Chaque année le mois de mai comporte son lot de jours fériés. Cette année ces derniers sont particulièrement nombreux. Cela n’est pas sans influence sur l’activité des cabinets avec la fin du premier semestre en point de mire. Cela nous rappelle qu’une bonne gestion des rendez-vous (et plus généralement du temps) est cruciale pour la bonne marche de nos cabinets. Après avoir abordé dans les numéros précédents, le concept de service, la gestion des plans de traitement et la politique d’encaissement, l’occasion m’est donc donnée de revenir sur ce système.
Le temps, plus que l’argent souvent, est une denrée devenue très rare. J’entends souvent nos confrères s’impatienter : « Aujourd’hui, je n’ai vraiment pas le temps ! ». Cette excuse est à mes yeux, irrecevable. J’entends dire : « Je n’arrive pas à trouver le temps de … ». En réalité, il faut bien accepter l’idée que le temps ne se trouve pas. C’est à vous de le «faire». Au quotidien, au cabinet ou dans notre vie personnelle, les sollicitations et projets, sont de plus en plus nombreux. Avec l’avènement des nouvelles technologies de communication ce phénomène ne fait que s’amplifier. Un nouveau terme est d’ailleurs apparu tout récemment à ce sujet : NOMOPHOBIA (No Mobile Phobie) c’est-à-dire l’angoisse de se retrouver ne serait-ce qu’une seule journée sans son mobile (comment est-ce possible ?). En réalité, en matière de gestion du temps, la clé pour être plus serein n’est pas de savoir quoi faire, mais plutôt de savoir quoi abandonner entre des projets, tâches ou activités toutes plus intéressantes et importantes les unes que les autres !
Aujourd’hui, nous subissons l’influence d’une société au sein de laquelle nous sommes incités à aller toujours plus vite et à être toujours disponible. On accomplit tout en deux temps et trois mouvements.
Comment cela se manifeste-t-il au quotidien ?
Au cabinet, de plus en plus d’équipes se disent à peine bonjour le matin. Nous répondons mécaniquement aux questions qui nous sont posées. Nous ne prenons pas le temps de revenir sur les problèmes rencontrés pour en tirer les leçons et éviter leur répétition. Nous ne traitons pas les événements en fonction de leur importance mais plutôt de l’urgence de la situation. À ce stade, la hiérarchisation des priorités s’avère indispensable. De même, cette course ne nous rend pas disponible pour être vraiment à l’écoute des patients, de leurs remarques ou de leurs demandes. Cela est donc très nuisible à la qualité du service au cabinet. À très court terme, cela devient un frein au développement d’un cabinet. Soyez extrêmement vigilants à ce sujet.
Ceci explique l’émergence récente de tendances nouvelles appelant à ralentir le rythme de vie.
Voici leurs slogans : « Déconnectez » et « Profitez de l’existence » sans être par exemple dérangés par un ordinateur ou un téléphone portable. Ou encore « Faites place enfin à la vraie vie » (lire, sortir, voir sa famille, privilégier les rencontres, etc.).
Des initiatives ou courants voient le jour comme la journée internationale de la lenteur (21 juin), le développement du slow tourism (prendre le temps de voyager), du slow-parenting (ne pas surcharger l’enfant d’activités extrascolaires) ou encore le slow-média (ne pas lire ou téléphoner en regardant la télévision, le tout devant son ordinateur), etc. pour n’en citer que quelques-uns.
Bien entendu, le rythme d’une journée de travail nous impose de savoir accélérer quand nécessaire. Bien maîtriser son temps permet de changer de vitesse selon nos différentes activités. Il est évident que le fait d’être en permanence en suractivité ne peut devenir une règle de fonctionnement. Une bonne gestion de votre temps passe aussi par des moments où l’on se pose pour réfléchir. Ceci vous permettra de prendre un peu de recul, de vous mettre en méta-position par rapport à votre exercice professionnel.
Toute une série de questions sont alors évoquées : quel est le bilan du trimestre et son lot d’enseignements ? Quelles sont les ressources (temps, formations, congés) disponibles pour les mois à venir ? Quels sont les projets ? Comment les mener à bien ? Qui participe au projet ? Autant de réponses qui seront les ingrédients d’un exercice efficace et serein. Pour parfaire cette réflexion, je ne peux que vous inviter à lire l’ouvrage de Jean-Louis Servan-Schreiber, « Trop vite ! » et profiter pleinement de ces congés « imposés » de ce mois de mai pour optimiser cette réflexion.
La gestion du temps en aval
La première étape dans toute stratégie de développement est à mes yeux de garder, voire reprendre le contrôle de votre temps. Cela revient à maîtriser votre agenda.
Il s’agit de ne pas confondre efficacité et suractivité.
