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Facettes en céramique collée : préparations pragmatiques mais toujours a minima

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Ces dernières années, les restaurations indirectes en céramique collée ont connu un accroissement exponentiel [1]. La demande esthétique couplée avec le désir de la profession de privilégier des thérapeutiques conservatrices, a largement alimenté cette expansion. Parmi ces restaurations, les facettes en céramique constituent l’élément le plus légitimement associé à l’amélioration esthétique du sourire et aux techniques de préservations tissulaires.

l-examen-radiographique

Fig. 1 : la situation clinique initiale met en évidence la nécessité d’une prise en charge globale chez cette patiente (a). Sa demande première concerne la réhabilitation de son sourire, dont les anciennes restaurations directes et l’usure de l’émail ont compromis l’harmonie des couleurs (b). Hormis les secteurs latéraux qui relèvent de thérapeutiques prothétiques implantaires, le secteur antérieur peut être abordé par des techniques non invasives. La préservation tissulaire et le mimétisme de la zone de transition gingivale sont des arguments décisionnels forts dans ce sourire gingival. La présence et l’étendue des restaurations préalables doivent être évaluées grâce à l’examen radiographique (c).

Les angoisses des premiers temps concernant la fragilité ou le décollement de ces fines coques de céramique ont été largement apaisées par les excellents résultats rapportés dans de nombreuses études cliniques publiées à ce jour [2-6]. Si un faible taux d’échec est toujours d’actualité, la compréhension des phénomènes et des critères cliniques influençant positivement ou négativement le résultat a permis de mieux codifier la thérapeutique dans son ensemble. Parmi les critères les plus souvent rapportés comme déterminant le bon comportement des facettes à long terme, la présence d’un support de collage constitué exclusivement d’émail est essentielle [5].

En effet, l’émail est à la fois facilement mordançable et sa composition essentiellement minérale ne perturbe pas la couche adhésive comme peut le faire la dentine hydratée [7-9]. Ainsi, lorsque le système de collage est judicieusement choisi, la liaison céramique-émail peut présenter des valeurs d’adhérence supérieures à la jonction amélo-dentinaire naturelle [10].

Afin de préserver au maximum le tissu amélaire des faces vestibulaires, plusieurs auteurs ont proposé des procédures cliniques reproductibles. Ces dernières sont basées sur l’analyse et la préparation préalable d’un projet esthétique [11-13].

Par la suite, la réalisation de clefs en silicone permettant de contrôler la réduction, ou le transfert du projet esthétique à l’aide d’un masque [14-16], sont des approches qui permettent au praticien de limiter sa préparation au strict minimum.

Cet article a pour but d’illustrer et de donner des lignes directrices rationnelles sur la préparation des facettes en céramique.

Évaluation clinique préalable

Évaluation-clinique-préalable

Fig. 2 : les préparations a minima sont basées sur des repères de profondeur (a) réalisés grâce aux fraises dédiées à cet usage (Komet 868B 314 020), qui assurent une butée à 0,4 mm. Ces repères sont reproduits sur chaque dent et complétés par des repères verticaux de 1,5 mm (b). Enfin, la limite cervicale est réalisée avec une fraise boule à long col (Komet 6801L 314 018). Ces différents repères sont crayonnés (c) avant d’engager la préparation vestibulaire qui permet de les relier (d). Fig. 3 : après analyse des limites des premières préparations, une approche pragmatique doit rester de mise. Ainsi, il est généralement judicieux d’englober les anciennes restaurations en composite direct afin de ne pas multiplier les joints de collage. Ceci transforme une préparation purement vestibulaire en préparation à retour palatin. Le point commun à toutes ces préparations reste la recherche d’un support exclusivement amélaire favorisant les meilleurs résultats du collage.

La décision thérapeutique peut être motivée par le souhait de modifier la forme, d’améliorer la couleur, ou encore de corriger une malposition [17]. Avant toute intervention, l’état initial de la dent doit être évalué cliniquement et radiographiquement afin de percevoir les futures limites des préparations (Fig. 1).

