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La “No Post, No Crown Dentistry » : A quelle échéance… ?

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Dans le cadre de la dentisterie contemporaine, le changement fort de paradigme qui s’opère dans le domaine de la prothèse conjointe concerne tout aussi bien ses indications actuelles que les biomatériaux et les modes d’assemblage qu’elle met en œuvre. Il est clairement admis que la prothèse conjointe conventionnelle basée sur des concepts essentiellement mécanistes à l’origine d’une perte tissulaire souvent excessive voire extrême n’est plus acceptable tant sur le plan biologique que sur le plan biomécanique (1, 2, 3).

Ainsi aujourd’hui, comme nous le rappelle le Pr Urs Belser, seuls les délabrements coronaires ne présentant pas de support dentaires suffisant et fiable mécaniquement pour un collage de qualité devrait rester les seules indications de la couronne unitaire (1). En dehors de cette indication spécifique, la réalisation d’une couronne périphérique devrait légitimement se faire dans le cadre de la seule réintervention prothétique. La couronne a donc encore sa place, bien évidemment, dans notre arsenal thérapeutique, mais son indication en première intention s’est limitée considérablement au profit des restaurations partielles. C’est ce que Pascal Magne appelle la « No Post, No Crown dentistry » (2).

Les techniques adhésives offrent effectivement aujourd’hui au praticien la possibilité d’indiquer et réaliser dans de nombreuses situations des restaurations partielles aussi bien sur les dents postérieures qu’antérieures, qu’elles soient pulpées ou dépulpées. Ces restaurations partielles peuvent aussi répondre à des contextes de perte de substance parfois importantes relevant des phénomènes pathologiques d’érosion/usure en augmentation croissante dans tous les pays du monde, touchant toutes les classes d’âge et dont certains affichent un degré de sévérité extrême (4, 5, 6).

Ce changement de paradigme et cette démarche clinique s’inscrivent dans un concept plus contemporain appelé concept « Biomimétique » ou « Bioémulation » décrit par Magne et Belser en 2003 (7, 8) et qui trouve son origine dans l’étude histo anatomique des tissus naturels de la dent. Idéalement, la dent et le biomatériau de restauration devraient constituer, au sens biologique et optique, une véritable « unité fonctionnelle », qui aurait la capacité de supporter les charges biomécaniques auxquelles elle est soumise dans son environnement.

Cette préservation tissulaire des restaurations partielles par rapport aux restaurations périphériques a été quantifiée sur les dents postérieures (9) et sur les dents antérieures (10). Elle est associée à d’excellentes performances de longévité comme par exemple dans le cas des facettes lorsque les préparations restent dans l’émail (11) ou dans le cas des inlays/onlays (12). Ainsi en suivant le concept du gradient thérapeutique (13), qui basé sur la préservation tissulaire, on peut dire que, lorsque les conditions sont requises (Cf plus haut selon Urs Belser), les restaurations partielles, directes ou indirectes sont préférables aux couronnes.

De plus, l’allongement de la durée de vie de nos concitoyens (en moyenne un trimestre par année) impose un nombre de réinterventions sur les restaurations plus important dans le temps. Cette donnée nécessite donc plus que jamais la conservation optimale des tissus lors des premières interventions cliniques sur la dent afin de rendre possibles et plus aisées toutes les réinterventions futures.

En effet, les échecs de restaurations partielles sont non seulement plus faciles à gérer que les échecs des restaurations périphériques, mais dans quasiment tous les cas la dent reste conservable et une nouvelle restauration partielle reste possible (12). Ainsi le cercle vicieux des restaurations qui aboutit à la perte de la dent est brisé et une importante longévité de la dent sur l’arcade est permise (14).

Donc la question titre de ce numéro La “No Post, No Crown Dentistry » : à quelle échéance ? » reste d’une actualité brûlante. Il semble urgent que tous les acteurs de la vie professionnelle (université, syndicat, ordre, organisme de formation…etc) se saisissent de ce sujet et expliquent aux gouvernants qu’il est possible de mieux soigner les dents, en préservant les tissus, et ce à coût constant.

