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Les implants courts : une alternative aux comblements de sinus

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Depuis toujours, la rehabilitation du secteur posterieur a ete consideree comme com-plexe, en cas de perte d’elements dentaires isoles ou de dents contigues. En effet, suite a la perte des dents dans ces zones, les proces alveolaires maxillaires subissent une serie de modifications structurelles pouvant conduire a une resorption osseuse marquee, a la fois horizontalement et verticalement. Parfois, des defauts gingivaux peuvent egale-ment etre associes.

Dans certains cas, on peut assister a une pneumatisation des sinus maxillaires entrai-nant un volume osseux encore plus faible. Cela peut necessiter des procedures complexes pour une rehabilitation implanto- prothetique correcte. (tawil & Younan 2003)

Les implants se sont reveles au fil des annees etre une alternative valable, pour rempla-cer les racines perdues avec un taux de succes tres important. (Becker W, Becker BE. 1995)

Concernant le secteur maxillaire posterieur, le traitement privilegie en cas de perte os-seuse a toujours ete l’elevation du sinus maxillaire. Cette technique permet la mise en place d’un substitut osseux (allogreffe-xenogreffe) accompagne de l’utilisation de mem-branes (principalement resorbables) ayant comme but de maintenir le materiau in situ. La finalite est d’obtenir une hauteur osseuse suffisante pour la pose d’un implant de taille standard ou dit “long” (> 8- 10mm). (Barone 2017, Calin 2009, Pjetrusson 2008.)
Cette technique peut engendrer des complications de nature inflammatoire et infectieuse augmentant sa morbidite. Le patient peut egalement garder un mauvais souvenir de l’intervention.

En regle generale, les complications operatoires concernent la perforation de la mem-brane de Schneider au cours de la chirurgie sinusienne, qui peuvent etre a l’origine de complications inflammatoires et infectieuses, d’une migration du greffon. Cette interven-tion est tres operateurdependant. (Esposito 2009 Nedir et al. 2004). un autre aspect en defaveur de la greffe de sinus est le nombre d’interventions, en parti-culier quand les implants sont places dans un second temps apres la greffe. (Reinert, Konig, Bremerich, Eufinger et Krimmel, 2009) (Fig.1)

Toutes ces etapes peuvent etre evitees en utilisant l’alternative des implants courts (<8 mm) positionnes dans l’os residuel. ainsi, l’absence de chirurgie invasive prealable per-met une meilleure evolution postoperatoire, avec moins de morbidite et de risques pour le patient.

L’utilisation d’implants courts (inferieur a 8mm – Renouard et Nisand 2006) a augmente de facon exponentielle lorsque les surfaces ont commence a etre traitees, chimiquement ou mecaniquement, afin d’ameliorer l’osteointegration a la fois d’un point de vue quanti-tatif et qualitatif. Dans les premieres etudes menees pour evaluer la survie d’implants courts, des im-plants principalement usines ont ete utilises,(van Steergerg 1990, Naert, 1992, Jemt 1993, Branemark 1995, Jemt & Lekholm 1995).

Il a ete demontre que la rugosite de la surface de l’implant est fondamentale pour accelerer les processus d’osteointe – gration par un contact plus important entre l’os et l’implant. Cet etat de surface a ete optimise au fil des annees pour atteindre une valeur optimale pour l’adherence des osteoblastes. (Hagi et al. 2004, Renouard et Nisand 2006, Kotso-vilis et al. 2009, Romeo et al. 2010). Pjetursson et al. (2008) rapportent des resultats nettement meilleurs pour les implants a surface rugueuse positionnes simultanement a l’elevation du sinus maxillaire par rapport aux implants a surface non traitee. Shalabi et al. (2006) ont constate une relation positive entre le contact os-implant et la rugosite de surface.

En consequence, l’amelioration des surfaces a permis une reduction de la longueur des implants et donc a la possibilite de solutions alternatives pour la rehabilitation de sec-teurs complexes.

Pour prendre sa décision, le clinicien doit se poser les questions suivantes :

Les implants courts ont-ils le même taux de survie que les implants longs ?
Les implants courts ont-ils une résorption osseuse marginale supérieure à celle des im plants longs ?
La relation de la couronne implantaire est-elle un paramètre important à prendre en compte ?