Dans le cas particulier des malpositions, l’entretien préalable avec le patient est essentiel car plusieurs options doivent être explicitées afin de respecter l’obligation légale d’information et l’obtention d’un consentement éclairé.

Ainsi, lorsque le projet final souhaité consiste en un alignement des dents, le recours à un traitement orthodontique doit être envisagé comme alternative ou comme traitement associé.

Pour autant, cet alignement n’est pas souhaitable dans tous les cas, et il est parfois judicieux de savoir conserver de légères malpositions qui resteront le « trait de caractère » du patient.

Les préparations

Une fois ces considérations prises en compte, le recours à des techniques de préparation permettant de contrôler la profondeur de pénétration est essentiel. Pour ce faire, des fraises spécifiques sont indispensables [18]. Elles assurent au praticien l’obtention un support de collage amélaire, dès lors qu’une profondeur de 0,4 à 0,8 mm est respectée. En cas d’usure amélaire, la profondeur choisie sera plus faible puisque la facette restaurera l’émail disparu avec le temps. Au contraire, face à une coloration intense ou à une dent vestibulo-versée, la profondeur peut être majorée. Si le recours à un masque esthétique est indispensable pour gérer sereinement une correction de malpositions, il n’est pas forcément utile lorsque celles-ci veulent être reproduites. Des repères de profondeur sont ainsi préparés directement sur la face vestibulaire des dents, puis la préparation est engagée (Fig. 2).

Classiquement, la limite cervicale reste juxta-gingivale afin de faciliter l’installation du champ opératoire lors de la séance de collage. Sur les faces proximales, les limites s’engagent sous le point de contact afin de positionner le futur joint dento-prothétique dans une zone non-visible quel que soit l’angle de vue. Le point de contact est préservé dans un premier temps puis sera estompé avant l’empreinte grâce à une bande matrice abrasive.

Parfois, la présence de restaurations composites préalables dans ces zones proximales peut conduire à modifier la forme de la préparation (Fig. 3). Une grande attention doit être portée à l’évaluation du volume de ces composites. Si les petits volumes sont compatibles avec une extension proximale de la préparation, il s’agit alors de situer les limites proximales plus palatinement afin d’englober ces anciennes restaurations [19]. Les plus gros volumes, quant à eux, nécessitent une autre approche. Celle-ci consiste soit à renouveler au préalable les restaurations directes puis à situer les limites proximales en partie dans ces nouveaux composites, soit à étendre la préparation à une forme périphérique se rapprochant davantage d’une couronne pelliculaire.

Enfin, la préparation du bord libre n’est pas systématique mais répond, elle aussi, à une analyse clinique attentive. Ainsi, lorsque le bord libre initial est usé, altéré ou dyschromié, il est judicieux de le préparer et de le restaurer avec la facette. En revanche, s’il peut être préservé, les contraintes mécaniques seront mieux dispersées dans la céramique.

L’essayage-et-le-collage

Fig. 4 : les facettes en céramique pressées et stratifiées sont réalisées au laboratoire (Emax Press). Elles sont respectueuses des couleurs et des malpositions assurant leur future intégration naturelle dans le sourire de la patiente.

La préparation est toujours arrondie et finie avec une fraise à fine granulométrie (bague jaune), voire à l’aide d’instruments soniques ou ultrasoniques [18, 20]. Ce degré de finition assure une reproduction plus fidèle lors de l’empreinte et ne perturbe en rien le futur assemblage puisque celui-ci dépend essentiellement des principes de collage.

les-zones-interproximales

Fig. 5 : chaque facette est collée individuellement à l’aide d’une colle MR2 (Variolink II, Ivoclar- Vivadent). La digue unitaire assure un confort de travail en évitant la contamination des préparations voisines par les différents agents de collage (acide, adhésif, colle) et en limitant les excès de colle dans les zones interproximales (a,b). La séquence de collage se termine par les deux incisives latérales (c), dont les points de contact proximaux doivent être revérifiés avant collage. En effet, même un léger déplacement des facettes voisines déjà collées peut empêcher une insertion passive et générer des contraintes de fracture.

