N’ayant pas mis en pratique les systèmes tout céramique lors de ma formation initiale, il a fallu que je me penche davantage sur la question dès les débuts de mon activité libérale. Quel système choisir ? Comment le mettre en place au cabinet ? Quel type de chape utiliser ? Dois-je coller ou sceller ?
Je me suis tout simplement tournée vers le système PROCERA® de la société Nobel Biocare qui réalise des éléments pour des prothèses dentaires par une technique de Conception et de Fabrication Assistées par Ordinateur (CFAO) en utilisant des matériaux résistants et ayant une bonne biocompatibilité.
Ce système élaboré par Andersson et Odén en 1993 (1) va permettre la fabrication d’éléments en titane ou céramique (alumine ou zircone), unitaires ou pluraux qui seront posés sur dents naturelles ou sur implants.
Voyons étape par étape comment ce système peut être simplement introduit dans une pratique quotidienne au cabinet et dans un laboratoire de prothèse.
Etapes réalisées au cabinet dentaire
Toute nouveauté nécessite une courbe d’apprentissage plus ou moins longue. Cela ne m’a pas été nécessaire avec ce système car j’ai pu bénéficier de cette nouvelle technologie sans contrainte particulière.
Le système PROCERA® m’a permis d’obtenir de meilleurs résultats esthétiques, une bonne adaptation gingivale, une facilité et une rapidité dans les étapes implantaires sans toutefois modifier mon activité au quotidien. Voyons comment mettre en pratique ce système au sein des cabinets.
Tout d’abord, il faut contacter votre prothésiste pour savoir si son laboratoire est muni d’un scanner PROCERA® appartenant à la société NOBEL BIOCARE.
Si ce n’est pas le cas, votre prothésiste pourra se renseigner auprès de la société (thème abordé dans le chapitre suivant) ou vous pouvez contacter le représentant de votre région afin de connaître les laboratoires de prothèse à proximité de votre cabinet possédant ce type de scanner.
Prothèses unitaires ou plurales sur dents naturelles
Préparation et empreinte
Sur dents naturelles, la forme de contour reste identique aux préparations dites traditionnelles avec une limite cervicale sous forme de congé ou quart de rond sans angle vif. La profondeur de préparation varie entre 0,8 et 1,5 mm avec une réduction occlusale allant jusqu’à 2 mm au niveau des dents cuspidées.
Pour les dents postérieures, la réduction ne se fait pas de façon homothétique, puisqu’une surface occlusale plane est recherchée.
Pour le cas particulier des facettes, la dent est réduite de 0,5 à 0,7 mm et la préparation peut s’étendre au maximum de 2 à 3 mm sur la face palatine.
La phase d’enregistrement ne présente pas de spécificité car le cahier des charges de cette empreinte est identique aux empreintes conventionnelles.
Choix de la chape
Il se fait en fonction de la zone à restaurer : pour un secteur esthétique, le choix s’oriente sur une chape en alumine qui est moins opaque que la chape en zircone et pour des dents postérieures, une chape en alumine de 0,6 mm d’épaisseur ou une chape en zircone est utilisée afin d’augmenter la résistance mécanique. Pour une prothèse plurale, seule la chape en zircone est recommandée.
Essayage et mise en place
L’essayage clinique des chapes n’est pas toujours nécessaire compte tenu de la précision de ce système, encore moins sur les prothèses unitaires. À ce stade, seules de petites retouches sous irrigation avec des fraises diamantées neuves sont possibles afin d’éviter des microfissures. À la réception de la coiffe en céramique et après contrôle en bouche, celle-ci peut être scellée ou collée (4). Pour le scellement il se fait à l’aide d’un ciment à l’orthophosphate de zinc ou d’un ciment verre ionomère. Pour le collage, on colle sous champ opératoire à l’aide d’un ciment résine autopolymérisable ou composite de collage dual.
La dent est au préalable mordancée avec de l’acide orthophosphorique puis rincée et on lui applique un adhésif dual ; l’intrados de la coiffe est au préalable mordancé et silanisé. Toutes ces étapes cliniques sont donc très similaires à celles réalisées pour des prothèses dites conventionnelles. Elles ne nécessitent pas d’apprentissage particulier toutefois, comme cité préalablement, certaines précautions doivent être suivies.
Prothèses unitaires ou plurales sur implants
À l’aide du système PROCERA®, on peut réaliser des piliers implantaires personnalisés usinés en titane, ou en zircone compatibles avec divers systèmes implantaires. Pour le praticien, il n’y a aucun changement dans les étapes cliniques. Le délai est en général identique et le praticien pourra diminuer le nombre de séances car l’essayage en bouche du pilier est rendu inutile par la précision de ce système.
Pour les piliers unitaires sur implants, ce système est rapide et facile dans son utilisation au fauteuil, elle est cependant plus onéreuse que les piliers préfabriqués proposés par le système implantaire. Le système PROCERA®, dans ce domaine, trouve tout son sens dans des situations esthétiques ou lorsque l’implant se trouve en position défavorable.
L’application implant-bridge permet d’élaborer des armatures de bridge sur implant usiné en titane en une seule pièce. On peut également réaliser des armatures de bridge sur implant en zircone. Ces systèmes nécessitent une empreinte précise, donc de préférence au plâtre et un bon enregistrement des rapports intermaxillaires. Puis, l’empreinte est validée définitivement à l’aide de clés en plâtre réalisées par le prothésiste. La société NOBEL BIOCARE propose également le système NobelGuide® qui permet de planifier tout type de traitement et de guider l’acte chirurgical. Bien que ce système soit perfectible, il reste cependant très performant et offre au praticien, avec peu d’apprentissage et d’investissement, une réponse aux exigences de ses patients.
