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Résorptions internes et traitement endodontique

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Madame B. est adressée chez un confrère pour un avis concernant la faisabilité d’une chirurgie endodontique sur deux incisives nécrosées. Celles-ci n’ayant jamais subi de traitement endodontique, l’indication chirurgicale est contre-indiquée en première intention et la patiente m’est alors adressée pour réaliser les traitements endodontiques de ces deux dents.

L’anamnèse nous apprend que la patiente est asthmatique et prend un traitement médicamenteux contre l’insuffisance veinolymphatique à base de pépins de raisins.

L’examen clinique montre (Fig. 1, 2, 3) une discoloration grisâtre des deux incisives supérieures droites (dents n° 11 et 12). Les deux dents sont asymptomatiques, aucun gonflement ni aucune douleur à la palpation ne sont présents, la mobilité est normale et le parodonte marginal est sain (sondage parodontal négatif).

Les dents voisines sont restaurées par deux couronnes céramo-métalliques (dents n° 13 et 21).

L’examen radiographique (Fig. 4) révèle deux résorptions internes : la première est petite et située au niveau des derniers millimètres apicaux de l’incisive centrale (dent n° 11), l’autre est plus volumineuse et située à mi-hauteur canalaire de l’incisive latérale (dent n°12). La patiente n’a pas le souvenir d’avoir subi un choc dans son enfance dans ce secteur.

Un traitement endodontique en trois séances, comportant : une phase de désinfection temporaire à l’hydroxyde de calcium (1), la mise en forme et l’obturation du système canalaire (2), un blanchiment interne puis l’obturation définitive de la cavité d’accès (3) est proposé à la patiente et accepté, après qu’un devis et un consentement éclairé aient été signés.

Le pronostic est assez bon à condition qu’un suivi clinique et radiographique soit assuré. Chaque séance sera réalisée intégralement sous anesthésie locale (para-apicale), sous digue et sous microscope opératoire.

La-mise-en-forme-canalaire

1ère séance

Les cavités d’accès sont réalisées et modifiées jusqu’à ce qu’une lime de perméabilité de petit diamètre (K10) soit introduite librement dans chaque canal et sans contact avec les bords occlusaux, en présence d’un gel lubrifiant contenant de l’EDTA, ceci afin de sonder l’anatomie canalaire et de maintenir la vacuité canalaire au moins jusqu’au niveau des résorptions, sans risquer de tasser de débris pulpaires en direction apicale.

La mise en forme canalaire est alors réalisée grâce à des instruments rotatifs en nikel-titane utilisés en rotation continue sur un moteur électrique avec contrôle de couple selon la technique du « crown down ». La désinfection, elle, est assurée par une irrigation d’hypochlorite de sodium à 5, 25 %, renouvelée abondamment entre chaque instrument et potentialisée par l’utilisation d’une lime montée sur un générateur à ultrasons piézoélectrique.

Un-traitement-endodontique

Après avoir préparé les canaux jusqu’au niveau des résorptions, des limes K en acier sont utilisées manuellement selon la technique du « step back » jusqu’à un diamètre apical de 0,25 au minimum. Il est particulièrement contre-indiqué d’utiliser la rotation continue d’emblée au niveau apical ! En effet, les résorptions internes créent une discontinuité de la conicité des canaux, ce qui pourrait facilement entraîner une casse des instruments en nikel-titane ! Seule la précourbure des limes manuelles de petits diamètres, très utile pour retrouver la perméabilité de chaque canal jusqu’aux apex (Cf. Radio), et la « pré » mise en forme du tiers apical de façon manuelle permettent de garantir un succès (Fig. 5).

Après une mesure précise des longueurs de travail grâce à un localisateur d’apex, et en prenant comme repère fixe le bord incisif de chaque dent, nous pouvons à présent réutiliser la rotation continue avec plus de sécurité pour terminer la mise en forme et donner plus de conicité apicale ! En effet, cette conicité permettra à la fois d’optimiser la désinfection, car un plus grand volume d’irrigant pourrant être amené à l’apex, et l’obturation à chaud puisqu’un fouloir pourra être descendu jusqu’à 4 mm des longueurs de travail, garantissant ainsi une obturation tridimensionnelle particulièrement nécessaire dans une telle situation anatomique !

