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La littérature et les statistiques qu’elle véhicule en question

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Le mythe : tout ce qui est écrit, est inscrit dans la pierre nous arrachant tout sens critique.
La réalité : on trouve tout et son contraire dans la littérature scientifique sans faire le distinguo entre le monde réel et la fiction.

La plupart des auteurs et des conférenciers s’appuient sur une analyse des articles publiés dans la littérature scientifique pour proposer des solutions aux problèmes que nous rencontrons dans notre exercice clinique. Relisons l’éditorial paru dans l’International Endodontic Journal du mois d’avril 2013.

Cet éditorial est signé de Michael Hulsmann de l’université de Göttingen en Allemagne. En résumé il considère que la portée des différentes études est faible au regard des implications cliniques.

Nombre d’articles ne portent que sur des résultats théoriques ou sur des sujets fondamentaux qui n’ont qu’un très loin rapport avec nos préoccupations quotidiennes. Il considère, à juste titre, que les études menées sur des blocs en plastique n’ont plus de raison d’être.

Concernant les débris extrusés de l’apex lors des manoeuvres de mise en forme, aucune étude ne nous donne une quelconque information sur ce qui est acceptable par l’organisme et ce qui ne l’est pas.

Il considère qu’il est temps pour la recherche de s’intéresser à des sujets qui ont un impact direct sur l’exercice clinique afin que le lecteur tire un véritable bénéfice de sa lecture. Si de surcroît on relit l’article de Jon P.A. Ionnidis paru en août 2005 dans une célèbre revue médicale dans lequel il affirme que la plupart des résultats des recherches publiés sont faux [Why most published research findings are false: John P.A. Ionidis PLoS Medecine August 2005/vol2/issue8/e124], le pauvre lecteur risque bien d’y perdre son latin et de refuser tout en bloc ne restant certain que de ses propres convictions.

Bien entendu, il faut prendre un certain recul et concernant l’endodontie, conserver à l’esprit les principes fondamentaux établis par Herbert Schilder et qui sont maintenant universellement acceptés.

L’endodontie reste une discipline difficile, très opérateur dépendante où avant d’être rapide il faut être performant. Un traitement endodontique n’est pas une course de vitesse et une dent bien traitée doit pouvoir être conservée fonctionnelle sur l’arcade pour de très nombreuses années.

nettoyage-du-systeme-canalaire

Fig. 1 : l’intégralité du système canalaire est nettoyé et mis en forme. On note les deux canaux distaux qui se rejoignent. L’économie tissulaire est respectée.

Fig. 2 : respect des trajectoires canalaires et des foramina dans leur position spatiale d’origine. Les canaux sont maintenus perméables et le diamètre apical reste étroit.

Bien entendu, chaque praticien quand il intervient sur une dent a la ferme conviction que celle-ci va pouvoir rester sur l’arcade pour une période suffisamment longue pour que le patient (et lui même) puisse considérer que le traitement est un succès.

Or, si on lit la littérature, le taux de succès d’un traitement endodontique varie de 50 % à 95 % en fonction de critères liés à l’opérateur : à savoir de l’étudiant en chirurgie dentaire au spécialiste en endodontie en passant par le praticien généraliste.

Mais ce taux de succès chute invariablement au fur et à mesure que l’on introduit de nouveaux paramètres. À savoir : le taux de succès est plus important quand la pulpe est vitale en début de traitement, et quand l’anatomie n’est pas trop compliquée.

Il commence à chuter quand la pulpe est nécrosée et continue à descendre en présence d’une lésion d’origine endodontique radio-visible.

Le taux de succès/échec ne dépend pas que des conditions préalables au traitement mais du traitement lui-même. Une fracture instrumentale dans le cas d’une pulpe nécrosée a des répercussions négatives sur le taux de succès.

Ce qu’il est important de retenir c’est que les statistiques ne sont là que pour traiter des données et que pour le patient que l’on traite c’est 100 % de succès ou 100 % d’échec. Ce n’est pas parce que statistiquement une dent laissée ouverte pour drainage a un taux de succès inférieur à celle d’une dent fermée qu’il ne faut pas dans certains cas laisser une dent ouverte !

Ce qu’il faut faire c’est revenir aux conditions de la dent fermée avant de traiter définitivement le cas.

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Fig. 3a : la dent 46 fait un accident infectieux qui justifie la dépose de la prothèse ainsi que l’élimination du matériau d’obturation canalaire. Le drainage important ne permet pas de fermer la dent dans la séance. Dans un deuxième temps on instaure un traitement à l’hydroxyde de calcium.

Fig. 3b : une fois la dent asymptomatique et les canaux parfaitement nettoyés et secs l’obturation à la gutta chaude oblitère l’espace endodontique.

Fig. 3c : contrôle postopératoire 3 ans après l’intervention. On observe une guérison ad integrum de l’os alvéolaire. Malgré un nombre important de facteurs défavorables, la dent est maintenue sur l’arcade avec un bon pronostic. Seul le respect des différentes étapes du traitement, permet d’atteindre ce résultat.

De plus, il est trop facile d’appliquer les taux de succès de la littérature, sans prendre en compte les conditions dans lesquelles ont été réalisés les traitements.

Si aujourd’hui, la pose du champ opératoire n’est pas discutée, tous les cabinets ne sont pas équipés d’un microscope opératoire, indispensable pour le traitement des perforations ou pour le retrait d’instruments fracturés.

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Fig. 4 : perforation du plancher pulpaire avec communication avec le parodonte marginal. La dent n’est pas traitable du fait de la composante parodontale.

Fig. 5a et 5b : l’instrument fracturé transfixe la racine provoquant des douleurs intenses, sur la radiographie rétro-alvéolaire on note l’instrument fracturé mais celui-ci semble être toujours à l’intérieur du canal. Le dépassement est mis en évidence lors de l’exploration chirurgicale.

Un autre sujet de controverse concerne le nombre de séances pour un traitement endodontique.

Là aussi il faut lire avec attention la littérature et analyser la composition de l’échantillon et la qualification des opérateurs.

Une fois que l’on a éliminé les dents symptomatiques, les canaux qui restent humides même après utilisation de nombreuses pointes de papier, les anatomies très compliquées, il ne reste qu’un petit nombre de dents dans notre échantillon. Si l’on ne garde dans l’échantillon que les dents asymptomatiques, pas trop calcifiées, avec peu de canaux et que l’on a du temps devant soi, alors effectivement une séance peut suffire.

Le plus difficile en dentisterie reste la sélection du cas.

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A propos de l'auteur

Dr. David BENSOUSSAN

Dr en Chirurgie Dentaire
CES de Dentisterie Restauratrice et Endodontie
Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire Paris 7
Past Président CPEA
Founder Member of the International Academy off Endodontics

Dr. Catherine BENAMARA-BENSOUSSAN

Chirurgien dentiste de la Faculté de Chirurgie Dentaire de Paris
Ancienne Assistante à la Faculté de Chirurgie Dentaire de Paris VII
CES d'Endodontie et d'Odontologie Conservatrice
Diplôme Universitaire d'Etudes Cliniques Spéciales en Endodontie

Un commentaire

  1. Juste pour finir sur le nombre de séances pour l’endo, on n’ose pas parler de la rémunération de cette dernière qui, en secteur conventionné, est dérisoire par rapport au temps passé (efforts et concentration nécessaires sans parler des moyens investis) doit on avoir 2 poids, 2 mesures…

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