Il aura fallu attendre plus de vingt ans pour qu’un pourcentage significatif de cabinets dentaires français soit équipé en matériel de radiographie panoramique. Aujourd’hui, aucun des praticiens équipés n’est prêt à se défaire de ce formidable outil, qui en dehors du critère premier de faciliter et de sécuriser un diagnostic, est aussi un facteur de confort pour le patient (qui n’aura pas besoin de prendre un rendez-vous supplémentaire, pour un déplacement superflu chez un radiologue).
Il y a bien sûr d’autres avantages dans cette équipement :
- une image de technicité et de modernisme du cabinet, qui conforte la confiance des patients,
- une disponibilité immédiate des résultats qui favorise la communication patient/praticien,
- un investissement très pertinent, alliant services rendus (aux patients et au praticien) avec une rentabilité non négligeable.
La radiographie panoramique (inventée en 1954) a fait son entrée dans les cabinets privés dans les années 60. Depuis elle n’a guère évoluée, si ce n’est que la source de rayons X est devenue plus performante grâce au découpage haute fréquence de son alimentation.
Je vous entends déjà me dire qu’il y a eu aussi le numérique ! Là, je rétorque que le numérique a enterré l’argentique, un point c’est tout, tout comme dans la photographie ! Bien entendu, l’apport du numérique a permis de se passer de produits chimiques, de rattraper des réglages d’expositions fantaisistes et de réduire les doses administrées aux patients, et enfin de jouer avec les densités, inversions, contrastes et mesures en tous genres.
Mais malgré tout ça, le numérique n’a fait que de remplacer le film, le fonctionnement intrinsèque de la tomographie panoramique dentaire est toujours à peu près le même (!) avec ses contraintes et ses limites : problèmes de positionnement des patients ; problèmes de profondeur de coupe très limitée au niveau du bloc incisif ; problèmes de projection du rachis cervical, perturbant la lecture du bloc incisif ; soucis d’orthogonalité du faisceau de rayons, entravant la détection des caries interproximales dans les zones 3 à 5 ; problèmes d’alignement dans le plan vertical antérieur des dents de la mandibule et du maxillaire supérieur ; chevauchement délicat de structures perturbant la lecture des résultats (ex : voûte palatine et apex des incisives et canines du maxillaire supérieur…).
Restons-en là dans les énumérations et voyons si la technologie peut nous apporter quelque chose de mieux. Avec la 3D ?
L’apport de la 3D en diagnostic dentaire
Avant-propos : comme je le précise à chaque fois (n’étant pas chirurgien-dentiste), mes propos se limitent à la technologie. Je ne suis pas habilité et je ne tiens pas à aborder le côté clinique, que je laisse aux spécialistes dûment diplômés que vous êtes.
Tous les points problématiques cités ci-dessus, sans exception, sont solutionnés avec la technologie de radiographie dentaire “CBCT” : Cone Beam Computerized Tomography, ou plus simplement, la “3D”. Pour en savoir plus sur les CBCT, n’oubliez pas de consulter nos précédents articles expliquant le principe et les subtilités de la technologie 3D¹.
Avec un appareil Cone Beam, que certains appellent scanner (terme à éviter pour ce type d’appareil, qui n’utilise pas le même principe d’acquisition de données qu’un vrai scanner de radiologie médicale2), le positionnement du patient est important mais pas primordial. Par contre, ce qui l’est plus est sa contention pour éviter tout « bougé » dans l’acquisition des multiples images que nécessite la technique Cone Beam (entre 250 et 360 par examen, en fonction des différents appareils).
Comme précédemment évoqué, en panoramique classique, il faut absolument respecter le plan de ‘‘Francfort’’ pour limiter les superpositions de structures osseuses et dentaires. Avec le Cone Beam, nous travaillons sur un volume tridimensionnel généralement cylindrique, où chaque tissu sera ensuite matérialisé dans l’espace par calcul et reconstruction informatique. On cherchera uniquement pour des raisons pratiques de rendu de volume, à positionner horizontalement le plan occlusal ; ce qui se fera en adoptant le plan de “Camper” au lieu du plan de “Francfort”.
La perception dans l’espace des différents tissus et éléments radiographiés permet donc d’avoir d’excellents résultats diagnostiques, quelle que soit la morphologie dentaire des patients. Et je dirais que plus ils sont dysmorphologiques, plus l’examen Cone Beam est indispensable.
