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Application clinique de la dentisterie neuromusculaire : le bio-mimétisme fonctionnel et esthétique

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La dentisterie évolue en permanence et nous devons maîtriser les techniques pour la santé de nos patients. Chaque patient a ses désirs et ses besoins et le praticien doit prendre soin de les évaluer afin de réaliser un diagnostic précis et d’élaborer un plan de traitement approprié. Les objectifs de traitement doivent prendre en considération la biologie des tissus dentaires, parodontaux, musculaires et des articulations ainsi que l’esthétique de la face et des dents. Un des piliers fondamentaux dans la réussite à long terme de nos restaurations est l’occlusion.

Les récentes avancées des systèmes informatiques nous permettent aujourd’hui de manager plus efficacement l’occlusion mais aussi les empreintes. Si nous ajoutons à cela le CAD CAM pour la réalisation des éléments prothétiques, nous voyons que l’informatique fait partie prenante de notre métier. À travers un cas clinique complexe, nous allons voir comment la technologie va nous permettre d’aborder ce challenge sans stress, de manière sereine et surtout en ayant une grande prévisibilité du résultat.

Présentation du cas

Le patient est âgé de 25 ans. Il se présente au cabinet avec comme plainte principale une denture usée et des sensibilités des dents lorsqu’il mastique et boit. À l’examen clinique, nous notons des surfaces occlusales extrêmement usées. Le patient les attribue à l’acidité des agrumes qu’il consomme en quantité importante depuis son plus jeune âge. L’examen radiologique ne révèle aucune carie, aucune maladie parodontale, aucun traitement endodontique (Fig. 1 et 2).

vue-intra-buccale

Pendant l’examen, nous notons que le patient présente des douleurs musculaires au niveau des muscles masticateurs (temporaux et masséters) ainsi qu’au niveau des muscles cervicaux. Il nous indique aussi qu’il est souvent sujet à des maux de tête voire des migraines. Pour déterminer l’incidence de l’occlusion sur ces douleurs, nous réalisons un diagnostic de l’appareil manducateur à l’aide du BioPack (Bioresearch) (Fig. 4 à 6).

diagnostique-table-HIP

Diagnostic avancé

Ce diagnostic va nous permettre de mettre en relation esthétique et fonction. Deux empreintes au polyvinylsiloxane sont prises et nous veillons à bien enregistrer les encoches hamulaires afin de pouvoir monter le modèle maxillaire sur la table HIP (gad-center) (Fig. 3). Les avantages de cette table sont d’orienter le plan occlusal parallèlement à la base du crâne et le plan esthétique parallèlement à la ligne bi-pupillaire.

Pour le montage de la mandibule, nous devons déterminer une nouvelle position mandibulaire. Pour ce faire, nous utilisons le BioPack et le Tens de Bioresearch. Les électrodes d’électromyographie sont positionnées et nous enregistrons différentes activités musculaires afin d’évaluer précisément l’état de fatigue des muscles. Ensuite, nous recherchons avec le « Jaw Tracking » la position idéale de la nouvelle occlusion d’intercuspidie maximale que nous allons donner au patient (Fig. 7). Une fois trouvée, cette position est enregistrée, des tomographie sont prises pour évaluer la position des articulations temporo-mandibulaires et le modèle mandibulaire est monté sur articulateur. Pour compléter le diagnostic avancé, une série de photographies extra et intra-orales est prise.

Phase 1 : port de l’orthotic fixe (Fig. 8 à 10)

test-esthetique

Le plan de traitement proposé au patient est une réhabilitation complète de sa bouche avec modification de son OIM habituel par collage d’éléments prothétiques en vitrocéramique (Emax). La première étape du traitement est de valider la nouvelle OIM que nous avons déterminée précé- demment. Pour cela, nous mettons en bouche un orthotic. Habituellement, l’orthotic est fabriqué uniquement à la mandibule, mais comme nous devons réévaluer l’esthétique du sourire du patient, l’orthotic sera maxillaire et mandibulaire. L’orthotic est réalisé grâce à une clef en silicone tirée des wax-up créés à partir du montage sur articulateur par la table HIP.

Du composite pour provisoire type Protemp de 3M est injecté dans la clef en silicone puis mis en bouche. Une fois le composite durci, les excès sont éliminés à l’aide d’une fraise flamme bague rouge puis poli et l’occlusion est ajustée sous contrôle du BioPack. L’esthétique est évaluée. Le patient est revu pendant 3 séances durant lesquelles l’occlusion est ajustée toujours sous contrôle du Biopack et du T Scan. Grâce à ce procédé, nous pouvons évaluer de manière réversible et confortable pour le patient sa future occlusion et esthétique (les dents n’étant pas préparées sous l’orthotic).

Après 3 mois de port, l’orthotic est déposé et l’OIM du patient est enregistrée par section. Le guide anté- rieur est enregistré afin de le transférer au laboratoire de prothèse. Deux empreintes en silicone sont prises et les modèles sont montés sur articulateur avec la table HIP et l’enregistrement de l’OIM. Deux nouveaux orthotics sont réalisés jusqu’à la prochaine séance.

