Qu’est-ce que le SAOS de l’enfant ?
Le Syndrome d’Apnée Obstructive du Sommeil (SAOS) de l’enfant a été décrit pour la première fois en 19761. Il fait partie des troubles ventilatoires obstructifs de l’enfant 3,4 et est défini par l’existence d’au moins un épisode d’apnée ou hypopnée par heure de sommeil (Tableau 1). Il est parfois noté SAHOS (Syndrome d’Apnée Hypopnée Obstructive du Sommeil). Il est lié à la présence d’obstacles empêchant une ventilation normale. Il doit être différencié du Syndrome d’Apnée du Sommeil d’origine centrale dû à un dysfonctionnement d’origine cérébrale. Sa fréquence serait de 1 à 10 %2, le plus souvent estimée autour de 3 ou 4 %3,4. Elle est cependant certainement sous-estimée. L’objectif de cet article est de souligner le rôle du chirurgien-dentiste dans la détection de ces enfants et préciser la conduite à tenir face à une suspicion de SAOS.
Quels signes rechercher ?
Le SAOS perturbe la qualité du sommeil de l’enfant, de son réveil et la qualité de vie de celui-ci tout au long de la journée.
C’est donc à ces trois niveaux que l’interrogatoire devra être mené. Les principaux signes à rechercher sont résumés dans le tableau 2. D’une manière générale, le sommeil est agité, irrégulier et peu réparateur. Les principaux signes sont bien sûr les épisodes d’apnée que les parents peuvent remarquer durant le sommeil et le fait que l’enfant dorme le plus souvent avec la tête en arrière afin de libérer le passage pour l’air. Le ronflement y est souvent associé. Ce manque de sommeil explique l’irritabilité au réveil et les difficultés de concentration dans la journée, ainsi que les difficultés à suivre en classe. Outre les perturbations staturo-pondérales, cognitives, comportementales et cardio-vasculaires, d’autres signes, découlant de ceux décrits ici, ont également été associés au SAOS de l’enfant5,6, tels la dépression, la faible estime de soi et la timidité.
L’examen clinique intra et extra-oral révèle de nombreux signes, souvent communs à ceux habituellement décrits pour l’enfant ventilateur buccal (Tableaux 2 et 3). Le retard staturo-pondéral peut être expliqué par une activité perturbée des hormones de croissance car celles-ci sont principalement sécrétées durant le sommeil. Ceci aura également des conséquences sur la croissance de la mandibule. La bouche souvent ouverte et la tête tirée en arrière avance la langue de l’enfant pendant son sommeil ce qui dégage le carrefour aérien, mais favorise la traction vers l’arrière du menton et par conséquent une mandibule courte (Figure 1).
L’enfant présente le plus souvent une classe II d’Angle chez les enfants de type caucasien, associée à un défaut de croissance mandibulaire quasi systématique. La filière ventilatoire peut également être perturbée par un hypo-développement mandibulaire, souvent syndromique (Tableau 4), qui peut alors entraîner un SAOS. Le manque d’expansion transversale du maxillaire favorise les inversés d’articulé latéraux et postérieurs.
Il est important de rechercher la présence d’amygdales hypertrophiques et de vérifier l’importance du volume laissé au passage d’air (Figure 2).
Le tableau clinique d’un enfant qui ventile par la bouche est proche de celui de l’enfant porteurs de SAOS. Si tous les enfants porteur de SAOS sont des ventilateurs buccaux, l’inverse n’est pas vrai. Il est donc très important de faire le diagnostic positif de ces deux dysfonctions.
L’examen par imagerie vient en complément des éléments précédents. Il est essentiellement réalisé à partir d’un cliché panoramique et des téléradiographies de face et de profil. La téléradiographie de face permet d’apprécier les fosses nasales (volume, état de la cloison et des cornets …). Les obstacles de type végétations ou amygdales hypertrophiques et notamment le pôle inférieur de ces dernières, le volume de la langue ainsi que l’étroitesse des voies respiratoires peuvent être visualisés sur téléradiographie de profil (Figures 3 et 4).
Quels sont les enfants à risque ?
Le SAOS peut toucher toute la population enfantine, avec un pic entre 3 et 6 ans. Les enfants présentant des troubles de la ventilation ou certaines particularités anatomiques des VAS sont plus à risque de développer un SAOS. Celui-ci est particulièrement présent chez les personnes en surpoids (Tableau 4). Une prédisposition individuelle a été mise en évidence, suggérant un rôle de l’hérédité.
Comment établir le diagnostic positif ?
La suspicion de SAOS chez un enfant fait donc suite à l’interrogatoire, à l’examen clinique et par imagerie. Le diagnostic positif sera fait par analyse du sommeil de l’enfant.
Celle-ci est effectuée par polysomnographie. C’est un médecin du sommeil qui en assure la réalisation et l’interprétation. Cette analyse permettra de définir, entre autres, l’Indice d’Apnée-Hypopnée (IAH : nombre d’apnées et hypopnées par heure) de l’enfant mais également de nombreux éléments tels les épisodes de désaturation en Oxygène, les mouvements pendant le sommeil…
Quelle conduite à tenir pour le chirurgien-dentiste ?
Face à un tableau clinique évocateur (Tableau 3), le chirurgien-dentiste peut orienter son interrogatoire vers la recherche de signes de SAOS (Tableau 5). Si la suspicion de SAOS se confirme, il est recommandé d’adresser le patient à un médecin spécialiste du sommeil qui réalisera les examens appropriés, dont la polysomnographie. En cas d’impossibilité, référer le patient à son médecin traitant ou à un ORL reste une alternative intéressante.
Conclusion
Le chirurgien-dentiste a rôle important dans la détection du SAOS de l’enfant. Le diagnostic définitif ne peut cependant être réalisé que par un médecin, en particulier après analyse du sommeil par polysomnographie.
Bibliographie
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