En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés à vos centres d'intérêts.

LEFILDENTAIRE est un site réservé aux professionnels de la santé dentaire.
Si vous n'êtes​ pas un professionnel de santé, vous pouvez obtenir des réponses à vos questions par des experts sur Dentagora.fr en activant le bouton Grand Public.

Je suis un professionnel Grand Public

Implantologie et parodontopathies : Quelles décisions thérapeutiques en 2009 ?

0

La très grande majorité des maladies parodontales, quelles que soient leurs formes cliniques, sont initiées et/ou entretenues par une flore incompatible avec la santé parodontale qui apparaissent chez des sujets présentant une réponse inflammatoire dysfonctionnelle. Par ailleurs, il est également admis qu’un processus infectieux similaire aux maladies parodontales, “la péri-implantite”, peut affecter les implants et entraîner la perte de ceux-ci si l’infection n’est pas enrayée suffisamment tôt.

L’évolution de ces différents concepts a eu un impact considérable sur nos attitudes thérapeutiques en dentisterie globale. Les abords des traitements parodontaux, implantaires et prothétiques, plus ou moins complexes, ont donc été bouleversés au cours des quinze dernières années. Le but de cet article est d’actualiser ces connaissances avec leurs implications en pratique quotidienne.

Maladies parodontales : concepts et traitements

La très grande majorité des parodontites et les pertes d’attache qui en découlent sont initiées et/ou entretenues par une flore bactérienne incompatible avec la santé parodontale chez des patients ayant une réponse immunitaire inadéquate. Ces infections parodontales présentent, en l’absence de traitement et à un moment donné, une majorité de sites au repos qui peuvent le rester pendant plusieurs années. Quelques sites réunissent simultanément quatre conditions : présence de bactéries virulentes ; absence de bactéries protectrices ; environnement dento-gingival favorable aux bactéries virulentes ; réponse inadéquate du système de défense de l’hôte. Elles sont en activité pendant un temps relativement bref au cours duquel la destruction des tissus parodontaux peut être extrêmement rapide (14). Ces pertes d’attache peuvent conduire, dans certains cas, à la perte des dents (9).

En conséquence, l’attitude globale des traitements parodontaux consistera :

  1. à d’abord stopper l’évolution des pertes d’attache,
  2. à regagner le maximum d’attache perdue,
  3. enfin, à maintenir les résultats obtenus (4).

Ces traitements réalisés avec ou sans prothèses conduisent à d’excellents taux de succès qui avoisinent 95 % avec un recul de 10 ans (10).

Implantologie

Bränemark et ses collaborateurs ont mis au point le concepte de l’ostéointégration (1). Cette unité fonctionnelle, capable de transmettre des forces occlusales au niveau des tissus osseux a aussi été décrite comme une “ankylose fonctionnelle”.

Parallèlement à ces recherches fondamentales, de très nombreuses études cliniques ont pu démontrer que l’implantologie est devenue un acte courant et fiable quand elle est réalisée dans des conditions optimales en suivant un protocole rigoureux que ce soit dans le cadre de protocoles de recherche ou dans le cadre de pratiques privées (5) (7).

Similitudes entre parodontites et péri-implantites

Comme les parodontites non-traitées peuvent entrainer la perte des dents naturelles, les péri-implantites non-traitées peuvent entrainer la perte des implants (6). Un des facteurs étiologiques majeurs de la perte des dents et des implants à moyen et long terme reste le biofilm bactérien qui se dépose sur les surfaces dentaires (“la plaque dentaire”). Il existe une flore bactérienne quasi similaire pour les parodontites et pour les péri-implantites composée essentiellement de bactéries à Gram négatif anaérobies (3). En revanche, ces bactéries sont rarement retrouvées au sein de la plaque jouxtant des implants sains (12). Par ailleurs, si le parodonte est infecté, il existe un risque majeur de voir s’installer une péri-implantite par contamination bactérienne (2).

Il apparaît que les patients souffrant ou ayant souffert de maladies parodontales sont des patients à risque pour les traitements implantaires (13).

Que conclure des relations « paro-implantaires » ?

Les péri-implantites sont essentiellement des maladies infectieuses. Il est établi que les patients susceptibles aux maladies parodontales sont à risque de développer des péri-implantites. Il est donc primordial, en présence de parodontite, avant toute réalisation implanto-prothétique, de supprimer tous les foyers infectieux. Par conséquent,un protocole strict paro-implantaire doit être suivi chez ces patients à risque.