En dentisterie implantaire, il est communement admis que les implants plus longs pre-sentent des taux d’echec plus faibles, bien qu’une relation lineaire entre la longueur de l’implant et le succes n’ait jamais ete demontree (Lee et al. 2005). Mais il n’en reste pas moins que les implants courts ont ete percus defavorablement par les chercheurs et les cliniciens.

Revue de littérature

Friberg en 2000, examinant environ 4600 implants, a indique que les defaillances des implants courts representaient environ 7 %, de la meme maniere que Bahat 2000 a sou-ligne que la survie des implants courts etait de 83 % contre 95 % pour les standards. Weng 2003, dans une etude de suivi prospective a cinq ans, a montre comment, pour les implants courts, le taux de survie etait seulement de 79 %.

Cependant, Lekholm en 1999 a montre que le taux d’echec pour les implants courts n’etait pas tres different de celui qui suivait les procedures utilisant des implants plus longs.

Ce qui est confirme par Van Steenberghe en 1997. Des publications plus recentes ont montre que les implants courts offraient des resultats comparables a ceux obtenus

avec des implants longs (deporter et al., 2001, 2008; Gentile et al., 2005; Goene et al., 2005; Misch et al. , 2006; Malo et al., 2007) : les taux de survie varient entre 94,6 % selon Renouard et Nisand jusqu’a 100 % selon les publications de Felice et al. 2015

Cependant, les etudes restent parfois difficiles a comparer car les parametres etudies peuvent varier d’une etude a l’autre, ce sont la longueur des implants courts, les types d’implants et de rehabilitations prothetiques, le type de surface, la position des implants, leur diametre, la qualite de l’os, la duree de suivi et les methodes d’analyse statistique. (Misch 2005, Renouard et Nisand 2006, Neldam et Pinholt 2010, Pommer et al., 2011, telleman et 2011, Monje et al. 2014, Mezzomo et al. 2014, Nisand et Renouard 2014, Sierra-sanchez 2015, Fan 2017, Esfahroud 2017, Palacios 2017, silva-cruz 2018, dias 2018,

Mokhceh et al 2018, Jung et l 2018, ravid et al 2019), ce qui peut derouter le clini-cien lorsqu’il veut utiliser une revue de litterature.

Il faut egalement noter que l’evaluation du succes des  implants courts par rapport a celui des implants plus longs est soumise a un biais d’analyse important. En effet, les implants courts sont generalement places dans une situation alveolaire compromise par rapport aux conditions ideales dans lesquelles les implants de longueur standard sont places (Herrmann et al., 2005).

Pour placer des implants longs dans les secteurs posterieurs en cas d’atrophie osseuse, il faut necessairement greffer. Il faut donc ponderer le succes de ces implants longs pla-ces dans des greffes avec la morbidite et le taux d’echecs de ces greffes. (Renouard et Nisand 2006)

Cependant, les dernieres etudes, en particuliers des RCt (biblio esposito), montrent que le taux de succes des implants courts est comparable a celui des implants long pla-ces dans des greffes que ce soit a court, (1 an), moyen (3 ans) ou a long terme. (5 ans et plus). de nouvelles propositions sont faites depuis quelques annees avec les implants extra courts, c’est a dire ayant une longueur inferieure a 6.5 mm. Ravida, par exemple, effectue en 2019 une revue de litterature avec un suivi a 5 ans.

Il ne montre aucune difference significative entre les implants extra-courts (<6,5 mm) et les implants longs (> 10 mm).

