc pas de besoin d’assistance respiratoire ni d’anesthésiste ;
  • simplicité d’emploi : le mélange 50 % N2O/50 % O2 est prêt à l’emploi dans une seule bouteille.

Quel matériel ?

Le mélange est administré avec un masque nasal sans latex (Hans Rudolph®) ou naso-buccal (Laerdal® ; sans latex : Eco Mask, Intersurgical®, Ambu®), relié à un circuit d’administration (Circuit de Bain modifié pour l’Odontologie, Intersurgical) comportant un filtre antibactérien à usage unique (Clear-Guard Midi, Intersurgical®) et un système d’évacuation des gaz expirés par tube souple vers l’extérieur (fenêtre ou circuit d’aspiration)1, 2. Le MEOPA est commercialisé en Europe par plusieurs firmes (Tableau 1).

Les bouteilles sont en acier ou en aluminium ; de contenance différente (5 à 15 litres), elles répondent aux normes européennes. La sélection du type de masque se fait selon le mode de ventilation du patient et selon sa capacité à vouloir coopérer. Ils sont de taille différente de façon à s’adapter à toute morphologie faciale.

Le circuit permet d’administrer le gaz en toute sécurité (système anti-pollution répondant aux normes réglementaires).

Le ballon intégré dans le circuit d’administration évacuation sert de contrôle pour la ventilation et permet d’ajuster le débit.

Le gaz s’évacue soit vers l’extérieur de la salle, par la fenêtre, ou mieux, par un extracteur d’air. A défaut d’un dispositif d’extraction active des gaz, une aération régulière des locaux est indispensable.

Indications

Elles concernent :

  • les jeunes enfants ou adolescents anxieux ou phobiques appartenant aux catégories ASA I (en bonne santé) et ASA II (atteinte systémique modérée) ;
  • les jeunes enfants ou adolescents atteints de troubles cognitifs. C’est la sévérité du handicap qui limite l’efficacité du MEOPA ;
  • les situations d’urgence : la sédation peut réduire la douleur et la peur chez le jeune enfant et l’aider à coopérer ;
  • des patients jeunes, coopérants pour les soins, mais devant subir une intervention chirurgicale.

Tout type de soin peut être pratiqué. L’emploi de la sédation consciente induit une analgésie de surface mais les indications d’anesthésie locale restent les mêmes.

La digue peut être employée, le praticien devant être attentif aux vomissements.

Quelles limites ?

  • la quantité d’actes : si les besoins en soins sont multiples et si la sédation doit être souvent répétée sur une courte période, particulièrement chez des tout-petits, l’indication de sédation peut être remise en question ;
  • l’âge : avant 3 ans on peut avoir un effet moindre car l’immaturité de certains récepteurs minimise l’effet, l’enfant respire moins bien, est moins coopérant. Il comprend moins bien et il est donc plus angoissé ;
  • les interventions chirurgicales situées dans le haut du vestibule maxillaire antérieur : le praticien peut être gêné par le masque recouvrant les narines ;
  • le personnel : il faut être au moins 2 soignants.

Quelles sont les contre-indications à la sédation par inhalation de MEOPA ?2 (Tableau 2)

Par contre, pas de contre-indication chez l’enfant asthmatique, diabétique (équilibré) ou épileptique pour qui l’effet sédatif du Meopa pourra éviter l’apparition d’une crise.

Recommandations

  • Veiller à travailler dans une ambiance calme.
  • Le matériel et les effets possibles du Meopa doivent toujours être décrits à l’enfant et à ses parents, si possible lors d’une consultation précédant la première séance de soins.
  • Il est important d’expliquer à l’enfant (et à ses parents) qu’il ne dormira pas mais qu’il se sentira dans une sorte de rêve, qu’il pourra contrôler ce qui se passe (le gonflement régulier du ballon a un effet rassurant), qu’il pourra continuer à parler. Les sensations ressenties varient d’un individu à l’autre : fourmillements, euphorie, rêves, distorsion des sons.
  • La sédation consciente ne consiste pas seulement en une aide pharmacologique : elle doit toujours être complétée par une aide psycho-comportementale et le contrôle de la douleur. L’effet de dissociation est propice à l’utilisation des techniques de distraction, de suggestion : la compétence du praticien à accompagner son patient verbalement est très importante dans ce domaine4.
  • Conseils pratiques avant une séance de Meopa : – pas de jeûne mais une prise alimentaire légère à 2 h de distance du RDV – reporter la séance si l’enfant est enrhumé ou présente une otite.
  • Les séances de soins ne dépassent pas 60 minutes. Il est recommandé de les espacer d’une semaine.
  • Le matériel d’urgence et les compétences nécessaires à son utilisation sont requises avant de mettre en place la sédation.
  • En cas d’inefficacité totale après 5 minutes d’inhalation, il faut savoir changer de méthode.