Cas cliniques

Ces deux cas cliniques illustrent une pratique qui privilégie la “parodontie médicale” avant toute implantologie. Ils démontrent qu’il n’est pas toujours nécessaire de procéder à l’extraction suivie de l’implantation chez une très grande majorité des patients.

Cas clinique n°1 (Fig. 1 à 5)

Dent unitaire en 25 chez un patient de 61 ans souffrant d’une parodontite agressive. Vingt ans de recul parodontal et 8 ans de recul implantaire.

Bilan-radiologique-long-cone

Monsieur Gérard Dem., âgé de 41 ans, consulte le 20 septembre 1988 pour problèmes parodontaux. Compte-tenu des examens cliniques, radiologiques et bactériologiques, le diagnostic de parodontite agressive est posé (Fig. 1 et 2).

Le traitement de l’infection parodontale est entrepris (soins locaux de contrôle de plaque, antibiothérapie initiale et traitement conservateur). La parodontite est ainsi stabilisée des points de vue clinique, radiologique et bactériologique. Un traitement orthodontique est ensuite réalisé afin de supprimer la supraclusie.

En 2000, lors d’un contrôle, la dent n°25 doit être extraite (fracture). Il est décidé de la remplacer par une solution implantaire. La maintenance parodontale et implantaire est depuis assurée tous les 9 mois (Fig. 3, 4 et 5).

Cas clinique n°2 (Fig. 6 à 9)

Réhabilitation complexe chez une patiente de 65 ans souffrant d’une parodontite agressive. Dix huit ans de recul parodontal et 12 ans de recul implantaire.

vue-clinique-de-face

Madame Françoise Tal., âgée de 47 ans, consulte le 17 septembre 1990 en vue d’une réhabilitation globale. Le diagnostic de parodontite chronique sévère de l’adulte est posé (Fig. 6 et 7).

A l’issue du traitement parodontal, un traitement orthodontique a été réalisé afin de rétablir les courbes occlusales, redresser les axes dentaires en vue de prothèses fixes et rendre l’esthétique souhaité par la patiente. Des implants sont posés au niveau des dents n°46 et n°13 et une contention orthodontique est demandée. La patiente est reçue une fois par an en maintenance parodontale et implantaire (Fig. 8 et 9).

Discussion

Les choix de traitements chez les patients partiellement édentés pour raison parodontale représente une difficulté en raison des nombreuses possibilités thérapeutiques qui sont offertes. Les questions se posent : Faut-il garder et traiter les dents ou faut-il extraire et “poser” des implants ? Certains d’entre nous pensent que le taux de succès des traitements implantaires qui suivent l’extraction de dents « parodontalement compromises » est largement supérieur à celui de traitements parodontaux. Cependant, la littérature indique que les taux de succès sont quasiment identiques (environ 90 %) pour les traitements parodontaux (15) et les traitements implantaires (10). Par ailleurs, les patients ayant souffert d’une pathologie parodontale non traitée sont à haut risque de développer une pathologie péri-implantaire. Ainsi, le traitement de la pathologie parodontale permet d’éviter la perte d’autres dents et/ou le risque de voir évoluer une péri-implantite par contamination bactérienne (8). Il a été montré que, chez les patients souffrant de parodontite chronique de l’adulte, la raison majeure de la perte des dents reste le davier (11). La « décision hâtive » d’extraire est souvent liée au fait que les praticiens ne sont pas suffisament confiants dans les traitements parodontaux (11).

La décison thérapeutique d’extraire et/ou d’implanter chez les patients parodontalement compromis prendra en compte plusieurs facteurs :

  • La sévérité et la progression de la pathologie parodontale ainsi que la capacité du praticien à la prendre en charge ;
  • La demande esthétique et fonctionnelle du patient ;
  • La participation active du patient dans le contrôle de l’infection parodontale ;
  • La complexité du traitement ainsi que son coût ;
  • Les facteurs de risque technique, chirurgical et biologique qui seront pris au cours des traitements.

La solution thérapeutique choisie devra toujours être prise par le patient qui reste, au total, le seul juge à évaluer le rapport coût/bénéfice du traitement.

