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L’orthodontie rapide : une révolution dans le traitement orthodontique de l’adulte

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La durée des traitements orthodontiques est une des plaintes principales des patients en pratique orthodontique, en particulier chez les patients adultes. Celle-ci serait d’ailleurs un motif fréquent de refus de traitement chez ces patients (Iseri et al. 2005).

L’accélération de la vitesse de déplacement dentaire orthodontique permettrait de faciliter l’acceptation de ces traitements et de limiter le risque de complications dento-parodontales (caries dentaires, récessions parodontales, résorptions radiculaires) corrélées à la durée totale de traitement orthodontique (Dominguez & Velasquez 2014).

A ce titre, différentes approches chirurgicales et non chirurgicales ont été proposées ces dernières années pour accélérer le déplacement dentaire orthodontique (Dominguez & Velasquez 2014) dont certaines font déjà partie intégrante de la pratique orthodontique quotidienne.

Biologie du déplacement dentaire accéléré

Le déplacement d’une dent soumise à une force mécanique dépend du remodelage des tissus péri-radiculaires.

Ce déplacement implique des remaniements complexes de l’ensemble des tissus parodontaux (Houchmand-Cuny et al. 2009), qui peuvent être résumés schématiquement en phénomènes de résorption osseuse sur la paroi alvéolaire en pression et d’apposition osseuse sur la paroi alvéolaire en tension (Meikle 2006).

L’accélération du déplacement dentaire orthodontique est un objectif recherché depuis longtemps pour ses bénéficies potentiels (Huang et al. 2014), à savoir :

  • la diminution de la durée totale de traitement ;
  • la diminution des effets indésirables du traitement orthodontique (difficultés d’hygiène orale, résorptions radiculaires, etc…) ;
  • l’augmentation de l’enveloppe des déplacements dentaires possibles ;
  • l’augmentation de la stabilité post-traitement.

En dehors de toute thérapeutique d’accélération du déplacement dentaire orthodontique, il est estimé que la durée moyenne d’un traitement orthodontique est de 21 à 27 mois sans extractions et 25 à 35 mois avec extractions (Skidmore et al. 2006).

La vitesse de déplacement dentaire orthodontique dépend du remodelage de l’os alvéolaire lors de l’adaptation au nouvel environnement biomécanique induit par l’appareillage orthodontique. La vitesse de ce remodelage adaptatif dépend des niveaux d’activités des cellules osseuses ostéoclastiques et ostéoblastiques, sous la dépendance de facteurs mécaniques et biochimiques.

L’accélération du déplacement dentaire peut être obtenue principalement en augmentant l’activité ostéoclastique locale (via notamment la voie RANKL/OPG et le Macrophage Colony Stimulating Factor [M-CSF]) facilitant la résorption de l’os alvéolaire et le déplacement dentaire à son niveau. Par ailleurs, l’augmentation de l’activité ostéoblastique participerait également au remodelage osseux physiologique post-déplacement dentaire orthodontique et donc au déplacement dentaire accéléré (Huang et al. 2014).

De nombreuses techniques ont été étudiées dans l’espoir d’accélérer de façon sûre et efficace le déplacement dentaire orthodontique.

A l’heure actuelle, certaines techniques sont utilisées de façon courante en pratique quotidienne alors que d’autres sont encore uniquement expérimentales (Gkantidis et al. 2014). La suite de cet article se limitera aux trois techniques d’accélération du déplacement dentaire orthodontique couramment utilisées en pratique quotidienne, à savoir : la thérapie laser, les vibrations mécaniques et les corticotomies alvéolaires.

Thérapeutiques non chirurgicales de l’accélération du déplacement dentaire orthodontique

Thérapie laser de faible intensité

L’utilisation de lasers de faible intensité (communément appelée « thérapie laser ») permettrait une stimulation du métabolisme cellulaire local et notamment du remodelage osseux (par expression de RANK/RANK-L) permettant une accélération du déplacement dentaire orthodontique (Doshi-Mehta & Brad-Patil 2012, Andrade et al. 2014). Parmi les différents lasers utilisables en médecine bucco-dentaire, le laser à arséniure de gallium-aluminium serait le plus adapté pour accélérer le déplacement dentaire orthodontique (Andrade et al. 2014).

Vibrations mécaniques

Les effets biologiques des vibrations mécaniques (ultrasons pulsés) sont connus depuis longtemps en orthopédie, avec un effet notable sur l’accélération de la cicatrisation osseuse fracturaire. En orthodontie, des vibrations mécaniques de basse fréquence (30Hz) permettraient une accélération du déplacement dentaire orthodontique via l’augmentation du nombre et de l’activité des ostéoclastes (en lien avec l’augmentation du niveau d’expression de RANK-L au niveau du coté en pression).

Ces vibrations mécaniques sont déjà utilisées en pratique quotidienne orthodontique, via notamment le recours à des appareils commerciaux tels que l’AcceleDent® (OrthoAccel Technologies, Tx, USA). Cet appareil est composé d’un d’activateur générant des micro-impulsions (d’intensité moindre que celles ressenties lors de l’utilisation d’une brosse à dent électrique), d’une interface USB (facilitant le suivi de l’utilisation de l’appareil) et d’une embouchure délivrant les micro-impulsions sur les deux arcades simultanément. Des séances de 20 minutes par jour sont recommandées et permettraient –d’après le fabricant- de diminuer le temps global de traitement de 30 à 50 %. Par ailleurs, cette technique serait compatible avec le port de gouttières thermoformées de type Invisalign® et permettrait une accélération notable du traitement par gouttières tel que rapporté dans la littérature (Ojima et al. 2014).