Il est interessant de noter que pendant les 3 premieres annees suivant l’insertion, les im-plants courts, ont non seulement montre des taux de survie comparables a celui des im-plants plus longs, mais ils ont egalement presente des pertes osseuses inferieures, des complications biologiques moindres, des couts et un temps operatoire plus favorables par rapport aux implants longs (> 10 mm). Les memes conclusions se retrouvent dans la revue de Mokcheh incluant 17 etudes randomisees considerant seulement les zones du maxillaire posterieur. Dans ce cas, sont compares les implants courts (moyenne de 5-7,6 mm entre les etudes) et les im-plants longs (11 mm) avec elevation du sinus. Dans le calcul global, le taux de survie des implants courts variait de 91 % pour Esposito 2016 a 100 % pour Felice 2018, Pohl 2017, Gulje 2014. Pour les implants standard associes a une elevation sinusienne, le taux de survie varie de 87,8 % pour Esposito 2016 a 100 % pour Felice 2018, Pohl 2017, Gulje 2014. Cruz, avec un suivi de 3 ans, montre que le taux de survie des implants courts et longs est identique puisqu’il varie entre 91,2 % pour Esposito et 100 % pour Pohl, Bechara, Gastaldi, taschieri, thoma en 2015, compare les implants courts de 5 et 6 mm places dans un os non natif par rapport aux implants longs (<10 mm) et a l’elevation du sinus maxillaire. Il en ressort que le taux de survie moyen est de 99,0 % pour les implants courts et de 99,5 % pour les implants longs. Le rapport survie / longueur des implants a ete etudie par Kotsovilis et al. (2009), les auteurs n’ont trouve aucune difference statistiquement significative entre les implants courts et longs. De meme, Romeo et al ont trouve un taux de survie similaire entre les deux longueurs d’implants. En remontant plus loin dans la litterature, les etudes realisees sont moins nombreuses et moins fiables car les methodologies etaient tres dif-ferentes, ce qui rendait impossible la formulation de conclusions precises sur l’utilisation ou non de ces solutions implantaires. Nous pouvons donc affirmer, avec l’appui de la litterature, que les implants courts sont au fil des annees de plus en plus complets et exhaustifs et qu’ils constituent une alternative sure et previsible, pour la reconstruction des secteurs maxillaires posterieurs atro-phies. (Fig.2 et 3)

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Malgre les donnees de la litterature en faveur des implants courts de nombreux clini-ciens continuent a ne pas vouloir les incorporer dans leur pratique avec les arguments suivants : les implants courts presentent des pertes osseuses superieures aux implants longs et le ratio couronneimplants doit rester favorable.

Perte osseuse marginale et longueur des implants

La perte osseuse marginale est un aspect crucial pour la perennite des implants.

Il est clair que cela aura un impact plus fort sur les implants courts, car elle apparait logiquement plus grave que sur un implant de 15mm.

Les niveaux osseux marginaux et les variations de niveaux osseux dependent des pa-rametres suivants :
(i) type d’implant (ii) conception de l’implant (iii) surface de l’implant et (iv) diametre de l’implant.

A ce jour, les criteres d’albrektson pour evaluer le succes du traitement implantaire sont toujours utilises, notamment la recommandation selon laquelle la perte osseuse ne de-vrait pas etre > 1,2 mm la premiere annee et > 0,2 mm par an par la suite.

Cependant, avec l’apparition d’implants technologiquement de plus en plus avances, il a ete observe que le taux de perte osseuse decrit par les criteres albrektson n’etait plus applicable.

La perte osseuse progressive autour des implants ne rentre plus dans les criteres de succes. Il est admis que le niveau d’os doit etre stable au cours du temps.

Probablement que les modifications de la micro-rugosite de la surface des implants par des traitements chimiques ou mecaniques ont permis une plus grande stabilite osseuse.

Plusieurs revues de litterature recentes, revelent que les implants courts presentent des pertes osseuses marginales moindres par rapport aux implants longs associes a une elevation des sinus.

Ravid a montre une perte osseuse marginale significativement plus importante dans le groupe des implants longs, ainsi que Palacios, indiquant que les variations osseuses marginales etaient plus faibles dans le groupe des implants courts que dans le groupe des implants temoins. De la meme maniere, uehara constate des differences significatives entre les implants courts et longs et souligne le fait que les implants ≤ 7 mm de long entrainent moins de perte osseuse que les implants longs avec une elevation du sinus a un an de suivi.

Mokcheh a passe en revue plusieurs articles comparant la perte osseuse marginale. Dans son etude, les implants courts ont une longueur moyenne de 5,64 mm, tandis que pour les implants longs associes a une elevation du sinus, la longueur moyenne est de 11,59 mm.