Ayant passé en revue très brièvement, mais en allant à l’essentiel, l’apport de cette technologie “3D”, vous aurez compris l’intérêt de ce type d’appareil dans votre exercice.
La manipulation des machines est très similaire à celle des radios panoramiques classiques, c’est uniquement au niveau des logiciels d’imagerie que les choses sont plus sophistiquées et demandent un réel apprentissage de prise en main.
Le vif du sujet !
À la question : « Dois-je troquer ma panoramique pour un Cone Beam ? » une réponse aussi claire que : « Peut-être bien que oui, peut-être bien que non ! », vous fait tout de suite comprendre que cela demande une réflexion très pragmatique.
Tout d’abord, nous allons tenter de lister les points qu’il faut prendre en compte et se renseigner avant de signer un chèque de 80 000 à 200 000 € !
Mon exercice est il adapté à l’entrée de ce matériel dans mon cabinet ?
Si vous êtes seul, que vous pratiquez une dentisterie conventionnelle et que vous travaillez sans assistante, cela concerne seulement 2 % d’entre vous, si ce n’est moins.
Si vous êtes seul, mais avec une assistante qualifiée, que vous êtes très exigeant dans vos endos et que vous posez au moins quelques implants sur des patients différents chaque mois, que vous réalisez un peu plus d’un examen panoramique par jour, ce type d’appareil a une place dans votre cabinet.
Si vous êtes un cabinet de groupe de deux praticiens ou plus, que vous pratiquez une dentisterie de bon niveau, la question ne se pose pas : troquez dès que possible votre pano actuelle (numérique ou pas) !
Si avez une activité d’implantologie d’une dizaine de cas par mois et en progression, je me demande pourquoi vous en êtes encore à lire un article de ce genre dans la presse professionnelle, prenez votre téléphone et demandez une démonstration et une étude d’implantation d’un Cone Beam dans votre structure.
Ce type d’appareil est-il facilement intégrable dans mon cabinet ?
Il prendra place sans problème dans votre local de radio panoramique, si celui-ci est aux normes actuelles, soit au minimum 3 m2 sans aucune dimension inférieure à 1,50 m. Le reste des dispositions est identique à l’installation d’une panoramique classique.
Norme FC15-163 : www.sop.asso.fr/Telechargements/Fichiers/Radioprotection_patients.pdf
Il faut ensuite distinguer deux types de Cone Beam, les E4 et les E5.
Ceux de la catégorie E4 (Fig. 5) sont des appareils de radiographie exclusivement 3D (iCat, New Tome, etc.) qui ne permettent pas de réaliser des tomographies panoramiques directes, mais uniquement reconstituées, c’est-à-dire des panoramiques virtuelles. Dans ce cas, il faut disposer d’un local d’au moins 9 m2.
Ceux de la catégorie E5 (Fig. 6) sont considérés comme des panoramiques auxquels est ajoutée une fonction Cone Beam (ex : Promax 3D, Kodak 9000, Scanora 3D, Veraviewepocs 3D, PaX-Uni 3D, etc.).
Ce sont des appareils qui entrent dans les mêmes recommandations d’installation que les radios panoramiques classiques, soit un minimum de 3 m2, comme précisé ci-avant.
Mon personnel qualifié actuel sera-t-il en mesure d’utiliser ce genre de matériel ?
La mise en place du patient et les réglages de bases sont sensiblement similaires à ceux des panos classiques. Le personnel actuel peut donc le manipuler sans beaucoup de changements (Fig. 7).
Par contre, au niveau de la manipulation des volumes acquis et des différentes reconstructions, il n’y a que vous (après une bonne mise en mains) qui serez apte à en tirer la quintessence.
Que dois-je choisir, un petit champ ou un grand champ ?
Si vous n’êtes pas stomato ou ORL, un petit champ peut être suffisant. Kodak avec son K 9000 3D en est l’exemple même : avec un volume d’acquisition de 50 x 37 mm, il est possible de capturer un groupe de quatre à cinq dents consécutives, ce qui est suffisant pour la plupart des cas d’implantologie. Si vous avez besoin de plus de volume, il est possible (vu la faible dose d’irradiation de cette machine) d’effectuer une seconde acquisition dans une autre zone de l’arcade dentaire (Fig. 8).