Au final, les préparations sont les suivantes : conicité 8 % / diamètre 0,25 pour l’incisive latérale et conicité 9 % / diamètre 0,30 pour l’incisive centrale (Fig. 7, 8, 9).

Après le séchage des canaux, la mise en place d’hydroxyde de calcium pur grâce à un lentulo (Fig. 10) est assurée pour permettre une désinfection prolongée en inter-séance (action antibactérienne) et un meilleur contrôle du processus inflammatoire pour stopper ces résorptions (action hémostatique et anti-inflamatoire).

apex-maintenus-relativement

Fig. 9 et 10 : Avant et après hydroxide de calcium.

2e séance

Après deux semaines environ, l’hydroxyde de calcium est retiré des canaux grâce à une irrigation à l’acide citrique à 15 % en alternance avec de l’hypochlorite de sodium à 5,25 % et des ultrasons.

Les longueurs de travail, les diamètres apicaux et la conicité de chaque canal sont alors vérifiés. Des cônes de gutta percha non standardisés (médium) sont calibrés manuellement grâce à une réglette graduée perforée. Puis, l’obturation complète des deux systèmes canalaires est réalisée par une technique de condensation verticale à chaud en une seule vague de condentation (® Système B du Dr Buchanan), après avoir préalablement séché les canaux avec des points de papier stériles. Un ciment endodontique adapté à ce type d’obturation est utilisé en petite quantité et badigeonné sur les parois canalaires grâce à des pointes de papiers stériles ou directement par les cônes de gutta désinfectés préalablement dans l’hypochlorite de sodium pendant une minute.

Nous pouvons aisément voir sur la radio l’obturation tridimensionnelle obtenue après la phase de descente et le parfait contrôle apical (Fig. 11). Ce dernier est obtenu grâce à des apex maintenus relativement étroits et à la mise en forme suffisamment conique, permettant ainsi de générer des forces hydrauliques importantes lors du compactage de la gutta pour mieux piéger l’anatomie canalaire complexe de ces deux dents.

La remontée est réalisée par un therm-ocompactage de gutta selon la technique du Dr Mc. Spadden. Ici la gutta est remontée jusqu’au niveau crestal car la dent sera éclaircie par une technique de blanchiment interne décrite dans l’étape suivante.

Pour ce faire, les parois des cavités d’accès sont nettoyées avec du chloroforme, de l’alcool et de l’eau puis séchées par des pointes de papier. Un ciment Verre Ionomère (ou bien IRM) est alors déposé au dessus de la gutta sur 2 à 3 millimètres de façon à créer une barrière étanche pour le produit de blanchiment.

Après la prise du matériau, le perborate de sodium (granules blancs) est dilué dans du sérum physiologique déposé dans la cavité d’accès qui sera refermée par un petit coton et un pansement temporaire (Fig. 12).

3e séance

L’éclaircissement de la dent est contrôlé quinze jours après (Fig. 13 et 14) et le produit de blanchiment est alors soit de nouveau remis dans la cavité d’accès pour une ou deux semaines supplémentaires, soit retiré si le résultat esthétique est satisfaisant. La cavité d’accès peut alors être rincée avec de l’eau puis refermée par un nouveau pansement temporaire qui sera changé par un composite par le praticien traitant deux à trois semaines après. Il est en effet important de rappeler que les procédures de collage peuvent être altérées, si elles sont réalisées trop rapidement, par l’oxygène libéré par le perborate de sodium.

Le traitement réalisé a été particulièrement conservateur dans le cas présent puisque aucune restauration prothétique ne sera envisagée (Fig. 15 et 16). Le traitement endodontique de ces deux dents nécrosées était parfaitement indiqué, et a pu être réalisé selon un protocole stricte mais accessible à tous à condition de respecter les recommandations propres à chaque technique utilisée.

L’éclaircissement de la dent

Fig. 14 : Avant blanchiment interne Fig. 15 : Après blanchiment interne.

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A propos de l'auteur

Dr. Regis ATTUIL

Chirurgien-dentiste
C.E.S de Biologie buccale (Paris VII)
C.E.S d’Odontologie conservatrice et Endodontie (Paris VII)

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