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Le cloisonnement du bas-fond sinusien par un bloc osseux cortical a-t-il un intérêt lors d’un sinus-lift ?

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De nombreuses publications rapportent des taux de succès supérieur à 90 % pour le comblement des bas-fonds sinusiens par une approche latérale. Plusieurs variables dans le protocole chirurgical sont introduites par les différents auteurs.

On peut citer la dimension et la position de la fenêtre vestibulaire, l’utilisation des ultra-sons ou de la fraise pour la réaliser, son impaction ou son retrait pour accéder à la membrane sinusienne et l’élever. Le comblement de la cavité se fera avec de l’os autogène ou des substituts, voire un mélange des deux dans des proportions variables, avec la possibilité d’un comblement sélectif. Dans certaines situations, la cavité ne sera pas comblée et la membrane sinusienne plus ou moins bien maintenue en hauteur par l’apex des implants, lorsque la décision d’implantation immédiate est prise. Enfin, il est possible d’interposer une membrane de régénération osseuse sur la fenêtre vestibulaire ou de repositionner le volet osseux initial.

Parmi toutes ces variables, le cloisonnement supérieur du bas-fond sinusien par un bloc osseux cortical est très peu cité comme une alternative intéressante. C’est J.-F. Tulasne qui l’a proposé et systématisé avec de l’os crânien (Tulasne – Saade – Riachi. Implant mai 1993 : 101–114).

S’il n’est pas, bien sûr, indispensable au résultat, ce cloisonnement présente beaucoup d’avantages et l’inconvénient… de devoir être réalisé. Cet article présente le protocole chirurgical pour stabiliser un plafond osseux cortical sous anesthésie locale, et dégagera l’intérêt de ce cloisonnement supérieur.

Protocole chirurgical

Le prélèvement d’os ramique

Le prélèvement osseux est effectué sur la face latérale de la mandibule, en arrière du trou mentonnier, généralement à partir de la première molaire ou de la deuxième molaire selon l’épaisseur de la ligne oblique externe.

Le prélèvement se poursuit vers l’arrière, en avant de la projection de l’épine de Spix et vers le bas où il est délimité par une gorge intra-corticale faite à la fraise boule. Toutefois, si la quantité d’os autogène nécessaire est importante, le prélèvement peut s’étendre vers le bas jusqu’au bord basilaire. Les ostéotomies antérieures et postérieures sont faites à la fraise fissure et l’ostéotomie supérieure qui les rejoint est faite à la scie oscillante ou aux ultra-sons. Il est primordial lors du prélèvement de protéger l’extrémité des fraises rotatives avec un décolleur approprié et de rester dans la corticale, en particulier l’ostéotomie verticale postérieure, pour éviter toute lésion du nerf alvéolaire (Fig. 1 et 2).

Les-blocs-osseux

Fig. 1 : délimitation du site donneur ; noter le décolleur qui va assurer la protection des instruments rotatifs, ce site est choisi pour la quantité d’os qu’il peut offrir, des suites postopératoires simples et surtout la surface plane du bloc osseux Fig. 2 : la gorge intra-corticale faite vers le bas à la fraise boule rejoint les ostéotomies verticales antérieures (non visible) et postérieure, l’épaisseur de la corticale dans la région supérieure est sondée au foret, et les pertuis seront réunis à la scie oscillante ou grâce aux ultra-sons

Les blocs osseux sont essentiellement corticaux et font entre 3 et 5 cm de long, 1 à 2 cm de large, une épaisseur variable de 4 mm au niveau de la ligne oblique externe, à 1 ou 2 mm sur la partie inférieure.

Il n’est pas rare que le nerf alvéolaire inférieur laisse son empreinte sur la face interne, d’où la nécessité de rester dans la corticale lors des manœuvres chirurgicales et de disposer d’une imagerie appropriée. Il faut entre 15 mn et 30 mn pour effectuer ce prélèvement, variable selon la quantité d’os nécessaire et l’aspect plus ou moins corticalisé du secteur (Fig. 3 et 4).

