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L’obligation de sécurité du fait du matériel utilisé

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Si le praticien est tenu à une simple obligation de moyens dans le cadre du contrat de soins le liant à son patient, il va différemment en cas de dommage causé du fait du matériel dentaire utilisé. Dans ce domaine en effet, la jurisprudence a progressivement construit une obligation de sécurité résultat concernant le matériel utilisé pesant sur le professionnel de santé.

La problématique

La question

Au cours des soins dentaires, il peut arriver un incident du fait du matériel dentaire utilisé et causant un préjudice corporel au patient. Tel est le cas, par exemple, pour une blessure causée par la rupture d’une fraise dans la bouche d’un patient. A quelles conditions la responsabilité du praticien sera-t-elle engagée ? Faut-il nécessairement un acte fautif de la part du praticien ? Est-ce au patient d’en rapporter la preuve, ou au contraire au praticien lui-même de démontrer qu’il n’a pas commis d’acte fautif ? Et que se passe-t-il si le dommage est dû exclusivement à une défectuosité, défaut du matériel utilisé ? En d’autres termes, le fait des choses inanimées peut-il engager la responsabilité du praticien en cas d’incident dû au matériel utilisé survenu lors de l’exécution du contrat médical ? Existe-t-il une obligation de sécurité pesant sur le chirurgien-dentiste vis-à-vis de son patient en pareil cas ?

Evolutions de la jurisprudence

Dès 1965, la Cour de cassation a posé le principe d’une responsabilité contractuelle du fait des choses utilisées dans l’exécution du contrat médical. En l’espèce, à la suite d’une opération chirurgicale, une aiguille de Reverdin s’est rompue et la pointe métallique s’est perdue dans l’épaisseur des couches externes de la plaie opératoire.

Le patient a intenté une action en responsabilité contre le chirurgien. La Cour de cassation a condamné le praticien qui est « est tenu, par le contrat qui le lie au malade, de donner à celui-ci des soins attentifs, consciencieux et prudents, conformes aux données acquises de la science ; que la violation ou l’exécution défectueuse d’une telle obligation est sanctionnée par une responsabilité de nature contractuelle (C.Cass 16/11/1965). »

La Cour de cassation considérait auparavant que le praticien devait réparer le dommage subi par le patient, même si l’instrument utilisé ne l’avait pas été de façon défectueuse, sur la base d’une obligation de sécurité envers son patient du fait d’un instrument affecté d’un vice propre à l’origine du dommage (TGI Pontoise 28/11/1986, rupture d’une fraise dans la bouche d’un patient).

En revanche, en cas d’absence de preuve de défaut de l’instrument et de faute du praticien, la jurisprudence repoussait la responsabilité du chirurgien-dentiste : « attendu qu’il ne peut être contesté qu’une obligation contractuelle de sécurité est mise à la charge du praticien quant à l’utilisation des instruments nécessaires à l’exercice de son art ; que ces instruments ne doivent, en aucun cas, par leur fonctionnement défectueux, être source de dommage pour le patient […] Qu’en cas d’atteinte à l’intégrité corporelle en raison de l’utilisation d’un instrument qui, dans son fonctionnement, est susceptible de provoquer une telle atteinte, en dehors de tout défaut, la responsabilité du praticien ne peut être retenue que si une faute dans l’utilisation de l’instrument est prouvée… » (TGI Paris 7/12/1987).

Solution de la Cour de cassation

L’arrêt du 9 novembre 1999

Dans une décision du 9 novembre 1999, la Haute Cour a confirmé le fondement contractuel de la responsabilité faisant peser sur le praticien une obligation de sécurité résultat.

Elle a cependant posé des conditions spécifiques à cette responsabilité. Tout d’abord, le dommage subi par la victime doit être lié à l’anomalie de la chose, au vice dont celle-ci est affectée (le matériel dentaire en l’occurrence).

Il appartient ensuite à la victime de prouver le lien de causalité, et non au praticien de prouver l’absence de défaut de son matériel. Les limitations ainsi rapportées par la jurisprudence de la Cour de cassation évitent ainsi de faire supporter par le praticien tous les accidents où est intervenu son matériel quelles qu’en soient les circonstances.

Notons que cette obligation de sécurité-résultat du matériel utilisé, dont la charge incombe au patient, se distingue nettement de celle relative à l’acte chirurgical lui-même.

Une interrogation

La jurisprudence de la Cour de cassation dispense donc la victime d’établir l’existence d’une faute du professionnel de santé en cas de dommage causé par le matériel du professionnel de santé. D’aucuns estiment que cette position induit une tendance vers un « droit médical de la consommation ». Et la question d’un maintien de cette obligation de sécurité à l’issue de la loi du 4 mars 2002 se pose, dans la mesure où, sauf exception, la responsabilité du professionnel de santé n’est engagée qu’en raison de la faute commise. Il apparaît, dans l’hypothèse d’un matériel défectueux et en l’absence de faute du professionnel, que la victime aurait donc la faculté de saisir l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

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A propos de l'auteur

Catherine NGUYEN

La Médical de France


Adresse : 50 Rue de la Procession - 75015 Paris

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