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Rencontre avec Pierre KELLER

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Quid de ce prélèvement d’os autogène dans la zone rétromolaire qui tourmente tant les implantologistes ? La rédaction du Fil Dentaire s’est rendue à Kehl, en Allemagne, pour participer à une formation sur les greffes osseuses, organisée par Dentsply Sirona et orchestrée par Pierre Keller, fervent défenseur de cette technique développée par Fouad Khoury, pour en comprendre les enjeux.

Rencontre avec l’une des valeurs sûres de la chirurgie pré-implantaire en France.

Pouvez-vous nous décrire votre parcours professionnel ?
Après mes études dentaires à Strasbourg, je suis parti faire la spécialité de chirurgie orale en Allemagne. Cette spécialité n’existait alors pas en France. J’ai eu l’opportunité d’être assistant pendant 4 ans à la clinique du Professeur Fouad Khoury à Olsberg. En 2010 à la fin de mon cursus, j’ai créé un cabinet de chirurgie orale et d’implantologie à Strasbourg en gardant un exercice dans une clinique à Kehl (la ville allemande frontalière à Strasbourg).

Une partie de votre formation qui a beaucoup contribué à construire le praticien que vous êtes a été passée pendant 4 ans auprès de Fouad Khoury qui a joué pour vous le rôle de mentor. Avec le recul, quel est « l’héritage » que vous avez conservé de cette période ? Qu’avez-vous conservé de cet apprentissage et en avez-vous abandonné une partie et pourquoi ?
L’héritage de cette période est une véritable culture chirurgicale. Évidemment mon mentor Fouad Khoury m’a inculqué la puissance de l’os autogène. J’ai conservé dans mon exercice de reconstruction osseuse toutes les techniques qu’il a développées et dont il a démontré la stabilité. Je n’ai rien vraiment abandonné, j’ai juste adapté certains détails à mon activité pour essayer d’optimiser certains aspects.

Vous êtes connu pour vos reconstructions osseuses en 3D avec prélèvement retro-molaire. et vos formations portent essentiellement sur ce sujet. Est-ce la seule technique que vous préconisez et l’utilisez-vous pour toutes vos reconstructions osseuses ou adoptez-vous une gamme de techniques en fonction du type et de l’étendue du défaut ?
Les reconstructions en 3D avec un prélèvement rétromolaire permettent de reconstruire de façon reproductible et fiable de gros défauts osseux alvéolaires. Je ne préconise ces techniques uniquement lors de la reconstruction de défaut le justifiant. Mon activité est orientée sur les cas extrêmes, des reprises d’échecs, des traumas etc… Dans ces cas, aucun compromis n’est envisageable et l’os autogène est indiqué. Cependant, j’utilise évidemment des solutions alternatives pour les cas moins extrêmes. Les techniques ROG avec biomatériau-membrane résorbable font entièrement partie de mon arsenal thérapeutique et m’apportent d’excellents résultats.

La technique de reconstruction osseuse en 3D avec prélèvement retro-molaire présente beaucoup de
difficultés et est réservée à des praticiens ayant déjà une certaine expérience mais ce qui effraie le plus les
candidats à franchir le cap est le prélèvement ramique avec son risque de lésions nerveuses. Comment rassurez-vous les praticiens qui viennent se former chez vous à ce sujet ?
Nous passons du temps à bien expliquer l’anatomie de cette région lors de nos formations. une fois que l’on se représente clairement l’anatomie de la ligne oblique externe par rapport au ramus et la position du nerf, on comprend la position et l’orientation des ostéotomies. Le protocole de prélèvement parait alors sécurisant et reproductible pour que les praticiens se sentent prêt à passer le cap. Même si une courbe d’apprentissage est nécessaire, l’objectif de nos formations est de rendre accessible toutes ces techniques.

“Une fois que l’on se représente clairement l’anatomie de la ligne oblique
externe par rapport au ramus et la position du nerf, on comprend la position
et l’orientation des ostéotomies.”