Au laboratoire de prothèse, les wax-up des futures restaurations sont créés. Dans un premier temps, le laboratoire fabrique un index en silicone pour maintenir l’occlusion le jour des préparations. Ensuite, il fabrique les wax-up des dents maxillaires en fonction des données esthétiques que nous lui avons transmises (longueur et largeur des incisives centrales, nombre d’or, embrasures etc.). Pour l’élaboration de ce wax-up, la table HIP sert de plan esthétique. Elle permet le parallélisme de la ligne bi-pupillaire avec les bords libres des dents maxillaires. Puis, le technicien crée la courbe de Spee et de Wilson. Le wax-up mandibulaire est ensuite réalisé. Sur ces cirages, le laboratoire fabrique des clefs en silicone (clefs de préparation et clefs pour réaliser les provisoires et les mock up).

Phase 2 : la réhabilitation prothétique

Préparation (Fig. 11 à 13)

Le jour des préparations des dents nous avons comme objectif de conserver l’OIM de manière très rigoureuse. Nous devons préparer les 28 dents vitales, prendre les empreintes, maintenir l’occlusion, la transférer au laboratoire et réaliser les provisoires.

preparation-de-la-rehabilitation-prothetique

Après anesthésie, les orthotics sont déposés et nous réalisons les mock up grâce aux clefs en silicone tirées des wax-up. Nous préparons les dents directement sur les mock up en composite. Cela permet d’être le plus conservateur possible. Une fraise boule nous permet de calibrer nos préparations en vestibulaire. Elle est passée sur toutes les faces vestibulaires des mock up, puis une fraise congé sert à finir les préparations.

Dans les séquence de travail, nous préparons de la première molaire à l’incisive centrale puis enregistrons l’occlusion à l’aide de la clef en silicone que nous re-basons. Ensuite les préparations sont faites de l’incisive centrale à la première molaire et l’occlusion enregistrée. Enfin, les secondes molaires sont préparées. La mandibule est traitée de la même manière. Les préparations des dents sont contrôlées avec les clefs de préparations tirées des wax-up.

Empreinte (Fig. 14)

Les empreintes optiques sont prises à l’aide du LAVA COS. Nous doublerons ces empreintes avec des empreintes conventionnelles au polyvinylsiloxane (Précision de Bisico et S4 de Bisico) car les empreintes optiques pour les restaurations de grandes étendues ne sont pas encore préconisées. Les avantages des empreintes optiques sont le confort pour le patient, l’élimination du risque de déformation ou de tirage de l’empreinte conventionnelle, l’élimination du risque d’erreur lors de la coulée de l’empreinte, le détourage, la mise en place des dies puisque tout cela sera réalisé par informatique. L’occlusion peut aussi être enregistrée à l’aide de l’empreinte optique.

L’éviction gingivale est effectuée avec de l’Expasyl. Les lignes de finition des préparations étant juxta ou supra-gingivales, nous n’avons pas besoin d’une éviction importante. Puis, un poudrage léger est réalisé sur les piliers et nous enregistrons à l’aide de la caméra optique les préparations. De proche en proche, l’acquisition des données se fait et l’arcade maxillaire est enregistrée. Nous contrôlons à tout moment nos enregistrements et il est possible de revenir en arrière, de corriger si jamais un défaut apparaissait.

Dans un second temps, nous traitons l’arcade mandibulaire de la même manière. Enfin, grâce à des cales, nous demandons au patient de venir positionner sa mandibule en OIM et enregistrons l’occlusion avec la camera optique.

empreinte-et-prothese-provisoire

Prothèses provisoires (Fig. 15)

Avant la réalisation des prothèses provisoires, la teinte des piliers est prise afin de pouvoir déterminer quels lingotins nous utiliserons au laboratoire pour la confection des céramiques pressées. Les piliers ayant une couleur naturelle (sans faux moignon), nous optons pour des céramiques haute translucidité.

Les provisoires sont fabriquées par auto-moulage à partir de clefs en silicone tirées des wax-up. Les piliers sont désinfectés à l’aide de Telio Desensitizer, puis séchés, enfin le moule en silicone est inséré en bouche, rempli de composite pour provisoire (Protemp 3M) couleur Bleach à la demande du patient. Trois minutes après son insertion, la clef est retirée, le composite, du fait de la légère contraction, reste en bouche. Les excès sont éliminés comme pour le mock-up, le composite poli et ensuite maquillé à l’aide du Tétric Color (Ivoclar) avant d’être glacé avec du Biscover (Bisico). L’occlusion est contrôlée sous Bio Pack et le patient est revu 2 jours après pour valider l’esthétique (une fois l’anesthésie disparue).