Etapes réalisées au laboratoire de prothèse
Si votre prothésiste dentaire souhaite travailler avec le système PROCERA®, plusieurs possibilités s’offrent à lui. Il peut décider de ne pas investir dans un scanner : dans ce cas, il devra s’entendre avec un prothésiste de proximité qui possède un scanner PROCERA® afin de traiter les empreintes coulées.
Votre prothésiste joue alors uniquement le rôle de céramiste et devra investir dans des céramiques adaptées à la chape usinée. Cette solution peut paraître complexe par le nombre d’intervenants, mais elle présente, lorsque la communication est bien établie, la possibilité d’utiliser ce système avec un investissement minimal pour votre prothésiste.
Il peut également décider d’investir dans un scanner ; dans ce cas, la société NOBEL BIOCARE propose trois types de scanner (le scanner PICCOLO ou Modèle 50 ou PROCERA FORTE) qui permettent, en fonction de l’importance du laboratoire de prothèse, d’adapter son investissement. Il peut aussi utiliser la dernière version par empreinte optique.
Prothèses unitaires ou plurales sur dents naturelles
Le prothésiste coule l’empreinte du praticien en plâtre résine époxy et monte les modèles sur un articulateur. Le modèle est fractionné afin d’obtenir le ou les dies qui sont ensuite détourés afin de faciliter la lecture de la limite prothétique par le scanner.
Aucun vernis d’espacement n’est alors appliqué sur le die car cet espace est aménagé virtuellement par le logiciel. Il positionne le die dans le scanner qui va réaliser un micro-palpage à l’aide d’une pointe saphir (3). Après la lecture de toutes les données, les informations sont transmises à un ordinateur mais il doit alors vérifier si le die numérisé est conforme au die en résine.
Pour la conception de la chape, le prothésiste peut réaliser un wax up dont la forme de contour est également scannée puis positionnée informatiquement aux limites du die numérisé. On obtient ainsi une chape anatomique adaptée à toutes situations cliniques. Il peut également réaliser virtuellement cette chape à l’aide du logiciel PROCERA® CADD (Computer Aided Dental Design) en sélectionnant le type de chape. Avec l’apparition du scanner PROCERA forte (par exemple), la réalisation des bridges est devenue beaucoup plus simple car l’armature est usinée dans un seul bloc lui conférant une bonne résistance mécanique.
À ce stade, après vérification des données informatiques, le prothésiste doit transmettre ces dernières par modem Internet au centre de production qui se situe à Stockholm. Si les données informatiques sont incorrectes, l’unité de production envoie un fax au prothésiste qui doit alors refaire un scannage. Il peut suivre sur Internet l’évolution de l’étape de la fabrication assistée par ordinateur. Cette unité de production décentralisée permet de réduire les coûts de fabrication des éléments usinés (2). Lorsqu’il reçoit la chape, il doit contrôler sa forme, son aspect général, son adaptation sur le modèle de travail. La chape est alors sablée à l’oxyde d’aluminium et nettoyée aux ultrasons afin d’améliorer son état de surface.
Le prothésiste n’a plus qu’à réaliser le montage de la céramique cosmétique PROCERA® qui se fait de façon traditionnelle. L’inconvénient majeur de ce système est le délai de livraison qui se voit rallongé de 48 heures par rapport aux travaux conventionnels.
Les laboratoires apprécient en général la prise en main rapide du scanner et la simplicité du logiciel PROCERA® CADD sans connaissance informatique approfondie.
Prothèses unitaires ou plurales sur implants
L’empreinte du praticien est coulée en plâtre résine époxy après injection d’un silicone matérialisant une fausse gencive. Les modèles sont ensuite montés sur un articulateur. Les étapes de confection du pilier sont alors identiques à celle d’une chape. Le prothésiste au retour du pilier usiné doit réaliser une encoche verticale sur ce dernier ou confectionner une clé afin de donner des repères de positionnement pour le praticien.
Pour la réalisation de bridges pluraux sur implants, les étapes diffèrent légèrement : on envoie le modèle de travail et l’infrastructure en résine qu’il aura confectionnée et validée avec le praticien directement, au centre de production en Suède où s’effectuera le scannage. Une fois l’investissement réalisé, les prothésistes trouvent dans ce système une utilisation aisée et un bon panel de matériaux (alumine, zircone, titane) de plus en plus usités pour leurs qualités esthétiques, de solidité, de biocomptabilité, de précision.
Ce système nous apporte, grâce à l’usinage en un bloc, un ajustage parfait en nous évitant les problèmes rencontrés avec les coulées de métal.
Bibliographie
1. ANDERSSON M. and ODEN A. A new all-ceramic crown. Act Odontol Scand 1993 ; 47:279-286.
2. DURET F. Le système Sopha CAD/CAM. Art et technique dentaire 1992 ; 241-8
3. MUSHABAC D. Micropalapation for dentistry. United States patents. USA 1997 ; 1,4.184-312
4. SAMAMA Y. Et OLLIVIER J. Une nouvelle approche dans l’élaboration des céramo-céramiques : le système PROCERA®. Information Dentaire 1999 ; 3 :161-171