Conclusions

Dans une pratique quotidienne, le succès d’un plan de traitement parodontal et/ou implantaire est conditionné par le respect d’un protocole strict dans l’établissement du diagnostic parodontal et implantaire. Compte-tenu de l’investissement humain et financier, il est nécessaire d’employer des concepts, des techniques et des matériaux que le praticien maîtrise parfaitement et qui assurent la satisfaction des patients et la pérénnité des soins réalisés.

Avant toute implantation, il est nécessaire de stabiliser durablement les foyers infectieux parodontaux afin de rétablir une flore compatible avec la santé parodontale et implantaire. Les risques d’échec sont alors réduits. Si ce protocole est rigoureusement respecté, il permet d’obtenir des résultats à moyen et long termes (plus de 93 % de taux de succès implantaire) tout en préservant un nombre très élevé de dents « parodontalement compromises » (7).

Bibliographie

1. Albrektsson T., Sennerby L., Wennerberg A. State of the art of oral implants. Periodontology 2000. 47 : 15 – 26, 2008
2. Aspe P., Ellen R.P., Overall C.M., Zarb G.A. Microbiota and crevicular fluid collagenase activity in the osseointegrated dental implant sulcus: A comparison of sites in edentulous and partially edentulous patients. J. Periodontal Res. 24 : 96 – 105, 1989
3. Becker W., Becker B., Newman M. Clinical and microbiological findings that may contribute to dental implant failures. Int. J. Oral Maxillofac. Implants 5 : 31 – 38, 1990.
4. Charon J., Mouton C. Parodontie Médicale. CdP, Paris, 2003.
5. Fugazzotto P.A., Vlassis J., Butler B. ITI implant use in private practice: Clinical results with 5,526 implants followed up to 72+ months in function. Int J. Oral Maxillofac Implants 19 : 408 – 412, 2004
6. Heitz-Mayfield L.J.A. Peri-implants diseases : diagnosis and risk indicators. J. Clin. Perio. 35 (suppl. 8) : 292 – 304, 2008
7. Joachim F., Duchatelle J., Charon J. Implantologie et maladies parodontales. Information Dentaire 36 : 2937 – 2946, 2001.
8. Lang N.P. Implants and teeth in harmony with biology. Wiley-Blackweel Dentistry News. 1 : 3, 2008
9. Löe H., Anerud A., Boysen H., Morrison E. Natural history of periodontal disease in man. Rapid, modarate and no loss of attachment in Sri Lanka laborers 14 to 46 years of age. J. clin. Periodontol. 13 : 431 – 440, 1986
10. Lulic M., Brägger U., Lang N. et Coll. Ante’s (1926) law revisited : a systemic review on survival rates and complications of fixed dental prostheses (fdp) on severe reduced periodontal tissue support. Clin. Oral Implants Res. 18 (Suppl. 3) : 63 – 72, 2007.
11. Lungren D., Rylander H. & Laurell R. To save or to extract, that is the question. Natural teeth or dental implants in periodontitis-susceptible patients : clinical decision-making and tretament strategies exemplified with patient case presentations. Periodontology 2000, 47 : 27-50, 2008
12. Papaioannou W. et Al. The effects of periodontal parameters on the subgingival microbiota around implants. Clin. Oral Impl. Res. 6 : 197 – 204, 1995.
13. Schou S., Holmstrup P., Worthington H. et Coll. Outcome of implant therapy in patient with patient in previous tooth loss due to periodontitis. Clin. Oral Impl. Res. 17 (Suppl. 2) : 104 – 123, 2006.
14. Socransky S. et Coll. New concepts of destructive periodontal disase. J. clin. Periodontol. 11 : 21 – 32, 1984.
15. Yi S.W., Ericsson I. et coll. Long-Term follow up of cross-arch fixed partial dentures in patients with advanced periodontal destruction. Acta Odontol. Scand. 53: 242-248, 1995

Les auteurs remercient vivement leurs collaboratrices, tous les praticiens qui ont participé à la réalisation des cas cliniques ainsi que le Pr. PILOT (1992) pour sa citation : “Il n’existe pas un traitement efficace pour chaque maladie… mais il est toujours facile de trouver une maladie pour chaque traitement !” Autrement dit, lorsque l’on a un marteau dans les mains, on voit des clous partout.

Partager

A propos de l'auteur

Dr. Frédéric JOACHIM

Parodontiste/Implantologiste, Lille

Dr. Sébastien DUJARDIN

Parodontiste/Implantologiste, Lille
Post Graduate in Periodontics, Temple University, Philadelphia, USA

Laisser une réponse