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Thérapeutiques chirurgicales de l’accélération du déplacement dentaire orthodontique

Corticotomies alvéolaires

La corticotomie alvéolaire se définit comme une lésion chirurgicale contrôlée de l’os alvéolaire en vue d’induire un remodelage osseux accéléré, responsable localement d’une ostéopénie transitoire, facilitatrice du déplacement dentaire (Moreau & Charrier 2016). Depuis la première description de cette technique au début du 19ème siècle, de nombreuses techniques de corticotomies alvéolaires ont été proposées, avec une tendance actuelle à des protocoles chirurgicaux de moins en moins invasifs pour la même efficacité d’accélération de déplacement dentaire.

Les corticotomies conventionnelles impliquent la réclinaison d’un lambeau muco-périosté vestibulaire puis la réalisation de travées osseuses à l’aide de fraises, scies ou d’inserts piézoélectriques, en regard de la ou les dent(s) à déplacer. Des approches mini-invasives ont été récemment proposées avec abolition du lambeau muco-périosté au profit de travées osseuses au travers d’incisions transmuqueuses (corticotomies « flapless ») réalisées avec un bistouri renforcé (« corticocision ») ou un insert piézoélectrique (« piezocision »).

Le recours aux corticotomies alvéolaires permettrait d’accélérer le déplacement dentaire par un facteur 3 ou 4 (Moreau & Charrier 2016) avec des suites opératoires souvent moins importantes qu’une avulsion de prémolaire (Al-Naoum et al. 2014), en particulier dans les nouvelles approches mini-invasives (Fig. 1).

Par ailleurs, les corticotomies alvéolaires diminueraient le risque de résorptions radiculaires en diminuant le temps de traitement et en limitant au maximum la phase de hyalinisation (Moreau et Charrier 2016).

Conclusion

La possibilité d’accélérer les traitements orthodontiques, en particulier chez le patient adulte, permet une amélioration notable de la compliance du patient tout en limitant le risque de complications dento-parodontales associées aux traitements longs.

A ce titre, le recours aux vibrations mécaniques, à la stimulation laser ou aux corticotomies alvéolaires peut être une option thérapeutique intéressante pour limiter la durée du traitement orthodontique, d’ores et déjà applicable en pratique orthodontique quotidienne.

Bibliographie

1. Al-naoum F, hajeer MY, Al-Jundi A. Does alveolar corticotomy accelerate orthodontic tooth movement when retracting upper canines? A split-mouth design randomized controlled trial. J Oral Maxillofac Surg 2014;72:1880-9.
2. Andrade JRI, Sousa ABS, Silva gg. New therapeutic modalities to modulate orthodontic tooth movement. Dental Press J Orthod 2014;19(6):123-133.
3. Dominguez A, Velasquez SA. Dental movement acceleration: literature review by an alternative scientific evidence method. World J Methodol 2014;4:151-62.
4. Doshi-Mehta g, Brad-Patil WA. Efficacy of low-intensity laser therapy in reducing treatment time and orthodontic pain: a clinical investigation. Am J Orthod Dentofacial Orthop 2012;141(3):289-97.
5. gkantidis n, Mistakidis I, Kouskoura T, Pandis n. Effectiveness of nonconventional methods for accelerated orthodontic tooth movement : a systematic review and meta-analysis. J Dent. 2014; 42:1300-1319.
6. houchmand-Cuny M, Chretien n, Le guehennec L, Deniaud J, Renaudin S, Boutigny h, Soueidan A. Le déplacement dentaire orthodontique : histologie, biologie et effets iatrogènes. Orthod Fr 2009;80:391-400.
7. huang h, Williams RC, Kyrkanides S. Accelerated orthodontic tooth movement : molecular mechanisms. Am J Orthod Dentofacial Orthop 2014;146:620-32.
8. Iseri h, Kisnisci R, Bzizi n, Tuz h. Rapid canine retraction and orthodontic treatment with dentoalveolar distraction osteogenesis. Am J Orthod Dentofacial Orthop 2005;127:533.
9. Meikle M. The tissue, cellular, and molecular regulation of orthodontic tooth movement: 100 years after Carl Sandstedt. Eur J Orthod 2006;28:221-240.
10. Moreau n, Charrier JB. Corticotomies alvéolaires. EMC- Médecine buccale 2016;11(4):1-10. [Article 28-872-M-10]
11. Ojima K, Dan C, nishiyama R, Ohtsuka S, Schupp W. Accelerated extraction treatment with Invisalign. J Clin Orthod. 2014;48(8):487-99.
12. Skidmore KJ, Brook KJ, Thomson WM, harding WJ. Factors influencing treatment time in orthodontic patients. Am J Orthod Dentofac Orthop 2006;129(2):230-238.

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A propos de l'auteur

Dr. Nathan MOREAU

Assistant Hospitalo-Universitaire en Chirurgie Orale, Faculté de Chirurgie Dentaire, Université Paris Descartes, Montrouge
Service d’odontologie, Hôpital Bretonneau
AP-HP Paris

Dr. Jean-Baptiste CHARRIER

Chirurgie de la face
Ex-Professeur des Universités
Pratique privée
Paris AP-HP, Paris

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