Prenez conscience que votre agenda, qu’il s’agisse d’un carnet papier ou d’un écran informatique détermine à la fois votre heure d’arrivée au cabinet et votre heure de départ. Il conditionne aussi votre niveau de stress dans la journée et votre chiffre d’affaires en fin d’année !
Une bonne gestion des rendez-vous repose sur une combinaison de plusieurs facteurs: la définition d’objectifs financiers, l’efficacité de l’ensemble des membres de l’équipe, un service en adéquation avec le positionnement de votre cabinet. Cela ne va pas sans un haut niveau de compétences et de formation de votre équipe. Il s’agit également de distinguer dans votre emploi du temps, le temps productif et le temps improductif. Nous vous rappelons que dans le temps improductif, il y a la notion de temps improductif investi® (réunions d’équipe, première consultation, exposé de plan de traitement, etc.) et de temps improductif perdu, qu’il faut absolument combattre ! En analysant votre carnet, interrogez-vous sur les points suivants :
- quels sont vos objectifs en tant que praticien ?
- quel type de dentisterie voulez-vous proposer ?
- de combien de temps avez-vous besoin pour réaliser vos traitements ?
- vos services sont-ils suffisamment productifs pour vous permettre d’atteindre vos objectifs financiers ?
L’étape suivante est de mettre en place un système de prise de rendez-vous qui vous aide à répondre à ces questions. Vous n’obtiendrez jamais que ce que vous programmerez. J’aimerais toutefois apporter 3 points de clarification, extrêmement importants à mes yeux, pour éviter tout malentendu sur ce que j’entends par la notion de production.
Produire n’est pas vendre
L’une des définitions donnée par le dictionnaire Larousse est : « Production : ensemble de moyens qui aboutissent à la création d’un bien nouveau ou d’un service. » Or, les chirurgiens-dentistes produisent/réalisent des actes dentaires, qui ont une certaine valeur (honoraires) et qui répondent aux besoins de soins des patients.
Attention : la production n’est donc pas le coût de la prestation, il s’agit du montant de sa réalisation.
Équilibrer les objectifs de production pour réduire le stress
En conséquence, à mes yeux, la production a beaucoup plus à voir avec le rythme d’une journée de travail qu’avec le chiffre d’affaires. À travers la gestion des rendez-vous, il s’agit bien plus d’établir une planification équilibrée de la journée afin de permettre au praticien et son équipe d’avoir des journées plus sereines. L’absence de planification nous impose un rythme de travail aléatoire et incontrôlé aboutissant à un niveau de stress généralement élevé. Le rythme subit alternativement des accélérations puis des ralentissements : c’est cela que j’appelle les «montagnes russes». L’objet de la planification d’objectif de production est donc avant tout la réduction du stress. Comme nous le constatons tous les jours dans les cabinets avec lesquels nous travaillons, les résultats obtenus sont souvent spectaculaires avec notre méthode basée sur la planification.
La gestion devient toutefois une nécessité
Je vous invite donc désormais à voir votre carnet de rendez-vous comme un outil de gestion bien au-delà d’un simple support de prise de rendez-vous. En effet, la gestion, que cela nous plaise ou non, est devenue une condition de la survie des cabinets libéraux. Il faut accepter cette réalité avec lucidité même si elle ne nous plaît pas. La difficulté est de concilier gestion et éthique. Cela ne peut plus se faire par une approche empirique. Une gestion saine est même justement la condition d’une garantie de notre éthique.
Maintenir un niveau d’encaissement correct est une condition nécessaire pour maintenir son salaire et justement faire plus facilement face à la concurrence exacerbée des low-costs et autres cabinets relevant du tourisme dentaire.
Dans notre philosophie de l’organisation et de la gestion, les revenus du praticien sont une conséquence d’une approche professionnelle des aspects cliniques mais aussi non cliniques. L’objectif est en premier lieu d’offrir des soins de haute qualité, en deuxième lieu de conserver une approche humaine et en dernier lieu seulement de conserver son niveau de revenus.
C’est la raison pour laquelle nous considérons impératif le contrôle de la production en tant qu’outil moderne de fonctionnement d’un cabinet.
Ne laissez pas votre agenda vous contrôler !
Ayez une approche rationnelle de votre carnet de rendez-vous. Utilisez systématiquement des règles bien définies. Les variables dépendront de vos propres objectifs. Déterminez le niveau de revenus que vous souhaitez et donnez-vous les moyens par une série de mesures, d’atteindre ces objectifs. Si vous ne réussissez pas, analysez minutieusement votre carnet. Apportez les corrections qui vous permettront de ne plus subir votre planning et par voie de conséquence, de reprendre le contrôle de votre cabinet.