L’essayage et le collage

Le collage des facettes se fait après avoir validé les aspects esthétiques et fonctionnels. La validation fonctionnelle ne peut être appréciée qu’avec les facettes provisoires et doit être évoquée systématiquement en cas de modifications des longueurs (impact phonétique) ou de corrections de malpositions (impact sensitif sur la lèvre). Lorsque le choix initial a été de respecter et de reproduire les malpositions initiales, cette validation fonctionnelle est évidente (Fig. 4).

La validation esthétique est faite au fauteuil. Dans un premier temps, les pâtes d’essayage (Try-in) permettent au praticien d’évaluer l’impact éventuel de la couleur de la colle sur la couleur finale de la facette. Ce critère est essentiellement vérifié lorsque la facette est fine, réalisée en céramique feldspathique et collée sur un support dyschromié. Lorsque tous les critères esthétiques souhaités initialement sont respectés, la séance de collage peut être entreprise.

L’installation de la digue unitaire garantit non seulement l’isolation de l’humidité ambiante et sulculaire, mais aussi la protection des préparations voisines sur lesquelles les différents produits auraient pu se déposer. Le choix du système adhésif doit être basé sur les données acquises de la science, qui concluent indiscutablement aux meilleures valeurs d’adhésion entre émail et céramique pour les colles à mordançage-rinçage (MR) par rapport aux colles auto-mordançantes [8, 9, 21].

Chaque facette est ainsi collée individuellement, en commençant par les incisives centrales, puis les canines et enfin les incisives latérales (Fig. 5). Les contacts proximaux doivent être vérifiés et rectifiés si nécessaire avant chaque collage.

l-intégration-des-facettes

Fig. 6 : après une semaine, l’intégration des facettes en céramique dans le sourire de la patiente répond aux exigences initiales : respect des positions et harmonie des couleurs et des caractérisations dentaires avec les dents résiduelles. (Laboratoire D. Watzki, 67-Illkirch)

Enfin, la digue ayant légèrement repoussé la gencive, sa dépose permet une visualisation parfaite du joint de colle cervical dans les deux minutes qui suivent. Ce temps doit être exploité pour éliminer rigoureusement, à l’aide d’une curette affûtée ou d’une lame de bistouri, tout excès de colle ou d’adhésif à ce niveau. Un contrôle à une semaine permet de s’assurer du résultat et de la satisfaction de la patiente (Fig. 6).

Conclusion

Les facettes en céramique collée constituent une option thérapeutique supplémentaire, dont la fiabilité, grâce au progrès des céramiques et des systèmes adhésifs, est aujourd’hui reconnue. Malgré des indications bien définies, elles restent encore trop souvent perçues par la profession comme des options réservées à une patientèle jeune, soucieuse d’obtenir un sourire « médiatique », parfaitement aligné et d’une teinte au delà du A1.

Or, ces indications-là restent ponctuelles, d’autant plus qu’elles peuvent souvent être gérées par des techniques moins invasives, comme l’éclaircissement et l’orthodontie linguale.

En revanche, les facettes pourraient être plus souvent envisagées dans les traitements globaux, associées aux restaurations périphériques voisines souvent nécessaires du fait du délabrement initial des dents.

Cette approche clinique répond pleinement aux concepts de la dentisterie moderne, et la réfuter serait se priver d’une solution technique exceptionnelle, permettant de maximiser la préservation tissulaire et pouvant être indiquée ponctuellement ou globalement sur un sourire.

Bibliographie

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21. Etienne O., Toledano C., Paladino F., Serfaty R., Restaurations tout-céramique sur dents vitales ; Éditions CdP Paris, 2011 – 128 p.

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A propos de l'auteur

Dr. René SERFATY

Maître de conférences des universités
Faculté de chirurgie dentaire de Strasbourg
Responsable du DU d'esthétique du sourire
Pratique privée

Dr. Charles TOLEDANO

Ancien AHU, Strasbourg
Chargé d'enseignement universitaire
Coordinateur du DU d'esthétique du sourire de Strasbourg

Dr. Olivier ETIENNE

MCU-PH, Strasbourg

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