L’avantage des blocs osseux obtenus réside dans la géométrie plane de la face externe, ce qui permet dans tous les cas de les dédoubler plus ou moins complètement pour en obtenir deux dont l’un fera office de plafond et l’autre sera broyé en copeaux, ou plus généralement participera à la reconstruction en épaisseur et/ou en hauteur de la crête osseuse résiduelle (Fig. 5).

Antrotomie-vestibulaire

Fig. 3 : des blocs de 3 à 5 cm de long sur 1 à 2 cm de hauteur peuvent être prélevés, à noter la surface plane de ce prélèvement Fig. 4 : sur la face interne de ce prélèvement, le trajet du NAI est visible dans la partie inférieure, il faut être prudent avec les instruments rotatifs et éviter de franchir la corticale à son voisinage Fig. 5 : la géométrie de ces blocs ramiques et leur épaisseur autorise leur dédoublement au disque diamanté, l’une des deux parties fera fonction de plafond sinusien

la-membrane-sinusienne

Fig. 6 : un implant est prévu pour compenser la première molaire ; la fenêtre vestibulaire va s’étendre vers l’avant et passer au dessus de la prémolaire Fig. 7 : tracé de l’antrotomie vestibulaire qui s’étend jusqu’à la paroi antérieure du sinus en passant au dessus de la prémolaire ; cette fenêtre reste à distance de la crête édentée pour ménager un rempart vestibulaire ; notez le sondage de l’épaisseur de la paroi faite à la fraise boule et le biseau du trait d’ostéotomie Fig. 8 : la fenêtre est retirée, la membrane sinusienne et sa vascularisation sont visibles, la manipulation est facilitée par l’ouverture antérieure ; le décollement vers le bas et l’arrière ne présente en général pas de difficulté

Antrotomie vestibulaire

La position et la taille de la fenêtre latérale doivent être mûrement réfléchies. Une fenêtre trop distale obligera à utiliser une curette fortement coudée pour détacher la membrane sinusienne dans sa partie antérieure.

Le geste est alors moins contrôlé et toute perte du contact osseux peut se solder par une déchirure, qui peut passer inaperçue. Ainsi, en présence des prémolaires avec un sinus s’étendant vers l’avant, il ne faut pas hésiter à étendre la fenêtre sous les apex dentaires.

En revanche, il faut éviter de faire des fenêtres trop basses en cas de sinus procident afin de garder un rempart osseux vestibulaire et parce que le mouvement de la curette dans ce sens vertical est facilement contrôlable, comme il l’est vers l’arrière, sauf si le plancher osseux est irrégulier suite à des extraction récentes, la présence d’une molaire ou de septa (Fig. 6 à 9).

L’antrotomie se fera à la scie oscillante ou mieux aux ultra-sons avec un insert de type scalpel. C’est cet insert qui permettra la réalisation d’une tranchée dans la paroi latérale antérieure dans laquelle s’impactera le plafond cortical (Fig. 10).

Selon l’épaisseur des parois osseuses et l’accessibilité, les traits d’ostéotomie seront convergents, l’idée étant de retirer la fenêtre vestibulaire et de la repositionner en fin d’intervention sans qu’elle s’enfonce, pour oblitérer le plus naturellement cet accès latéral. L’inclinaison donnée à l’insert réduit également le risque de lésion de la membrane lors de cette phase où il est inutile de rechercher à sectionner toute l’épaisseur osseuse vestibulaire.

Soulevé de la membrane sinusienne

Une fois le volet vestibulaire retiré, la membrane de Schneider est séparée du plancher et des parois osseuses environnantes, ce temps opératoire pouvant être compliqué par la finesse de la membrane, par une artériole ou la complexité anatomique de la zone. De fait, la complication la plus fréquente réside dans la survenue d’une perforation qui est le résultat, dans la plupart des cas, d’un manque d’anticipation et qui va toujours nécessiter une gestion complémentaire visant à éviter une fuite du comblement et son envahissement par des mucosités sinusiennes.