C’est donc fort de ce changement de paradigme fondamental, qui bouscule la dentisterie de tous les pays du monde, que nous avons voulu inscrire le sommaire de ce numéro spécial.

Nous avons fait appel pour cela à 3 équipes de jeunes praticiens, cliniciens et scientifiques talentueux (Paris, Bordeaux, Marseille) pour présenter quelques aspects des restaurations partielles que nous encourageons si fortement. L’équipe bordelaise traite des restaurations partielles postérieures, l’équipe marseillaise des restaurations partielles antérieures et l’équipe parisienne d’une synthèse sur les matériaux actuels. Nous les remercions tous très chaleureusement tant pour leur réactivité que pour la qualité de leurs articles.

Bonne lecture !

Bibliographique

1. Belser U. Changement de paradigmes en prothèse conjointe. Real Clin, 2010, Vol 21, n°2 : pp. 70-95.
2. Magne P. Interview. Brit Dent J, Aug 25 2012, Vol 213, N°4 ; 189-191.
3. Rich B, Goldstein GR. New Paradigms in Prosthodontic Treatment planning : A literature review. J Protsh dent. 2002 ; 88 : 208-214.
4. Vailati F, Belser UC. Full-mouth adhesive rehabilitaion of a severely eroded dentition : the three step technique. Part 1. Eur J Esthet Dent. 2008a ; 3 : 30-44.
5. Vailati F, Belser UC. Full-mouth adhesive rehabilitaion of a severely eroded dentition : the three step technique. Part 2. Eur J Esthet Dent. 2008b ; 3 : 128-46.
6. Vailati F, Belser UC. Full-mouth adhesive rehabilitaion of a severely eroded dentition : the three step technique. Parts 1. Eur J Esthet Dent. 2008c ; 3 : 236-257.
7. Magne P, Belser U. Restaurations adhésives en céramique: approche biomimétique. Quintessence 2003.
8. Bazos P , Magne P. Bio-imitation : reproduction de la nature par imitation biomimétique fondée sur une approche histo-anatomique. Analyse structurale. Eur J Esthet Dent. 2011, Automne 2011.Vol 3, n°3, 196-207.
9. Edelhoff D, Sorensen JA. Tooth structure removal associated with various preparation designs for posterior teeth. Int J Periodontics Restorative Dent. juin 2002;22(3):241-9.
10. Edelhoff D, Sorensen JA. Tooth structure removal associated with various preparation designs for anterior teeth. J Prosthet Dent. mai 2002;87(5):503-9.
11. Gurel G, Sesma N, Calamita MA, Coachman C, Morimoto S. Influence of enamel preservation on failure rates of porcelain laminate veneers. Int J Periodontics Restorative Dent. févr 2013;33(1):31-9.
12. Van Dijken JWV, Hasselrot L. A prospective 15-year evaluation of extensive dentin-enamel-bonded pressed ceramic coverages. Dent Mater Off Publ Acad Dent Mater. sept 2010;26(9):929- 939.
13. Tirlet G, Attal J-P. Le gradient thérapeutique: un concept médical pour les traitements esthétiques. Inf Dent. 2009;(41/42):2561-8.
14. Lasfargues J-J, Colon P. Odontologie conservatrice et restauratrice. Tome 1 : une approche médicale globale. 2010. 480 p.

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A propos de l'auteur

Dr. Gil TIRLET

Praticien Libéral
Maître de Conférences des Universités
Praticien hospitalier
Responsable de la Consultation de Bioémulation (Hôpital Charles Foix, Ivry-sur-Seine)

Dr. Jean-Pierre ATTAL

Praticien libéral
Maître de Conférences des Universités
Praticien hospitalier
Responsable du pôle clinique de l'URB2i
Président de la Société Francophone de Biomatériaux Dentaire (SFBD)

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