Les avantages des appareils à petit champ sont multiples :
- Prix d’achat abordables
- Faibles doses de radiations
- Fichiers de tailles raisonnables
- Temps de reconstructions limités.
- En général, définition des voxels plus fine que leurs cousins à grands champs
Quand vous aurez besoin d’une arcade complète, et au-delà, il sera toujours temps de travailler comme aujourd’hui, en somme d’adresser le patient au radiologue pour un scanner dentaire.
Si vous avez besoin d’un grand champ, cela signifie que vous êtes un praticien rompu à l’implantologie et que vous traitez plusieurs centaines de cas par an. Les plus de 150 000 à 200 000 € nécessaires à l’acquisition d’un de ces appareils seront alors amortis sans problème.
Dois-je choisir un appareil mixte, ou un pur « Cone Beam » ?
Sans hésiter, je dirais que vous devez porter votre choix sur un appareil mixte “Cone Beam + Pano”. Pour deux grandes raisons essentielles (Fig. 2, 5, 6, 9) !
D’une part, parce que vous êtes depuis longtemps habitué à interpréter des tomographies panoramiques et que vous avez un certain œil pour en tirer un diagnostic.
Une panoramique reconstituée virtuellement à partir d’un volume 3D, bien que de bonne facture, ne donnera pas la même assurance.
Ensuite, car il ne faut pas oublier non plus le côté financier : la cotation d’une radio panoramique est de Z 15 + 6, alors que pour une panoramique reconstituée, cela reste pour le moment le brouillard au niveau légal.
Dans cette catégorie mixte, la tendance est au passage automatique du capteur pano au capteur 3D, ce dispositif permettant d’éviter toute manipulation manuelle et tout risque d’accident si l’assistante n’était pas suffisamment vigilante.
Pensez-vous que je puisse amortir mon investissement sans forcer l’utilisation ?
Absolument !
Un appareil de radio 3D, de surcroît mixte, vous apportera de précieux compléments pour vos diagnostics, vous fera gagner du temps dans votre agenda, en limitant le nombre de rendez-vous avant implantologie (Fig. 10).
Il vous apportera aussi un puissant moyen de persuasion de vos patients en leur faisant une démonstration en live à l’écran de leur cas clinique, avec positionnement du futur implant en situation.
Pour finir, il vous assurera une capitale confiance de praticien performant et à la pointe des techniques actuelles, ce qui n’est pas un luxe pour ceux qui pratiquent l’implantologie et aspirent à se développer dans ce domaine.
Pas de temps perdu pour attendre les examens venant du radiologue, pas non plus besoin de repousser le traitement dans l’attente des résultats !
Exemple 1 : appareil d’environ 89 000 €
Crédit-Bail : 7 ans = 1 314 €/mois (assurance comprise)
Seuil d’amortissement mensuel minimum : 30 panos = 837 €/mois et 5 examens 3D = 500 €/mois (H.N.)
Exemple 2 : appareil grand champ d’environ 200 000 € pour un cabinet d’implantologie :
Crédit-bail : 7 ans = 2968 €/mois (assurance comprise)
Seuil d’amortissement mensuel minimum : 30 panos = 837 €/mois et 20 examens 3D = 2131 €/mois (H.N.)
A la lumière de ce qui vient d’être évoqué, je vous invite fermement à contacter vos confrères équipés en 3D, à demander à vos distributeurs attitrés de vous documenter et de vous faire une démonstration des possibilités inouïes que la radiographie en trois dimensions peut vous apporter dans votre exercice quotidien, parmi lesquelles :
- Localisation d’implants
- Localisation précise de dents incluses
- Mise en évidence de fractures
- Visualisation du positionnement exact des molaires à trois racines
- Visualisation des traitements canalaires
- Localisation très précise du canal dentaire
Dans les années 60 et 70, les cabinets de pointe étaient équipés de panoramiques dentaires, aujourd’hui, le nouveau panoramique moderne, c’est le Cone Beam.
1. Blanc G. La radiographie dentaire 3D. LFD n°20, fév. 2007, p.16-22 et LFD n°22, avril 2007, p.20-26. Consultables en ligne sur les sites du Fil Dentaire et de Foxy Études & Développement : www.lefildentaire.com et www.foxy-ed.fr
2. Ibid.