Comblement-et-fermeture-vestibulaire

Fig. 9 : la membrane est soulevée et toutes les parois osseuses internes sont libérées, noter l’épaisseur de la paroi vestibulaire et le biseau Fig. 10 : insert scalpel BS5 Actéon utilisé pour la découpe de la fenêtre vestibulaire et pour l’encoche qui stabilisera le plafond

Positionnement du plafond

Ce temps opératoire ne nécessite en général pas plus de 5 minutes pour aboutir à stabiliser la lamelle osseuse corticale horizontalement à 13 ou 15 mm maximum du bord inférieur de la crête édentée. En général, une seule encoche est réalisée sur la paroi antérieure, en veillant à ce qu’elle soit parallèle à la crête édentée.

Après avoir adouci tous les angles, le bloc osseux est inséré dans la cavité antrale et glissé dans l’encoche pour y être impacté afin d’obtenir son immobilité.

Si la fenêtre est de petite taille, il est possible qu’une deuxième encoche soit nécessaire en postérieur pour insérer le bloc. L’immobilité du plafond, si elle n’est pas suffisante, peut être complétée par une ligature avec un fil de suture résorbable 4/0, bien que ceci soit moins nécessaire au fur et à mesure de l’apprentissage (Fig. 11 à 13).

La largeur du plafond ne lui permet pas toujours d’être en contact permanent avec la paroi nasale interne, du moins en postérieur et chaque fois que la distance vestibulo-palatine est importante. Mais l’orientation qui lui est donnée fait qu’il est dirigé sous les apex supposés des implants.

Une fois le plafond immobilisé, sa partie antérieure située hors de la cavité sinusienne est découpée, et le volet vestibulaire est repositionné pour vérifier que le plafond n’interfère pas avec sa bonne assise, et bien souvent, il participe à sa stabilité.

Positionnement-du-plafond

Fig. 11 : l’encoche antérieure sur la paroi vestibulaire doit être parallèle à la crête osseuse et à une hauteur de 13 à 15 mm maximum de celle ci Fig. 12 : le plafond est immobilisé par impaction dans l’encoche, la partie antérieure du plafond est recoupée lorsqu’elle dépasse du sinus et qu’elle empêche le repositionnement du volet vestibulaire Fig. 13 : lorsque la fenêtre est de petite taille, une deuxième encoche est nécessaire pour insérer le bloc

Comblement et fermeture vestibulaire de la cavité d’accès

le-plafond-cloisonne

Fig. 14 : le plafond est inséré dans l’encoche antérieure ; pour parfaire l’immobilité du bloc, une suture résorbable 4/0 est ajoutée ; la membrane sinusienne ici très fine apparaît en postérieur Fig. 15 : le plafond cloisonne vers le haut la cavité et limite le comblement dans ce sens, il n’a aucun effet en postérieur ; du collagène assure la protection en étant disposé contre la membrane ; notez un deuxième bloc qui va épaissir la crête antérieure Fig. 16 : le comblement est effectué avec un mélange d’os autogène et de substituts osseux, les copeaux autogènes sont condensés préférentiellement sous la crête et au contact des parois osseuses, le biomatériau complète le comblement vers le haut et proche de la fenêtre Fig. 17 : le volet osseux retiré lors de l’antrotomie est repositionné, il a dû être redécoupé vers le haut pour s’ajuster au dessus du plafond ; malgré la finesse des parois osseuses et l’absence de fait d’un biseau prononcé, le volet est stable ; il peut être judicieux de disposer une ou deux membranes de PRF pour compléter son immobilité

Si le plafond permet de cloisonner vers le haut, il n’a pas d’efficacité vers l’arrière puisqu’il ne s’étend pas jusqu’à la paroi postérieure. Ainsi, si la membrane de Schneider est fine, ou bien pour limiter le comblement en postérieur, du collagène type Pangen® ou Gingistat® est disposé à ce niveau préalablement au comblement. Puis, le comblement est disposé en tassant plus au moins fortement selon qu’il s’agisse de copeaux osseux ou d’un substitut, d’abord vers le bas et l’avant, puis contre la paroi nasale, et progressivement vers l’arrière et le haut pour terminer sur la fenêtre. Lorsque les implants sont combinés avec le sinus-lift, le comblement est dans un premier temps partiel jusqu’à la paroi nasale, puis les implants sont insérés, et le comblement est repris.