Étape de laboratoire de prothèse (Fig. 16 à 19)

etape-de-laboratoire-de-prothese

N’ayant pas l’habitude de l’empreinte optique pour de tels travaux, nous décidons de réaliser les prothèses sur les modèles en plâtre puis de les repositionner sur les modèles tirés de l’empreinte optique afin de valider cette dernière. Les empreintes en silicone sont coulées en prenant soin de conserver les encoches hamulaires puis montées sur l’articulateur avec la table HIP. Le mordu de gestion d’occlusion est préparé avec un bistouri et le modèle mandibulaire est à son tour monté.

Le technicien de laboratoire va ensuite réaliser les cires pour la céramique pressée. Il commence par le secteur antérieur maxillaire en se servant de la table HIP et en copiant le wax-up à l’aide de clef en silicone. Puis, il recrée les secteurs postérieurs maxillaires avec les courbes de Spee et Wilson et enfin l’arcade mandibulaire. Une fois toute les cires fabriquées de manière unitaire, le technicien les met en revêtement puis réalise la pressée des céramiques.

Les éléments céramiques postérieurs sont uniquement maquillés alors que les éléments antérieurs bénéficient d’un traitement par cut back, c’est-à-dire que le céramiste découpe la partie incisale de la céramique pressée afin de la stratifier.

Lorsque toutes les céramiques ont été finies, nous avons inséré ces dernières sur les modèles en résine tirés de l’empreinte optique. Pour obtenir ce modèle, le laboratoire a d’abord détouré l’empreinte optique sur informatique, puis réalisé les dies aussi sur informatique.

Ensuite, l’impression par stéréolithographie a été lancée et nous recevons des modèles déjà détourés, die en place et mise en occlusion. À notre grande surprise, toutes les couronnes se sont insérées sur les modèles en résine avec un ajustage remarquable.

Collage (Fig. 20 à 23)

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La séance de collage est une étape extrêmement minutieuse. Tout d’abord, après anesthésie, les provisoires sont déposées. Les éléments prothétiques sont essayés à l’unité afin de vérifier l’ajustage au niveau des limites cervicales puis tous ensemble pour valider les points de contact. Nous veillons à ce que l’esthétique ait bien été respectée (longueurs des incisives centrales, formes des dents, embrasures, état de surface etc.).

Cet essayage se fait à l’aide du Try in (Ivoclar) ce qui nous permet de choisir la teinte du composite de collage et de montrer au patient le futur résultat pour validation. Les céramiques sont rincées à l’eau pour éliminer le Try in, puis nous préparons l’intrados. De l’acide fluorhydrique à 5 % est appliqué pendant 20 secondes puis rincé abondamment. Ensuite, le silane est déposé pendant 60 secondes avant d’être séché au sèche-cheveux.

En bouche, la digue est mise en place de la 27 à la 17 puis un désinfectant (Telio Desensitizer Ivoclar) est passé sur toutes les préparations. L’acide orthophosphorique à 37 % est appliqué pendant 15 secondes puis rincé. L’adhésif (Exite DSC Ivoclar) est déposé sur toutes les dents maxillaires puis soufflé légèrement. Les céramiques sont collées deux à deux. Nous commençons par 27 26 puis 17 16, puis les deux incisives centrales, 12 13 puis 22 23, pour finir par les deux prémolaires de chaque côté. Chaque céramique est d’abord photo-polymérisée uniquement 2 secondes afin de pouvoir éliminer les excès et permettre le passage d’un fil interdentaire. Ensuite une photo-polymérisation finale est effectuée pendant 20 secondes par face et tous les excès sont soigneusement éliminés. La même procédure est appliquée à la mandibule.

Contrôle de l’occlusion

Dans un premier temps, nous réalisons les contrôles habituels (contact en OIM, latéralité, propulsion, mastication).

Ensuite, à l’aide du BioPack puis du T scan, l’occlusion va être vérifiée et ajustée de manière plus précise. Tout d’abord, l’électromyographie est positionnée ainsi que le Tens. Nous enregistrons l’activité musculaire qui doit être la plus faible possible. Puis avec le Jaw Tracking, nous confirmons que l’OIM du patient se situe de façon proche de la trajectoire musculaire de la mandibule. Nous vérifions aussi que lorsque le patient est en OIM légère, il n’y a pas de forte augmentation de son activité musculaire.

Enfin, lorsque nous sommes sur la trajectoire neuromusculaire, nous utilisons le T Scan afin de vérifier qu’il n’existe pas une pression plus importante sur une dent que sur une autre et que les forces sont uniformément réparties.

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A propos de l'auteur

Dr. Cyril GAILLARD

DU de réhabilitation chirurgicale maxillo-faciale
CES prothèses fixées
CES prothèses amovibles
Fondateur de Global Advanced Dentistry

Christophe HUE

Laboratoire Technologies et Cosmétiques Dentaires
Co-Fondateur du Global Advanced Dentistry
Post-Graduate du Las Vegas Institute en dentisterie esthétique et neuromusculaire

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