Vous pratiquez les reconstructions en 3D à Kehl en Allemagne ou il vous est possible d’utiliser un type
d’analgésie interdit en France, pouvez-vous nous expliquer pourquoi et pensez-vous que ce type d’intervention est déconseillée à réaliser sous anesthésie locale ?
Nous réalisons beaucoup de nos interventions à Kehl sous sédation intra-veineuse au midazolam (Hypnovel). Ce type d’anesthésie n’est pas interdit en France, il est uniquement réservé au milieu hospitalier. Nous réalisons aussi des prélèvements sous anesthésie locale, cela dépend de la demande de nos patients. Lorsque notre protocole de prélèvement est respecté, il prend moins de 5 minutes, il est donc tout à fait applicable sous anesthésie locale. L’opportunité d’intervenir sous sédation lors des formations avec chirurgies en direct me permet de commenter et d’expliquer en détail l’intervention sans que le patient ne s’en rende compte.

“Les reconstructions en 3D avec un prélèvement rétromolaire permettent de reconstruire de façon reproductible et fiable de gros défauts osseux alvéolaires.”

Dans les reconstructions en 3D le « coffrage » qui permet d’éviter une compétition cellulaire qui serait défavorable à la néoformation osseuse provient d’un prélèvement rétromolaire. Que pensez-vous des techniques de régénération où ce coffrage est remplacé par une plaque allogénique, une plaque d’ostéosynthèse, une membrane en titane, une membrane non résorbable armée de titane… ?   

Le concept de coffrage est en effet applicable avec d’autres barrières que des lamelles d’os autogène. Le risque d’exposition est alors beaucoup plus important. Les lamelles osseuses sont utilisées comme une barrière biologique. L’adhésion du lambeau muqueux sur une lamelle osseuse est favorisée par rapport aux alternatives même allogéniques.

Pour compléter la question précédente, à un moment où l’implantologie recherche les techniques les moins invasives possibles, ne pensez-vous pas que la technique de régénération par bloc 3 D nécessitant 2 sites opératoires, un pour le prélèvement et un pour la greffe va à contre-courant du sens de l’Histoire ?
Durant l’histoire, la simplification à l’extrême a souvent entraîné des retours en arrière. Aujourd’hui, on observe justement un engouement pour les techniques de reconstructions osseuses avec prélèvement rétromolaire. De nombreuses alternatives présentées comme moins invasives se sont avérées beaucoup plus complexes et onéreuses. Il est également important de préciser que des techniques de reconstruction verticale avec des membranes non résorbables préconisent un mélange d’au moins 50 % d’os autogène qui oblige l’opérateur à réaliser un prélèvement osseux.

Dans les décennies précédentes, l’os autogène était le « gold standard » ce qui ne semble plus être le cas
aujourd’hui en raison de la résorption constatée à moyen et long terme par de nombreux leaders d’opinion. Quelle est votre position à ce sujet ?
A une époque, l’os autogène a été greffé en bloc sans le concept de coffrage ce qui a entraîné sa résorption à moyen-long terme. La technique du coffrage a complètement modifié les résultats de l’os autogène. La
reconstruction d’un os vivant est essentielle à sa stabilité. Par ailleurs, les techniques d’aménagement des tissus mous n’étaient souvent pas maîtrisées. L’absence de gencive fixe péri-implantaire a également été
la cause de résorptions. Le secret de la stabilité des reconstructions est non seulement la technique de greffe mais aussi une correction spécifique des tissus mous. L’os autogène reste alors une référence en raison de sa fiabilité, sa capacité de régénération et son faible taux de complications.

“Même si une courbe d’apprentissage est nécessaire, l’objectif de nos formations est de rendre accessible toutes ces techniques pour que les praticiens se sentent prêt à passer le cap”

Quel est le type de membrane et de biomatériaux que vous utilisez dans votre pratique quotidienne et pourquoi ?
J’utilise volontiers la membrane Symbios (Dentsply Sirona) dans différentes indications. Son caractère lentement résorbable est très intéressant. Le biomatériel le plus documenté reste le Bio-oss (Geistlich). Les résultats qu’il apporte ne sont plus à démontrer. Comme alternative non animal, j’utilise également le Biphasic (Dentsply Sirona) avec satisfaction.

Quels sont vos projets ?
Mes projets professionnels sont multiples dans le développement de mon activité de praticien et de
formateur. Les réseaux sociaux idéalisent souvent les activités de chacun, notre métier reste challengeant. J’ai la chance d’avoir une super équipe qui m’entoure et me permet d’avancer, je leur suis extrêmement reconnaissant. Mes projets privés sont simplement de moins travailler (;- pour passer plus de temps avec ma femme et mes enfants ! :-).

 

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