La fermeture de la fenêtre de Tatum est assurée en repositionnant le volet osseux initial, mais il est possible aussi de cloisonner cette région vestibulaire avec un bloc osseux si l’épaississement de la crête est nécessaire.

Dans notre pratique, une membrane collagénique n’est pas utilisée à cet effet et c’est bien le volet vestibulaire qui assure préférentiellement cette fonction (Fig. 14 à 17).

Intérêts d’un cloisonnement sinusien par un plafond cortical

Ils sont nombreux et découlent de l’aspect mécanique du plafond. L’intérêt biologique éventuel de la présence d’un bloc osseux vascularisé par la membrane sinusienne nécessite une évaluation qui dépasse le cadre du clinicien.

Limiter le comblement et le condenser au contact des parois osseuses résiduelles

Une cloison rigide supérieure simplifie le comblement et le risque de sur-comblement est éliminé, hormis en postérieur où il faut se garder de condenser d’une manière excessive.

Maintien d’espace et stabilisation du volume osseux obtenu

Quelques rapports font état d’une perte de hauteur du comblement sinusien dans les trois années qui suivent le sinus-lift. Le plafond, parce qu’il ne se résorbe pas et qu’il est immobile stabilise le volume nécessaire aux futurs implants. Bien plus, en maintenant la membrane en hauteur, il permet à un caillot de se former, rejoignant ainsi la tendance de plus en plus documentée de ne pas combler les bas-fonds sinusiens, dès lors que la membrane peut être maintenue en hauteur par l’apex des implants. Il est aussi permis de penser que la membrane sinusienne reposera sur la surface la plus naturelle qui soit, ce qui facilitera sa réparation et limitera toute fuite de matériau en cas de rupture après intervention si le patient ne respecte pas les consignes post-opératoires.

Surface optimale pour réparation spontanée d’une membrane sinusienne perforée

En moyenne, il ressort que le taux de perforation de la membrane lorsqu’elle est dépistée est de 20 %. Il semble que si les perforations de petite taille n’ont pas de réelle incidence si elles sont bien traitées, il n’en est pas de même pour les perforations de gros diamètre pour lesquelles une gestion avec des membranes collagéniques, de la fibrine ou des blocs osseux doit être mise en œuvre. Le plafond n’exonère pas le traitement d’une perforation par tous les moyens possibles visant à la réduire, mais il facilite son traitement en réduisant le risque de fuite de matériau ou son envahissement par des sérosités sinusiennes.

Ré-intervention facilitée en cas d’infection

Notre expérience nous permet de rapporter qu’en cas d’infection nécessitant le parage du secteur (3 % des situations en accord avec la revue de littérature effectuée par Pjetursson et Coll. J Clin. Periodontol 2008 ; suppl. 8 : 216-240,) le matériau de comblement est la principale source qui entretient l’infection et son élimination combinée avec une antibiothérapie a permis la résolution du problème infectieux. Le plafond est généralement laissé in situ s’il est toujours immobilisé, ce qui facilite la ré-intervention, puisque la cavité est maintenue en l’état et peut même se réduire par un comblement osseux spontané.

Conclusion

Le principal écueil de cette technique réside dans la nécessité de prélever de l’os autogène. Toutefois, dans 75 % des situations que nous avons eues à traiter, le sinus-lift doit être combiné avec l’épaississement de la crête résiduelle, voire son augmentation en trois dimensions, et ceci se gère également avec de l’os autogène.

Dans la période 2002–2010, 369 plafonds ont été réalisés pour 417 sinus lifts, que ce soit sous anesthésie locale avec de l’os ramique ou sous anesthésie générale avec du crânien, et dans aucune situation, ce complément cortical n’a été source de complication post-opératoire. Face aux avantages que nous ressentons cliniquement, le cloisonnement du bas-fond sinusien représente une démarche de choix pour ce type d’intervention.

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