Quelques résultats des études cliniques menées en France

  • L’essai thérapeutique de phase II a concerné 1 205 sessions de soins chez 661 patients répartis en 3 groupes (333 déficients mentaux, 193 enfants d’âge pré-scolaire et 135 patients phobiques) dans 8 centres français. Le taux de succès global est de 93 %, le taux le plus faible, 91,4% concerne les patients handicapés3.
  • Les effets secondaires sont rares, mineurs et réversibles en quelques minutes après l’arrêt de l’inhalation. Il s’agit en général de nausées et vomissements (5,2 %) et plus rarement (1,8 %) de manifestations d’euphorie, d’agitation, de pleurs ou de céphalées. Une sensation de malaise, de dysphorie peut être ressentie par certains patients anxieux qui n’ont pas été bien préparés1, 2.
  • Une étude monocentrique, portant sur 229 patients présentant des troubles cognitifs, conduite sur une période de 2 ans, a montré que le comportement s’améliore lors des séances de réitération. Il est possible d’obtenir un effet de rémanence lors de séances répétées3.

Conclusion

« La sédation quand elle est administrée dans le but de réaliser des soins dans des conditions de confort et de sécurité peut être une aide efficace à la fois pour le praticien et pour l’enfant. Le risque de développer un état anxieux lors des soins dentaires s’en trouve largement réduit et l’enfant se sent plus apte à consulter régulièrement, condition qui permettra d’optimiser sa santé orale dans une perspective à long terme5. » Le suivi du développement de la technique de sédation au MEOPA en France, doit désormais permettre d’envisager son utilisation dans le secteur privé, pour des praticiens ayant suivi une formation validante. En effet, l’absence de formation peut avoir des conséquences préjudiciables pour le patient (moindre efficacité du mélange, aggravation de l’état d’angoisse, survenue d’accidents)5, 6, 7. Actuellement, l’acte de sédation consciente ne bénéficie d’aucune cotation relevant de la NGAP : il serait donc souhaitable que les organismes professionnels puissent réfléchir à une prise en charge consensuelle et à une tarification adaptée8.

Bibliographie

1. DROZ D, MANIERE M-C, TARDIEU C, BERTHET A, COLLADO V, ALBECKER-GRAPPE S, FAULKS D, WOLIKOW M, KOSCIELNY S, ONODY P, HENNEQUIN M. La sédation consciente avec Kalinox : quatre années de pratique hospitalière en Odontologie. Douleurs 2005 ; 6(4) : 3519-3525.
2. Berthet A, Droz D, Manière MCM, Naulin -Ifi C, Tardieu C. Le traitement de la douleur et de l’anxiété chez l’enfant. Ed Quintessence International Collection Réussir 2007.
3. COLLADO V, ONODY P, FAULKS D, KOLSCIELNY S, HENNEQUIN M. Effets des administrations réitérées d’un mélange équimolaire N2O/O2 (Kalinox) au cours des soins dentaires. Les Cahiers de l’ADF 2004 ; 16-17 : 26-31.
4. COLLADO V, FAULKS D, HENNEQUIN M. Choisir la procédure de sédation en fonction des besoins du patient. Réal Clin. 2005 ; 3 : 201-220.
5. KLINGBERG G. Sédation pour les soins dentaires chez les enfants : considérations éthiques. Réal Clin. 2005 ; 16(3): 221-230.
6. GODEFROY JL. Pour une utilisation en ville du protoxyde d’azote. La Lettre de l’Ordre déc 2002 ; 13 :10-11.
7. HENNEQUIN M, MANIERE M-C, BERTHET A, TARDIEU C, LEMAIRE M, ONODY P. Cadre médico-légal des indications de sédation par inhalation de protoxyde d’azote en odontologie. Inf Dent. 2002; 25: 1727-1735.
8. TARDIEU C, HENNEQUIN M, MANIERE MC, DROZ D. Introduction de La sédation consciente pour les soins dentaires. Inf Dent. 2005 ; 3 : 89.

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A propos de l'auteur

Dr. Dominique DROZ

Odontologie Pédiatrique, UFR d’Odontologie Université de Lorraine
Pôle Neuro-tête et cou, CHU de Nancy

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