Les auteurs ne trouvent pas de difference statistiquement significative dans la perte os-seuse marginale entre les deux groupes a 4 mois de suivi (Esposito 2016), a un an de suivi (Esposito 2015, Felice 2015, Gulje 2014 et Pistilli 2013) et a trois ans (Pohl 2017 et Bechara 2016). Alors qu’a un an, il semble y voir une tendance de perte osseuse marginale plus impor-tante pour les implants longs par rapport aux implants courts. thoma ne constate pas de difference statistiquement significative, meme si cette etude considere les implants courts comme etant <10 mm. Ils observent une perte osseuse moyenne de 0,1 mm pour les deux groupes au cours de la premiere annee et la meta-analyse effectuee entre les implants courts (<10 mm) et longs (≥ 10 mm) est statistique-ment non significative.

Monje, a travers 5 etudes randomisees portant sur un total de 382 implants dentaires courts (< 10 mm), indique que la perte osseuse marginale autour des implants ne semble pas etre influencee par la longueur de l’implant. de plus, les revues de litteratures qui prennent en compte les etudes randomisees avec les etudes de cohorte, retrospectives et prospectives n’ont pas mis en evidence de diffe-rence statistiquement significatives concernant la perte osseuse entre les implants longs et les implants plus courts (Sierra-Sanchez 2018). (Fig.4 et 5)

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En conclusion, il n’y a pas de difference statistiquement significative entre les implants courts versus implants longs pour la perte osseuse marginale.

Le ratio couronne-implant

Dans l’histoire de la dentisterie, la regle du ratio couronne clinique-racine clinique d’au moins 1/1 a toujours ete un dogme pour eviter les charges liees a la mastication et eviter ainsi les complications mecaniques qui pourraient conduire a un echec de la rehabilita-tion prothetique (ante 1926).

Au fil des annees, la regle du ratio couronne-implant compris entre 0,5 et 1 a ete propose pour prevenir le stress osseux peri-implantaire, la perte osseuse crestale et les echecs implantaires (Haas et al. 1995, Rangert et al. Glantz & Nilner 1998).

C’est a partir de ce type d’observation que la necessite de placer les implants les plus longs possibles a ete suggeree.

Cependant, de nombreuses etudes et de revues de littérature ont montrees de facon formelle que le ratio couronneimplant n’etait pas un facteur de risque biomecanique ou biologique (Blanes 2007).

Des revisions plus recentes (Lulic 2007) ont montre l’inutilite de ce concept, de meme que d’autres etudes cliniques ne montrent pas de differences concernant la perte osseuse marginale lors de rehabilitations avec des rapports de rayonnement radiculaire defavorables (Schneider 2012, Shulte 2007). (Fig.6 et 7)

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Conclusion

A partir de la revue de litterature, il est possible d’affirmer que les implants courts sont une solution efficace pour resoudre les problemes d’edentement dans les secteurs atro-phiques posterieurs. Leur taux de survie, leur stabilite osseuse a long terme et le ratio longueur implant/couronne prothetique ne sont pas presentes a l’heure actuelle comme des facteurs limitant leur utilisation en pratique clinique. De cette maniere, il est possible de limiter le nombre d’interventions chirurgicales invasives (elevation sinusienne maxil-laire) dont le succes est souvent lie a l’experience de l’operateur. Les implants courts garantissent une alternative efficace et totalement comparable (selon les etudes actuelles) aux techniques considerees comme standards.

Bibliographie

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La bibliographie exhaustive est disponible en ligne sur
Lefildentaire.com/bibliographie-articlelfd154-desanctis/

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A propos de l'auteur

Dr Franck Renouard

Ancien Président de l’European Association for Osseointegration
Professeur invité à l’Université de Médecine de Lièges - Belgique
Docteur en chirurgie dentaire
Exercice limité à l’implantologie

Francesco DE SANCTIS

Chirurgien-dentiste
Membre actif de la société Italienne de Parodontologie.
Exercice limité à la Parodontologie et l 'Implantologie à Florence

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